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jeudi 1 octobre 2009







SOCIÉTÉ

Le meurtre de l'Essonne relance la polémique sur la récidive


AP | 01.10.2009 | 20:09


La polémique a agité jeudi le monde politique et judiciaire, au lendemain du meurtre de la joggeuse de l'Essonne qui a relancé le débat sur la récidive. A Brice Hortefeux, qui a critiqué la remise en liberté du meurtrier présumé, la ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie a répondu qu'il n'y avait eu "aucun dysfonctionnement". Le porte-parole de l'UMP s'est, lui, attiré les foudres des magistrats en plaidant pour la castration chimique des récidivistes.


Le suspect, Manuel Da Cruz, 47 ans, qui a avoué mercredi le meurtre de Marie-Christine Hodeau, avait été condamné en 2002 à 11 ans de réclusion pour l'enlèvement et le viol d'une adolescente de 13 ans deux ans plus tôt dans le Loiret. Il avait bénéficié d'une libération conditionnelle le 5 mars 2007, la surveillance judiciaire s'achevant en novembre dernier, a expliqué jeudi le procureur d'Evry Jean-François Pascal. Pour lui, "rien ne laissait penser, objectivement, dans son comportement, qu'il pouvait recommencer".


Jeudi, le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux a critiqué la décision de remise en liberté prise par les juges d'applications des peines, et estimé que ce meurtre aurait pu être évité. Des propos qui ont suscité une vive réaction de la magistrature, et un recadrage de Michèle Alliot-Marie.


"Il n'y a pas eu de dysfonctionnement de la justice, mais il y a eu une insuffisance des mesures de suivi. Je pense que les juges ont effectivement besoin d'être soutenus parce qu'ils font un métier difficile", a déclaré la garde des Sceaux lors d'un point presse au ministère de la Justice. "La chaîne de la sécurité implique qu'il y ait le respect à la fois des compétences des uns et des autres, mais qu'il y ait également une bonne entente entre le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Justice", a-t-elle ajouté sèchement.


"Il raconte n'importe quoi, Brice Hortefeux", a de son côté estimé Christophe Régnard, président de l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), qui a également réagi à l'idée de castration chimique évoquée par Frédéric Lefebvre.


Dans un communiqué, le porte-parole de l'UMP a en effet jugé nécessaire de "tirer les conséquences immédiates en termes de responsabilité et de modification de la loi" du drame de l'Essonne. "Ne doit-on pas enfin décider la mise en oeuvre de la castration chimique pour ce type d'individu?", s'est-il interrogé.


"C'est un grand classique, la modification de la loi", a jugé Christophe Régnard sur Europe-1. "En France, dès qu'il y a un problème de faits divers, on fait une loi (...) Je suis à peu près certain que l'année prochaine, avec un nouveau drame, on aura à nouveau le même discours et on nous vendra à nouveau une nouvelle loi".


"On continue à faire des lois et à faire croire à l'opinion publique que les choses vont s'améliorer. Elles ne s'amélioreront pas", car "on n'a jamais voulu, en France, se poser la question du suivi psychiatrique, psychologique et social des détenus" dès le début de la détention, a poursuivi le président de l'USM.


Pour Mathieu Bonduelle, du Syndicat de la magistrature, la solution de la castration chimique n'est pas applicable. "Il faut bien comprendre que sur 100 personnes qui sont libérées, y compris en matière sexuelle, vous avez peut-être une ou deux personnes éventuellement qui récidivent", a-t-il expliqué sur France-Info. "Si on doit castrer chimiquement 100 personnes pour en empêcher deux de récidiver, ça pose des questions vraiment fondamentales".


Nicolas Sarkozy a pour sa part reçu jeudi la famille de la victime. Selon un communiqué de l'Elysée, le chef de l'Etat a demandé à M. Hortefeux "de veiller, au besoin par une modification de notre législation, à une implication plus forte" des forces de l'ordre dans la surveillance des condamnés ayant achevé leur peine.


Souhaitant "une véritable réforme de la psychiatrie criminelle", il a également indiqué que le prochain projet de loi sur la "récidive criminelle" sera "examiné en priorité par le Parlement avant la fin du mois d'octobre".


Dans le cadre de sa libération conditionnelle, le suspect Manuel Da Cruz avait été soumis à des obligations, avec un suivi médical en raison de son addiction à l'alcool, ainsi qu'à des interdictions, notamment de se rendre à Echilleuses (Loiret) où vivait son ancienne victime. Il était revenu vivre dans ce village après la fin de sa surveillance judiciaire en novembre 2008, selon le procureur.
AP




A la une


jeudi 01 octobre 2009
http://www.ouest-france.fr/actu/actuDetFdj_-Nicolas-Sarkozy-se-prononce-pour-une-reforme-de-la-psychiatrie-criminelle-_39382-1089085_actu.Htm

Nicolas Sarkozy se prononce pour « une réforme de la psychiatrie criminelle »

Nicolas Sarkozy a publié, aujourd’hui, un communiqué pour demander « une véritable réforme de la psychiatrie criminelle », après le meurtre de Marie-Christine Hodeau, une joggeuse enlevée et assassinée en forêt de Fontainebleau. Un homme déjà condamné pour le viol d’une mineure a reconnu en être l’auteur.

Le chef de l’Etat souhaite une implication plus forte de la gendarmerie et la police dans la surveillance des condamnés qui ont purgé leur peine. Pour cela, il n’exclut pas de légiférer.

Un projet de loi examiné en octobre.


Le président, qui a reçu la famille de la victime, en compagnie de Brice Hortefeux et Michèle Alliot-Marie, a estimé que « cet assassinat et les circonstances dans lesquelles il s'est déroulé mettaient en lumière la nécessité absolue de poursuivre l'action entreprise en matière de lutte contre la récidive ».

Ainsi, le projet de loi visant à diminuer le risque de récidive criminelle sera « examiné en priorité par le Parlement avant la fin du mois d'octobre », a assuré Nicolas Sarkozy.

Celui-ci présidera, la semaine prochaine, « une réunion au cours de laquelle devront lui être présentées des propositions répondant à cet objectif ».


Mediapart

A propos des suicides au travail

01 Octobre 2009 Par Les invités de Mediapart
Edition : Les invités de Mediapart
http://www.mediapart.fr/club/edition/les-invites-de-mediapart/article/011009/propos-des-suicides-au-travail


Comment la psychiatrie peut-elle répondre au suicide et notamment celui sur le lieu de travail? Sylvie Zucca, psychiatre et psychanalyste, connue pour son travail sur la grande précarité, démontre comment «le passage à l'acte suicidaire prend la forme d'un pied de nez ultime à un monde qui se dédie de ses promesses de quête de sens».

Au moment où l'on s'interroge, en France, sur un nombre important de suicides sur les lieux de travail, je choisis ici d'en parler en ma triple qualité d'ancien médecin du travail, de psychiatre psychanalyste de cabinet, et de psychiatre ayant quelques connaissances sur le monde de la grande précarité.

Étrangement, ces trois lieux d'exercice se complètent les uns les autres depuis longtemps dans ma réflexion, en ce que la question du lien social et de ses effets sur la subjectivité y est directement posée dans deux situations (médecine du travail, grande précarité), et que le colloque singulier d'avec les patients en cabinet m'amène à être, par définition, comme tout psychiatre hospitalier et ou libéral, confrontée en première loge à la douleur morale sous toutes ses formes, et donc, bien évidemment, au risque suicidaire, à la tentative de suicide, au suicide lui-même, et à une part de mystère insondable qui l'accompagne: car faut-il le rappeler, tous les suicides ne sont pas de cause psychiatrique.

Les médecins, les psychiatres notamment mais aussi les psychanalystes et les psychologues sont, de par leur fonction soignante, particulièrement bien placés pour observer les dysfonctionnements et du collectif et du subjectif, les risques des intrications délétères entre ces deux mondes –eux-mêmes n'étant d'ailleurs pas à l'abri de vivre ces mêmes risques, comme le montrent les statistiques concernant les taux de suicides dans les professions médicales. Aucune population n'est d'ailleurs aujourd'hui épargnée: policiers, employés, prisonniers, lycéens, étudiants, agriculteurs. Et si parmi ces suicides, un certain nombre ont lieu chez des personnes présentant une pathologie psychiatrique à risque, un aussi grand nombre de ces suicides surgissent chez des personnes sans antécédent psychiatrique.

Dans l'univers du travail –aussi bien dans le monde rural que dans celui des entreprises– de profonds changements sont à l'œuvre en ce qui concerne le sens des actes, la reconnaissance d'un travail dans ce qu'il suppose de savoir faire, de responsabilité, de valeur accordée à la tâche effectuée, et au plaisir de la réalisation de ce savoir faire.

A la place, depuis une bonne vingtaine d'années –et de manière exponentielle– se développent toutes sortes de panoplies de néo-management, de bilans d'efficacité, de contractualisations de toute sortes avec des missions de réussite d'objectifs et d'évaluations, de cultures du résultat, d'autonomisations des tâches, de risques tous azimuts de judiciarisation, le tout emberlificoté dans un tas d'outils ou de pseudos outils à connotation vaguement psychologique qui ont ceci de pervers qu'ils renvoient, en cas de non concordance avec «l'objectif» à atteindre, à la seule responsabilité de l'individu.

Dans les entreprises, la menace de l'éjection de l'univers professionnel, du chômage, du spectre de l'exclusion et de l'inutilité sociale, est plus vive que jamais, largement entretenue par une médiatisation qui surfe sur cette angoisse diffuse.

Cette ambiance amène avec elle tout un cortège de malaises, d'intensités variables, qui accompagnent cette dévalorisation humaine dans son premier stade: l'humiliation, la honte, l'épuisement, la surcharge professionnelle («burning out»), puis, dans un second temps, la dépression profonde, l'isolement, la peur, le repli, et bien souvent l'alcool.

La peur, notamment, est ces temps-ci un vecteur incroyablement fort de silence, d'isolement, de non-solidarité («s'il est viré, c'est que moi je ne le suis pas encore»).
Et comme aucun champ n'est épargné par cette peur –ni le champ privé, avec son taux de précarisations de toutes sortes qui ne cessent de grimper; ni le champ social avec son taux de licenciements, ses crises économiques, ses menaces planétaires–, il est aujourd'hui, en France, évident que le tissu de solidarité spontanée ne fait pas suffisamment office de filet de protection.
A sa place, notamment dans les entreprises, se développe chaque jour une compétitivité accrue par les risques de délocalisation, de crise économique, que l'on fait miroiter chaque jour aux employés et cadres, à tort ou à raison.

