CNRS LE JOURNAL
![©Laurent Thion /Ecliptique](https://lejournal.cnrs.fr/sites/default/files/styles/visuel_principal/public/assets/images/2016-07-12-157045_dsc5856_72dpi_0.jpg?itok=5dGpWNj5)
Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.
Par Bernadette Arnaud le 07.12.2020
François Desset est parvenu à déchiffrer l’élamite linéaire, un système d’écriture utilisé en Iran il y a 4.400 ans. Dans sa version archaïque proto-élamite (dès 3300 avant J.-C.), celle-ci rejoint les deux systèmes d’écritures les plus anciens connus au monde, le proto-cunéiforme des Mésopotamiens et les hiéroglyphes égyptiens. De quoi modifier les connaissances que l’on avait jusque-là sur l’origine de l’écriture !
"Inscription B" en élamite linéaire retrouvée sur un galet gravé provenant de Suse, Iran, attribuée au souverain Puzur-Shushinak (2150-2100 av.J. -C), (Musée du Louvre) à gauche; "Inscription K" en élamite linéaire figurant sur un vase Gunagi en argent daté de 1900/1880 av. J.-C (Iran), à droite.
Par Elie Abergel, France Bleu Maine
C'est une des nombreuses conséquences de la crise sanitaire, les troubles psychologiques sont en hausse partout en France. L'établissement public de santé mentale de Sarthe traite ainsi de plus en plus de patients.
La crise sanitaire a un impact très négatif sur la santé mentale des Français. Depuis cet été, l'établissement public de santé mentale de la Sarthe constate un afflux de patients.
"Depuis le mois de juillet et le mois d'août", confirme en effet Marianne Piron-Prunier, psychiatre à l'établissement public de santé mentale de la Sarthe, "alors qu'au début de la crise sanitaire, nous avions constaté une baisse du nombre de patients".
"Nous avons une augmentation des demandes de consultations et _d'hospitalisation_, parfois pour des traitements lourds, et cette demande ne fait qu'augmenter actuellement", détaille le docteur Piron-Prunier. "Nous sommes frappés de voir que des patients que nous connaissions décompensent, présentent des malaises lourds et complexes
Par Séverine Kodjo-Grandvaux Publié le 04 décembre 2020
Dans son dernier ouvrage, le psychiatre Jonathan Metzl se plonge dans les archives du XXe siècle et montre comment la perception de la schizophrénie a été influencée par le mouvement des droits civiques dans les années 1960.
Livre. C’est une enquête minutieuse que retrace Jonathan M. Metzl dans Etouffer la révolte. La psychiatrie contre les Civils Rights, une histoire du contrôle social (Autrement). Pendant quatre ans, le psychiatre américain a plongé au cœur de quelque 624 boîtes d’archives de l’hôpital d’Etat d’Ionia (Michigan) pour criminels pénalement irresponsables, mais aussi de millions de morceaux de musique populaire, de romans, d’articles de presse, de publicités, de films… Le résultat en est surprenant. Avec force détails, il retrace l’évolution du diagnostic de la schizophrénie au sein du corps médical au XXe siècle – et de sa perception populaire. Il montre comment l’histoire raciale des Etats-Unis a fortement influencé l’institution médicale au point qu’elle a fait de la schizophrénie une maladie touchant tout particulièrement les hommes noirs au moment de la lutte pour les droits civiques.
Par Anouk Tomas le 08.12.2020
Le gyrus fusiforme médian, région cérébrale du lobe temporal, servirait de dictionnaire visuel au cerveau : grâce à lui, les mots lus sont reconnus et compris. Ce traitement sera plus ou moins long selon la fréquence du mot en question dans le langage courant.
La façon dont sont organisées nos sociétés modernes repose sur la capacité qu’ont les humains à comprendre rapidement le langage écrit. Pourtant, d’un point de vue cérébral, cette faculté de lecture, un processus qui implique de nombreuses composantes de la voie visuelle ventrale, est encore loin d’être intégralement comprise.
Une équipe de l'Université du Texas Health Science Center à Houston (UTHealth, États-Unis), s'est penchée sur la façon dont le cerveau tire du sens des mots qu’il lit. Leurs résultats, publiés dans la revue Nature Human Behavior, mettent en évidence une région du lobe temporal, le gyrus fusiforme médian, qui servirait de dictionnaire visuel cérébral et nous permettrait de distinguer les mots qui existent (comme “chien”) des mots qui n’existent pas (comme “hniec”).
Si l’on ne connaissait pas déjà Hélène Delprat, si d’aventure on n’avait jamais vu ses toiles, l’on serait conquise rien qu’en feuilletant I Hate My Paintings («je déteste mes peintures»), publié à l’occasion de l’expo du même nom à la galerie Christophe Gaillard, à Paris (IIIe). L’on y trouve par exemple ceci : «Mais il faut bien le dire, on ne s’amuse pas beaucoup avec la peinture !!! C’est l’Art de l’Ennui» - et sans être complètement d’accord avec elle, on note que l’artiste utilise trois points d’exclamation, ce qui est un peu osé. Ou encore cela : «Comment Magritte a-t-il pu assumer sa Période Vache.
