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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

lundi 3 mai 2021

Maladie mentale: Entre le marteau de la stigmatisation et l’enclume de l’indifférence

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Par Mohamed Saâd Bouyafri   26 avril, 2021

MAROC

Rabat – Le débat autour des maladies mentales revient de façon sporadique dans l’actualité du Maroc, souvent au gré de faits divers sanglants. Sans déroger à la règle, c’est une nouvelle fois dans des circonstances tragiques que le sujet de la prise en charge des personnes en proie à cette souffrance refait surface.

Le 17 avril courant, la province de Taounate s’est retrouvée dans un état d’effarement suite à un triple meurtre attribué à un individu souffrant de troubles mentaux. Le mis en cause aurait agressé plusieurs personnes à l’aide d’un bâton, à Douar Rass El Koudia, Ain Beida, Caïdat Ain Aicha, entraînant la mort d’une femme âgée et de deux enfants de 7 et 9 ans.

Dans le dessein de lever le voile une fois pour toute sur une éventuelle corrélation entre les troubles psychologiques et les tendances criminelles, la MAP a contacté le psychiatre et psychanalyste, Khalid El Alj, qui a souhaité d’emblée dissiper toute ambiguïté en clarifiant que les homicides, dans leur majorité, ne sont pas dus aux malades mentaux.

Près de 85 % des auteurs d’homicides ne souffrent pas de maladies mentales, a précisé M. El Alj, notant qu'”ils ne sont pas fous au sens commun du terme et l’intervention psychologique et psychiatrique, si elle doit avoir lieu, ne vient qu’après la réponse sociale et judiciaire”.

Pour étayer ses propos, M. El Alj a relevé que selon des études sérieuses, les homicides ne concerneraient qu’une catégorie de maladies mentales qualifiées de “graves” qui ne serait responsable que de 0,16 cas d’homicides pour 100.000 habitants par an.

“Il s’agit beaucoup plus de situations critiques de souffrance vécues par des individus présentant des perturbations structurelles de la personnalité et dont la dangerosité est sensiblement accrue par la prise de stupéfiants”, a-t-il expliqué.

Toutefois, “la représentation collective de la folie criminelle stigmatise la souffrance humaine et la surmédiatisation y contribue”, a déploré M. El Alj.

En effet, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), la stigmatisation est l’obstacle le plus important à surmonter dans la communauté pour la prise en charge des maladies mentales.

A cet égard, l’OMS insiste sur l’importance de mener des campagnes de santé publique visant à améliorer la prise de conscience générale des dangers de la stigmatisation des maladies psychiques afin d’éviter que les personnes en proie à ces troubles ne finissent par s’approprier les stéréotypes attribués à leur maladie.


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Affaire Sarah Halimi : « La question du discernement n’est pas une question clinique, mais philosophique et morale »

Propos recueillis par   Publié le 2 mai 2021

La confirmation de la Cour de cassation de l’irresponsabilité pénale du meurtrier de cette femme a relancé la controverse sur cette notion, dont la sociologue Caroline Protais retrace l’évolution dans un entretien au « Monde ».

Rassemblement pour demander le jugement de Kobili Traoré, le meurtrier de Sarah Halimi, déclaré irresponsable pénalement, le 25 avril à Paris.

La sociologue Caroline Protais est chercheuse associée au Cermes3 (CNRS-Inserm-EHESS) et autrice de Sous l’emprise de la folie ? L’expertise judiciaire face à la maladie mentale (1950-2009) (EHESS, 2016). Si les experts ont longtemps considéré l’irresponsabilité pénale comme automatique en cas de « démence », rappelle la spécialiste des liens entre la justice et le monde de la santé mentale, les non-lieux pour irresponsabilité pénale sont de plus en plus rares. Après la décision de la Cour de cassation dans l’affaire Sarah Halimi, qui a confirmé, mercredi 14 avril, que le discernement du meurtrier était « aboli » au moment des faits, elle a répondu aux questions du Monde.

Notre système immunitaire face à une année de confinement


 


Repéré par Nina Pareja — 

Ce que la théorie de l'hypothèse hygiéniste peut nous apprendre.

