Le cerveau, jeu pour enfant.
Photo Christophe Halais
La recherche ne prétend pas détenir toutes les réponses, mais sa méthode expérimentale et ses conclusions doivent éclairer le ministère.
Dès le 25 novembre, au lendemain de la nomination de Stanislas Dehaene, figure des neurosciences en France, à la tête du Conseil scientifique de l’Education nationale (CSEN) par Jean-Michel Blanquer, le syndicat majoritaire des enseignants du premier degré, le SNUIPP - FSU, lançait un appel : «L’école de la réussite de tous et de la formation des citoyens a besoin de toute la recherche.» La tension est réelle. Pourtant, ceux qui contestent la légitimité du CSEN ne remettent pas en cause l’importance des sciences cognitives. La crainte est celle d’une domination sans partage sur tout un pan de la recherche. De leur côté, les membres du CSEN eux-mêmes, lors d’une conférence organisée jeudi au Collège de France, ont relativisé la portée des sciences expérimentales en expliquant qu’il était presque impossible de retrouver les résultats obtenus en laboratoire au sein d’une vraie classe. Nous avons demandé à Franck Ramus, professeur de psychologie et membre du CSEN, et à Roland Goigoux, professeur en sciences de l’éducation, de nous éclairer sur les enjeux qui sous-tendent la création de cette nouvelle instance.
Dans le domaine de l’éducation, chacun a un avis. Des milliers de livres ont été écrits, dans lesquels les opinions les plus contradictoires s’affrontent. Elles ne peuvent pas toutes être correctes. Comment les enseignants sont-ils censés faire le tri, comment peuvent-ils déterminer rationnellement lesquelles ont plus de chances d’être justes et sur lesquelles ils ont intérêt à fonder leurs pratiques ? La seule méthode connue pour faire le tri entre des opinions est la démarche scientifique, qui consiste à formuler précisément des hypothèses, à en dériver des prédictions testables, et à tester ces prédictions en recueillant des données par l’observation et l’expérimentation (études comparant de très nombreuses classes avec une méthodologie rigoureuse permettant de contrôler les autres facteurs, comme le niveau initial des élèves ou leur milieu social)