par Julie Brafman, Envoyée spéciale à Douai publié le 24 septembre 2022
Immobile sur son banc telle une statue en baskets dorées et blouse scintillante de strass, elle écoute les qualificatifs à la chaîne : elle est une «fille bien», une «fille sage», une «fille réservée», une «fille sans problème», un «amour de fille», une fille «14 /20 au collège», une fille «20 /20 en comportement». A la barre, il y a son frère avec l’accent du Sud, sa sœur avec celui du Nord, sa grand-mère chez qui elle réside pendant l’audience et qui restera dans la salle «parce qu’il faut bien la ramener le soir» ou encore ses parents qui ne lui parlent plus depuis un mois. Ses épaules s’affaissent lentement tandis que tous soulignent qu’ils n’ont «rien vu», «rien, rien, rien», ou alors à peine un «petit ventre». Mais «rien» en tout cas laissant présager le «drame» de cette nuit du 4 novembre 2017, qu’ils résument de cette même formule qui renferme tout l’incongru de la violence : «Elle a jeté son bébé par la fenêtre.» Devant la cour d’assises du Nord, Mallaury D., comparaît libre. Jugée pour «meurtre», elle a posé quelques jours de congé dans l’hôtel de luxe où elle est gouvernante. Sans mentionner que, peut-être, elle ne reviendra pas.