Depuis mars 2020, vous n’avez pas été malade, même pas votre petit rhume habituel au moment du changement de saison. C’est un des rares effets bénéfiques de cette pandémie, la propagation des autres maladies a reculé avec le confinement, le port du masque et le lavage des mains plus fréquent.

Pourtant, ce manque d’exposition aux autres infections pourrait devenir dangereux puisque notre système immunitaire apprend à réagir en fonction des attaques qu’il reçoit. Il est possible, peut-on lire dans le magazine Wired, que l’un des effets à long terme de la pandémie soit une augmentation des allergies et des maladies comme l'eczéma et l’asthme, en particulier chez les enfants qui ont grandi pendant le Covid.

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Romain Dupuy : « On veut m’interner à vie, je subis une injustice »


Par Nicolas Bastuck  Publié le 

Interné depuis 16 ans dans une unité pour malades difficiles, le meurtrier des infirmières de Pau réclamait son transfert dans un service ordinaire.

S

on nom est réapparu dans la presse après la décision, rendue définitive par la Cour de cassation dans un arrêt du 14 avril, de déclarer l'assassin de Sarah Halimi pénalement irresponsable. Dans la nuit du 17 au 18 décembre 2004, après avoir fumé une quinzaine de joints à son domicile, Romain Dupuy, alors âgé de 20 ans, se rend à l'hôpital de Pau où il a déjà été soigné à trois reprises pour schizophrénie, armé d'un couteau de cuisine et de tournevis cruciformes. Il tue sans les connaître une infirmière et une aide-soignante de 40 et 48 ans, poignardant l'une, décapitant l'autre ; quelques semaines plus tard, il tire sur les policiers venus l'interpeller à son domicile.

Psychotique et pris d'une « bouffée délirante » lors de son passage à l'acte, Dupuy a été déclaré pénalement irresponsable par un arrêt définitif de la cour d'appel de Pau rendu en 2007 ; les experts psychiatres qui l'avaient examiné ont estimé que son discernement était « aboli » au moment des faits. Depuis seize ans, Romain Dupuy fait l'objet d'une mesure d'hospitalisation sous contrainte, prise au nom de la « sûreté des personnes » et des risques d'« atteinte à l'ordre public ». Il est interné à l'unité pour malades difficiles (UMD) de Cadillac, qu'il n'a jamais quittée. « Un régime quasi carcéral », soulignent ses avocats, Mes Hélène Lecat et Serge Portelli. « Enfermé dans une chambre au mobilier scellé, privé de toute sortie et de toute activité à l'extérieur, surveillé constamment, M. Dupuy subit depuis de très longues années un régime très contraignant qui n'est plus en rapport avec son état de santé, lequel s'est sensiblement amélioré et stabilisé », ont-ils plaidé le 27 avril devant le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux(Gironde).

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Le parti pris militant de « Promising Young Woman »

Par   Publié le 26 avril 2021

Avec ce premier long-métrage, lauréat de l’Oscar du meilleur scénario original, la réalisatrice Emerald Fennell s’emploie à illustrer par la fiction tout un panel de notions ressorties dans le sillage de #metoo, comme le consentement, le harcèlement, la culture du viol ou la masculinité toxique.

Carey Mulligan incarnant Cassie dans « Promising Young Woman », film américain d’Emerald Fennell.

Premier long-métrage de la comédienne et scénariste d’origine britannique Emerald Fennell, Promising Young Woman, très remarqué au Festival de Sundance en 2020, mais dont la sortie a été bousculée par la crise sanitaire, se présente comme une satire féministe d’une société américaine bon teint où les relations entre hommes et femmes sont encore déterminées par des schémas de violence et de domination.

Au seuil de la trentaine, Cassie (Carey Mulligan), démissionnaire de l’école de médecine, vit toujours chez ses parents et stagne dans un petit boulot de serveuse au café du coin, sans véritable perspective d’avenir. Le week-end, elle sort seule en club et feint l’ivresse, hameçonnant chaque fois un homme différent pour qu’il la ramène chez lui. Et cela ne manque jamais : dès lors que la jeune femme se retrouve à leur merci, aucun d’eux, même les plus convenables, ne se prive de franchir la ligne rouge, tirant profit de sa vulnérabilité pour obtenir une gratification sexuelle. C’est à ce moment-là que, chaque semaine, le piège de Cassie se referme pour administrer à chacun une bonne leçon et la frousse de sa vie.

