La nouvelle a pris de court l’administration berlinoise : selon l’hebdomadaire Der Spiegel de la semaine dernière, les fonctionnaires de l’état civil ont été confrontés au printemps à un casse-tête administratif. Le 11 avril, ils informent par courrier interne leurs collègues chargés de l’enfance et de la santé publique qu’«un homme vient d’accoucher» à domicile. L’affaire se passe dans le quartier populaire de Neukölln, dans la capitale allemande. L’homme - un transsexuel ayant conservé ses organes sexuels féminins - vient de mettre au monde un enfant après une insémination artificielle. L’accouché exige d’être inscrit comme «père» dans les registres d’état civil et non comme mère, ce qui lui sera accordé. Un enfant sans mère… «Dans toute ma carrière, c’est la première fois que je suis confronté à une chose pareille, explique Falko Liecke, de la CDU, chargé des affaires sociales de l’arrondissement de Neukölln. A un moment ou à un autre, cet enfant va bien découvrir que son père est en fait sa mère !»
"Et toi, tu y arrives ?", "tu fais comment ?", "qui le faisait chez toi ?", "tu en as parlé avec tes parents ?", "tes enfants le prennent comment ?", "tu penses à bien ajuster le plastique ?". Ce n'est pas un sujet de magazine. C'est pourtant une question de société, une douleur secrète dont on parle à mi-mots. Pas une vieille discussion qui remonte au fond des âges obscurs pleine de sang, de peau, de quart de lune, d'amour maternel et d'hommes impossibles. Rien d'archaïque ni de charnel, là-dedans. Quoique. Quoique...
J'ai 40 ans et je ne suis pas foutue de couvrir convenablement les livres de mes enfants. Ça gonfle, ça coince, ça colle. Gondole, paperolle, ras-le-bol. Enfant, je n'ai jamais couvert mes propres livres. J'avais hâte de m'y mettre un jour. De perpétuer le geste. Couvrir les livres, c'est un baptême du plastique. Une ordalie : tu couvres bien, t'es un bon parent. "Nel mezzo del cammin di nostra vita mi ritrovai per una selva oscura, che la diritta via era smarrita." Dante avait vu juste : au milieu du chemin de ma vie, je me retrouve paumée, la voie n'est pas droite. Le papier plastique ondule furieusement du côté de l'Enfer. Chez d'autres, il a l'aplat lumineux du paradis.
J'AI RATÉ L'ÉPREUVE
Année après année, j'ai raté l'épreuve. Quelque chose clochait là-dedans, j'y retournais immédiatement. J'ai tenté de penser que j'avais la couverture postfigurative tendance déconstructiviste. Puis, j'ai décidé qu'être une bonne mère ne devait plus se réduire à des vignettes : la purée de brocolis au Baby Cook, la natation synchronisée dès 2 mois, le gâteau marbré apporté à l'école. Je n'essaie même plus. Nous sommes nombreux dans ce cas. Beaucoup de souffrances, beaucoup d'enfance. Il suffit d'en discuter pour s'en rendre compte.