Dans leur ouvrage, les sociologues Christian Baudelot et Roger Establet reviennent sur un sujet délicat et mystérieux : le suicide. Avec un constat surprenant : le taux de suicide en France est au plus bas depuis le début du XXe siècle. Extraits.
LE MONDE |
Le suicide est l’un des sujets les plus délicats et mystérieux d’une société. Dans leur livre, les sociologues français Christian Baudelot et Roger Establet dressent un constat étonnamment positif : en trente ans, le taux de suicide en France est passé du niveau maximum au niveau le plus faible connu depuis le début du XXe siècle. Et le mouvement s’observe dans le monde entier, mis à part dans les pays les moins développés. L’explication ? Probablement l’effet de la transformation de la perception sociale des maladies mentales, mieux acceptées. Plus sûrement encore, la conséquence de la démocratisation des antidépresseurs. Extraits.
Bonnes feuilles. Depuis 2006, des changements importants sont intervenus dans l’évolution du suicide, dans notre pays et dans une grande partie du monde. Un rapide coup d’œil sur la courbe d’évolution du suicide en France depuis le début du XIXe siècle suffit pour constater une tendance à la baisse à partir de 1985. Depuis plus de trente ans, le mouvement est net, régulier et de grande ampleur. Le taux de suicide s’établissait au cours des années 1985 et 1986 à 22,5 pour 100 000 habitants, soit un niveau voisin des années précédant la première guerre mondiale, très proche du maximum jamais enregistré une seule fois dans notre pays (25 en 1908). Il est tombé en 2013 à 15,1 et à 13,8 en 2014, soit un niveau identique ou légèrement inférieur à celui que la France a connu dans les années 1950, dans l’immédiat après-guerre et au tout début des années de forte croissance : l’un des plus faibles qui ait jamais été enregistré au cours du XXe siècle, à l’exception des années de guerre. En résumé, au cours des trente dernières années, le taux de suicide est passé du niveau maximum au niveau minimum !