Le remboursement des psychothérapies plus compliqué que prévu

03.05.2021

LUXEMBOURG

Les négociations entre l'association des psychothérapeutes (Fapsylux) et la CNS concernant le remboursement des thérapies sont au point mort. 

Retour à la case 2018 pour ces discussions qui, à l'époque déjà, n'avaient abouti sur aucun accord. La situation telle qu'elle a été décrite en 2021, n'a pas meilleure allure: les discussions sont suspendues et les points déjà acquis sont finalement remis en question. Pour les psychothérapeutes, la balle est dans le camp de la CNS.

Delphine Prüm, présidente de Fapsylux, attend maintenant que la CNS fasse un geste: "ce n'est pas à nous de faire un pas vers eux, nous leur avons clairement présenté nos positions de manière officielle et nous attendons maintenant une réponse de leur part".

Plusieurs points primordiaux ont été définis par Fapsylux afin de proposer aux patients une prise en charge de qualité. Grâce aux trois séances remboursées, l'accès gratuit à la psychothérapie doit être proposé selon eux. Tous les citoyens qui en ont besoin doivent pouvoir se faire rembourser leurs séances de psychothérapie sans exclure une partie de la société, et chaque thérapeute autorisé au Luxembourg doit pouvoir être remboursé.

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dimanche 2 mai 2021

Luce Irigaray : “Le désir naît d’une différence plus que d’une similarité”

Luce Irigaray, propos recueillis par Octave Larmagnac-Matheron publié le 

                                            Luce Irigaray © Alberto Ramella / rosebud2

Elle est l’une des grandes figures du féminisme et une penseuse influente pour toute une génération. Moins connue en France qu’à l’étranger, où elle a fait carrière, la philosophe Luce Irigaray n’a cessé de réfléchir à la coexistence entre hommes et femmes. Elle retrace une vie consacrée à penser l’agencement de nos différences.

Vous n’avez peut-être jamais entendu son nom. Luce Irigaray, 88 ans, a pourtant été – entre bien d’autres choses – l’une des féministes les plus marquantes et les plus singulières des mouvements de libération des années 1970, avant d’être mise au ban, marginalisée, exclue de l’espace intellectuel francophone. En cause : la publication de sa thèse, Speculum, une critique radicale du traitement du féminin dans la psychanalyse et une déconstruction des « fondements mêmes de notre culture ». Cette dernière se serait édifiée autour de l’idée d’un « sujet neutre ». Fiction, réplique Luce Irigaray : la réalité du vivant, c’est la différence sexuée. Le deux plutôt que l’un. L’homme et la femme n’ont pas la même subjectivité. Le méconnaître revient à reconduire notre volonté de dominer la nature. Le scandale, immédiat, est à la hauteur du succès de librairie : Irigaray est chassée de l’université de Vincennes et de l’École freudienne de Paris, et bientôt privée de publication. Déjà exilée de sa Belgique natale, et de ses origines minières, pour venir étudier la psychanalyse à Paris, la jeune femme est rejetée intellectuellement de son pays d’accueil. Sa pensée trouve alors refuge à l’étranger : en Italie, notamment, où elle collabore avec le parti communiste pendant des années, et aux États-Unis, où elle devient une référence fondamentale pour les études de genre et la pensée féministe. Elle se rend souvent dans ce pays, avant d’arrêter de prendre l’avion. Une conviction écologique forte, par « respect pour la nature », qui est au cœur de son approche différentialiste du genre et qui l’a « toujours accueillie, jamais exclue », lorsque les portes se fermaient. Discrète sur sa vie, réticente à revenir sur les polémiques qui l’ont marquée, elle s’efforce inlassablement d’« apporter des éléments positifs pour le présent et le futur » plutôt que de ressasser le négatif. Tour d’horizon d’une pensée, que nous avons explorée pendant plusieurs semaines à coups d’échanges téléphoniques, de conversations épistolaires et de rencontres face à face.

