Anorexie mentale: la prendre en charge vite, plutôt à la maison
De Christine COURCOL (AFP)
PARIS — L'anorexie mentale, qui touche plusieurs dizaines de milliers de personnes en France, est un trouble du comportement alimentaire qu'il faut détecter et prendre en charge au plus vite pour éviter qu'elle ne devienne chronique, mais sans forcément aller à l'hôpital.
"C'est une maladie complexe, insidieuse et déstabilisante, dont les diagnostics sont difficiles à porter", a souligné devant la presse le Dr Cédric Grouchka, de la Haute autorité de santé (HAS), autorité publique indépendante qui a publié jeudi ses recommandations de bonne pratique.
L'anorexie touche 1% de la population féminine jeune, soit quelque 40.000 adolescentes en France, mais aussi, selon les spécialistes, de plus en plus d'enfants de 8-9 ans et de jeunes gens. Avec les personnes plus âgées chez qui la maladie est devenue chronique, on estime qu'elle concerne à peu près 70.000 personnes.
"L'anorexie, ce n'est pas la copie des modèles de mode, le suivi d'un régime qui a dérapé", a souligné Christine Chiquet, présidente d'une fédération d'associations sur les troubles alimentaires, la FNA-TCA.
Selon elle, les médecins peuvent parfois, par méconnaissance, aggraver le mal.
Pour mettre un terme à leur "errance", la HAS - qui a mis ses recommandations au point avec l'Afdas-TCA, une association de professionnels des troubles alimentaires - a fourni aux médecins et aux familles un "cadrage".
Pour un repérage précoce, elle suggère une "vigilance accrue" face aux signes évocateurs : forte perte de poids, absence ou disparition des règles, hyperactivité physique... Elle propose aux médecins des questions simples à poser sur les problèmes alimentaires, sur le vomissement provoqué, sur comment la personne voit son corps...
Une fois le trouble détecté, il faut éviter l'hôpital au profit d'une prise en charge ambulatoire, qui intègre la famille dans le parcours, dit la HAS.
"Le changement ne peut être que progressif, l'hospitalisation brutale renforce la résistance du patient", note Jean-Luc Vénisse, psychiatre et directeur du pôle universitaire d'addictologie et de psychiatrie du CHU de Nantes.
La prise en charge doit être conduite par "au moins" un généraliste et un psychiatre ou psychologue, et la psychothérapie engagée devra être prolongée pendant "au moins un an".
Seulement en cas d'"urgence avérée" la HAS préconise l'hôpital, y compris contre l'avis du patient, pour "se donner les moyens de ne pas laisser quelqu'un se mettre à mort", dit le pédopsychiatre Philippe Jeammet. Et aussi parfois pour séparer l'anorexique de son environnement familial, critique ou anxieux.
Pour les psychiatres, l'anorexie est une conduite addictive au même titre que la drogue ou l'alcoolisme. "C'est un comportement non choisi qui s'impose, adaptatif à une situation d'anxiété", relève le Pr Jeammet. "C'est un cri de détresse, mais il y a d'autres moyens de s'exprimer : il faut créer un dialogue, redonner confiance", dit-il.
La moitié des anorexiques guérissent totalement, 30% ont des rémissions partielles, et chez 20% des personnes atteintes, la maladie devient chronique, selon le Pr Vénisse. Une chronicité qui fait que la personne ne s'intéresse plus à rien et coûte cher au corps, avec ménopause prématurée et ostéoporose.
"Une fois installé dans l'anorexie, ça devient de plus en plus difficile d'y échapper", note-t-il. Sur une durée de suivi de 20 ans, l'anorexie fait 10% de morts. Mais l'anorexie se soigne, même au bout de dix ans.
Trois fiches de synthèse à destination des médecins et deux à destination du grand public sont téléchargables sur le site de la HAS (www.has-sante.fr).
Copyright © 2010 AFP. Tous droits réservés. »
De Christine COURCOL (AFP)
PARIS — L'anorexie mentale, qui touche plusieurs dizaines de milliers de personnes en France, est un trouble du comportement alimentaire qu'il faut détecter et prendre en charge au plus vite pour éviter qu'elle ne devienne chronique, mais sans forcément aller à l'hôpital.
"C'est une maladie complexe, insidieuse et déstabilisante, dont les diagnostics sont difficiles à porter", a souligné devant la presse le Dr Cédric Grouchka, de la Haute autorité de santé (HAS), autorité publique indépendante qui a publié jeudi ses recommandations de bonne pratique.
L'anorexie touche 1% de la population féminine jeune, soit quelque 40.000 adolescentes en France, mais aussi, selon les spécialistes, de plus en plus d'enfants de 8-9 ans et de jeunes gens. Avec les personnes plus âgées chez qui la maladie est devenue chronique, on estime qu'elle concerne à peu près 70.000 personnes.
"L'anorexie, ce n'est pas la copie des modèles de mode, le suivi d'un régime qui a dérapé", a souligné Christine Chiquet, présidente d'une fédération d'associations sur les troubles alimentaires, la FNA-TCA.
Selon elle, les médecins peuvent parfois, par méconnaissance, aggraver le mal.
Pour mettre un terme à leur "errance", la HAS - qui a mis ses recommandations au point avec l'Afdas-TCA, une association de professionnels des troubles alimentaires - a fourni aux médecins et aux familles un "cadrage".
Pour un repérage précoce, elle suggère une "vigilance accrue" face aux signes évocateurs : forte perte de poids, absence ou disparition des règles, hyperactivité physique... Elle propose aux médecins des questions simples à poser sur les problèmes alimentaires, sur le vomissement provoqué, sur comment la personne voit son corps...
Une fois le trouble détecté, il faut éviter l'hôpital au profit d'une prise en charge ambulatoire, qui intègre la famille dans le parcours, dit la HAS.
"Le changement ne peut être que progressif, l'hospitalisation brutale renforce la résistance du patient", note Jean-Luc Vénisse, psychiatre et directeur du pôle universitaire d'addictologie et de psychiatrie du CHU de Nantes.
La prise en charge doit être conduite par "au moins" un généraliste et un psychiatre ou psychologue, et la psychothérapie engagée devra être prolongée pendant "au moins un an".
Seulement en cas d'"urgence avérée" la HAS préconise l'hôpital, y compris contre l'avis du patient, pour "se donner les moyens de ne pas laisser quelqu'un se mettre à mort", dit le pédopsychiatre Philippe Jeammet. Et aussi parfois pour séparer l'anorexique de son environnement familial, critique ou anxieux.
Pour les psychiatres, l'anorexie est une conduite addictive au même titre que la drogue ou l'alcoolisme. "C'est un comportement non choisi qui s'impose, adaptatif à une situation d'anxiété", relève le Pr Jeammet. "C'est un cri de détresse, mais il y a d'autres moyens de s'exprimer : il faut créer un dialogue, redonner confiance", dit-il.
La moitié des anorexiques guérissent totalement, 30% ont des rémissions partielles, et chez 20% des personnes atteintes, la maladie devient chronique, selon le Pr Vénisse. Une chronicité qui fait que la personne ne s'intéresse plus à rien et coûte cher au corps, avec ménopause prématurée et ostéoporose.
"Une fois installé dans l'anorexie, ça devient de plus en plus difficile d'y échapper", note-t-il. Sur une durée de suivi de 20 ans, l'anorexie fait 10% de morts. Mais l'anorexie se soigne, même au bout de dix ans.
Trois fiches de synthèse à destination des médecins et deux à destination du grand public sont téléchargables sur le site de la HAS (www.has-sante.fr).
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