Freud exilé, dans son bureau, à Londres, vers 1938-1939.Photo AKG-Images
Il existe un lien peu intuitif entre l’empathie, actuellement sacralisée, la psychanalyse et le nazisme. La psychanalyste Laurence Kahn explique ce tissage dans un essai ardu et passionnant, Ce que le nazisme a fait à la psychanalyse. Les atteintes sont allées bien au-delà des mises à l’index des ouvrages de Freud et de l’exil des grands psychanalystes viennois en Grande-Bretagne notamment. La littérature, à travers Thomas Mann mais surtout Imre Kertész, est un des fils directeurs de ce livre.
Pourquoi avoir choisi ce titre, et non «Nazisme et psychanalyse» ?
Parce que «Nazisme et psychanalyse» aurait débouché sur une histoire des instituts psychanalytiques et des psychanalystes durant la période nazie. Elle est connue : Matthias Göring, cousin d’Hermann Göring, lance une politique d’aryanisation à laquelle participent certains analystes. Elle aboutit en 1936 à la création de l’Institut Göring, institut de psychologie et de psychothérapie présidé par Carl Jung. Les psychanalystes juifs s’exilent en masse avec l’aide de Jones ; certains sont assassinés. Mais ce que j’ai souhaité et essayé de repérer, au-delà de la catastrophe dans les vies individuelles, c’est la manière dont les nazis avaient atteint la psychanalyse dans son utilisation de la culture.
Cet ouvrage a fait scandale aux Etats-Unis. Son auteur, une psychologue américaine du nom de Judith Rich Harris, réfute l'hypothèse communément admise du primat de l'éducation parentale sur la personnalité de l'enfant. L'individu est plus soumis qu'on ne le pense à son environnement social et à son hérédité biologique, explique-t-elle au fil d'un réquisitoire palpitant sur la recherche en psychologie et ses résultats. Plus que l'éducation parentale, c'est « l'univers que l'enfant partage avec ses pairs [qui] modèle son comportement et modifie ses traits de caractère innés ; en d'autres termes, [le groupe de pairs]modifie sa personnalité d'adulte ».
Un centre parental accueille des mères pour lesquelles la parentalité ne va pas de soi. Dans ce lieu où les émotions sont aiguisées, les frontières sont minces entre protection et contrainte.
Et si l'autisme était une preuve d'intelligence à part ? Comment faire pour que cette forme d'intelligence soit respectée ? En philosophe, Josef Schovanec a accepté de nous livrer sa propre expérience de l'autisme.
Toutes les pathologies psychiatriques sont surreprésentées en prison, et un quart des détenus souffrant de troubles psychiatriques présentent une comorbidité addictive. Face à une pénalisation accrue de la folie, quels sont les enjeux éthiques et cliniques pour la psychiatrie ? Comment soigner et penser la rencontre avec l’autre dans des contraintes de temps et d'espaces maximales ? Comment établir des frontières claires avec le judiciaire pour négocier les conditions du soin psychique ?
Les pays européens voient augmenter de façon inédite la prévalence des troubles mentaux en milieu pénitentiaire. La détention aggrave les troubles de ces populations...
Auteur(s) : Pierre Thomas, Professeur de psychiatrie, CHU de Lille
Les études soulignent la prévalence importante de tous les troubles psychiatriques en prison, avec une surreprésentation des dépressions, des troubles psychotiques et des...
Auteur(s) : Thomas Fovet, Pierre Thomas, Psychiatres, CHU de Lille, Laurent Plancke, Sociologue, FR2SM Hauts-de-France
En grève générale dans les hôpitaux depuis près de sept mois, les médecins algériens résidents (c'est-à-dire en cursus de spécialisation après un concours, à l'instar des internes en France), ont récemment annoncé le durcissement de leur mouvement en cessant d'assurer les gardes de nuit, week-ends et jours fériés inclus dans l'ensemble des établissements du pays.
Les médecins résidents sont environ 9 000 en Algérie. Ils réclament depuis plusieurs mois la fin de l'obligation de service civil, qui les contraint une fois diplômés à exercer entre un et quatre ans dans des zones parfois reculées, en plus du service militaire d'un an obligatoire pour tous les hommes en Algérie. Début avril, ils ont rejeté des propositions du gouvernement, notamment la déduction de la durée du service militaire de celle du service civil, une prime en fonction de la zone d'affectation ou encore la fourniture d'un logement individuel dans les zones éloignées.
Les consommations d'alcool et de tabac sont les plus coûteuses en vies humaines et financièrement (par rapport aux drogues illicites), et elles sont particulièrement élevées en Europe, selon un état des lieux mondial de la consommation de drogues et de leur impact sur la santé publié dans le journal « Addiction » (basé sur des chiffres de 2015). De plus, à l'échelle mondiale, la consommation d'alcool et de tabac est beaucoup plus répandue que la consommation de drogues illicites.