Montaigne, la cérébrologie et le passeport bipolaire. Episode 2

En guise d’illustration de la mutation cérébrologique du champ de la psychiatrie et de la santé mentale, l'institut Montaigne et le site de FondaMental vantent une «radicalité» dans les décisions politiques à prendre. Radicalité fondée sur l'ubérisation de la psychiatrie.

Le 29 avril 2021, la directrice déléguée de la santé de l'institut Montaigne s'inquiète dans une tribune parue dans Le Monde: de "l’absence d’une certaine forme de radicalité dans les décisions prises, la situation de crise profonde dans laquelle se trouve la psychiatrie"

Depuis 2007, la cérébrologie a sa fondation soutenue et financée par ce même Institut Montaigne. FondaMental s’est progressivement infiltrée dans l’appareil d’État et sur les plateaux télés jusqu’à devenir un acteur incontournable de la santé mentale. Le délégué à la psychiatrie nommé par le pouvoir macroniste en est directement issu.

Destruction explicite de la psychiatrie au profit de la cérébrologie, du big data et des start-up

Pour illustrer ce que nous avons avancé dans le premier épisode, rien de plus facile car tout est dit, sans état d'âme, sur le site de FondaMental qui développe "le passeport bipolaire". Ce passeport bipolaire a fait l’objet d’un arrêté officiel publié au JO le 26 août 2019. FondaMental en fait la promotion sur son site. Sa directrice, Marion Leboyer, y dit sans ambage :

« Cette expérimentation concrétise les transformations souhaitées par les cliniciens et les patients vers une prise en charge globale (psychiatrique et somatique) et spécialisée, au sein d’un modèle économique incitant à la qualité et à l’efficience. Elle préfigure des évolutions qui pourraient s’appliquer aux autres maladies psychiatriques comme la dépression ou la schizophrénie. »

Le texte publié sur le site de FondaMental est organisé en trois chapitres : « l’innovation organisationnelle », « l’innovation technologique » et « l’innovation de tarification ».

Rappelons, comme l’a montré Rachel Knaebel, que l’institut Montaigne et de nombreuses entreprises du CAC 40 soutiennent FondaMental. L'institut a d'ailleurs co-édité le livre "Psychiatrie état d'urgence". Au sein de la société française, l’institut Montaigne milite pour les réformes néolibérales des services publics. Il se réclame de « l’innovation »« l’égalité » et « l’efficacité ». Cette efficacité se présente comme altruiste et entend réduire les dépenses publiques et les coûts sociaux (ici les arrêts de travail).

De la première à la dernière ligne du site, l’enjeu est clairement énoncé. Sans complexe.

« En rupture avec le fonctionnement actuel de la psychiatrie française, Passport BP propose un parcours de soins spécialisé, spécifique aux personnes avec troubles bipolaires, en aval de leur passage dans un service de psychiatrie adultes (…) Passport BP propose d’expérimenter un nouveau mode de financement avec une bascule progressive d'un financement par la dotation annuelle de fonctionnement (DAF), budget global inégalitaire, inefficace et peu propice au déploiement de nouvelles organisations, à un financement forfaitaire au parcours, afin de dégager de nouvelles ressources pour la psychiatrie française tout en réduisant la dépense pour la collectivité par la limitation des hospitalisations et arrêts de travail. »

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Assises de la psychiatrie couchée. Episode 1: la consécration de la cérébrologie

Décidées par le gouvernement, « les Assises de la psychiatrie » sont l'un des éléments de la stratégie d'étouffement d'une psychiatrie soignante. Ces Assises de la psychiatrie couchée entérineront sa disparition au profit de ce que nous décrirons sous le terme de cérébrologie.

De la psychiatrie à la cérébrologie

Dans le chapitre 2 de « La Révolte de la psychiatrie »nous évoquions l’assomption d’une neuropsychiatrie de deuxième génération alliant antipsychiatrie gestionnaire, neuropolitique et santé mentale néolibérale. La reprise de ce terme ancien de « neuropsychiatrie » correspondait aux discours politiques qui proclamaient que « au vu des progrès des neurosciences et de l’imagerie cérébrale, la partition entre neurologie et psychiatrie n’est plus de mise à l’heure actuelle ».

