LE MONDE SCIENCE ET TECHNO | | Par Catherine Mary
Vincent Demassiet entend des voix. « T’es nul, t’es un minable », lui disaient-elles naguère. Et il les croyait. Il les croyait car il les entendait vraiment, comme si elles étaient celles de personnes réelles. Parfois même, elles lui donnaient des ordres et lui prédisaient le pire s’il ne les exécutait pas. Par exemple, la mort de ses parents. Aux yeux des psychiatres, Vincent Demassiet était schizophrène et ses voix le rendaient dangereux. Pour lui et pour les autres. Il fallait donc les éradiquer.
Et pour cela, un seul moyen, les neuroleptiques, prescrits à des doses croissantes, atteignant sept fois celle préconisée par l’autorisation de mise sur le marché. « J’avais la tête qui penchait, je pesais 204 kg, et un filet de bave coulait de mon menton », raconte-t-il face à la vingtaine de personnes, captives et graves, venues l’écouter dans la petite salle de l’espace Khiasma, aux Lilas (Seine-Saint-Denis). Son élocution est parfois hachée, puis les mots se bousculent, comme précipités par l’urgence de dire. Invité par Dingdingdong, collectif de production de savoirs sur la maladie de Huntington qui s’appuie sur l’expertise des patients pour inventer de nouvelles manières de vivre avec la maladie, il témoigne, en tant que président du Réseau français sur l’entente de voix (REV).