Nous ne voulons plus de cette « Psychiatrie », clament depuis dix ans les usagers et les familles !
Par Guy Baillon
Édition : Contes de la folie ordinaire
Paris le 24 mai 2010
Il y a 10 ans les deux grandes Fédérations Nationales (Unafam et Fnapsy) réunies pour la première fois ont rendu public leur : LIVRE BLANC DE LA SANTE MENTALE comprenant un programme précis en 6 points ; il est toujours d’actualité, mais les professionnels de la psychiatrie et l’opinion l’ont ignoré ; par contre l’Etat a été attentif.
Depuis, elles ont obtenu une extension de l’accompagnement social des patients grâce à la loi 2005 (créant le handicap psychique pour soutenir les personnes présentant des troubles psychiques graves sans déficit intellectuel), mais elles n’ont pas obtenu de changement dans le domaine des soins : ceux-ci sont restés tels que ceux qui sont décrits actuellement dans les medias (voir les films de la 2 et Arte sur Ste Anne et Aulnay en mai), pendant que la majorité des psychiatres a continué de refuser de recevoir les familles, d’où la révolte des familles.
Les professionnels de la psychiatrie sont partagés sur les films décrivant la psychiatrie car ils peuvent témoigner que dans de nombreuses équipes les soins sont de qualité. Il n’en est pas moins vrai que pour de multiples raisons, que nous avons déjà évoquées, dans des régions entières, la situation de la psychiatrie se dégrade en France.
Les professionnels de la psychiatrie ont envie de réagir avec le collectif des 39 comme Bernard Durand, président de la Croix Marine dans son texte du 20 mai sur Médiapart : « Arrêtons la destruction de la psychiatrie. » parce que beaucoup de soignants sont engagés, souvent avec passion, là où ils travaillent. Cependant ces professionnels n’ont pas encore compris qu’ils n’ont pas une vision réelle de l’ensemble de la psychiatrie et de la santé mentale, ni de l’ensemble des besoins des patients et des familles ; de plus la plupart ne savent pas ce que vivent au quotidien, familles et usagers dans la société, d’où le fossé actuel entre tous ces partenaires.
En fait il est nécessaire de compléter le propos de notre collègue et d’affirmer : LA SITUATION ACTUELLE VIENT DU FAIT QUE LA VRAIE PSYCHIATRIE N’A TOUJOURS PAS ÉTÉ CONSTRUITE !
Ce qu’aucun d’entre nous, professionnels, n’a encore compris, c’est qu’aucune de nos équipes de soins n’est en situation de répondre à la totalité des besoins des personnes en situation de souffrance psychique grave. Dans le même temps chacun des acteurs a su faire une avancée considérable, mais partielle.
Examinons un instant le détail de ces avancées :
-la psychothérapie, axe central et constant de tout soin psychique, ne peut à elle seule répondre aux troubles psychiques graves (psychoses)
-les médicaments peuvent modifier angoisse, dépression, agitation, mais ne font rien sur les troubles relationnels et les délires qui leur échappent à peu près totalement,
-les traitements cognitivo-comportementalistes, et éducatifs ne viennent pas non plus à bout des souffrances psychiques profondes
-l’imagerie corporelle, la génétique, la chirurgie cérébrale ne sont qu’expérimentales et n’ont aucune conséquence concrètes sur les troubles relationnels qui malmènent au quotidien.
Enfin et surtout, la psychiatrie de secteur, elle non plus n’a pu répondre à l’ensemble des besoins. Pourquoi ? Parce qu’elle est l’occasion d’un quiproquo considérable : on a pu croire qu’une simple organisation administrative créant les 1130 équipes (générales et pour enfants) des 827 secteurs suffirait pour créer une méthode de soins originale de qualité satisfaisante.
Or il n’en est rien car la « politique de secteur » ne peut se réduire à une simple division du territoire en ‘secteurs’, cette politique c’est une ‘hypothèse de soins’ : les soins doivent s’appuyer sur les ressources psychiques et relationnelles du tissu social des secteurs concernés tout en appliquant les méthodes élaborées par la psychothérapie institutionnelle (mélange nuancé de psychothérapies individuelles et de psychothérapies de groupes). Et elle doit pour y arriver intégrer les apports partiels que nous venons d’évoquer (psychothérapies, médicaments, comportements). La dimension administrative du secteur n’a en elle-même aucun effet thérapeutique (même si la création d’intersecteurs pseudo-scientifiques a donné l’illusion que des modifications organisationnelles avaient des effets thérapeutiques).