Un des effets le pire de cet état des lieux est la démotivation au travail, dont seuls les plus caustiques et ou joueurs semblent être protégés, contrairement à ceux qui s'accrochent à l'idée d'une valeur de leur travail –osons dire de leur métier. Et parmi la population de la rue que j'ai pu rencontrer, nombre n'ont pas supporté à un moment de leur vie l'éviction d'un travail, d'un foyer, et se sont retrouvés affublés d'une identité privative «sans travail», «sans domicile», avant de plonger dans l'irrémédiable d'une survie au jour le jour.

Nous vivons actuellement dans un monde fou, plein de paradoxes qui ne se disent pas, de contradictions indécodables, d'aberrations: le monde du travail est de plus en plus cruel, qui trie, jette, avec des méthodes engendrant des pressions qui vont jouer d'autant plus fort sur la personnalité de l'individu que le collectif ne fait plus garant de partage, ni de culture syndicale et encore moins historique.

A la place, en guise de culture, des programmes télévisuels avec pléthore de jouissance sanguinolente: on aimerait que l'altérité soit un peu d'actualité, et que les vieux concepts d'attention, de remords, de regrets, et donc d'envies, de désirs, de fantasmes, reviennent un peu le long des sentiers, loin des autoroutes de la Très Grande Vitesse d'Existences dans lesquelles le temps de la poésie et de la pensée font doucement ricaner.
Sinon, il n'y a aucune raison que ces pressions ne viennent pas rencontrer, dans l'isolement le plus profond, les traits de caractère les plus vulnérables de chacun d'entre nous; et c'est cette exacerbation structurelle des traits de la personnalité, mise à nue par les pressions sociales en tout genre (et aussi par des diagnostics psy à l'emporte-pièce, faits n'importe où, édictés par n'importe qui, sans précaution) qui risque de continuer à dévaloriser profondément l'individu, le poussant dans ses retranchements les plus intimes: sans bien comprendre ce qui se passe, il ou elle n'a plus l'énergie pour contester la réalité qu'on lui impose (le «c'est à vous de vous adapter», le «votre évaluation est mauvaise») et pense porter en soi une folie, et une insuffisance majeure, bref, une inadaptation à ce monde-là.

A ce moment, pas assez de proches ne sont là pour dire que si le monde est devenu fou et dur, ce n'est pas à lui, à elle, d'en payer le prix; et même entouré(e), il ou elle peut finir par ne plus rien entendre de ces soutiens (familles, amis, proches, médecins), tant la certitude de n'avoir pas été à la hauteur est devenue forte.
A force d'être mis à mal par des injonctions paradoxales, dans leur éthique, leurs valeurs, et donc leurs identités professionnelles et donc sociales, des êtres humains peuvent mourir: c'est cela que nous disent ces suicides en chaîne. Des symptômes psychiques, le perfectionnisme, l'angoisse par exemple, sont livrés sans protection, sans bordure ni limite d'un «cela suffit, merci beaucoup», ad libidum, pourrait-on dire, à la voracité d'un univers du «toujours plus d'efforts»: et un jour, des hommes et des femmes s'effondrent dans un non sens total, celui d'un vide abyssal.

Ou ils se mettent à boire, à consommer des drogues, réponse toxicomaniaque à un monde incertain qui pousse à jouir du seul «tout-tout-de-suite» auquel nous incite l'idéologie de la consommation (consummation, devrait-on dire), en cherchant des réponses à un mal-être sans nom dans des sensations immédiates, là où, bien au contraire, il faudrait qu'on puisse aider ces mêmes personnes à s'inscrire dans une démarche de quête de curiosité professionnelle et de projets encouragés sur le long terme...

Le passage à l'acte suicidaire prend alors la forme d'un pied de nez ultime à un monde qui se dédie de ses promesses de quête de sens, et brade l'idée du bonheur, ravalé par ailleurs à la médiocrité d'un pauvre leurre d'un monde de communication et d'images publicitaires doté d'une imagination toujours plus appauvrie, où «l'avoir toujours plus d'objets» se substitue à la question de l'être et de ses aspirations.

Si ce n'était pas aussi tragique, on pourrait sourire du fait que ce soit précisément dans une des entreprises chargées de veiller et développer la communication que l'on voit actuellement des salariés exprimer une désespérance majeure.

La manière actuelle de jouer avec ses salariés « kleenex », jetables à tous moments, porte bel et bien une part de déshumanisation, que les plus jeunes d'entre nous observent non sans interrogation: ce monde du travail aux méthodes sauvages les laisse pour le moins perplexes, surtout quand ils ont eu à vivre, chose fréquente, la mise au rebut du monde du travail d'un de leurs parents.

Un des maîtres mots du nouveau monde mondialisé est «la flexibilité» dont parle très justement Zygmunt Bauman, sociologue si pertinent de notre monde, dans son dernier ouvrage L'éthique a t-elle une chance dans un monde de consommateurs? «.... Il s'ensuit que le seul talent qu'il me faille acquérir et exercer est celui de la flexibilité –se débarrasser rapidement des talents inutiles, oublier vite, mettre au rebut les avantages passés devenus handicaps, changer de cap et de route au dernier moment et sans regret, éviter les serments de loyauté à vie envers quiconque et quoique ce soit. Après tout, les bonnes occasions ont tendance à apparaître soudainement, surgissant de nulle part, et disparaître de la même façon: malheur aux ringards, qui, par dessein ou à défaut, agissent comme s'ils devaient leur rester fidèles à jamais», écrit-il.

Oui, c'est vrai, la culture du zapping se porte bien. Accentuée par une virtualisation du monde qui chaque jour donne au Temps et à l'Espace une dimension à la fois plus resserrée et abstraite, à une narcissisation massive (rester jeunes à tout prix, «s'estimer soi-même», etc), une angoisse de type nouveau saisit les hommes du XXIe siècle des pays développés: l'humain est à la fois prisonnier de trop de choix de conformisations –qui changent chaque jour– et en pleine perdition sur ce qu'il en serait des questions de la transmission, celle reçue par les aînés, celle dont ils pourraient se sentir détenteurs vis-à-vis de leurs enfants. Il sait que plus rien n'est sûr.

Alors parler de prévention du suicide suppose pour moi plusieurs perspectives :S'il relève de notre compétence de médecins de repérer les symptômes de dépression, de maladies mentales, de les soigner... la seule médicalisation de l'existence s'avère elle aussi un piège dès lors qu'elle réduirait l'homme à un seul statut d'handicapé, de malade isolé.

La tendance actuelle, en ce qui concerne notre métier de psychiatre, serait de renier la dimension psychothérapeutique inhérente à notre fonction, pour transformer la psychiatrie en une seule spécialité médicale comme une autre: en quelque sorte, ne voir dans l'humain qu'un agrégat de défaillances chimiques qu'il faut réparer, faire fi de la psyché au profit du tout neuronal. Il faut violemment s'opposer à une telle vision des choses, et pouvoir accompagner les patients traités, dans une parole qui s'inscrit dans la durée. Rien ne dit que cela ne sera pas bientôt considéré comme un luxe inutile.

Mais c'est aussi profondément du côté de l'organisation du monde du travail qu'il faut se tourner, et s'interroger sur les méthodes de restructuration des ressources humaines: jamais nous ne serons allés aussi loin dans l'utilisation perverse des mots, notamment à connotation humaniste ou psychologique, pour les utiliser et les faire accepter à des populations de plus en plus infantilisées et crédules: se mêlent alors des pseudo notions de deuil: «faire son deuil de son poste», qui, jouant toujours plus sur l'individualisme, enlèvent toute possibilité de discours collectif, renvoyant toujours et encore à la seule responsabilité et culpabilité individuelles...

Une démocratie qui ne s'interrogerait pas sur ces suicides – en prison, au travail à l'école, chez soi, partout –, serait une démocratie bien malade. Mais saura-t-elle écouter tous les signaux des soignants et autres citoyens qui ne sont pas avares en conseils intelligents, ou se contentera-t-elle d'un «Passez, il n'y a rien à voir», les yeux rivés sur les chiffres du dernier PIB?

Sylvie Zucca auteur de Je vous salis ma rue, clinique de la désocialisation. Stock, 2007





BUDGET

Sécu : plus de déficit, plus de taxes, moins de remboursements

NOUVELOBS.COM | 01.10.2009 | 18:54
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/economie/20091001.OBS3149/secu__plus_de_deficit_plus_de_taxes_moins_de_remboursem.html

Le projet de budget 2010 présenté par le gouvernement prévoit un déficit de 30,6 milliards d'euros. Le forfait hospitalier passe de 16 à 18 euros. Les médicaments au "service médical rendu faible" sont moins remboursés. Le "forfait social" est doublé.

Le gouvernement a présenté, jeudi 1er octobre, son projet de budget 2010 pour la Sécurité sociale (PLFSS) : il anticipe un déficit de 30,6 milliards d'euros. Selon le ministre du Budget, Eric Woerth, ce déficit aurait été de 33,6 milliards sans les mesures prises par le gouvernement.
En 2009, le déficit du régime général (salariés) de la Sécurité sociale devrait atteindre 23,5 milliards d'euros, revu à la hausse par le gouvernement en raison notamment de la grippe H1N1 (achats de vaccins, antiviraux et masques).
Des mesures d'économie ont été présentées devant la Commission des comptes de la Sécurité sociale (CCSS) par les différents ministres concernés.

Des mesures d'économie

- Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, a confirmé la hausse du forfait hospitalier de 16 à 18 euros en 2010, et de 12 à 13,5 euros en psychiatrie.

- Elle a en outre annoncé que le taux de remboursement par l'assurance maladie de certains médicaments, au "service médical rendu faible", baisserait de 35% à 15% en 2010. Les analgésiques comme l'aspirine ou le paracétamol resteront remboursés à 65%. Le gouvernement attend 145 millions d'euros d'économies de cette mesure.

- Une personne dont les indemnités journalières (IJ) auront été suspendues pour "arrêt injustifié" ne pourra obtenir "automatiquement" ses indemnités pour un autre arrêt juste après, a annoncé le ministre Eric Woerth, en présentant le budget 2010 de la Sécurité sociale. Il faudra obligatoirement un accord préalable de la Caisse d'assurance-maladie.
Décidé à "accélérer" la lutte contre les fraudes, en particulier contre "les arrêts de travail injustifiés", "encore beaucoup trop nombreux (13% selon la Cnam pour les arrêts courts)" avec des indemnités journalières qui "augmentent (+5,8 % en 2008; +6,6 % sur les cinq premiers mois de l'année 2009)", Eric Woerth a également annoncé que "la 'contre-visite' de l'employeur, que nous avons expérimentée" allait "être généralisée. "La Caisse sera obligée de tenir compte de l'avis du médecin mandaté par l'entreprise. Elle aura le choix entre effectuer un nouveau contrôle ou suspendre immédiatement le versement des IJ", précise le ministre.