La consommation moyenne d'alcool pur par personne et par an est estimée à 6,42 l dans la population mondiale. L'Europe fait pencher la balance vers le haut avec des consommations moyennes allant de 11 à 12 l selon les régions. À l'inverse, l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient présentent les plus faibles consommations avec une quantité de 0,91 l par an. Par ailleurs, 18,3 % des Européens ont reporté une consommation excessive au cours du mois.
Le livre.Pourquoi certains autistes ne veulent-ils pas qu’on les touche ? Pour quelle raison sortent-ils non couverts par un temps glacial sans avoir froid ?… C’est à ces questions concrètes et à bien d’autres que répondent les Québecoises Brigitte Harrisson et Lise St-Charles dans L’Autisme expliqué aux non-autistes. Travailleuse sociale et autiste elle-même en ce qui concerne la première, spécialiste des troubles du spectre autistique (TSA) en ce qui concerne la seconde, elles ont fondé un centre d’expertise sur les TSA à Québec.
Une cellule immunitaire migre à travers l'oreille interne d'un poisson-zèbre tout en ramassant des particules de sucre (bleu) le long du chemin. Crédit: T. Liu et al./ Science 2018
Contrairement aux affirmations du ministre de l’éducation nationale, il n’existe pas de méthode validée par la science pour apprendre à lire aux élèves de cours préparatoire. Entretien croisé avec les experts Laurent Cros et Roland Goigoux.
LE MONDE IDEES| | Propos recueillis par Luc Cédelle
Le 26 avril, Jean-Michel Blanquer a fait une série d’annonces en faveur de la « méthode syllabique ». Auparavant, dans l’attente d’une prise de position du ministre de l’éducation nationale, Le Monde avait convié deux experts à faire le point sur l’état des savoirs et des pratiques en matière d’apprentissage de lecture.
Le 26 avril, le ministre de l’éducation nationale vantait la méthode « syllabique » et conspuait la « globale ». Pourquoi feint-il d’oublier qu’enseignants et spécialistes s’accordent aujourd’hui sur l’essentiel ? Retour sur la longue querelle de l’apprentissage de la lecture.
Une phrase-clé qui claque : « La liberté pédagogique n’a jamais été l’anarchisme pédagogique. » Et une affirmation non moins retentissante : « Entre quelque chose qui ne marche pas – la méthode globale – et quelque chose qui fonctionne – la syllabique –, il ne peut y avoir de “compromis” mixte. » Avec son entretien au Parisien du 26 avril,accompagné de la publication, le même jour, de quatre notes de service sur l’enseignement des « fondamentaux » et d’un guide de 130 pages détaillant ses recommandations pédagogiques sur l’apprentissage de la lecture, Jean-Michel Blanquer était certain de marquer les esprits. D’une double façon : en se mettant la plupart des syndicats d’enseignants à dos et l’opinion publique dans sa poche.
Méthodes validées par la science
Le ministre de l’éducation nationale avait déjà, en août 2017, laissé percer ses intentionsen déclarant à L’Obs que, pour la lecture, il s’appuierait « sur les découvertes des neurosciences, donc sur une pédagogie explicite, de type syllabique, et non pas sur la méthode globale, dont tout le monde admet aujourd’hui qu’elle a eu des résultats tout sauf probants ». Aujourd’hui, tout en se défendant de vouloir imposer quoi que ce soit, il est passé à l’action. Quelle que soit la part calculée de communication politique, il faut lui faire crédit de sa conviction qu’il est possible d’obtenir – ou, à tout le moins, d’approcher – les « 100 % de réussite au CP », selon l’objectif-slogan énoncé dès son arrivée Rue de Grenelle. Pour Jean-Michel Blanquer, cet objectif est atteignable si l’éducation nationale a recours aux méthodes validées par la science.
Des équipes françaises du réseau de la Fondation FondaMental ont identifié la protéine Elk-1, un facteur de transcription, comme marqueur de pronostic de la dépression et cible d’un nouveau traitement impliquant une approche originale par rapport aux antidépresseurs classiques. Le Dr Eleni Tzavara, directeur de recherche INSERM, membre du réseau FondaMental, et l’une des auteurs de l’article paru dans « Nature Medicine », présente au « Quotidien » ces découvertes.
Environ un tiers des patients dépressifs sont résistants aux traitements standards. « Il existe plusieurs raisons pouvant expliquer cette résistance aux traitements », indique le Dr Tzavara au « Quotidien ».
