Par Didier Quella-Guyot 3 mai 2019
Il faut un petit grain de folie pour se mettre à dessiner, à peindre, à écrire, mais qu’en est-il chez ceux que l’on traitait de fous, qu’on envoyait à l’asile d’aliénés, qu’on privait de vie publique ? C’est ce que tente de raconter « Enferme-moi si tu peux » en évoquant six créateurs, célèbres ou pas, dont la reconnaissance artistique fut problématique sous l’appellation d’art brut ; c’est aussi ce qu’évoque « La Trahison du réel » à travers le destin édifiant d’Unica Zürn qui vécut avec Hans Bellmer ...
Les auteurs d’« Enferme-moi si tu peux » ont choisi d’évoquer des destins aussi exceptionnels qu’opposés. Augustin Lesage, par exemple, né dans une famille de mineurs et qui se met au fond des galeries où il s’épuise à entendre des voix ! Celles-ci le poussent vers une peinture miniaturiste et très colorée qui contraste fortement avec son environnement habituel. Au total, plus de 800 toiles naitront « sous l’influence des esprits » !
Il n’est pas le seul à entendre des voix : Magde Gill, elle aussi. Après l’orphelinat et un travail comme bonne, elle se met à entendre une dénommée Myrninerest qui va lui inspirer des dessins dont elle n’a jamais perçu l’intérêt ou l’originalité. Les musées après sa mort se les sont arrachés. Les femmes ont évidemment particulièrement souffert de l’interdit artistique qui pesait sur elles. Aloïse en est un autre exemple. Maltraitée par une sœur ainée tyrannique, elle s’inventera des amours, écrivant des choses curieuses, puis on l’enferma pendant plus de 40 ans dans un asile où elle se mettra à dessiner inlassablement sans jamais reconnaitre son talent.