Plus de taxes

- Le "forfait social" (taxe sur l'intéressement, la participation et l'épargne salariale) sera doublé en 2010, passant de 2% à 4%, selon Eric Woerth. Ce prélèvement à la charge des employeurs avait été introduit dans le budget 2009 de la Sécurité sociale. "Si nous développons l'intéressement et la participation, nous devons les soumettre plus largement aux prélèvements sociaux", a justifié le ministre du Budget.
Il s'agit, pour le gouvernement, d'"élargir le financement de la protection sociale aux revenus du capital".

- L'exonération de prélèvements sociaux dont bénéficiaient jusqu'à présent certains contrats d'assurance vie en cas de décès du bénéficiaire sera "remise en cause". En outre, "les plus-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières seront soumises aux prélèvements sociaux (12,1%) au premier euro", selon Eric Woerth.

- Les prélèvements sur les retraites chapeaux des dirigeants d'entreprise seront doublés, pour un gain attendu d'environ 25 millions d'euros. Seul l'employeur cotise pour ce régime, qui assure un complément de retraite aux dirigeants de grandes entreprises (près de 800 selon des sources gouvernementales).

Des mesures pour les retraites des mères de famille

Pour ce qui concerne les retraites, le ministre du Travail Xavier Darcos a indiqué que les compensations aux mères de famille seraient "sauvegardées". La majoration de durée d'assurance (MDA) de deux ans pour les mères de famille du privé est préservée. Elle continuera à bénéficier essentiellement aux femmes, avec des possibilités pour les hommes d'en bénéficier, mais de manière exceptionnelle, sous des conditions restrictives.

Les invalides capables de poursuivre une activité pourront désormais toucher leur pension jusqu'à l'âge de 65 ans, au lieu de 60, a indiqué jeudi le ministre du Travail Xavier Darcos.
Le projet de loi de finances de la Sécurité sociale instaure pour les entreprises "un système de "bonus-malus" plus efficace dans le champ des accidents du travail" : "D'une part, il simplifie les mécanismes de majoration de cotisation qui existent en cas de risque avéré ou récurrent : c'est le malus. D'autre part, il crée une nouvelle incitation financière pour les entreprises qui réalisent des investissements de prévention : c'est le bonus", selon Xavier Darcos.

Grogne

La hausse du forfait hospitalier et la baisse du taux de remboursement de certains médicaments ont suscité de vives réactions de la part de l'opposition, des syndicats et d'associations qui déplorent que les patients soient pénalisés.
La proposition du président des députés UMP, Jean-François Copé, d'imposer les indemnités d'accidents du travail (dans le cadre du projet de loi de finances) a amplifié la grogne.

(Nouvelobs.com avec AFP)

mercredi 30 septembre 2009



Le socialiste Claude Evin prend la tête de la santé francilienne
LEMONDE.FR | 30.09.09 | 08h02 • Mis à jour le 30.09.09 | 09h31
http://abonnes.lemonde.fr/politique/article/2009/09/30/l-ex-ministre-socialiste-claude-evin-dans-l-orbite-du-gouvernement_1246984_823448.html#ens_id=1241091

Le gouvernement va procéder, mercredi 30 septembre, à la nomination en conseil des ministres des directeurs des 26 futures agences régionales de santé (ARS) parmi lesquels figurera Claude Evin, ancien ministre socialiste de la santé, pour l'Ile-de-France.

"Il n'y a pas eu de candidature de grâce et de faveur. Si M. Evin a été retenu, c'est d'abord en raison de ses compétences, non du fait qu'il est un candidat de l'ouverture. Il se trouve qu'être de gauche n'a pas été un critère de rejet !", explique la ministre de la santé et des sports, Roselyne Bachelot dans un entretien au "Monde".

"Nous avons fait le choix d'une procédure innovante, pour répondre à la commande du président de la République et du premier ministre de professionnaliser le recrutement des dirigeants des grands opérateurs, poursuit Mme Bachelot. Nous avons fait appel à un cabinet de recrutement et un comité d'experts. Plus de mille candidatures ont été examinées. J'ai moi-même reçu des candidats dans la dernière phase de sélection. Tout le monde a joué le jeu, Claude Evin comme les autres".

"Je ne franchis pas le Rubicon", assure quant à lui M. Evin dans Aujourd'hui en France/Le Parisien. "Je suis toujours au Parti socialiste et n'ai pas l'intention de renier mes engagements en faveur du service public", ajoute-t-il. "J'ai milité depuis longtemps pour la création de ces agences régionales de santé qui, à mes yeux, ne sont ni de droite ni de gauche, et la ministre de la santé m'a fait l'honneur de me solliciter avec l'aval du président de la République et du premier ministre", a ajouté M. Evin.

A la question de savoir s'il ne craint pas "d'être accusé par la gauche de servir de caution au gouvernement, s'il doit prendre des mesures impopulaires", l'ancien ministre répond par la négative. "Je n'ai plus de mandats électifs au PS depuis 2007. […] Les gens qui me connaissent savent que j'ai des convictions et que je ne vais pas les mettre dans ma poche", explique-t-il.



Entretien
Roselyne Bachelot : "En matière de santé, il n'y a pas de tournant de la rigueur"
LE MONDE | 30.09.09 | 14h51 • Mis à jour le 30.09.09 | 17h18
http://abonnes.lemonde.fr/politique/article/2009/09/30/roselyne-bachelot-en-matiere-de-sante-il-n-y-a-pas-de-tournant-de-la-rigueur_1247187_823448.html#ens_id=1241091

Le gouvernement dévoile jeudi 1er octobre, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), sur fond de déficits persistants. Mercredi 30 septembre, il a procédé à la nomination en conseil des ministres des directeurs des 26 futures agences régionales de santé (ARS) parmi lesquels le socialiste Claude Evin. Ministre de la santé et des sports, Roselyne Bachelot s'explique.


La nomination de Claude Evin, ancien ministre de la santé socialiste est-elle un nouveau geste d'ouverture ?

Nous avons fait le choix d'une procédure innovante, pour répondre à la commande du président de la République et du premier ministre de professionnaliser le recrutement des dirigeants des grands opérateurs. Nous avons fait appel à un cabinet de recrutement et un comité d'experts. Plus de mille candidatures ont été examinées. J'ai moi-même reçu des candidats dans la dernière phase de sélection. Tout le monde a joué le jeu, Claude Evin comme les autres. Il n'y a pas eu de candidature de grâce et de faveur. Si M. Evin a été retenu, c'est d'abord en raison de ses compétences, non du fait qu'il est un candidat de l'ouverture. Il se trouve qu'être de gauche n'a pas été un critère de rejet ! Le résultat, c'est un "casting" exceptionnel : un ancien ministre, des médecins, des profils issus du privé, des préfets, des membres des grands corps de l'Etat, des cadres supérieurs de l'Assurance-maladie. Et nous avons 27 % de femmes, ce qui est le plus fort pourcentage des grands réseaux régionaux du secteur public.

Qu'attendez-vous de ces nouveaux "préfets sanitaires" ?

Avec les ARS, nous créons un service public unifié de santé, couvrant, au niveau régional, l'ensemble des champs de la santé : la prévention, la santé publique, la sécurité sanitaire, l'ambulatoire, l'hôpital, le médico-social. C'est un apport majeur de la loi que j'ai défendue au printemps dernier. Ces agences, qui regrouperont sept structures de l'Etat et de l'Assurance-maladie, étaient un concept porté par l'ensemble des candidats républicains lors de la présidentielle de 2007. Tous estimaient que leur création était indispensable pour remédier à certains dysfonctionnements de la structuration sanitaire, notamment le cloisonnement entre l'hôpital et la ville.

Quant à l'appellation "préfets sanitaires", elle est inappropriée. Pour autant, je revendique pleinement le rôle de régulateur de l'Etat, dans le domaine de la santé. Les préfets de région seront d'ailleurs les présidents des conseils de surveillance de ces agences. Les ARS devront répondre aux besoins concrets des gens : comment trouver un médecin dans des zones désertifiées, le week-end ou après 23 heures le soir, chaque jour ; comment décloisonner la ville et l'hôpital, l'hôpital et le médico-social ?

Les ARS n'ont pas de pouvoir de contrainte sur la médecine libérale, notamment pour lutter contre les déserts médicaux. Pourraient-elles l'avoir un jour ?

Je ne préjuge pas de ce qui pourrait être fait par une autre majorité. Le PS a dit qu'il souhaitait des mesures coercitives sur l'organisation de la médecine libérale. Dont acte. Pour ma part, j'ai affirmé que, dans le cadre de la meilleure répartition des professionnels de santé sur le territoire, je privilégiais l'approche qui respecte la liberté d'installation des médecins. Pour autant, les ARS ne seront pas dépourvues de moyens incitatifs, pour mieux répartir la présence médicale. Elles le feront en concertation avec les professionnels de santé, les élus locaux, les associations de patients et d'usagers.

Le gouvernement affirme qu'il n'a pas fait le choix de la rigueur, mais dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale vous augmentez le forfait hospitalier et dé-remboursez certains médicaments.

Il n'y a pas de tournant de la rigueur lorsqu'on envisage une croissance de près de 3 % des dépenses ! C'est près de 5 milliards d'euros de plus que nous aurons dépensés pour notre santé en 2009. Cette année, comme les précédentes, nous demanderons des efforts à tous : professionnels de santé, structures et hôpitaux, patients. Le forfait journalier n'avait pas été ajusté depuis plusieurs années, et cela fait plusieurs années que nous remboursons de façon différenciée les médicaments en fonction de leur service médical. Il n'y a pas non plus de forte ponction du pouvoir d'achat des Français.

Le premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin, juge pourtant une augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) inéluctable...

M. Seguin s'inscrit dans une perspective de long terme, en affirmant qu'il faudra à l'avenir consacrer une partie plus importante de notre richesse nationale aux dépenses de santé. Il faut surtout voir comment le système de santé évolue : le vieillissement de la population est évidemment source de coûts. A l'inverse, le progrès technologique peut engendrer des économies sans dégrader la qualité des soins : on peut opérer maintenant en six heures une tumeur qui nécessitait auparavant six mois d'hospitalisation. Si on se place dans le modèle actuel de la santé, il faudrait peut-être relever les prélèvements obligatoires. Mais on peut imaginer un modèle différent, plus efficient qu'aujourd'hui. Sur cette question, il faut trouver un consensus appuyé avec les Français.

Propos recueillis par Laetitia Clavreul et Cécile Prieur


Le forfait social va passer de 2 % à 4 %

Le forfait social de 2 %, dû par les employeurs sur les rémunérations différées (participation, intéressement, épargne salariale et retraite supplémentaire), va être relevé à 4 %. Ainsi réévaluée, cette contribution patronale devrait rapporter 410 millions d'euros à l'Etat. Le gouvernement prévoit aussi de mettre fin à l'exonération de prélèvements sociaux dont bénéficiaient les contrats d'assurance-vie multi-supports en cas de décès du titulaire. Il en tirera 270 millions.

