Par Pascale Robert-Diard Publié le 05 avril 2013
RÉCIT Rencontre totalement inattendue avec deux ex-SDF fondateurs d’une association pour handicapés.
Une pochette oubliée dans le panier d’un vélo en filant à un rendez-vous. Dans la pochette, un iPad et un clavier. Dans l’iPad, des pans entiers de ma vie professionnelle et personnelle. Le tout – négligence, inconscience – non verrouillé. On est mercredi. Déclaration de perte au commissariat, signalement des quelques numéros « sensibles », récapitulation mentale de tout ce qui est peut-être entre les mains d’un inconnu. Désagréable sentiment. Passe jeudi. Arrive vendredi. Coup de téléphone d’une consœur du journal. Elle vient de recevoir un appel d’une personne qu’elle ne connaît pas et qui me cherche. Il a ma pochette.
Il a laissé un numéro de portable, il s’appelle Patrice.
C’est son copain Didier, m’explique Patrice, qui a tout retrouvé. Didier est mitron dans une boulangerie, il commence sa journée de travail à 1 heure du matin et la termine à 9 heures. Ce matin-là, comme d’habitude, il fumait une cigarette devant la porte de la boulangerie avant de rentrer dormir chez lui. Il a vu la pochette oubliée dans le vélo avec son contenu, il l’a rangée dans l’arrière-cuisine et a prévenu l’une des vendeuses. Jeudi était le jour de congé de Didier. Quand il est revenu vendredi, la pochette était toujours là et Didier s’est dit qu’il fallait faire quelque chose. Comme il n’y connaît rien, il a appelé Patrice, un as en technologie. Ils ont cherché un nom au hasard dans le carnet d’adresses et composé le numéro de téléphone.
Rendez-vous est pris cour du Louvre, devant la pyramide. Patrice m’avait dit : « Ça nous arrangerait comme endroit, on est bénévoles dans une association, et cet après-midi on emmène des handicapés au musée. » J’avais pensé qu’il n’y avait pas de hasard dans la vie.