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mercredi 6 février 2013

Le contrôleur des prisons dénonce les "maintiens injustifiés" dans les unités pour malades difficiles

LE MONDE | 
Il est plus facile d'entrer dans une unité pour malades difficiles (UMD) que d'en sortir une fois soigné. Voilà ce que dénonce le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, dans un avis sur ces structures qui accueillent les malades présentant un danger pour autrui, nécessitant des soins et des mesures de sûreté renforcés, publié au Journal officiel, mardi 5 février. Il y constate des"maintiens injustifiés" dans ces unités, portant atteinte aux droits fondamentaux des malades, en particulier en raison de décisions de sortie qui restent "lettre morte". "Ces malades ne peuvent pourtant être cantonnés en UMD parce qu'à un moment ils ont fait peur", nous explique-t-il.
Son avis se fonde sur la visite de neuf UMD - des anciennes comme celles de Sarreguemines ou Villejuif, et des unités créées récemment, comme celles d'Albi et de Châlons-en-Champagne -, mais aussi sur 80 saisines, reçues de patients ou de psychiatres. Depuis 2011, le contrôleur avait à cinq reprises alerté les ministres de la santé successifs sur la question.
En UMD, toute sortie nécessite l'accord d'une commission de suivi médical, composée d'un médecin inspecteur et de trois psychiatres extérieurs, qui estime si le danger présenté par le malade n'est plus tel qu'il justifie son séjour dans l'unité. Il doit être suivi d'un arrêté préfectoral. Le plus souvent, il est décidé que le patient doit retourner dans l'hôpital psychiatrique d'où il est venu, celui-ci devant l'admettre dans un délai de vingt jours.
Dans les faits pourtant, il arrive que le patient reste bloqué dans l'unité plusieurs mois, voire plusieurs années. Le contrôleur cite ainsi le cas d'un malade resté plus de deux ans et demi en UMD, malgré la demande de sortie de la commission.
APPRÉHENSIONS DES SOIGNANTS
Deux obstacles sont principalement relevés : la difficulté de déterminer quel est l'établissement d'origine, si le malade est passé par diverses structures, mais aussi celle d'imposer sa réadmission. Il arrive qu'un hôpital s'y refuse, généralement au motif que le malade y a commis des actes de violence à l'encontre des soignants ou d'autres patients. S'il estime les appréhensions des soignants compréhensibles, M. Delarue juge qu'il ne peut être admis que les actes antérieurs, survenus parfois plusieurs années auparavant, justifient un refus, car cela revient à ignorer, "de surcroît de la part de professionnels", le bénéfice de la prise en charge en UMD et l'avis de la commission.
Le contrôleur constate que l'absence d'autorité en mesure de déterminer et d'imposer un lieu d'accueil à la sortie conduit à conditionner celle-ci non pas au fait que le patient ne présente plus les dangers justifiant une prise en charge particulière, mais "aux résultats aléatoires des tractations menées" entre structures. Parallèlement, d'autres patients présentant un danger demeurent hospitalisés en service ordinaire, faute de place en UMD.
Déjà, dans un avis publié en 2011, M. Delarue avait relevé des obstacles à la sortie des patients placés en hospitalisation d'office, dont la maladie n'exigeait pourtant plus qu'ils soient privés de liberté. Il recommande aux pouvoirs publics de rappeler l'obligation de suivre l'avis du préfet réadmettant le malade dans son établissement d'origine. Il préconise surtout la mise en place d'une procédure laissant à l'agence régionale de santé le soin de déterminer sans délai le lieu où le patient doit être accueilli en cas de doute.
Sur les dix UMD existantes, cinq ont été ouvertes en 2011 et 2012. A la suite du meurtre d'un jeune homme par un malade schizophrène échappé d'un hôpital de Grenoble en 2008, Nicolas Sarkozy avait souhaité la création de nouvelles unités et mis l'accent sur la sécurisation des hôpitaux psychiatriques.
Le gouvernement est déjà dans l'obligation de se pencher sur la question des UMD. A la suite du vote de la loi d'août 2011 instaurant des soins sans consentement, une question prioritaire de constitutionnalité avait été déposée par une association de patients. En avril 2012, le Conseil constitutionnel avait jugé nécessaire que fussent définies ses conditions d'admission, la loi ne précisant pas de critères. Il avait donné jusqu'en octobre 2013 pour modifier la loi.

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