Par Eric Favereau — 5 décembre 2020
Des soignants protestent contre l'agonie de l'hôpital public, devant l'hôpital Robert-Debré, à Paris, le 4 juin 2020. Photo Philippe Lopez. AFP
Sur l’état de santé des hôpitaux publics, le professeur André Grimaldi, ancien chef de service de diabétologie à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, est devenu un baromètre. Depuis plus de dix ans, il anime des débats et mène combat pour sortir l’hôpital public du modèle entrepreneurial et de la logique de communication vers lesquels il est conduit. Bien que très respecté, certains lui reprochent une vue trop hospitalo-centrée de la santé, d’autres de rester cantonné à des schémas passés, évoquant en réponse «l’hôpital de demain». Il rétorque : «La santé, ce n’est pas une affaire de management.» En cette fin 2020, rarement il ne s’est montré aussi inquiet.
L’hôpital va moins bien qu’il n’allait avant la première vague, et à l'époque, il allait déjà très mal. Ce n’est pas un message d’optimisme. Certes, le Ségur a permis d’augmenter les salaires – non pas suffisamment mais significativement. Sur le fond, le Ségur n’a néanmoins rien changé à ce qu’était la maladie chronique de l’hôpital public. Nous restons dans la même logique folle de contrainte budgétaire et de gestion commerciale.
04/12/2020
Par Sylvie Riou-Milliot le 03.12.2020
5 professionnels de la santé mentale appellent à des actions urgentes pour réformer la psychiatrie, discipline en souffrance, déjà parente pauvre de la médecine bien avant la pandémie de Covid-19.
Mi-novembre 2020, le ministre de la Santé, Olivier Véran, déclarait "vouloir éviter la 3e vague de la santé mentale". Trop tard, elle est arrivée. Services débordés, consultations pleines, délais d’attente déjà longs de plusieurs mois dans le secteur public… "Tous les symptômes sont déjà là", plaide le Dr Serge Hefez, psychiatre et psychanalyste (Paris), l'un des cinq* professionnels de la santé mentale avec les Drs Rachel Bocher, Marion Leboyer, Serge Hefez et Marie-Rose Moro, mais aussi la philosophe et psychanalyste Cynthia Fleury, à l'origine d'un appel lancé ce jour lors d'une visioconférence de presse.
Fabien GOUAULT Publié le
Aurore Gillard, infirmière en psychiatre, exerce depuis neuf ans au sein de l’unité de l’Hôpital nord Deux-Sèvres, à Thouars. À 32 ans, elle doit comme ses collègues s’adapter aux nouvelles conditions d’exercice de son métier : port du masque, désinfection accrue et distanciation sont devenus le lot du quotidien.
« On compense en prenant du temps, individuellement »
«C’est frustrant, car on n’accomplit pas forcément le travail tel qu’on voudrait le faire. Nous ne prenons plus part aux repas thérapeutiques, par exemple. C’est un moment où on parle de tout, un temps d’échanges utile pour gagner la confiance du patient et lui démontrer que nous sommes avant tout une personne, qu’on ne le juge pas. On perd cette relation avec eux. Mais on compense en prenant du temps, individuellement.
»
Paris, le samedi 5 décembre 2020 – Des équipes médicales, désarmées, qui doivent choisir entre deux patients lequel pourra recevoir les meilleurs soins. Des médecins ou des infirmiers qui s’épuisent à essayer de trouver dans un service proche une place pour accueillir leur malade.
Des familles qui s’indignent. Ces scènes qui ne peuvent que profondément heurter l’opinion et les soignants sont le spectre que l’on a fait planer au-dessus des Français pour expliquer la nécessité des mesures de limitation des déplacements et des rassemblements face à l’épidémie de Covid-19. Ces dilemmes qui bouleversent les fondements éthiques du soin sont pourtant le quotidien de milliers de professionnels de santé depuis des années en France : les psychiatres du secteur public et plus encore les pédopsychiatres.
« Qui soigner quand il n’y a pas la possibilité de le faire pour tout le monde ? La question est brûlante et rendue visible par la situation sanitaire actuelle, avec des services de réanimation qui pourraient avoir à faire le tri et « choisir » des patients en cas de surcharge des lits (…). En tant que responsable d’un centre médico-psychologique (CMP) pour enfants et adolescents dans le nord des Hauts-de-Seine, il s’agit d’une question quotidienne, tant les listes d’attente pour être reçu par des professionnels de santé mentale se sont allongées ces dernières années (souvent plus de six mois après une première demande). Les plages de consultation sont saturées. (…) La mission première d’un CMP est d’accueillir toute personne en état de souffrance psychique. Et la question est alors de déterminer qui soigner en priorité, quand on ne peut pas recevoir tout le monde. Avec mon équipe, nous étudions la liste d’attente… Où tracer la ligne de partage entre ceux qu’il faut soigner d’abord et ceux qui peuvent encore attendre ? Qui choisir ? C’est alors le domaine de l’éthique qui s’impose. En effet, les choix à faire sont tous des dilemmes pénibles et relèvent plus de l’éthique que de la connaissance médicale ou psychologique. Ce terme, employé à tort et à travers, apparaît le plus souvent vidé de son sens. Mais, dans notre travail quotidien, il s’agit d’un mot « chaud », dans le sens qu’il implique de résoudre des équations insolubles, car leur cause première est le manque d’argent… Il s’agit ici de la délibération insupportable avant de choisir quels patients (en l’occurrence, ici, quels enfants et leurs familles) accueillir en priorité. Nous retournons alors dans tous les sens les choix possibles et tentons d’établir des critères, dont nous prenons tout de suite conscience des aberrations » raconte dans une tribune publiée dans Le Monde, Oriane Bentata-Wiener, psychiatre, responsable du centre médico-psychologique (CMP) de Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine).
