LE FAIT
Le CH de Saint-Malo aura été le déclencheur d'une révolte de certains praticiens contre l'externalisation du codage des actes. Relayé sur le terrain par Sud Santé sociaux, ce mouvement prend corps à travers notamment des communications adressées aux autorités de tutelle et à la CNIL.
L'ANALYSE
Patricia Garcia, secrétaire générale de Sud Santé sociaux ne décolère pas. Objet de son courroux, la Tarification à l’activité (T2A) : "L’entrée en vigueur de la T2A a poussé les managers des établissements de santé à privilégier l’optimisation de la qualité du codage du PMSI avec comme corollaire, la généralisation du recours à des prestations de services externes portant pourtant sur des données administratives et médicales, certes anonymisées mais qui ne peuvent être transférées qu’à la tutelle. Le secret médical et les droits du patient ne sont plus respectés, tout comme la protection des données personnelles."Face à ces entorses, le syndicat a saisi la Commission nationale de l'informatique et des Libertés (CNIL), ainsi que la ministre de tutelle. À ce jour, ces requêtes seraient restées lettre morte, alors même que certains médecins Directeurs de l'information médicale (DIM) subiraient la pression de directeurs d'hôpitaux pour accepter l'externalisation du codage des actes médicaux, une approche qui leur revient moins cher et permet de mieux valoriser les activités de leurs établissements grâce au recours à des outils externes économiquement plus efficaces.
Certains traitements de l'autre côté de la Méditerranée
Comment expliquer le mutisme des pouvoirs publics ? Hospimedia avait déjà relayé cette problématique en prenant le soin d'ouvrir un débat contradictoire qui se poursuit d'ailleurs, comme le témoigne les réactions de Sud Santé sociaux (lire notre analyse du 03/04/2013 et notre sujet du 27/05/2013). Le syndicat va plus loin en apportant de nouveaux éléments à ce dossier : "Si l'externalisation du codage du PMSI a, dans un premier temps, été confié à des acteurs français, force est de constater que désormais, capitalisant sur la puissance technologique, certains sous-traitants vont jusqu'à confier le traitement de ces données à des pays du Maghreb; le patient est-il au courant de telles pratiques qui concourent quelque part à externaliser également une partie du financement de l’hôpital public ? Je ne le crois pas", s’indigne Patricia Garcia. On l'aura compris, le risque d'un manque d'éthique et la dimension économique constituent les principaux griefs formulés une fois de plus par ces représentants syndicaux. Avec en toile de fond une volonté de "gérer les établissements sur du court terme en ayant recours au surcodage des actes avec la bénédiction des ARS et la dénonciation des médecins DIM. Du pain béni pour les prestataires externes qui, en passant, empochent 10% du montant surcodé engrangé par l'établissement", dénonce la secrétaire générale.
Organiser un débat contradictoire
Comment y remédier ? "Revoir les bases de la tarification à l'activité. Même aux États-Unis, cette approche a été abandonnée du fait de ses effets pervers. Car la T2A pose les jalons d'une privatisation du financement de la protection sociale", estime Patricia Garcia. Une telle solution serait-elle acceptable ? Difficile de statuer à l'heure où aucun débat public et contradictoire n'a été initié sur le terrain. Il revient certainement à la tutelle d'organiser les conditions d'un tel échange qui aboutirait à clarifier la donne. Entre considérations économiques et éthique, il existe probablement un point d'équilibre qui limiterait toute radicalisation sur le terrain, où une profession semble de plus en plus mise à mal et des prestataires de services légitimés par leur succès économique, mais contestés sous l'angle moral.
Emmanuel Mayega
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