EN RÉALITÉ AUCUN ENSEIGNEMENT OFFICIEL N’A ACCOMPAGNE LA MISE EN PLACE DE CETTE HYPOTHÈSE DE LA POLITIQUE DE SECTEUR.
Tout s’est passé comme s’il suffisait de mettre entre les mains de jeunes bacheliers sans expérience, des activités de haut niveau associant exigences techniques relationnelles et solidarités précises entre les acteurs, données qui ne peuvent être enseignées qu’au cours de l’expérience et qui ne sont jamais totalement acquises.
Aujourd’hui, il est temps de construire la politique de secteur en formant tous ses acteurs à la psychothérapie institutionnelle et à l’ensemble des compétences qui la composent : psychothérapie, pharmacologie, éducation, soins institutionnels, tout en établissant une continuité entre les soignants et les acteurs du champ social et médico-social, l’ensemble soutenu par une volonté d’établir cohésion et congruence entre tous les savoirs.
Une seule de ces théories, une seule de ces pratiques ne peuvent faire face à la multiplicité et la complexité des besoins des personnes ayant des troubles psychiques graves. Les différents acteurs de la psychiatrie doivent apprendre à être modestes et se sentir de ce fait absolument complémentaires des acteurs sociaux, tout en associant élus, familles et usagers.
Prenons garde, le traitement des troubles psychiques graves est une vraie complexité. Il est temps d’analyser la solution de facilité qu’est la proposition si violente du nouveau projet de loi et qui entraine un tel découragement dans les équipes de soin.
Nous avons tous étés bouleversés de constater qu’en l’absence de formation permanente les attitudes sadiques sont le quotidien du soin. Claude Finkelstein, présidente de la Fédération des usagers de la psychiatrie, nous confirme que cela existe partout depuis toujours et pas seulement en psychiatrie, mais aussi dans tous les espaces où sont rassemblées des personnes en situation de vulnérabilité (personnes âgées, enfants en difficulté, handicapés). Tous ceux qui ont exercé des responsabilités dans de tels espaces le savent : dès qu’une équipe est fortement malmenée pour diverses raisons, internes ou externes, ses membres cherchent d’abord à se protéger, et de ce fait perdent de vue leur mission, c’est sur ce constat que la psychothérapie institutionnelle s’est développée et a montré toute son efficacité.
Réfléchissons un instant à ce que veut faire la loi à la demande d’acteurs qui avaient de tout autres objectifs : Sarkozy était à la recherche d’une loi sécuritaire, les psychiatres voulaient un statut stable dans le service public, les familles et usagers voulaient que l’accès aux soins soit possible.
Personne n’a d’emblée dénoncé le fait que toute ‘obligation de soin’ en psychiatrie est en elle-même la première étape d’une démarche sadique ; certes ce sadisme peut être limité tant qu’il est contrôlé, mais un instant après ? Ainsi cette loi met les protagonistes en grand danger dès que le contrôle va se relâcher, il faudrait que les murs soient transparents pour que la société constate et sanctionne toute attitude sadique. L’administration elle-même n’étant pas thérapeutique, ne mobilise que cette dimension sadique, sauf lorsqu’elle est proche des patients, actrice au niveau même des acteurs de soin et des patients et lorsqu’elle les accompagne. Elle devient sadique (à son insu, bien sûr) dès qu’elle s’éloigne et veut régir de loin de nombreuses équipes ensemble, alors que chacune a à résoudre des problèmes différents ; elle en fait une moyenne donc elle sadise les liens parce qu’elle fait des moyennes, établit des règles applicables à tout le monde, elle standardise, alors que le soin psychique est une constante recherche d’adaptation à chaque personne, puisque le soin psychique est relationnel.
Mais surtout le soin psychique ne peut se déployer que dans une relation où chaque protagoniste se sent ‘libre’, chaque patient à partir de là devient lui-même acteur et décideur de ses actes, de ses soins. L’obligation de soins impose au contraire au patient à donner son accord pour être soumis, pour être manipulé, pour ne rien dire de ce qu’il pense et de ce qu’il ressent, car tout ce qu’il dira sera interprété comme obéissance ou désobéissance.
