Établissements psychiatriques en lutte
À Sotteville-lès-Rouen comme à Rennes, les salariés des hôpitaux psychiatriques se battent pour que les patients bénéficient de conditions d’accueil dignes. Et il obtiennent des résultats.
Après trois jours de grève, les salariéEs du centre hospitalier du Rouvray (hôpital psychiatrique de Rouen) ont décidé de suspendre leur mouvement, certaines avancées ayant été obtenues.
Depuis le mois de décembre les actions se sont multipliées contre la « sur-occupation » des lits. L’hôpital étant sans cesse saturé, les malades sont accueillis en nombre croissant dans des conditions indignes (lits dans les couloirs, les bureaux…).
Le 21 février, le personnel se met en grève reconductible, un barrage filtrant très suivi bloque l’entrée de l’hôpital, provoquant des embouteillages massifs autour de l’établissement.
Après une entrevue infructueuse à l’Agence régionale de santé (ARS) le 22 février, le personnel organisé en comité de grève (syndiqués, non syndiqués) soutenu par les deux syndicats, CGT et CFDT, décide de durcir son action en bloquant le service des entrées (Unacor).
Ce durcissement a provoqué l’intervention du président du conseil de surveillance, affirmant son accord avec les revendications. Une négociation avec la direction permet alors de concrétiser des solutions immédiates par rapport à la sur-occupation (augmentation du nombre de places pour accueillir d’anciens patients dans une maison d’accueil spécialisée, réouverture provisoire de 20 lits dans une unité désaffectée).
Des perspectives sont ouvertes concernant l’hospitalisation des adolescents (élargissement de l’équipe mobile, perspective pour 2013 d’une unité de dix lits pour adolescents).
Sept places dans des appartements collectifs en ville seraient également créées.
Les grévistes ont souligné les limites de ces propositions qui ne résolvent pas les problèmes de fond. La crise de sur-occupation des lits est en effet la conséquence de l’abandon progressif du travail de prévention et de soins hors hôpital, mis en place au cours des 40 dernières années par la psychiatrie publique, dans le cadre des centres médico-psychologiques, des hôpitaux de jour, des équipes de soins travaillant à domicile. Sur ce terrain, les négociations se sont heurtées à un mur.
De plus, les engagements de la direction doivent être confirmés par l’ARS jusqu’alors totalement fermée à la discussion.
Rendez-vous est donc pris pour le 13 mars, où une nouvelle assemblée générale constatera ou non les avancées effectives et décidera des suites à donner à la mobilisation.
Cette expérience de lutte, débouchant sur des avancées grâce à des formes d’action radicales a redonné confiance dans l’action collective, notamment pour de jeunes soignants dont c’était la première grève. D’autant plus que son organisation démocratique leur ont permis d’y trouver leur place. Un premier succès qui en appelle d’autres.
À Rennes, une victoire retentissante
« Nous avons obtenu la réouverture de 27 lits, l’ouverture de 20 nouveaux et la création d’un hôpital de jour de 10 places ouvert 7 jours sur 7 » triomphait, à juste titre, Michel, responsable syndical de SUD de l’hôpital Guillaume-Régnier de Rennes.
Il aura fallu cinq jours de grève reconduite en assemblée générale, à l’initiative de l’intersyndicale CGT, CFDT, SUD. Malgré un froid vif, le piquet de grève bloquait symboliquement l’entrée jour et nuit. Cet hôpital a donc connu une lutte massive et nécessaire, face la situation scandaleuse d’accueil des patients dont certains dorment sur des matelas et d’autres sont déménagés plusieurs fois par jour. Le personnel réclamait l’ouverture de 60 lits... Le scandale a été révélé par une photo de SUD transmise au ministère et à la presse locale et nationale. Tous les secteurs se sont mobilisés. Ce matin, les services techniques sont même venus distribuer des tracts à 6 heures du matin. Beaucoup de jeunes salariés inconnus des syndicalistes ont participé activement à ce mouvement sans précédent.
Les patients se sont également déplacés, certains ont été interviewés par les médias, d’autres ont fait signer une pétition pour dénoncer leurs conditions d’hospitalisation. La grève a été massive, de très nombreux soutiens extérieurs, citoyens ou militants, sont venus rencontrer le piquet de grève.
Le vendredi soir devant l’ARS, frigorifiés, nous étions une centaine pour soutenir les négociateurs syndicaux face à la direction du CHSP et de l’ARS. Ils sont sortis victorieux, fiers d’avoir mené un combat exemplaire et d’avoir retrouver leur dignité de soignants.
Une hirondelle ne fait pas le printemps… mais cette même semaine à Rennes, les cheminots ont aussi débrayé pour défendre 300 postes ; les salariés de l’inspection du travail pour leur condition de travail, idem les archéologues, enseignants et parents d’élèves, les ouvriers d’Eifage ont gagné une augmentation de salaire…
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