Destiné à protéger les femmes des violences de leur ex-conjoint, cet outil est longtemps resté confidentiel. Bien qu’il soit jugé efficace, son utilisation varie selon les juridictions. En 2019, 148 femmes ont été tuées par leur conjoint.
Ce vendredi de novembre, Camille a inspiré un grand coup avant de saisir les deux gros sacs noirs qui encombraient sa cuisine. Elle a dévalé l’escalier à toute vitesse et traversé la petite cour en courant. Une fois qu’elle s’est trouvée face aux deux containers verts, elle a fondu en larmes. Une petite victoire : elle n’avait plus descendu elle-même ses poubelles depuis plusieurs semaines. Mais ce soir-là, sentir contre sa cuisse, à travers la poche de son jean, son nouveau téléphone, un Téléphone grave danger (TGD), destiné à certaines femmes victimes de violences conjugales, l’a rassurée. La procureure, « une dame très énergique », le lui a remis en mains propres l’après-midi même.
Pour pouvoir en bénéficier, trois conditions sont nécessaires : la victime doit être dans une situation de grave danger ; elle ne doit plus cohabiter avec son conjoint ; enfin, son agresseur doit avoir été l’objet d’une mesure d’éloignement (interdiction d’entrée en contact, ordonnance de protection) ou d’une condamnation.
La proposition de loi du député Aurélien Pradié (Les Républicains, Lot), adoptée au Sénat le 18 décembre, prévoit d’assouplir ces règles. La garde des sceaux, Nicole Belloubet, dans sa circulaire du 9 mai destinée aux procureurs, les appelait déjà à attribuer plus largement les TGD. Dans le prolongement de cette circulaire, une fiche émanant de la direction des affaires criminelles et des grâces, diffusée en août, incitait très explicitement les procureurs à aller au-delà du texte. Les effets ont été immédiats : en novembre, 682 TGD étaient attribués, soit près de trois fois plus qu’au début de l’année.