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Imaginaire
Dans un monde cynique et désenchanté, le merveilleux peut sembler mièvre et superflu. Pourtant, les forêts oniriques et enneigées, peuplées de lutins, de sorcières et de princesses, obéissent à des besoins humains profonds : être rassuré, douter, exprimer ses désirs ou se relier aux autres. Bergson, mais aussi Beauvoir et Todorov nous ouvrent les lourdes portes (parfois cruelles) des contes de fées.
Il fut un temps ou le merveilleux était partout. Avant d’être appelé « miracle », il était inclus dans une vision animiste du monde. Les cimes de la montagne, les animaux, l’orage qui gronde étaient dotés d’un pouvoir extraordinaire, à la fois esthétiquement satisfaisant et étonnement réconfortant. Ce besoin de merveilleux, qui poussait les hommes à donner un prénom aux arbres de la forêt et à supplier la divinité de la pluie, Henri Bergson l’a appelé « fonction fabulatrice ». Une telle faculté inhérente à tous les hommes s’explique par « le désir d’agir sur n’importe quoi, même sur ce qu’on ne peut atteindre », analyse le philosophe dans Les Deux Sources de la morale et de la religion (1932). Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le besoin de merveilleux n’est donc pas l’apanage des rêveurs, contemplatifs et passifs. La fonction fabulatrice vise au contraire à donner aux hommes ce qu’il faut de courage pour agir dans un monde hostile, et quand l’individu se retrouve faible et désarmé. « À défaut de puissance, nous avons besoin de confiance », explique Bergson.