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Paris, le samedi 10 octobre 2020 – Parmi les effets secondaires de l’épidémie de Covid-19, un phénomène sans doute moins préoccupant que l’engorgement des services de réanimation ou les conséquences économiques suscite un certain amusement : l’épidémie de nouvelles formules et expressions.
C’est ainsi par exemple que ces derniers jours ont vu émerger le mot "rassuriste", utilisé par exemple par l’Express, Envoyé Spécial et sur plusieurs réseaux sociaux cette semaine.
Des bons clients pour des altercations méthodiques
Qu’on ne se méprenne pas, le nom a priori plutôt engageant de "rassuriste" serait trompeur, comme tentent de mettre en garde différents médias. Qui sont-ils ? Il s’agit d’une poignée de chercheurs ou de médecins, dont le professeur Jean-François Toussaint et l’épidémiologiste Laurent Toubiana sont les plus médiatisés, qui tiennent sur les plateaux de télévision un discours qui va à l’encontre de la doxa concernant l’appréhension de l’épidémie. Pour eux, la crise ne connaît plus aujourd’hui le niveau de gravité du printemps et il importe d’éviter les discours anxiogènes et les mesures restrictives, potentiellement dommageables pour la vie économique et sociale. Séduisant nécessairement les médias en raison de leur discours à contre-courant (même si une forme de « censure » existe également parallèlement comme en a témoigné par exemple le refus in extremis du Journal du Dimanche de publier une tribune signée par le camp des "rassuristes") ces personnalités sont les vedettes (souvent malgré eux) de moments d’anthologie, que les chaînes de télévision ne résistent pas à repasser en boucle, telle l’altercation entre le professeur Jean-François Toussaint et le docteur Martin Blachier la semaine dernière sur LCI.
Des « abrutis » qui nuisent à ceux qu’ils prétendent défendre
Cependant, au-delà de ces micro-événements qui font partie du cirque médiatique, certains se montrent graves. Les messages des rassuristes seraient dangereux, parce qu’ils pourraient entraîner un relâchement des fameuses mesures "barrières", alors que l’on constate une augmentation des admissions dans les services de réanimation et une très légère progression du nombre de morts. C’est l’inquiétude majeure par exemple du professeur Axel Kahn, président de la Ligue contre le cancer, qui n’hésite pas à qualifier les "rassuristes" « d’abrutis ». « Ils prétendent défendre les autres malades, tous ceux qui ont pâti du confinement en raison de retards de soins ou de diagnostic. Mais si leur discours conduit à affaiblir l’adhésion de la population aux gestes barrières, il y aura un nouveau confinement et ce sont justement ces malades qui en souffriront » avertit-t-il.
Masque : un homme de paille
D’une façon plus précise, une des grandes critiques faite aux rassuristes est de conserver quelques distances avec le masque. Ce reproche exaspère ceux qui soutiennent la nécessité d’une perception différente des faits. « La question du masque masque l’essentiel du problème, à savoir la suspension de certaines libertés fondamentales au nom du sacro-saint impératif sanitaire. Ce fétichisme sur la question du masque n’est qu’un élément de communication visant à ridiculiser les positions de ceux qui s’inquiètent de l’érosion de l’État de droit dans notre pays. Cette technique argumentative lamentable porte un nom : homme de paille » s’emporte ainsi par exemple le rédacteur en chef de Contrepoints, Frédéric Mas. De fait, majoritairement, les médecins et chercheurs "rassuristes" veulent rappeler que si le masque dans les espaces clos est nécessaire et utile, sa pertinence dans l’espace extérieur, en raison d’une diminution très nette du risque de contamination, n’a jamais pu être mise en évidence. Or, cette position est partagée par une grande majorité des experts. Ainsi, Le Monde a la semaine dernière interrogé plusieurs « scientifiques » (dont aucun ne peut être rangé dans la catégorie "rassuristes") dont la conclusion générale, avec quelques nuances, est que le masque en extérieur peut principalement être défendu parce qu’il s’inscrit dans la volonté de garder en éveil la population. « Il n’existe aucune certitude sur l’utilité des masques à l’air libre, mais, par prudence, dans un contexte de communications gouvernementales contradictoires, il faut continuer à les porter. Tel est le consensus général, en apparence paradoxal, qui se dégage de notre consultation. Une écrasante majorité des scientifiques que nous avons interrogés approuvent leur port dans les lieux clos, en citant les nombreuses études concluantes sur leur efficacité. Mais dès que l’on aborde l’utilité du masque en extérieur, le consensus se brise. La faute, en premier lieu, à une littérature académique plus chiche sur le sujet, regrettent à l’unanimité les scientifiques sondés. En dehors des configurations où la foule est groupée (marchés, centres-villes, manifestations), ils sont nombreux à penser que son utilité reste à démontrer ». Ainsi, en nuançant leur propos sur les masques, les rassuristes n’expriment qu’une position "politique" différente : à leurs yeux, compte tenu de leur inutilité en extérieur, ils ne devraient pas être imposés.