Il est temps que chacun des acteurs se ressaisisse. Il faut expliquer aux familles et aux usagers qu’ils ne peuvent rien espérer de ce système d’obligations de soins : le service de Sainte-Anne qui a été filmé fonctionne déjà sous ce modèle : nous y voyons l’obligation de soins associant médicaments et contention, sans psychothérapie individuelle ni institutionnelle ; cette attitude n’est pas due à un manque de moyens, c’est un des services les plus dotés de la capitale, simplement il fait l’économie de toute formation en psychothérapie institutionnelle.
Ce qu’il faut proposer est tout autre chose. Il est temps de prendre acte de tout ce qui a été acquis par les différents courants de la psychiatrie.
Le premier temps est la confiance mutuelle entre tous les acteurs. La confiance est le point de départ de toutes étapes du soin psychique. Elle doit exister chez tous les acteurs s’appuyant sur ce premier constat qu’aucun d’entre eux à lui seul n’est capable de donner une réponse suffisante aux besoins d’une personne présentant des troubles psychiques graves.
La première étape est donc ‘LA CONSTRUCTION DE LA COMPLMENTARITE ENTRE TOUS LES ACTEURS DE LA SANTE MENTALE’ soutenue par la mise en place à l’échelle nationale d’un travail de formation immédiat et collectif, interactif entre tous les acteurs : l’emploi du temps de chacun doit prévoir l’échange autour de la connaissance des compétences des différents acteurs et autour de la façon dont on peut établir cette complémentarité.
Le cadre de la psychiatrie de secteur en reste la base, mais en lui-même il ne transmet rien, c’est dans ce cadre que la complémentarité des savoirs des pratiques et des compétences doit pouvoir se déployer en y associant familles et usagers.
Il n’y a aucune raison donc de continuer à se déprimer comme le remarque Éric Piel dans Libération du 24 mai : tous les ingrédients sont présents pour élaborer une des plus fortes psychiatries du monde si, loin de toute obligation et toute répression, tous ses acteurs reprennent en mains leurs capacités créatrices.
Guy Baillon, Psychiatre des hôpitaux
Paris le 24 mai 2010
Il y a 10 ans les deux grandes Fédérations Nationales (Unafam et Fnapsy) réunies pour la première fois ont rendu public leur : LIVRE BLANC DE LA SANTE MENTALE comprenant un programme précis en 6 points ; il est toujours d’actualité, mais les professionnels de la psychiatrie et l’opinion l’ont ignoré ; par contre l’Etat a été attentif.
Depuis, elles ont obtenu une extension de l’accompagnement social des patients grâce à la loi 2005 (créant le handicap psychique pour soutenir les personnes présentant des troubles psychiques graves sans déficit intellectuel), mais elles n’ont pas obtenu de changement dans le domaine des soins : ceux-ci sont restés tels que ceux qui sont décrits actuellement dans les medias (voir les films de la 2 et Arte sur Ste Anne et Aulnay en mai), pendant que la majorité des psychiatres a continué de refuser de recevoir les familles, d’où la révolte des familles.
Les professionnels de la psychiatrie sont partagés sur les films décrivant la psychiatrie car ils peuvent témoigner que dans de nombreuses équipes les soins sont de qualité. Il n’en est pas moins vrai que pour de multiples raisons, que nous avons déjà évoquées, dans des régions entières, la situation de la psychiatrie se dégrade en France.
Les professionnels de la psychiatrie ont envie de réagir avec le collectif des 39 comme Bernard Durand, président de la Croix Marine dans son texte du 20 mai sur Médiapart : « Arrêtons la destruction de la psychiatrie. » parce que beaucoup de soignants sont engagés, souvent avec passion, là où ils travaillent. Cependant ces professionnels n’ont pas encore compris qu’ils n’ont pas une vision réelle de l’ensemble de la psychiatrie et de la santé mentale, ni de l’ensemble des besoins des patients et des familles ; de plus la plupart ne savent pas ce que vivent au quotidien, familles et usagers dans la société, d’où le fossé actuel entre tous ces partenaires.