Claude Evin devient directeur de l'ARS Ile-de-France

Parmi les 26 directeurs d'agences régionales de santé figurent notamment :

- Claude Evin, ancien ministre socialiste de la santé, actuel président de la Fédération hospitalière de France (Ile-de-France) ;

- Denis Morin, conseiller maître à la Cour des comptes, ancien directeur de cabinet de Martine Aubry au ministère de l'emploi (Rhônes-Alpes) ;

- Dominique Deroubaix, directeur d'agence régionale d'hospitalisation (PACA) ;

- Daniel Lenoir, ancien directeur général de la Caisse nationale d'assurance-maladie (Nord-Pas-de-Calais) ;

- Nicole Klein, préfet des Hautes-Alpes (Aquitaine) ;

- Martine Aoustin, responsable de la tarification hospitalière au ministère de la santé (Languedoc-Roussillon) ;

- Jean-Yves Grall, directeur d'agence régionale d'hospitalisation (Lorraine) ;

- Jacques Laisné, ancien préfet du Var (Centre) ;

- Pierre-Jean Lancry, directeur de la santé à la Mutualité sociale agricole (Basse-Normandie) ;

- Chantal de Singly, directrice de l'Ecole des hautes études en santé publique (Réunion).

La liste exhaustive est consultable sur lemonde.fr.

Article paru dans l'édition du 01.10.09

mardi 29 septembre 2009

BEZIERS
Édition du mardi 29 septembre 2009

http://www.midilibre.com/articles/2009/09/29/BEZIERS-La-psychiatrie-dans-tous-ses-etats-avec-Croix-marine-937472.php5


Olivier GOT

Santé

La psychiatrie dans tous ses états avec Croix marine


RAPPEL : Les journées consacrées à la santé mentale se poursuivent ce matin. Le point, hier

Palais des Congrès, hier après-midi. Ils sont des centaines à arpenter les couloirs à la recherche de la conférence qui les intéresse ou d'un livre traitant du sujet recherché. Les journées Croix marine, consacrées à la santé mentale, attirent du monde. Professionnels ou simples curieux, ils sont réunis par la fédération biterroise créée voici près de soixante ans. Date à laquelle « lorsqu'on rentrait dans un hôpital psychiatrique, on avait une chance sur deux d'y passer le reste de sa vie ». Le D r Bernard Durand met en avant, avec ce discours, les avancées considérables qu'ont connues les centres de soins certes, mais aussi les structures d'accompagnement. A l'image des Groupes d'entraide mutuelle (Gem), créés plus récemment afin que les patients organisent eux-mêmes et entre eux leurs loisirs. Car c'est bien de ce sujet que traitent en particulier ces journées. « Ce n'est pas évident de s'insérer dans un club sportif quand on est psychotique » , souligne encore le psychiatre de Créteil . Qui précise que l'enjeu ne vaut la chandelle que si la synergie fonctionne entre ceux qui font les soins et ceux qui accompagnent. Jamais l'un sans l'autre (lire plus bas). Le groupe d'entraide biterrois est à mettre à l'actif de l'Union nationale d'aide aux familles et amis des malades mentaux (1) . Une réalisation importante que celle de cette association d'usagers puisque « quand le groupe est implanté en pleine ville, il contribue à changer l'image qu'ont les gens des malades ». Et inversement. En effet, une fois acceptée l'idée d'intégrer un groupe, il n'est pas rare qu'un malade accepte plus facilement de se faire soigner, tandis que l'autre ira plus aisément participer à une sortie sécurisée par ses "semblables". Et les psychiatres d'insister sur la nécessité de ces Gem tant qu'ils ne se substitueront pas aux centres de soins. et ne seront pas pour les politiques « un moyen de banaliser le handicap ». Evidemment, le sujet est bien trop délicat pour une profession de médecins qui souffrent d'une pénurie de personnels et d'infirmiers. Quoi qu'il en soit : « Nous sommes tous en difficulté, mais on n'est pas à Béziers pour défendre nos chapelles, mais pour travailler ensemble », conclut le D r Durand. Qui poursuit avec ses collègues les conférences ce matin encore. Cyril CALSINA
L'Unafam organise une discussion animée par une psychologue jeudi 1 er octobre, de 14 h 15 à 16 h 30, à la salle de réunion du centre Camille- Claudel, 2, rue Robert-Rivetti, à Béziers.
COLLOQUE Jeudi 15 octobre 2009 | Saint-Denis (93)
Expertise psychiatrique et sexualité - 1850-1930
Quand médecine, droit, morale et littérature se conjuguaient dans les prétoires...
Publié le lundi 28 septembre 2009 par Marie Pellen

http://calenda.revues.org/nouvelle14443.html

RÉSUMÉ


À partir du milieu du XIXe siècle, la psychiatrie occidentale a nosographié par le menu les déviances sexuelles dont certaines entamèrent leur lente démédicalisation après les Années folles, notamment sous l’influence de la littérature. La pathologisation de certains comporte-ments sexuels coïncida avec la reprise en main de l’ordre moral par le pouvoir et les Églises, amorcée avec ostentation depuis la Monarchie de juillet. À compter des années 1850, les délits et crimes liés à la sexualité occupèrent majoritairement l’activité judiciaire (que l’on songe par exemple aux cas de Joseph Vacher – publié par Alexandre Lacassagne – et de Vincent Verzeni – publié par Cesare Lombroso) et les psychiatres, pour la plupart experts des tribunaux, exploitèrent donc leur nosographie contestable des perversions sexuelles dans leurs rapports d’expertise légale.


ANNONCE

Université de Paris 8 Vincennes Saint-Denis


Jeudi 15 octobre 2009

Sur l’invitation de Geneviève Koubi, ex-Directrice du CER/FDP, et Hélène Gaumont-Prat, Directrice du Laboratoire de Droit médical et de la santé de l’Université de Paris 8
Organisé par Patrick Pognant (Paris-Descartes) et Brigitte Galtier (UCP) Centre d’Etudes et de Recherches Fondements du Droit public (CER/FDP) de l’Université de Cergy-Pontoise (UCP) - « Arts littéraires, arts cliniques »
Direction Claudine VIARD
à l’Université de Paris 8, salle B 106. 9h - 18h

Accès libre

9h-9h15 Accueil des participants
9h15 Ouverture du colloque par Geneviève Koubi Présentation par Patrick POGNANT

1. Autour de la problématique

Présidence de séance : Patrick POGNANT, enseignant-chercheur, Univ. Paris-Descartes et UCP
9h30 Corinne François-Denève, enseignant-chercheur, Univ. Versailles Saint-Quentin : Folies de femmes : sur Mad, bad and sad. Women and the mind doctors de Lisa Appignanesi (2008)
10h Iulian Bogdan Toma, doctorant-assistant d’enseignement, Univ. Western Ontario (Canada) L’inversion sexuelle : le « malade » a la parole
10h30 Gérard Danou, médecin, chercheur HDR, Univ. Paris-Diderot L'influence de la formation psychiatrique d’Arthur Schnitzler sur la vie de ses personnages
11h Laurent Kondratuk, ATER, Histoire du Droit et des institutions, Univ. de Franche-Comté Le recours à la psychiatrie dans les sentences de la Rote romaine 11h30/12h30 - discussion

2. Études de cas
Présidence de séance : Brigitte Galtier, enseignant-chercheur, Univ. de Cergy-Pontoise
14h30 Marc Renneville, enseignant-chercheur, Univ. de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, Chargé d'études et de recherches au Ministère de la Justice (Direction de l'administration pénitentiaire) Joseph Vacher ou la fin du brevet d'impunité pour les criminels
15h Gilles Trimaille, enseignant-chercheur, Histoire du Droit, Univ. de Bourgogne L'expertise médico-légale face aux perversions : instrument ou argument de la justice ?
15h30 Patrick Pognant, enseignant-chercheur SIC, Univ. Paris-Descartes et UCP Le comte qui était comtesse : un cas de gynandrie au tribunal de Vienne (1890)
16h Francis Ancibure, psychologue clinicien, expert Judiciaire, chargé de cours de criminologie – Faculté de Bayonne Un cas d’actes pédophiles rapporté par le Dr Brierre de Boismont (1840)
16h30 Fabien Gouriou : psychologue ; docteur en psychologie Le sexe des indigènes – Adolphe Kocher et la médecine légale en Algérie
17h/17h30 - discussion

Débat général
Pour citer cette annonce
« Expertise psychiatrique et sexualité - 1850-1930 », Colloque, Calenda, publié le lundi 28 septembre 2009, http://calenda.revues.org/nouvelle14443.html

jeudi 24 septembre 2009




ACTUALITÉ ROUBAIX

Vélofolie, ou comment une randonnée fait changer de regard sur les malades
lundi 21.09.2009, 04:45 - La Voix du Nord
http://www.lavoixdunord.fr/Locales/Roubaix/actualite/Secteur_Roubaix/2009/09/21/article_velofolie-ou-comment-une-randonnee-fait.shtml













Patients ou pas, ils n'étaient que des cyclistes à découvrir le patrimoine hospitalier de Roubaix.

| SANTÉ MENTALE |

« On va voir des... oufs ? » Dans les murs d'un hôpital psychiatrique, Théo hésite à prononcer le mot. Mais hier, c'était bien une randonnée Vélofolie qu'organisait l'Établissement de santé mentale. Ou comment une anodine découverte du patrimoine hospitalier de la ville se meut en une opportune occasion de changer de regard sur les malades.

PAR MARC GROSCLAUDE

roubaix@lavoixdunord.fr
La psychiatrie, « on n'y connaît rien du tout » ! Nathalie et Fabrice, des cyclistes militants, avouent « avoir fait à peu près tout ce qui concerne le patrimoine de Roubaix ». Mais sur les hôpitaux psychiatriques, ils sèchent. Alors, profitant de ce thème original de promenade, ils ont enfourché leur vélo pour découvrir les lieux, encore en activité ou pas, où l'on a soigné - ou parfois plutôt enfermé - les aliénés, déments, hystériques... Des termes qui, aujourd'hui, ne veulent plus dire grand-chose à l'heure où l'on parle de thérapie en milieu ouvert.

C'est le Dr Jean-Yves Alexandre qui leur a expliqué cela. « La psychiatrie ne se résume pas aux murs. » Il a été leur premier guide, à l'hôpital Lucien-Bonnafé, l'antenne roubaisienne de l'Établissement public de santé mentale de l'agglomération lilloise. Le praticien est revenu sur l'histoire des établissements de la ville, faisant démarrer son exposé au premier hospice créé par Pierre de Roubaix à son retour de croisade.

Dans son auditoire, des Roubaisiens curieux de découvrir une facette de plus de leur ville, souvent cachée. « Ce sont des gens qui n'ont pas de pathologie mentale ou qui ne savent pas qu'ils en ont une », sourit Erika Schröder. Cadre de santé, elle est à l'origine de cette randonnée particulière.