Mais reprendre le même mot – neuropsychiatrie- entretient l’idée du retour d’une forme ancienne, déjà connue. Or, la situation actuelle impose de clarifier, dans sa nomination même, la nouvelle discipline qui prend corps.

Penchons-nous sur le terme même de psychiatrie : « psych-iatros ».  « Le iatros », celui qui soigne ; la « psuchê », l’âme, la psyché. La racine grecque de iatros (iaomaï : soigner) suppose l’activité de soigner.

Or, depuis des années, nous constatons que la psyché et les soins s’effacent comme organisateurs structurants de la psychiatrie.

Remarquons qu’il n’y a que trois domaines de la médecine qui portent dans leur nom même cette activité de soigner : gériatrie, pédiatrie, psychiatrie. Les soins de la vieillesse côtoient ceux de l’enfance et de l’âme. Si nous ne comptons pas « la médecine générale », les autres spécialités sont constituées dans leur nomination du « logos », c’est à dire des lois et des discours rapportés à un objet. L’objet est ici tel ou tel organe comme cela apparaît dans cardiologie, neurologie, ophtalmologie, diabétologie, gynécologie etc.

Si nous prenons au sérieux cette nomination qui distingue le logos (pour les organes) du iatros articulé à l’enfance, à la vieillesse et à la psyché, quel est l’organisateur imaginaire reliant ces trois éléments ?

Si nous partageons avec les autres espèces de nombreux organes, des physiologies et des anatomies proches, l’analogie fonctionne-t-elle quand il s’agit de l’enfance, de la vieillesse ou encore de l’âme ?

L’activité de soigner sous tendue par le iatros induit une logique de l’indétermination qui tout en reconnaissant les lois de la rationalité scientifique ne les considère pas comme suffisantes. La trace et l’ampleur des constructions anthropologiques et sociales insistent aux côtés de ces trois notions. Nos enfances, nos âmes et nos vieillesses s’inscrivent dans le monde et ne se contentent pas d’obéir à des lois. Elles ont une part d’ineffable qui échappent à ce que Castoriadis nomme la logique ensembliste identitaire. Quand l’enfance, la psyché et la vieillesse sont frappées par la maladie, elles ne mobilisent pas que des lois, elles s’inscrivent dans des rapports complémentaires polydimensionnels, anthropologiques, existentiels, environnementaux, politiques. Elles sont instituées sur un fond imaginaire de la société qui se résume pas à une rationalité, qu’elle soit scientifique, économique ou autre.

La marque de ces trois spécialités fondées sur le iatros, n’est-elle pas la reconnaissance de processus constitutifs de notre humanité même qui ne se limiterait pas à une relation entre un objet, des discours et des lois ?

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samedi 1 mai 2021

Assises de la psychiatrie couchée. Episode 1: la consécration de la cérébrologie

Décidées par le gouvernement, « les Assises de la psychiatrie" sont l'un des éléments de la stratégie d'étouffement d'une psychiatrie soignante. Ces Assises de la psychiatrie couchée entérinerons sa disparition au profit de ce que nous décrirons sous le terme de cérébrologie.

De la psychiatrie à la cérébrologie

Dans le chapitre 2 de « La Révolte de la psychiatrie »nous évoquions l’assomption d’une neuropsychiatrie de deuxième génération alliant antipsychiatrie gestionnaire, neuropolitique et santé mentale néolibérale. La reprise de ce terme ancien de « neuropsychiatrie » correspondait aux discours politiques qui proclamaient que « au vu des progrès des neurosciences et de l’imagerie cérébrale, la partition entre neurologie et psychiatrie n’est plus de mise à l’heure actuelle ».

Mais reprendre le même mot – neuropsychiatrie- entretient l’idée du retour d’une forme ancienne, déjà connue. Or, la situation actuelle impose de clarifier, dans sa nomination même, la nouvelle discipline qui prend corps.