En fait il est nécessaire de compléter le propos de notre collègue et d’affirmer : LA SITUATION ACTUELLE VIENT DU FAIT QUE LA VRAIE PSYCHIATRIE N’A TOUJOURS PAS ÉTÉ CONSTRUITE !
Ce qu’aucun d’entre nous, professionnels, n’a encore compris, c’est qu’aucune de nos équipes de soins n’est en situation de répondre à la totalité des besoins des personnes en situation de souffrance psychique grave. Dans le même temps chacun des acteurs a su faire une avancée considérable, mais partielle.
Examinons un instant le détail de ces avancées :
-la psychothérapie, axe central et constant de tout soin psychique, ne peut à elle seule répondre aux troubles psychiques graves (psychoses)
-les médicaments peuvent modifier angoisse, dépression, agitation, mais ne font rien sur les troubles relationnels et les délires qui leur échappent à peu près totalement,
-les traitements cognitivo-comportementalistes, et éducatifs ne viennent pas non plus à bout des souffrances psychiques profondes
-l’imagerie corporelle, la génétique, la chirurgie cérébrale ne sont qu’expérimentales et n’ont aucune conséquence concrètes sur les troubles relationnels qui malmènent au quotidien.
Enfin et surtout, la psychiatrie de secteur, elle non plus n’a pu répondre à l’ensemble des besoins. Pourquoi ? Parce qu’elle est l’occasion d’un quiproquo considérable : on a pu croire qu’une simple organisation administrative créant les 1130 équipes (générales et pour enfants) des 827 secteurs suffirait pour créer une méthode de soins originale de qualité satisfaisante.
Or il n’en est rien car la « politique de secteur » ne peut se réduire à une simple division du territoire en ‘secteurs’, cette politique c’est une ‘hypothèse de soins’ : les soins doivent s’appuyer sur les ressources psychiques et relationnelles du tissu social des secteurs concernés tout en appliquant les méthodes élaborées par la psychothérapie institutionnelle (mélange nuancé de psychothérapies individuelles et de psychothérapies de groupes). Et elle doit pour y arriver intégrer les apports partiels que nous venons d’évoquer (psychothérapies, médicaments, comportements). La dimension administrative du secteur n’a en elle-même aucun effet thérapeutique (même si la création d’intersecteurs pseudo-scientifiques a donné l’illusion que des modifications organisationnelles avaient des effets thérapeutiques).
EN RÉALITÉ AUCUN ENSEIGNEMENT OFFICIEL N’A ACCOMPAGNE LA MISE EN PLACE DE CETTE HYPOTHÈSE DE LA POLITIQUE DE SECTEUR.
Tout s’est passé comme s’il suffisait de mettre entre les mains de jeunes bacheliers sans expérience, des activités de haut niveau associant exigences techniques relationnelles et solidarités précises entre les acteurs, données qui ne peuvent être enseignées qu’au cours de l’expérience et qui ne sont jamais totalement acquises.
Aujourd’hui, il est temps de construire la politique de secteur en formant tous ses acteurs à la psychothérapie institutionnelle et à l’ensemble des compétences qui la composent : psychothérapie, pharmacologie, éducation, soins institutionnels, tout en établissant une continuité entre les soignants et les acteurs du champ social et médico-social, l’ensemble soutenu par une volonté d’établir cohésion et congruence entre tous les savoirs.
Une seule de ces théories, une seule de ces pratiques ne peuvent faire face à la multiplicité et la complexité des besoins des personnes ayant des troubles psychiques graves. Les différents acteurs de la psychiatrie doivent apprendre à être modestes et se sentir de ce fait absolument complémentaires des acteurs sociaux, tout en associant élus, familles et usagers.
Prenons garde, le traitement des troubles psychiques graves est une vraie complexité. Il est temps d’analyser la solution de facilité qu’est la proposition si violente du nouveau projet de loi et qui entraine un tel découragement dans les équipes de soin.
Nous avons tous étés bouleversés de constater qu’en l’absence de formation permanente les attitudes sadiques sont le quotidien du soin. Claude Finkelstein, présidente de la Fédération des usagers de la psychiatrie, nous confirme que cela existe partout depuis toujours et pas seulement en psychiatrie, mais aussi dans tous les espaces où sont rassemblées des personnes en situation de vulnérabilité (personnes âgées, enfants en difficulté, handicapés). Tous ceux qui ont exercé des responsabilités dans de tels espaces le savent : dès qu’une équipe est fortement malmenée pour diverses raisons, internes ou externes, ses membres cherchent d’abord à se protéger, et de ce fait perdent de vue leur mission, c’est sur ce constat que la psychothérapie institutionnelle s’est développée et a montré toute son efficacité.