Car parmi ces anonymes, il y avait une dizaine de patients de l'EPSM : des hommes et des femmes qui avaient déjà une expérience de la bicyclette pour avoir déjà fait quelques kilomètres du Paris-Roubaix VTT. Dans de telles circonstances, « on n'a pas l'étiquette EPSM collée dans le dos », se réjouit Vincent, un grand jeune homme de 20 ans qui a déjà fait plusieurs séjours à l'hôpital. Outre ce « coup de main pour le patrimoine » qu'il était content de donner - et au passage en se distrayant grâce au vélo - ce qu'il cherchait, c'était « que les gens nous regardent normalement et pas de travers ». Un autre patient ajoute : « On est à même de faire du sport comme tout le monde. Ce n'est pas parce qu'on a le statut de "dépressif" qu'on n'est pas capable de faire des choses. » C'était donc l'enjeu de cette première édition de Vélofolie. Au-delà des 10 kilomètres dans Roubaix sur la trace du patrimoine hospitalier, le but était donc « de sensibiliser le public sur ce que sont la psychiatrie et les soins, insiste Erika Schröder. Faire comprendre qu'une personne qui a une pathologie n'est pas qu'un malade, mais un citoyen qui a des capacités, qui est capable de vivre en ville ». •


vendredi 18 septembre 2009





Polémique à Villejuif: «incompréhensible» selon Sarkozy


Quelque 300 personnes, principalement des personnels de l’hôpital Paul-Brousse de Villejuif, ont manifesté pour dénoncer le coût de la visite présidentielle et l'importance du dispositif policier déployé ce vendredi.

Alors que 300 personnes ont manifesté, ce vendredi, à l’hôpital Paul-Brousse de Villejuif (Val-de-Marne) pour dénoncer le coût de la visite de Nicolas Sarkozy, jugé excessif en période de restriction budgétaire, celui-ci a balayé la polémique, la jugeant «particulièrement incompréhensible».

«C’est la place du président de la République que d’être ici pour rencontrer des transplantés, pour appeler nos compatriotes à donner et pour féliciter les équipes», a plaidé le chef de l'Etat, au terme de la visite de l’établissement qui vient de réaliser sa 2.500e greffe de foie. «Ce qui serait scandaleux, c’est que je n’y sois pas», a-t-il lancé sous les applaudissements d’une partie du personnel de l’hôpital et des malades.

Parallèlement, le porte-parole du syndicat Sud de l’hôpital, André-Compain réaffirmait, devant les manifestants, que la note du déplacement présidentiel s’élevait à 200.000 euros, «le montant du buffet» étant, pour sa part, «inconnu». «Les frais sont pris en charge par l’hôpital sur un budget déficitaire», s’est-il indigné, sous les huées des personnels présents.

Les démentis de Luc Chatel et de Roselyne Bachelot n’ont visiblement pas convaincu. La ministre de la Santé avait exprimé sa «totale indignation sur l’instrumentalisation faite par certains, au détriment des malades et des médecins», du coût supposé de la visite. Et le porte-parole du gouvernement avait regretté, à l’antenne d’Europe 1, «cette polémique absolument ridicule», récusant le chiffre «absolument faux» de 200.000 euros.

Les manifestants ont par ailleurs dénoncé l’importance du dispositif policier déployé à l’occasion du déplacement présidentiel. «Même le boulanger qui venait livrer les viennoiseries n’a pas pu ouvrir sa camionnette, qui a été contrôlée par les chiens renifleurs. C’est excessif. Même les gens de la police présents ici sont d’accord avec ça», s’est plaint auprès de l’AFP, Josselyn Carvigant, cuisinier à l’hôpital depuis 11 ans.Tandis que la maire (PCF) de Villejuif Claudine Cordillot distribuait des tracts condamnant le «recul» du système de santé, notamment à Villejuif.

(Source AFP)
http://www.quotimed.com/web/index.cfm?fuseaction=viewflash&waidx=1162






La culture de l’efficience arrive à l’hôpital


Pleins feux sur la productivité des médecins

Dans son dernier rapport sur la Sécurité sociale, la Cour des comptes brise un tabou en se penchant sur la productivité des médecins hospitaliers. D’un praticien à l’autre, elle met au jour des écarts très importants et dénonce des « dérives » liées aux situations de sureffectifs.


VOICI DU GRAIN à moudre pour les brocardeurs comme pour les défenseurs du concept d’« l’hôpital-entreprise ». Dans son dernier rapport sur la Sécurité sociale (« le Quotidien » d’hier), la Cour des comptes s’intéresse de près aux (grands) écarts de productivité des hôpitaux publics. Parmi les multiples indicateurs qu’elle passe au peigne fin : les médecins, dont elle scrute plus particulièrement l’activité en pneumologie, en chirurgie orthopédique et en maternité.

Les statistiques de la Cour ne vont pas plaire à tout le monde. Le nombre de praticiens d’un établissement est par exemple rapporté au nombre de lits qu’ils font tourner (voir tableau n° 1) ou bien aux recettes que leur activité rapporte à l’hôpital dans le cadre de la tarification à l’activité (T2A). « On voit que pour générer la même recette T2A, le même nombre de journées ou de lits dans la même spécialité, il faut à certains hôpitaux quatre fois plus de médecins qu’à d’autres, jusqu’à 15 fois dans les maternités », assène le rapport. En présentant l’ouvrage à la presse, Philippe Séguin, premier président de la Cour, s’en est ému : « En chirurgie orthopédique, (...) l’encadrement en personnel médical par lit varie de 1 à 10 selon les établissements considérés ! »

Pour ne rien arranger, les magistrats dénoncent une situation de « sous-productivité » assez généralisée dans le parc hospitalier. Au sein d’un échantillon de quelque 40 hôpitaux, ils constatent en effet que « les deux tiers des établissements ont au moins un service où la productivité médicale (...) est fortement inférieure à la moyenne », concluant à l’existence, partout, de « marges d’amélioration ». Difficile de ne pas lire, même si les choses ne sont jamais écrites ainsi, qu’il y a dans tous les hôpitaux des médecins qui ne travaillent pas beaucoup.
Surdimensionnement ou pénurie. Comment expliquer les écarts mis au jour ? Se mordant un peu la queue, la Cour avance des causes de sur - comme de sous-effectif. « Le nombre d’actes par médecin, par équipement ou par lit, leur nombre par service et le taux d’occupation ont parfois des valeurs si faibles que la surcapacité ne fait aucun doute », écrit-elle. Elle affirme à l’inverse que le contexte de pénurie médicale a des effets pervers sur la productivité de chacun. « L’excès de la demande sur l’offre de compétences crée à l’égard du corps médical des situations inflationnistes voire malsaines », fait-elle valoir, citant en guise d’exemple « la persistance ou l’aggravation d’une déficience de contrôle dans trois domaines : le temps de travail des médecins, leur pratique des gardes et astreintes, l’activité libérale de certains d’entre eux ». Dans le domaine de la permanence des soins en particulier, les magistrats accusent : « les dérives sont parfois concertées avec la direction, qui en use comme d’un complément de rémunération ». L’effet s’en fait sentir sur les énormes écarts de coûts relevés dans les services d’urgence (voir tableau n° 2).
Autre source de déséquilibre, selon le rapport : l’absence d’adaptation des hôpitaux à l’évolution de la demande. Les magistrats jugent que nationalement ou localement, les décideurs hospitaliers gèrent mal leurs ressources médicales.


› KARINE PIGANEAU

Le Quotidien du Médecin du : 18/09/2009
http://www.quotimed.com/journal/index.cfm?fuseaction=viewarticle&DArtIdx=428856

Les corses d'ailleurs






http://corse.france3.fr/emissions/56961710-fr.php
Mardi 22 septembre à 17h00 sur ViaStella

Les corses d'ailleurs
: trajets de migration où il est question d'exil, de transhumance, de nomadisme...Ce documentaire est un portrait de Jean-Dominique Leccia, psychiatre d'origine corse qui vit aujourd'hui à Montréal après un parcours qui l'a emmené de Corse à Paris, puis en Abitbi-Téminscamingue aux confins du Québec...Voyage sur le thème de l'identité en transformation, à partir de l'expérience de Jean-Dominique Leccia sur la psychiatrie d'urgence, où il soigne les itinérants, les déracinés en perte de repères... Voyage qui nous entraîne d'Olivese à Ryoun Noranda, en passant par Montréal et Paris. Territoires, mouvements, trajectoires... «Ce qui définit les identités aujourd'hui, ce ne sont plus des positions mais des trajectoires».Un film de Philippe Raffali, coproduction France 3 Corse / Mouvement.

J'estime que l'espace n'est pas neutre et transparent. Il est présent et actif dans la discrimination identitaire des sociétés et des individus. Il peut devenir opaque, agressif, capable de stigmatisation et d'exclusion. Par ailleurs, en fonction des situations, il peut intervenir comme prétexte ou agent déclencheur. Il peut aussi servir de scène dramatique à l'expression d'émotions aussi puissantes que disparates. Voilà quelques thèmes (parmi d'autres) qu'explore ce film, « Corse de passage ».
Jean-Dominique Leccia

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http://www.geomental.com/index.php/site/videos/










mercredi 16 septembre 2009

Mis à jour 15-09-2009 21:34
http://www.metrofrance.com/info-locale/greve-au-palais-de-la-mutualite/piio!nZoSDc5UfD@bcD@uH8SjA/

Grève au palais de la Mutualité

Les salariés protestent contre la vente du site, qui pourrait devenir un palais des congrès de luxe.

“Entreprise atteinte de la grippe”, “En grève”, “A vendre”... Ce mardi, les banderoles et affiches avaient recouvert la façade du bâtiment de la rue Saint-Victor (Ve) qui accueille depuis les années 1930 un centre de santé mutualiste. Selon une information divulguée en août, la gestion de laMutualité aurait été confiée au groupe international GL events qui compterait y faire un “palais des congrès de luxe”.
Le site devrait fermer ses portes d’ici à juin prochain pour travaux. Selon les syndicats, “160 emplois seraient menacés, une vingtaine de spécialités seraient supprimées, dont la psychiatrie, l’urologie ou encore la médecine générale”. “Fini l’accès aux soins de proximité, le suivi des patients”, s’énerve Michel, salarié, indiquant qu’un plan de licenciement serait présenté dans deux jours (jeudi, ndlr) au comité d’entreprise. “La France veut une médecine de qualité et, dans le même temps, on supprime les centres qui ne sont pas ren tables”, s’indigne Nora Tanenbaum, médecin au centre. Une pétition de soutien a d’ores et déjà rassemblé plus de 4 000 signatures et le Conseil de Paris s’est prononcé pour le maintien intégral des activités et des emplois.