Penchons-nous sur le terme même de psychiatrie : « psych-iatros ».  « Le iatros », celui qui soigne ; la « psuchê », l’âme, la psyché. La racine grecque de iatros (iaomaï : soigner) suppose l’activité de soigner.

Or, depuis des années, nous constatons que la psyché et les soins s’effacent comme organisateurs structurants de la psychiatrie.

Remarquons qu’il n’y a que trois domaines de la médecine qui portent dans leur nom même cette activité de soigner : gériatrie, pédiatrie, psychiatrie. Les soins de la vieillesse côtoient ceux de l’enfance et de l’âme. Si nous ne comptons pas « la médecine générale », les autres spécialités sont constituées dans leur nomination du « logos », c’est à dire des lois et des discours rapporté à un objet. L’objet est ici tel ou tel organe comme cela apparaît dans cardiologie, neurologie, ophtalmologie, diabétologie, gynécologie etc.

Si nous prenons au sérieux cette nomination qui distingue le logos (pour les organes) du iatros articulé à l’enfance, à la vieillesse et à la psyché, quel est l’organisateur imaginaire reliant ces trois éléments ?

Si nous partageons avec les autres espèces de nombreux organes, des physiologies et des anatomies proches, l’analogie fonctionne-t-elle quand il s’agit de l’enfance, de la vieillesse ou encore de l’âme ?

L’activité de soigner sous tendue par le iatros induit une logique de l’indétermination qui tout en reconnaissant les lois de la rationalité scientifique ne les considèrent pas comme suffisantes. La trace et l’ampleur des constructions anthropologiques et sociales insistent aux côtés de ces trois notions. Nos enfances, nos âmes et nos vieillesses s’inscrivent dans le monde et ne se contentent pas d’obéir à des lois. Elles ont une part d’ineffable qui échappent à ce que Castoriadis nomme la logique ensembliste identitaire. Quand l’enfance, la psyché et la vieillesse sont frappées par la maladie, elles ne mobilisent pas que des lois, elles s’inscrivent dans des rapports complémentaires polydimensionnels, anthropologiques, existentiels, environnementaux, politiques. Elles sont instituées sur un fond imaginaire de la société qui se résume pas à une rationalité, qu’elle soit scientifique, économique ou autre.

La marque de ces trois spécialités fondées sur le iatros, n’est-elle pas la reconnaissance de processus constitutifs de notre humanité même qui ne se limiterait pas à une relation entre un objet, des discours et des lois ?

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Affaire Sarah Halimi : « Il faut réformer le régime de l’irresponsabilité pénale, mais pas n’importe comment »

Publié le 1er mai 2021

TRIBUNE

Auteur de l’expertise initiale du meurtrier de la retraitée, et seul à avoir conclu à l’altération et non à l’abolition de son discernement, le psychiatre Daniel Zagury estime, dans une tribune au « Monde », que l’arrêt de la Cour de cassation peut permettre de faire avancer le droit sur l’irresponsabilité des sujets, qui, pour l’instant, repose sur des facteurs très aléatoires.

[Psychiatre honoraire des hôpitaux, Daniel Zagury est l’auteur du premier rapport d’expertise établi en septembre 2017 sur la personnalité de Kobili Traoré, meurtrier de Sarah Halimi, défenestrée le 4 avril 2017. Il est le seul expert à avoir conclu à l’altération et non à l’abolition de son discernement]

Tribune. L’affaire Sarah Halimi n’a pas été un fait divers, mais un véritable séisme. Mon intention n’est pas de me justifier, ou de répondre aux nombreuses interventions médiatiques de mes collègues à propos des expertises psychiatriques de l’auteur des faits. Je dirai simplement que les contradictions entre experts ne concernent pas les dimensions proprement médicale et scientifique, puisqu’il y a unanimité sur le diagnostic de « bouffée délirante aiguë ». Le débat porte sur les domaines médico-légal et juridique.

Quelles conséquences tirer de ce diagnostic ? Au demeurant, le rapport entre les points de vue est beaucoup plus partagé qu’il n’a été dit (sept experts et une seule conclusion d’altération). J’ai en effet conclu à l’altération du discernement. Devant l’évidence, le deuxième collège d’experts a reconnu, lors de l’audience publique de la chambre de l’instruction, que le diagnostic de schizophrénie sur lequel reposait son raisonnement était erroné. Dont acte pour son honnêteté.