Alors que le remboursement des séances chez le psychologues est actuellement à l'étude, quelques conseils pour s'y retrouver entre psychologues, psychiatres et psychanalyste et choisir le bon.
Décidément, l'INSERM nous surprendra toujours (note du blogueur)
Le Pr Karine Chevreul et son équipe de l’unité Inserm 1123 à l’Université Paris-Diderot, ont entrepris de développer un site Internet et une application « Stopblues » de façon totalement indépendante, pour combattre le mal-être et prévenir l’apparition de troubles plus sévères comme la dépression ou le suicide. Ces deux outils sont accessibles à tous depuis le 15 janvier 2018, en ligne sur https://www.stopblues.fr, ainsi que sur les stores d’Apple et de Google.
Près de deux mois après son ouverture à la Madeleine, le restaurant pensé par le chef italien Massimo Bottura pour les personnes démunies ne tourne pas à plein régime.
LE MONDE| | Par Elvire von Bardeleben
« Avec la beauté, on va reconstruire la dignité de ceux qui viennent manger ici », promettait Massimo Bottura lors de l’inauguration. SHEHAN HANWELLAGE
Un restaurant qui réconcilie les chefs ennemis de la gastronomie française, où Marion Cotillard assure le service, où la cuisine voit défiler les trois étoiles, où l’on dîne dans un décor raffiné pensé par l’artiste JR… vous pensez que ça n’existe pas ? Et si, et en plus, c’est gratuit ! Il s’agit du Refettorio, ovni de la cuisine solidaire apparu à la mi-mars dans le foyer de l’église de la Madeleine, à Paris.
Bien sûr, Marion Cotillard n’est pas là tous les soirs, pas plus qu’Alain Ducasse ou Yannick Alléno qui ont épluché des oignons lors de la conférence de presse. Mais ces célébrités ont assuré un écho retentissant au projet. Tous les journaux ont parlé de ces « chefs étoilés [qui] cuisinent pour les sans-abri et les migrants ». Cette surmédiatisation et la dimension luxueuse interrogent. Car s’il est évidemment très louable d’offrir un cadre agréable à des personnes dans le besoin, la Madeleine, dans le très chic 8earrondissement de la capitale, est-elle le lieu le plus adapté ?
Les migrants ne se déplacent pas jusqu’à la Madeleine, loin des camps du Nord-Est parisien. Pour eux, les obstacles sont nombreux. Ceux qui n’ont pas de papiers n’ont pas envie de s’exposer à des contrôles de police.
Pour ceux qui n’auraient pas suivi : à l’initiative de ce projet, il y a Massimo Bottura. Chef italien dont on parle partout et tout le temps, pour sa table l’Osteria Francescana, à Modène, trois étoiles au Michelin et désignée à plusieurs reprises « meilleur restaurant du monde » par le classement des « Fifty Best ». Massimo Bottura a fait l’objet d’un documentaire sur Netflix, a sorti plusieurs livres chez Phaidon, dont le dernier, Le pain est d’or (424 pages, 39,95 euros), parle de gaspillage alimentaire.
Ce problème est au cœur de ses « refettorio », ses restaurants où l’on ne cuisine qu’à partir de surplus de nourriture. Massimo Bottura a ouvert le premier à Milan à l’occasion de l’Exposition universelle en 2015, puis a décliné le concept à Rio, Londres, Modène, Bologne et, enfin, à Paris. Dans la capitale française, le chef italien est associé à Jean-François Rial (fondateur de l’agence Voyageurs du monde) et l’artiste JR. Tous les soirs, du lundi au vendredi, des repas gratuits sont servis à des personnes démunies.
Le projet parisien est financé par des partenaires privés, dont Carrefour, qui fournit aussi les invendus de nourriture. La marque de design Flos a pourvu les lampes, Bernardaud a offert de la vaisselle, notamment les assiettes conçues par JR qui coûtent près de 100 euros pièce… « Avec la beauté, on va reconstruire la dignité de ceux qui viennent manger ici », promettait Massimo Bottura lors de l’inauguration. « Je ne dirais pas que c’est luxueux, mais qualitatif », nuance Jean-François Rial.
Riz cantonais et ragoût de légumes
Le problème de ce projet fort estimable, c’est qu’il ne semble pas vraiment tourner à plein régime. Les migrants ne se déplacent pas jusqu’au quartier de la Madeleine, loin des camps du Nord-Est parisien. Pour eux, les obstacles sont nombreux. Ceux qui n’ont pas de papiers n’ont pas envie de s’exposer à des contrôles de police.