Social
Débarqué par l’Arh : le docteur Paresys, première victime de la loi Bachelot


http://www.viva.presse.fr/Debarque-par-l-Arh-le-docteur_12507.html

Le docteur Paresys sera-t-il la première victime de la loi Bachelot ? L’agence régionale d’hospitalisation (ARH) vient, début septembre de rejeter le recours qu’il avait déposé contre l’arrêté mettant fin à ses fonctions de chef de service de l’établissement public de santé mentale des Flandres à Bailleul (Nord).

En juillet cet arrêté succédant à la décision du conseil exécutif de l’établissement avaient créé une vive émotion, de nombreux syndicats et associations qui avaient manifesté leur soutien au docteur Paresys [1] y voyant la confirmation des orientations de la loi Bachelot qu’ils dénonçaient : nouvelle gouvernance visant à administrer l’hôpital comme une entreprise, primat de la décision administrative sur l’intérêt des malades et l’argument médical. En effet, avant même la promulgation de la loi Bachelot, le conseil exécutif de l’établissement de Bailleul et l’agence régionale d’hospitalisation passaient outre à la commission médicale détablissement (CME) qui avait elle confirmé le docteur Paresys dans ses fonctions, fonctions qu’il occupe depuis 15 ans.


Psychiatre et militant syndical
Que reproche l’ARH au docteur Paresys ? Psychiatre, il est aussi militant syndical (Union syndicale de la psychiatrie). A ce titre il a participé à la dénonciation des lois contre les lois de Prévention de la délinquance, et particulièrement contre l’article 8, qui remettait fondamentalement en question le statut des patients, et donnait aux maires des pouvoirs exorbitants en terme d’hospitalisation d’office.
Le Syndicat de la médecine générale (SMG) qui demande l’annulation de l’arrêté de l’ARH souligne que ce qu’on lui reproche est bien « une pratique basée sur les besoins de santé des patients : organisation de la permanence des soins, défense de la psychiatrie de secteur permettant l’accès aux soins de tous, de la psychiatrie de liaison, recherche d’alternatives à l’hospitalisation comme la création d’une maison thérapie fermée arbitrairement par l’ARH, projet d’implantation de lits plus favorable aux besoins de la population (annulé par l’ARH pour un projet plus coûteux et stigmatisant les patients), accès aux soins facilité pour les détenus et les personnes en situation précaire etc ».


Responsabilité médicale
Dans son arrêté de juillet, l’Agence régionale d’hospitalisation justifiait sa décision en écrivant que : « Le bilan du docteur Pierre Paresys est un véritable réquisitoire contre l’Agence régionale de l’hospitalisation et la direction de l’établissement », ajoutant que : « Il n’est pas dans les responsabilités du médecin chef de remettre en cause les prescriptions des administrations locales ou régionales... » . Une ligne parfaitement conforme aux orientations de la loi Hôpital patients santé territoire mais, souligne le docteur Paresys dans une lettre au directeur de l’EPSM [2] : « Personne, ne peut délier un médecin de sa responsabilité vis-à-vis des patients ou de l’équipe, pas même un chef de pôle. Le code de déontologie condamne par ailleurs tout lien hiérarchique et privilégie la collégialité, la diversité des pratiques. Le médecin chef aura donc toujours le devoir de défendre des orientations compatibles avec les intérêts combinés des patients et de l’équipe qui demeurent indissociables, et le devoir de combattre les autres »…
[15.09.09]

Maïté Pinero

[1] Association des internes et anciens internes en psychiatrie, syndicats de psychiatres public (IDEP et SPH), Comité d’action Syndical en Psychiatrie, Coordination Nationale des Comités de Défense des Hôpitaux et Maternités de Proximité, CGT, Collectif contre les franchises, fédération nationale Sud-Santé sociaux, Union Syndicale de la Psychiatrie.
[2] Lettre ouverte au directeur de l’ARH : www.uspsy.fr

Pour signer la pétition de soutien : http://lapetition.be/en-ligne/petition-4483.html
lyoncapitale.fr

SOCIETE


Dépression : les cliniques accueillent à bras ouverts
http://www.lyoncapitale.fr/index.php?menu=01&article=8599

Reportage. L'hospitalisation publique est de plus en plus difficile d'accès pour les dépressifs en crise. Pour être suivi à court terme et à temps plein, ils sont donc réorientés vers les cliniques privées qui tournent à plein. (Article paru dans le numéro d'avril de Lyon Capitale)

Les hôpitaux psychiatriques publics sont au bord de l'apoplexie. Alors la psychiatrie réoriente les patients et les aiguille vers une prise en charge dans des cliniques privées. À Lyon, elles proposent 450 lits. Dans ces établissements, le taux d'occupation flirte avec les 100%. À Écully, la clinique Mon Repos a réalisé un chiffre d'affaires de 5,4 millions d'euros. Elles assurent un suivi et un soin que l'hôpital public ne peut assurer faute de moyens. “Nous ne surfons pas sur le business de la souffrance psychique. Nos prix ne sont pas exorbitants et les mutuelles ainsi que la sécurité sociale remboursent dans la plupart des cas tous les frais d'hospitalisation”, se justifie Manuel André, le directeur de la clinique Mon Repos. Le forfait journalier est de 12 euros et peut grimper jusqu'à 53 euros pour une chambre simple et un peu plus spacieuse, 23m2, équipée d'une télévision.

Dans l'agglomération lyonnaise, il n'existe aucune clinique pour VIP en pleine crise de nerfs comme en région parisienne. Cinq établissements se répartissent les patients hospitalisés dans le privé et proposent une offre d'accueil de 450 lits. La clinique Mon Repos à elle seule peut en accueillir une centaine. Le cadre est apaisant. L'endroit semble comme coupé du monde. La bâtisse a des allures d'hôtel casino de station thermale. Les patients qui déambulent l'air hagard dans les couloirs de la clinique ramènent à la réalité du lieu. “Les malades qui arrivent chez nous sont dans un état dépressif grave avec souvent une tentative de suicide”, précise Manuel André. À la clinique Mon Repos se mêlent des patients récurrents, chez qui la dépression est une pathologie, à ceux qui connaissent “juste” un épisode de crise. Les cadres côtoient des bénéficiaires de la CMU. Comme dans toutes les structures de soins psychiatriques, les salariés qui ont pété les plombs sont légion. Ils ne repasseront généralement plus par la clinique Mon Repos. La durée des soins est en moyenne d'une quarantaine de jours.


ACTUALITE MEDICALE

Promouvoir des alternatives à l’hôpital psychiatrique
Publié le 15/09/2009
http://www.jim.fr/e-docs/00/01/B1/71/document_actu_med.phtml#



Dans les services psychiatriques de tous les pays, eu égard à l’impératif des restrictions budgétaires, la tendance générale est à la réduction systématique des durées d’hospitalisation et à l’élaboration de solutions substitutives pour répondre malgré tout efficacement aux besoins de soins des patients. Consacrée à une méta-analyse de 27 études sur ce thème (échelonnées entre 1966 et 2008), une publication britannique conclut à l’intérêt de développer davantage les recherches, avant de pouvoir confirmer avec certitude la supériorité de ces alternatives à l’hospitalisation classique (quant au rapport qualité / prix, en quelque sorte). Néanmoins, les programmes de type « suivi communautaire » [1] (actuellement en plein essor dans les pays anglo-saxons) offrent, estiment les auteurs, « une alternative acceptable au séjour à l’hôpital pour certains patients avec une pathologie mentale aiguë », en permettant une gestion des crises basée sur « l’individualisation et la flexibilité des interventions ».

À l’image de ces six « auberges de crise » (crisis hostels) à San Diego (Californie), le nom même de certaines de ces structures en dit parfois long sur leur vocation : lieux de vie, substitut souple et moins onéreux à l’hôpital psychiatrique, avec tendance à privilégier l’aspect hôtelier, social et communautaire, sur l’aspect technique et médical, même si celui-ci reste bien sûr toujours présent dans les ressources disponibles.

Dans ce registre des « structures intermédiaires », on parle plutôt en France d’institutions à caractère médico-social, de logements thérapeutiques, de foyers de jour (ou d’internats), d’accompagnement à la vie sociale… Mais ces diverses dénominations dissimulent mal une réalité mesquine venant souvent compromettre les espérances ambitieuses à l’origine de tous ces projets de désinstitutionnalisation : le manque récurrent de moyens humains et financiers.

[1] Cf. http://www.espace-socrate.com/SocProAccueil/Document\Rehabilitation\a_accompagnement_et_suivi_communautaire.pdf

Dr Alain Cohen

Lloyd-Evans B et coll. : Residential alternatives to acute psychiatric hospital admission : systematic review. Br J Psychiatry 2009; 195: 109-117.

samedi 12 septembre 2009

Editorial
samedi 12 septembre 2009

La peine de mort n'a pas été abolie en France...

Ce titre peut étonner. Pourtant, c'est bel et bien la réalité. En effet, « le suicide tue plus dans les prisons que la peine de mort ne l'a jamais fait » (1). La dernière exécution capitale a eu lieu en 1977. Depuis, c'est au moins 3 000 morts par suicide que l'on peut recenser dans les prisons. Ainsi, des êtres humains placés sous la responsabilité et donc, en principe, sous la protection de l'État, se donnent la mort et que fait-on ? Des rapports et des rapports sur les prisons, sans que les choses changent en profondeur. À l'évidence, c'est le système carcéral lui-même qui est en cause.

Ne plus disposer ni de son temps ni de son espace, la promiscuité, l'impossible intimité, la soumission constante, la difficulté de prendre des initiatives, la rareté des contacts avec l'extérieur, avec la famille, l'indigence des relations entre personnes, l'ennui, la frustration, la violence, les trafics, les hiérarchies parallèles, les caïds, les braqueurs, les pointeurs, tout cela est à l'origine de certains des suicides, des automutilations, des dépressions, des agressions. À cette situation désastreuse, s'ajoute la souffrance des familles qui devraient pourtant être mises en situation d'aider le détenu. S'y ajoute aussi la souffrance des personnels, fatigués, lassés d'exercer leur métier dans des conditions fragiles... Voilà ce qu'écrit Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux privatifs de liberté (1).

Tout cela est aggravé par la surpopulation dans les prisons et ce n'est pas en en construisant toujours plus que les choses changeront au fond. Espérons que ces nouvelles prisons ne reproduiront pas l'existant en plus froid, en plus neutre, en plus déshumanisé. Il faut repenser ces lieux pour qu'il soit possible d'y redonner un sens de la punition. Or, punir c'est vouloir corriger, c'est donc tout faire pour relever celui qui est tombé au lieu de l'enfoncer davantage.

Le contraire de la dignité proclamée

Il est reconnu que bon nombre de détenus relèvent de la psychiatrie. Pour eux (et pour beaucoup d'autres), la prison n'a aucun sens, dit le sénateur Jean-René Lecerf, rapporteur du projet de loi pénitentiaire. « Les prisons sont pleines mais vides de sens », ajoute le professeur de philosophie Emmanuel Jaffelin.

La prison, telle qu'elle est, ne permet pas aux prisonniers « de se sentir des hommes qui comptent encore et restent debout », écrit la psychiatre Catherine Paulet, présidente des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire (1).

La conclusion de ces analyses et de ces constatations est claire pour Jean-Marie Delarue : « La prison ne peut être davantage cette mort lente qu'a dénoncée, il y a peu, un groupe de détenus. Elle doit se transformer par un ensemble de mesures qui lui permettront d'assurer les deux missions qui lui sont assignées depuis 1945 : la punition certes... mais aussi 'la réinsertion', c'est-à-dire le retour consenti, encouragé, soutenu, à une vie sociale acceptée et partagée. » (1)

Dans la semaine qui vient, le Parlement, une fois de plus, va débattre de cette grave question. Cette fois-ci, sortira-t-on enfin des chemins battus et rebattus ? Va-t-on enfin abandonner notre hypocrisie qui consiste, en ce domaine, à proférer des bonnes paroles, à faire des voeux en l'air, à proclamer les droits de l'homme, à abolir la peine de mort officiellement pour la voir se pratiquer sournoisement ? Va-t-on enfin cesser de tolérer qu'en prison, ce soit tout le contraire de la dignité proclamée ?

(1) Emmanuel Jaffelin, Le Monde, 5 septembre 2009.
François Régis Hutin

mercredi 9 septembre 2009

"L'âge de l'angoisse" a beaucoup d'avenir...
Éditeur : Basic Books
320 pages / 19 €

Résumé : Andrea Tone ne livre pas seulement une histoire exemplaire des tranquillisants. Elle ruine bien des clichés moraux et des facilités épistémologiques qui paralysent l'analyse historique rigoureuse de nos rapports si ambigus aux psychotropes. Un chef-d'oeuvre.
Pierre-Henri CASTEL

http://www.nonfiction.fr/article-2746-nonfiction.htm


Andrea Tone, qui enseigne l'histoire sociale de la médecine à l'université McGill, était bien connue pour son essai de 2001 sur la pilule contraceptive, Devices and Desires. Gageons que son dernier livre rencontrera le même succès. Il conte la tumultueuse histoire d'amour et de désamour de l'Amérique pour les tranquillisants, du tout premier, aujourd'hui bien oublié, le Miltown, jusqu'à la vague (funeste?) des benzodiazépines, et pour finir, à l'usage si problématique des anti-dépresseurs de dernière génération comme anxiolytiques.

Il gagne surtout à être mis en regard du travail de Christopher Lane sur la médicalisation des émotions, parce qu'il démontre que tout ce qu'on doit reprocher à Lane était parfaitement évitable, et qu'entre l'essai hypercritique, séduisant mais pour finir vain, et le travail minutieux de l'historien, surtout quand il a la chance extraordinaire de tomber sur une archive exceptionnelle, le public peut d'emblée percevoir la différence. Le grain des phénomènes sociaux est plus fin, les tensions qui les traversent plus dialectiques, plus paradoxales, la grande histoire pénètre la petite dans des détails inattendus. Nous sommes enfin délivrés des grands récits passe-partout dont se nourrit l'essayisme actuel en matière de santé mentale (le Triomphe Mercantile de l'Industrie Pharmaceutique comme infrastructure, la Haine de la Psychanalyse comme superstructure, l'Intellectuel Dénonciateur en Héros Moderne, etc.) qui ont découragé les études empiriques, ou pire encore, réduit les faits à des illustrations banales pour des théories préexistantes. Il n'est tout simplement pas vrai que si "ça a marché", c'est que "ça devait marcher". Andrea Tone nous met au contraire sous les yeux des pharmacologues assez peu fiers de leurs découvertes, et plutôt malhabiles à en tirer pour eux-mêmes profit, des industriels surpris de découvrir une clientèle aussi réceptive, et des gens ordinaires, aux soucis fort éloignés de la critique sociale, se transformer en menaces majeures pour les lobbies pharmaceutiques, bref, des surprises, des contre-pouvoirs, des moments de vraie science et même d'éthique et de haute responsabilité politique illuminant la montée progressive de la corruption douce des milieux médicaux, les surprenantes lacunes du droit, et l'aveuglement de tous devant des modifications si profondes de nos affects collectifs, qu'il faut des dizaines d'années de recul pour en saisir les contours.

Pourquoi en effet l'angoisse fait-elle problème? Pourquoi chaque époque, au moins depuis qu'on parle de Modernité, autrement dit depuis la fin du 17ème siècle, s'est-elle à un titre ou un autre vécue comme "l'âge de l'angoisse" (Auden en a frappé la formule en anglais et Andrea Tone le cite explicitement)? Parce que l'angoisse est à la fois une émotion pénible, et un sentiment dont nous ne cherchons pas tant que cela à nous sentir entièrement ni définitivement délivrés. Modalité affective exemplaire de la solitude de l'individu, c'est en même temps celle qu'il éprouve les plus grandes jouissances à surpasser; effet cruel de la vie morale qu'il mène sans l'avoir choisie. C'est aussi la preuve qu'il en a une, et qu'il n'est pas tout à fait abruti comme sujet par l'existence qu'on lui fait mener; porte ouverte sur le pire, jusqu'au suicide, c'est enfin l'aiguillon des grandes décisions et des ruptures. Bref, elle fait de l'affirmation de soi une condition douloureuse et de l'estime de soi une conquête chèrement acquise.

Si ce sont là des propriétés "conceptuelles" de l'angoisse, elles se distribuent ensuite, selon les époques et les milieux, dans des attitudes variées et souvent contradictoires. De façon trop cursive, malheureusement, Andrea Tone consacre ainsi un premier chapitre à une histoire de l'angoisse américaine. Il n'est pas difficile d’en retrouver l'origine dans les idéaux puritains, qui, jusque dans les années 1960, et sans doute encore au-delà, constituaient le socle des engagements personnels d'une partie considérable de la vaste classe moyenne et de l’élite. L’Amérique, c'est aussi le premier continent de la "neurasthénie" (le terme y fut forgé par Beard à la fin du 19ème siècle), cette pathologie protéiforme où il est si facile de "reconnaître" notre dépression, ou nos troubles anxieux, mais à laquelle on en comprend rien si on n'examine pas le rôle qu'elle pouvait jouer dans la vie morale et sociale des hommes d’avant le premier conflit mondial. D'entrée de jeu, Andrea Tone situe les drogues contre l'angoisse dans un contexte où ce qu'elles éclairent, ce sont d’abord les transformations des sentiments moraux. Elles ne puisent leur pouvoir, leur valeur marchande, et leur efficacité thérapeutique, que des réponses qu'elles offrent à des questions qui sont, de part en part, sociales et culturelles, politiquement mouvantes et moralement chargées. Car on ne soigne personne sinon de ce qui alimente une plainte collectivement admise comme légitime. Et l'on traite comme un poison tout ce qui altère des affects jugés, du moins jusqu’à un certain degré, indispensables à l’existence humaine normale. L'anglais des notices de médicaments reflète très tôt ces ambiguïtés. "Tension" n'est pas toujours "anxiety". "Tension" connote une valeur, et notamment virile, celle de l' "achiever", l'homme en route vers le succès, cette figure paradigmatique de la prospérité américaine. Ni trop, ni trop peu d’angoisse: voilà tout l'enjeu.

L'histoire moderne des anxiolytiques débute vers 1903 avec les barbituriques, et leur chef de file, le Véronal©. On mesure mal, aujourd'hui, à quel point ces substances, tenues de nos jours en si grande suspicion, bénéficiaient d'une aura d'efficacité et de sûreté. Ils remplaçaient en effet les dangereuses préparations sédatives au bromure de potassium, à quoi la pharmacopée destinée aux "malades des nerfs" s'était réduite pendant presque cinquante ans. Andrea Tone explique que le succès des barbituriques tenait notamment au fait qu'il était facile de les décliner en laboratoire en substances proches et cependant distinctes, ce qui permettait une brevetabilité fondée à l'époque, chez les Allemands, non sur la molécule, mais sur son mode de fabrication. Il n'a bien évidemment pas fallu attendre la jeunesse post-moderne dont les moralistes se lamentent pour que prolifèrent leurs usages récréatifs. "Goofballs" et autres cocktails épicés des années 1920 à 1950, dont on regrette qu'Andrea Tone ne livre pas toutes les recettes, feraient pâlir nos fêtes les plus débridées. Mais c’est la seconde guerre mondiale qui va voir exploser leur consommation, comme la drogue du soldat, employée autant pour soulager la douleur physique et les traumatismes des blessés que pour gérer l’angoisse des combattants. A la fin de la guerre, tout un marché illicite se développe, qui atteste des effets à long terme de cette intoxication collective. Or, la banalisation des barbituriques rencontra aussi, premier paradoxe, un allié inattendu : la psychanalyse. En effet, loin de contrevenir aux cures par la parole, les barbituriques (tels le penthotal, le fameux "sérum de vérité") furent utilisés pour la faciliter. Andrea Tone ne dit pas grand-chose de ce que fut alors la vogue incroyable de la "narco-analyse", psychanalyse rapide et efficace, car surmontant d’un coup le refoulement. Elle reste cependant un maillon essentiel dans la naissance d’un appétit de brièveté et d’efficacité thérapeutique, qui devait si rapidement faire basculer les demandes ordinaires des gens, de la cure freudienne avec un appoint chimique, à celle de la cure chimique avec complément psychologique.

Le méprobamate, principe actif du Miltown©, et qu’on trouve encore commercialisé par Wyeth sous le nom d’Equanil©, allait à cet égard marquer l’histoire et de la psychopharmacologie, et de la culture. Plus exactement, et c’est toute la force du livre d’Andrea Tone, grâce au Miltown©, nous comprenons pourquoi l’histoire de la culture et de la société individualiste devait à partir des années 1950 se trouver inéluctablement liée à celle de la psychopharmacologie.

Car, règle d’or de tous les anxiolytiques successivement commercialisés, et capitalisant sur la toxicité « finalement reconnue » de leurs prédécesseurs, le méprobamate se présentait d’abord comme absolument non toxique et non-addictif. On en frémit après coup… Mais à soi seul, cela ne pouvait suffire à son formidable succès. Il faut aussi tenir compte du contexte de la guerre froide commençante. La peur de l’apocalypse nucléaire, la menace soviétique, étaient en effet incorporées au quotidien des familles, aux exercices imposés aux écoliers, au point que la trousse de secours de la parfaite ménagère sous abri atomique se devait de contenir une centaines de comprimés de "tranks" ! Enfin, Andrea Tone note avec finesse que les "tranks" sont les premiers médicaments pour gens "normaux", car il est normal d’être angoissé, et que les gens "normaux" n’ont besoin, eux, que d’une aide "temporaire" . C’est là un formidable vecteur de diffusion, mais aussi, qu’on y prenne garde, le germe d’une future réaction potentielle violemment négative aux anxiolytiques. Car les gens "normaux", eux, ne veulent pas être des "drogués", ni dépendre en rien des médicaments, comme les "malades". D’ailleurs, ce n’est pas le psychiatre qui leur aura prescrit un anxiolytique, mais le généraliste, et comme un petit coup de pouce ("Mother’s little helpers", chanteront plus tard les Rolling Stones, sur un ton sinistre ) ; pas comme un vrai traitement pour une maladie mentale !