Irresponsabilité pénale : faut-il modifier la loi ?

Paris le samedi 1er mai 2021 - L’arrêt rendu par la Cour de cassation dans l’affaire Sarah Halimi a provoqué une véritable onde de choc politique mais aussi judiciaire. Faut-il réformer la politique en matière d’irresponsabilité pénale. Ce serait un euphémisme de dire que la discussion autour de cette question fondamentale du droit pénal ne s’est pas déroulée dans des conditions apaisées et raisonnées.

On peut tout d’abord souligner que le débat a mis en lumière une certaine méconnaissance globale du fonctionnement de l’institution judiciaire. Ainsi, la Cour de cassation, juge du droit, pouvait difficilement revenir sur une décision qui relevait de l’interprétation souveraine des juges qui composent la Chambre d’Instruction. L’arrêt rendu n’a pas délivré de « permis de tuer sous emprise du cannabis » pas plus qu’il n’a légitimé l’horrible meurtre antisémite commis à l’encontre de Sarah Halimi.

Mais tout débat sur la question de l’irresponsabilité pénale est-il pour autant interdit ? Simplifiant à l’extrême, l’opposition (parfois de circonstance) accuse le gouvernement de vouloir désormais « juger les fous » revenant ainsi sur un principe inscrit dans notre droit pénal depuis deux siècles. 

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Psychiatrie et sécurité : non aux amalgames !

29 avril 2021

 

Lettre de la Présidente


Les récents événements et déclarations sur le sujet de l’irresponsabilité pénale nous touchent ainsi que nos proches. Nous nous associons bien sûr à l’immense douleur des familles concernées par la disparition d’un des leurs. Mais nous ne pouvons pas accepter l’amalgame entre dangerosité et troubles psychiques qui vient renforcer la stigmatisation dont sont victimes les personnes vivants avec ces troubles. Des événements similaires ont déjà eu lieu par le passé ; leur utilisation médiatique nous appelle à la plus grande prudence. 

Pour le moment, face à l’émotion suscitée par l’irresponsabilité pénale retenue dans l’affaire Sarah Halimi, les médias ne sont pas le bon endroit pour faire entendre notre voix. Nous devons aller à la rencontre des pouvoirs publics pour éviter que l’émotion suscitée par cette actualité ne les amène à prendre des décisions inacceptables. 

C’est pourquoi nous travaillons activement avec les équipes de la Présidence de la République afin que le projet de loi à venir ne constitue pas un retour en arrière historique et inacceptable. Nous avons rencontré la semaine dernière la Conseillère santé handicap du Président de la République et approchons en ce moment le ministère de la Justice.

« Juger les fous » : le droit et la raison face à la pression populaire

 Stéphane VERNAY  Publié le 

Quatre ans après la mort de Sarah Halimi, tuée dans des circonstances terribles en avril 2017, à Paris la Cour de cassation confirme que le responsable ne pourra pas comparaître devant une cour d’assises. Cette décision, incompréhensible pour beaucoup, suscite une émotion légitime. Elle s’inscrit pourtant dans le strict respect du droit français, qui se refuse à « juger les fous ». Un principe fondamental, à préserver.

Émotion. Incompréhension. Colère. Comment la Cour de cassation a-t-elle pu reconnaître à la fois le caractère antisémite du meurtre de Sarah Halimi, 65 ans, sauvagement agressée à son domicile le 4 avril 2017 par un jeune voisin, tout en décidant de l’irresponsabilité pénale de ce dernier ? Gros fumeur de cannabis, en pleine bouffée délirante ​lors de son passage à l’acte, son libre arbitre était nul​, statue la Cour. Il ne répondra pas de ses actes devant une cour d’assises.

