Par Belinda Mathieu — 21 novembre 2016 à 19:01
Le contact humain est vital au même titre qu'un traitement.
Après la journée mondiale de l’AVC, Libération organise «Quand le corps s’éclipse», une journée de débats sur les liens entre maladie et société. Le philosophe Frédéric Worms analyse ici la notion de soin. Inscrivez-vous ici pour assister au Forum.
La maladie s'immisce t-elle de la même manière dans le corps et l'esprit ?
Il ne faut pas tomber dans un dualisme du corps et de l’esprit, mais plutôt distinguer deux dimensions de la vie psychique : la première est directement affectée par la maladie même quand elle n’est pas mentale, la deuxième est rationnelle, réflexive, capable de distance et de jugement. On ne peut pas non plus distinguer le corps et l’esprit de la personne sociale. Ces trois dimensions sont impliquées dans n’importe quelle maladie, du bobo à la maladie grave et ce même l’échéance ultime de la mort. Par exemple, si je me casse une jambe, mon corps est atteint, mais aussi mon esprit et ma capacité sociale. Et, dans la maladie mentale, il y a une dimension subjective qui n’est pas traitée par les médicaments. En fait il y a de l’objectif et du subjectif dans toutes les maladies. C’est pour cela que le soin n’est jamais seulement un secours objectif mais aussi un soutien psychique. Il faut prendre en compte la dimension réflexive car même ébranlé, l’esprit humain est capable d’autonomie et quand il ne l’est plus c’est un proche ou une « personne de confiance » qui la prend en charge. Même si la maladie affecte la vie psychique, le sujet veut continuer à être traité comme un citoyen. Prendre soin du sujet psychique c’est reconnaître sa faiblesse, prendre soin du sujet moral et politique, c’est reconnaître son autonomie.