On commence à les croiser sur les scènes, traduisant les paroles en langue des signes. Mais les «chansigneurs» font bien plus que ça : par les mouvements de leur corps, ils permettent aux personnes sourdes de réellement appréhender la musique. Reste à convaincre l’industrie de rendre les concerts accessibles à tous.
Les chansigneurs Perrine Diot et Florian Gautrin avec les Wriggles à Paris en février. Photo Mathieu Génon pour Libération
Les lumières ne fonctionnent pas. Pourtant, le concert a déjà commencé. Amber Galloway-Gallego tente d’attirer l’attention du staff, mais rien n’y fait. Personne ne bouge. Elle reste dans le noir. Nous sommes le 8 octobre 2016 et Kendrick Lamar vient d’entamer le show devant les dizaines de milliers de spectateurs du Austin City Limits Festival, l’événement phare de l’automne dans la capitale texane du cool. Amber Galloway-Gallego connaît les titres de l’album To Pimp a Butterfly sur le bout des doigts. Les paroles, les punchlines désormais mythiques, et même les moindres inflexions de voix de cet artiste avec qui elle a déjà «collaboré» à plusieurs reprises depuis 2013. Kendrick Lamar s’approche alors de la zone dédiée à Amber Galloway-Gallego, et lève la main. «Hey ! Mettez-moi de la lumière sur cette personne, tout de suite. Je veux de la lumière sur elle parce que la communauté qu’elle représente doit participer au concert elle aussi.» Cette «communauté» dont parle Kendrick Lamar, c’est celle des personnes sourdes. Et Amber Galloway-Gallego, elle, est interprète de musique en langue des signes. Ou «chansigneuse» comme le veut le terme officieux que s’est inventé cette poignée d’interprètes.