On voit là combien les thèses bien grossières qui font des masses innocentes les victimes de l’avidité manipulatrice des marchands de médicaments sont incapables de tenir compte de ce que Gerald Klerman a appelé, dans les année 1970, le "calvinisme pharmacologique" des Américains. On doit pouvoir se passer de psychotropes, quand on est "normal", et, en même temps, ceux qui en ont vraiment besoin, même ponctuellement, doivent pouvoir en consommer et en réguler eux-mêmes l’usage, en mettant leur liberté et leur autonomie à l’abri des pièges addictifs des molécules. Tout cela n’est pas aisé à comprendre pour un lecteur français. Nous imaginons les Américains gavés d’anxiolytiques, forgeant des pathologies imaginaires, comme la phobie sociale, le trouble panique, le SAD (Social Anxiety Disorder) pour pathologiser à des fins mercantiles des émotions innocentes. Toute l’argumentation de Lane repose là-dessus. Mais il n’en est rien : c’est nous, Français, qui étonnons les Américains. Nous consommons, à leurs yeux, des quantités effarantes de Xanax© (Alprazolam), la drogue même qui dans les années 1980 a remplacé le Valium© avant de déclencher une vague de méfiance et de rejet sans précédent. Ils s’étonnent même que cela ne nous pose pas de problème majeur de santé publique . C’est que nos formes d’appropriation collective des émotions et notamment de l’angoisse, la façon sans doute dont nous privatisons certaines difficultés psychologiques, est entièrement étrangère à la problématique post-puritaine du "calvinisme pharmacologique" américain. C’est d’ailleurs une question formidable, et fort empirique, à poser aux sociologues de la santé mentale : comment consommons-nous, en France, les psychotropes ? Quel genre de "droit" nous reconnaissons-nous d’en prendre, et quel "devoir" de les arrêter ? La réception du livre de Lane en France n’en semble que plus étrange : un peu comme si le phénomène culturel si particulier dont il est l’émanation exemplaire, la méfiance traditionnelle et typiquement américaine pour tout ce qui empêche le Self de prendre le contrôle de ses propres émotions, pouvait se transposer tel quel en France. Il aura suffi, et la chose est là encore exemplaire, de faire comme si Lane défendait la psychanalyse pour que le malentendu soit consommé, et que la critique sociale à la française "se reconnaisse" dans des thèses qui n’ont que fort de peu de prémisses morales et anthropologiques communes. Décidément, la globalisation des marchés et des mœurs ne rend que plus sensibles les appropriations locales et les distorsions multiples de tendances universelles. On devrait parler non de globalisation, mais de « glocalisation ». L’Amérique de Ralph Nader et des grands combats des consommateurs contre les lobbies, la culture individualiste de l’empowerment et des associations de patients, la virulence du combat féministe pour la santé des femmes (première cible des anxiolytiques de la seconde génération, les benzodiazépines), tout cela donne une couleur absolument spécifique au rapport puritain et post-puritain à l’angoisse. Nous ne savons pas si bien, en France, ce qui en serait la contrepartie, encore que, par exemple, les rapports entre patients et généralistes soit depuis longtemps un des lieux bien connus où se négocient nos spécificités à cet égard… De fait, Andrea Tone cite avec précision ces documents fascinants de Roche, où prescrire des tranquillisants aide à lutter contre la peur du chômage, dans un ordre économique qu’il n’est pas question de contester . Mais elle montre également comment émergea aux Etats-Unis l’idée d’un besoin "collectif" de médicaments psychotropes, besoin qui serait, de façon anti-individualiste, l’objet d’un souci public.

Un des charmes de ce livre, c’est ensuite comment il double l’histoire scientifique et aussi capitalistique des anxiolytiques d’une histoire culturelle de leurs appropriations populaires. Rien ne dément mieux la thèse de la manipulation unilatérale des foules par les forces démoniaques du marketing scientifique, que cette phrase de Henry Hoyt, le petit chanceux qui osa se risquer dans la vente industrielle du méprobamate, et qui lança sans s’en douter le premier block-buster de toute l’industrie pharmaceutique moderne, le Miltown© : "Laissez-moi vous dire : quand on a affaire à absolument tout le monde, on a affaire à la Grande Inconnue" . Mais c’est qu’il dut faire face à des enquêtes serrées, pour expliquer pourquoi, sans leur avoir jamais fourni d’échantillons, les vedettes de la radio et de la télévision, le Tout-Hollywood, les pharmaciens débordés sous l’afflux des commandes comme les patrons de bars chic vantaient sans relâche son produit-miracle. Autre époque : on lira avec curiosité l’ahurissant mélange que se faisait prescrire Kennedy à la Maison Blanche . Bref : nous ne sommes sûrement pas passifs dans nos relations aux drogues, et seul un regard vraiment anthropologique, qui décèle les enjeux spociaux généraux, peut rendre compte de ce que nous vouons au succès ou à l’échec, et pourquoi, en fait de médicaments.

Andrea Tone poursuit l’aventure du Miltown© avec celle du Librium©, premier de la série des benzodiazépines, censées surmonter les effets secondaires redoutables du méprobamate. A Frank Berger succède sous son amical scalpel Leo Sternbach. Que voilà des carrières scientifiques joliment racontées ! Ces savants chassés d’Europe vous savez pourquoi, emportés pour finir dans un vertigineux tourbillon de dollars, artistes du tube à essai bénis de coups de chances incroyables, peu intéressés au demeurant par l’argent et plutôt des artisans que des universitaires, renvoient de ce que pouvait être la vie d’un chercheur de laboratoire privé dans les années 1950 et 1960 une séduisante image.

Mais c’est encore une fois l’aspect véritablement social des benzodiazépines qui retiendra le lecteur : ce furent les premiers médicaments explicitement conçus avec pour cible non les besoins sociaux traduits en termes de souffrances émotionnelles, mais le cerveau. C’est grâce à ces drogues anti-angoisse modernes, montre Andrea Tone, que le vécu subjectif de la "névrose d’angoisse", ce monolithe sans faille hérité de Freud et de la psychanalyse, fut tout simplement dépecé en autant de sous-entités morbides qu’il y avait de psychotropes sur le marché pour les "guérir" . Le trouble panique, l’anxiété généralisée, les troubles de l’anxiété sociale, jusqu’aux phobies et aux obsessions, dans le sillage du développement des neurosciences, se mirent à apparaître comme des dysfonctionnements spécifiques des neuromédiateurs, et donc comme autant de cibles potentielles pour des molécules distinctes, correspondant à un marché segmenté pour autant de nouveaux psychotropes. Finie, l’ère du simple "tranquillisant". Car désormais, nous avons de l’angoisse à nous faire pour l’angoisse que nous éprouvons : de quel type est-elle au juste ? Cela, seuls pourront le dire la génétique, la psychométrie, les taxinomies tentaculaires des DSM successifs, les techniques cognitives et comportementales applicables ou pas, en somme, seuls les neurobiologistes ou les statisticiens. Cette biologisation de l’angoisse a donné lieu, très en amont, à la situation qui rend si perplexes les spécialistes en santé mentale : on critique de plus en plus les benzodiazépines, ou les anti-dépresseurs de dernières génération (comme le Prozac©) qui ont pris ensuite leur relève, mais on en consomme de plus en plus ; on s’alarme de cette consommation, mais on s’alarme au moins autant du sous-diagnostic des troubles anxieux "véritables" ; et l’on tourne en rond dans une surenchère qui peut en quelques semaines à peine diaboliser un produit jusque là porté aux nues, ou susciter l’espoir fou d’une panacée d’un jour, qu’il faudra ensuite et bien péniblement recycler d’indication en indication pour amortir ses coûts phénoménaux de production. Aux Etats-Unis, nous apprend Andrea Tone, le triomphe puis la chute des benzodiazépines ont eu pourtant d’autres déterminants sociaux et culturels que la pression des grands laboratoires. Car les benzodiazépines, c’est la drogue de la femme angoissée qui se cache ; c’est le médicament de l’angoisse honteuse. Le Valium©, premier médicament à rapporter plus de 100 millions de dollars, c’est le poison secret des femmes qui ne peuvent plus faire face. La qualité sociale de l’affect anxieux s’est transformée. Il n’a plus les mêmes effets, il ne sert plus à affecter autrui comme avant. Les émotions changent avec les sociétés, non pas tellement dans leur contour biologique, mais dans leurs fonctions pour tisser et valider des relations impératives entre les êtres humains, des relations qui les "touchent" et qui les « meuvent » en un sens rien moins que métaphorique. Andrea Tone montre ainsi le poids énorme de la confession de Betty Ford, l’épouse du président Ford, ou le succès de l’autobiographie de Barbara Gordon, dans la grande crise de conscience du "calvinisme pharmacologique" américain, justement dans les années 1980, qui est aussi, nouveau paradoxe, celle du DSM3 et de la nouvelle clinique pro-biologique des maladies mentales. A cause notamment des drames du syndrome de sevrage, le brouillage des frontières morales entre drogues (drugs) illicites et médicaments (drugs aussi, en anglais !) prescrits par des médecins, prit alors la forme d’une mise en cause des bases mêmes du sentiment d’identité, de contrôle de soi, et de dignité de l’individu qui sont au cœur de l’esprit américain. Le politique s’en saisit, et tout un arsenal de lois furent votées.

Comment, et au prix de quels détours et de quels à-coups dans l’appréciation collective de l’angoisse et de son traitement, Andrea Tone rejoint à la fin la situation contemporaine, le lecteur s’en émerveillera. Il se demandera aussi comment ces grands faits universels, liés au capitalisme mondialisé, à l’uniformisation des émotions et des représentations, s’insèrent dans des contextes nationaux précis — et en particulier, dans le contexte français. Il restera peut-être aussi un peu sur sa faim, quand il cherchera à comprendre au juste pourquoi l’angoisse américaine a évolué dans les années 1960, puis 1980 . Il n’en reste pas moins que l’ampleur de la fresque, l’harmonie des détails avec l’ensemble, la sélection des sources et le comparatisme permanent font de The Age of Anxiety un de ces bons livres de sciences sociales, dont on aimerait ne pas attendre vingt ans la traduction.