Cette décision, évidemment insupportable pour la famille de la victime et jugée aberrante par une partie de l’opinion, fait aujourd’hui scandale. Le besoin de procès est là​, avait déclaré le président de la République en décembre 2019, lorsque la cour d’appel de Paris avait conclu à l’abolition du discernement du meurtrier. Dimanche, après la confirmation de la Cour de cassation, Éric Dupond-Moretti a annoncé que le gouvernement présentera un projet de loi pour combler le vide juridique apparu dans l’affaire Sarah Halimi ​avant la fin du mois de mai. Cette histoire tragique qui nous a tous marqués va faire avancer notre droit.

Cette décision, évidemment insupportable pour la famille de la victime et jugée aberrante par une partie de l’opinion, fait aujourd’hui scandale. Le besoin de procès est là​, avait déclaré le président de la République en décembre 2019, lorsque la cour d’appel de Paris avait conclu à l’abolition du discernement du meurtrier. Dimanche, après la confirmation de la Cour de cassation, Éric Dupond-Moretti a annoncé que le gouvernement présentera un projet de loi pour combler le vide juridique apparu dans l’affaire Sarah Halimi ​avant la fin du mois de mai. Cette histoire tragique qui nous a tous marqués va faire avancer notre droit.

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Dans quels lieux risque-t-on d'être contaminé le plus vite par le Covid-19 ?

par Armêl Balogog  publié le 

Vous avez envie de voir un film, d'aller au restaurant, ou simplement au bureau, mais vous ne connaissez pas précisément les risques. Le MIT a la solution : il vient de mettre en ligne un simulateur qui vous dit au bout de combien de temps vous risquez d'être infecté par le virus. France Inter l'a testé pour vous.

Première soirée de couvre-feu à 21h à Paris, le 17 septembre 2020
Première soirée de couvre-feu à 21h à Paris, le 17 septembre 2020 © Maxppp / Luc Nobout

Nous connaissons tous la règle : il faut se tenir à au moins un mètre de distance les uns des autres pour limiter la propagation du coronavirus. Mais est-ce suffisant pour passer entre les gouttes d'aérosols ? Non, pour des chercheurs du MIT, le Massachusetts Institute of Technology, qui estiment que cette distanciation physique "n'offre que peu de protection", comme ils l'expliquent dans une étude publiée mardi.

Pour pallier l'absence de consignes de sécurité sur comment nous comporter, ils ont mis en ligne un modélisateur très précis qui nous dit quand et comment nous risquons d'être contaminés dans un lieu clos, en s'appuyant sur des calculs savants. L'outil prend en compte le temps passé dans un endroit, l'aspect "cumulatif" du temps d'exposition, les dimensions du lieu, la ventilation, le port du masque, le nombre de personnes et, surtout, leurs comportements.

[...]

Tous les scénarios répondent à la même question : si un porteur du Covid-19 entre dans le lieu où je suis, combien de temps puis-je y rester avant d'être exposé au virus ?

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Covid-19 : selon une étude, une dose de vaccin permettra de réduire de 50 % la transmission du virus

Par Gabriel Foffano,  publié le 29 avril 2021

Une main prise en photo avec un vaccin.

Une main prise en photo avec un vaccin.Main photo créé par wirestock - fr.freepik.com

Une nouvelle étude britannique vient de prouver que la transmission du virus était réduite de 50% dès la première dose de vaccin.

Depuis le début de la pandémie, nous avons que le coronavirus se propage principalement lors de réunions privées ou bien dans l’enceinte du foyer familial. A travers une nouvelle étude menée par l’agence de santé anglaise (PHE), nous apprenons aujourd’hui qu’une seule dose de vaccin Pfizer ou AstraZeneca permettre de réduire la transmission du virus de la Covid-19 du 38 % à 49 % dans l’enceinte d’un même foyer par rapport aux personnes non vaccinées.

Une dose de vaccin pour protéger de la transmission au sein d’un même foyer

« C’est une excellente nouvelle », soulignait le ministre de la Santé britannique Matt après avoir pris connaissance des résultats de la nouvelle étude de l’agence de santé publique anglaise relayée ce mardi 27 avril 2021. Pour arriver à ces résultats prometteurs, les chercheurs ont suivi 57 000 personnes appartenant à 24 000 ménages où une personne vaccinée a été testée positive à la Covid-19, et les a ensuite comparés à environ un million de contacts de personnes non vaccinées.


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