Réfléchissons un instant à ce que veut faire la loi à la demande d’acteurs qui avaient de tout autres objectifs : Sarkozy était à la recherche d’une loi sécuritaire, les psychiatres voulaient un statut stable dans le service public, les familles et usagers voulaient que l’accès aux soins soit possible.
Personne n’a d’emblée dénoncé le fait que toute ‘obligation de soin’ en psychiatrie est en elle-même la première étape d’une démarche sadique ; certes ce sadisme peut être limité tant qu’il est contrôlé, mais un instant après ? Ainsi cette loi met les protagonistes en grand danger dès que le contrôle va se relâcher, il faudrait que les murs soient transparents pour que la société constate et sanctionne toute attitude sadique. L’administration elle-même n’étant pas thérapeutique, ne mobilise que cette dimension sadique, sauf lorsqu’elle est proche des patients, actrice au niveau même des acteurs de soin et des patients et lorsqu’elle les accompagne. Elle devient sadique (à son insu, bien sûr) dès qu’elle s’éloigne et veut régir de loin de nombreuses équipes ensemble, alors que chacune a à résoudre des problèmes différents ; elle en fait une moyenne donc elle sadise les liens parce qu’elle fait des moyennes, établit des règles applicables à tout le monde, elle standardise, alors que le soin psychique est une constante recherche d’adaptation à chaque personne, puisque le soin psychique est relationnel.
Mais surtout le soin psychique ne peut se déployer que dans une relation où chaque protagoniste se sent ‘libre’, chaque patient à partir de là devient lui-même acteur et décideur de ses actes, de ses soins. L’obligation de soins impose au contraire au patient à donner son accord pour être soumis, pour être manipulé, pour ne rien dire de ce qu’il pense et de ce qu’il ressent, car tout ce qu’il dira sera interprété comme obéissance ou désobéissance.
Il est temps que chacun des acteurs se ressaisisse. Il faut expliquer aux familles et aux usagers qu’ils ne peuvent rien espérer de ce système d’obligations de soins : le service de Sainte-Anne qui a été filmé fonctionne déjà sous ce modèle : nous y voyons l’obligation de soins associant médicaments et contention, sans psychothérapie individuelle ni institutionnelle ; cette attitude n’est pas due à un manque de moyens, c’est un des services les plus dotés de la capitale, simplement il fait l’économie de toute formation en psychothérapie institutionnelle.
Ce qu’il faut proposer est tout autre chose. Il est temps de prendre acte de tout ce qui a été acquis par les différents courants de la psychiatrie.
Le premier temps est la confiance mutuelle entre tous les acteurs. La confiance est le point de départ de toutes étapes du soin psychique. Elle doit exister chez tous les acteurs s’appuyant sur ce premier constat qu’aucun d’entre eux à lui seul n’est capable de donner une réponse suffisante aux besoins d’une personne présentant des troubles psychiques graves.
La première étape est donc ‘LA CONSTRUCTION DE LA COMPLMENTARITE ENTRE TOUS LES ACTEURS DE LA SANTE MENTALE’ soutenue par la mise en place à l’échelle nationale d’un travail de formation immédiat et collectif, interactif entre tous les acteurs : l’emploi du temps de chacun doit prévoir l’échange autour de la connaissance des compétences des différents acteurs et autour de la façon dont on peut établir cette complémentarité.
Le cadre de la psychiatrie de secteur en reste la base, mais en lui-même il ne transmet rien, c’est dans ce cadre que la complémentarité des savoirs des pratiques et des compétences doit pouvoir se déployer en y associant familles et usagers.
Il n’y a aucune raison donc de continuer à se déprimer comme le remarque Éric Piel dans Libération du 24 mai : tous les ingrédients sont présents pour élaborer une des plus fortes psychiatries du monde si, loin de toute obligation et toute répression, tous ses acteurs reprennent en mains leurs capacités créatrices.
Guy Baillon, Psychiatre des hôpitaux
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire