Trop souvent, des malades sont privés de liberté. Les établissements de soins psychiatriques affichent des taux d'isolement étrangement hétéroclites.
Par François Malye et Jérôme Vincent
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Ça devrait être une pratique de dernier recours. Et pourtant, 26 676 patients, au sein des établissements de soins psychiatriques français, ont connu en 2014 un enfermement, plus ou moins long, dans une chambre d'isolement thérapeutique, souvent avec une « contention mécanique », c'est-à-dire sanglés par des courroies. Bien sûr, cette privation des droits fondamentaux est parfois nécessaire pour calmer une crise et protéger le patient, souvent contre lui-même. « Mais il faut des raisons cliniques très détaillées, explique le Dr Thierry Della, du centre hospitalier des Pyrénées, à Pau, il s'agit d'une prescription médicale. Le médecin doit donner son avis quotidiennement, et tout doit être inscrit dans un registre avec un protocole précis. Si on suit ces règles, le taux d'isolement thérapeutique est bas. » C'est le cas dans ce CH, où il s'élève à 0,44 % pour une moyenne nationale de 1,9 %, selon les données du RIM-P 2014, base statistique qui regroupe les données d'hospitalisation anonymes des patients séjournant dans les établissements qui prennent en charge les troubles mentaux en France. Le problème est que cette pratique se répand. En 2013, ce taux d'isolement était de 1,76 %. La durée moyenne d'enfermement augmente également : elle était de 13,8 jours en 2013, elle passe à 14,3 jours en 2014. En réalité, la mise à l'isolement s'est banalisée. Pis, elle est souvent pratiquée de façon anarchique, parfois au détriment de patients vulnérables. C'est le constat qu'a dressé le contrôleur général des lieux de privations de liberté (CGLPL), Adeline Hazan, dans un rapport qui fait froid dans le dos. Il a été publié en mai, résultat de 120 visites dans 112 établissements de soins psychiatriques, soit 40 % du parc. « La manière dont ces mesures sont mises en oeuvre est souvent humiliante, indigne, parfois dangereuse et [...] s'apparente, dans certaines conditions, à des traitements inhumains et dégradants. » Et de citer des cas de patients abandonnés au long cours à l'isolement, parfois pendant plusieurs mois, une prise en charge médicale « approximative », c'est-à-dire des médecins qui ne passent pas toujours pour actualiser le traitement, voire qui laissent au personnel soignant des ordonnances antidatées, et même des patients enfermés à titre de punition. Comme dans ce centre hospitalier où bon nombre d'entre eux avaient avoué aux contrôleurs que, s'ils refusaient de prendre leurs médicaments, « cela entraînait systématiquement la menace d'un placement en isolement avec contention et injection ». Une menace selon eux régulièrement mise à exécution.
Il y a surtout une forte hétérogénéité au sein des équipes. Certains pratiquent beaucoup l'isolement, d'autres pas du tout ou presque. – Denys Robiliard, député PS