« Quitter sa tente, c’est risquer de se la faire voler, ou de se faire prendre son emplacement », explique Letizia Calcamo, fondatrice de l’association Va faire cuire un œuf, qui vient en aide aux migrants. « Et tous ceux qui ont une place dans un hôtel doivent souvent pointer à 18 h 30 pour conserver leur place. » C’est justement l’heure à laquelle commence le service du Refettorio, qui ferme à 20 h 30.
Le Refettorio, dans le foyer de l’église de la Madeleine, à Paris. JR
Jusqu’à présent, le Refettorio rassemble surtout quelques dizaines de sans-abri qui reviennent régulièrement. Le mercredi soir de mai où l’on a assisté au service, la plupart d’entre eux étaient connus des bénévoles. Certains sont ravis, d’autres bougons ou hésitants, craignant de ne pas avoir de place parce qu’ils n’ont pas la carte du Refettorio (délivrée gratuitement), plusieurs signalent le bonheur que leur procure ce repas chaud, entrée-plat-dessert, servi comme au restaurant par des bénévoles enjoués.
Les convives sont un peu moins d’une soixantaine, alors que la capacité du lieu est de 120 personnes.
La cuisine est assurée par le chef résident Maxime Bonnabry-Duval, régulièrement épaulé par un chef invité (et souvent réputé : César et Michel Troisgros, Jean Imbert, Olivier Roellinger…). Une dame se plaint du service, pas assez rapide (« mais pourquoi vous n’apportez pas un charriot pour distribuer les plats ? »), un autre du menu (« Y a pas couscous plutôt ? »). Non, le chef est chinois ce soir-là, et c’est végétarien : poireaux aux petits oignons et chapelure de pain, riz cantonais et ragoût de légumes, pomme au four à la crème.
Les convives sont un peu moins d’une soixantaine, alors que la capacité du lieu est de 120 personnes (voire 170 s’ils ouvrent une autre salle disponible). Face aux critiques, Jean-François Rial assure ne pas faire de différence entre les SDF et les réfugiés et accueillir toute personne dans le besoin.
Il dit aussi que ce démarrage modeste est voulu, qu’il faut le temps de se chauffer : « On fonctionne avec un volume de nourriture aléatoire, un nombre de bénévoles et de couverts aléatoires, il ne faut pas aller trop vite au début. Dans deux ou trois mois, on sera à 120 tous les soirs. » Il compte notamment sur les associations pour lui envoyer plus de monde.
C’est le jeu phénomène de l’année 2018. Déjà 45 millions de joueurs se sont créé un compte pour tenter de terminer dernier survivant des matchs à mort à 100 participants de Fortnite Battle Royale. Depuis le 8 mai, on peut désormais y rencontrer Thanos, le méchant du dernier blockbuster en date de Disney et Marvel, Avengers : Infinity War, actant un peu plus encore de son poids considérable chez les jeunes.
Ce que l’on sait moins, c’est que derrière le succès de Fortnite se cache une Française de 40 ans, Celia Hodent, dont l’outil de prédilection détonne dans le monde très technique de la programmation de jeu : la psychologie.
Les personnes suivies en psychiatrie sont privées d’une prise en charge efficace des pathologies dites somatiques. Une négligence inacceptable, selon le pédopsychiatre Olivier Bonnot.
LE MONDE|
La psychiatrie est une discipline médicale transversale aux champs d’intérêt larges oscillant entre sciences humaines et neurosciences. Cette diversité des approches en fait toute la richesse, mais cache des luttes idéologiques, en particulier sur la question des liens entre maladies organiques et troubles psychiatriques.
Aujourd’hui encore, on apprend aux étudiants qu’un patient est psychiatrique s’il n’a pas de pathologie organique. En médecine, on appelle cela un diagnostic d’exclusion ou d’élimination. Cette dichotomie psychique versus organique est à la fois en contradiction totale avec les avancées scientifiques de ces vingt dernières années, mais surtout hautement préjudiciable pour les patients qui risquent de ne pas bénéficier de soins appropriés.
Nordahl Lelandais, Jonathann Daval et David Ramault. Ces trois meurtriers présumés, qui ont défrayé la chronique ces derniers mois après avoir avoués des crimes qui ont suscité une énorme émotion dans l'opinion publique, ont tous été écroués. Et peu de temps après leur incarcération, ils ont été transférés dans des UHSA, des unités hospitalières spécialement aménagées pour les détenus en souffrance psychologique.
Nordahl Lelandais, qui a avoué en février avoir tué la petite Maëlys a été transféré à sa demande trois jours après ses aveux de la prison de Saint-Quentin-Fallavier, en Isère, à l'UHSA qui se situe dans le centre hospitalier du Vinatier, à Bron. (En mars, l'ex-militaire de 34 ans a également avoir tué le jeune caporal Arthur Noyer, qui était porté disparu en Savoie depuis près d'un an.)