Par Virginie Ballet — 4 décembre 2020
A Bordeaux, le 25 novembre.Philippe Lopez. AFP
A l’entendre, la première des choses, c’est «d’abord de le dire». De «faire en sorte, qu’au sein du foyer, la parole se libère». D’en finir avec «l’autocensure» et la «normalisation»… Dans son interview accordée ce vendredi au média en ligne Brut, le président de la République, Emmanuel Macron, a tenté de s’exprimer sur les violences conjugales… mais encore à côté de la plaque. Le 25 novembre dernier déjà, dans une vidéo diffusée sur son compte Twitter à l’occasion de la journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, Emmanuel Macron estimait que «la première chose à faire, c’est alerter, dénoncer». Passons sur le fait que les quelque 220 000 Françaises victimes de violences physiques et/ou sexuelles de la part de leur partenaire auraient sans doute mérité mieux ce jour-là qu’un message de deux minutes relayé sur le réseau social, alors que l’égalité entre les femmes et les hommes est censée être «la grande cause» de ce quinquennat… Le Président semble surtout se tromper de cible : ce qu’associations et professionnels de terrain attendent de lui, c’est davantage de s’assurer que la parole de ces femmes soit correctement accueillie, entendue, que des suites, notamment judiciaires, lui soient données, et que des moyens financiers soient déployés.
LE 04/12/2020
À retrouver dans l'émission
L'INVITÉ(E) DES MATINS
par Guillaume Erner
Raillé par les uns, espéré par les autres : c’est aujourd'hui le black friday. Que racontent les circuits de mondialisation des objets de notre histoire ? D’où viennent les objets du quotidien ? La consommation peut-elle nous sauver de la crise économique ?
Alors que le gouvernement a demandé le décalage d'une semaine du "vendredi noir" français pour rouvrir les commerces en évitant la cohue, une question se pose : la consommation peut-elle nous éviter une crise économique ? Du XVIIIè siècle à aujourd'hui, comment ont évolué les systèmes marchands ? Que racontent nos objets du quotidien de l’histoire globale ?
Pierre Singaravélou, “British Academy Global Professor” au King’s College de Londres, professeur d’histoire contemporaine à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il est auteur de Le Magasin du Monde. La mondialisation par les objets du XVIIIe siècle à nos jours (avec S. Venayre), Fayard, 2020. Il sera rejoint en seconde partie par Daniel Cohen, économiste, il dirige le département d’économie de l’École normale supérieure (ENS), directeur du Centre pour la recherche économique et ses applications (CEPREMAP). Il est auteur de “Il faut dire que les temps ont changé, chronique (fiévreuse) d’une mutation qui inquiète”, Éditions Albin Michel.
Lire la suite et écouter le podcast ...
Par Laurent Decloitre, Correspondant à la Réunion Photos Thierry HOARAU —
Une vitre fendillée témoigne de la dernière «incivilité» : les urgentistes du CHU de Saint-Denis, l’hôpital du chef-lieu de la Réunion, reçoivent«quotidiennement» des personnes ivres, qui «mettent le chantier». «Elles insultent les autres patients et les soignants, on doit se mettre à plusieurs pour les attacher» , raconte Guy Henrion, responsable du service. La plupart du temps, les ivrognes décuvent sur leur lit d’hôpital et repartent à 6 heures du matin. Pour autant, l’urgentiste soupire : «On ne les met pas dans un coin ; l’alcoolisme n’implique pas de délit de sale gueule. Ils peuvent avoir subi un traumatisme crânien ou suffoquer dans leur vomi.»
Ce témoignage illustre une triste réalité, pointée par Santé publique France dans un rapport publié en janvier dernier : à la Réunion, 7,3 % des passages aux urgences des hommes sont en lien direct avec une consommation d’alcool, contre 2 % au niveau national. Et le taux de mortalité des principales pathologies causées par l’alcool chez les hommes y est de près de 40 % supérieur à celui de la métropole. Cirrhoses, cancers du pancréas, troubles neurologiques… La Réunion compte également le plus grand nombre de cas de syndrome d’alcoolisation fœtale : cinq fois plus qu’en métropole, selon les derniers chiffres de l’Observatoire français des drogues et toxicomanies.
Par Nicolas Celnik, Recueilli par — 4 décembre 2020