Il y a un an, l'enquête Ipsos "France 2013 : les nouvelles fractures" faisait l'effet d'un coup de tonnerre médiatique, soulignant combien la crise avait exacerbé la tentation du repli national et le rejet du politique. Le Monde titrait sur"les crispations alarmantes de la société française". "Le poujadisme s'est enraciné en France", estimait-elle. L'idéologie anti-autoritaire des années 60-70 a reflué de manière spectaculaire. 87 % des Français estiment qu'on a besoin d'un vrai chef en France pour remettre de l'ordre et 86 % (toute tendance politique confondue) estiment que l'autorité est une valeur qui est souvent trop critiquée. Et la nouvelle édition que vient de relayer Ipsos ne fait que renforcer cette tendance. Certes, ce sondage, encore plus que d'autres, est à prendre avec beaucoup de précautions, tant il semble chercher à faire démonstration. Le politologue Alain Garigou de l'Observatoire des sondages et le sociologue Renaud Cornand sur le blog de Laurent Mucchielli en ont brillamment montré toutes les limites, insistant sur son manque de représentation, sur son côté manipulatoire et sa capacité à amalgamer des différences, ou encore sur la polysémie du terme même d'autorité, qui ne recouvre certainement pas la même réalité pour les sympathisants du Front national et ceux du Front de gauche. Si la défiance s'exacerbe, encore faut-il rappeler que la collaboration, la réinvention du lien social, elle, est une réponse, pragmatique, des Français à ce repli sur soi, estimait la directrice de TNS Sofres dans le Monde.fr en réponse au sondage de son concurrent.
Notre besoin d'autorité est impossible à rassasier
Reste que si cette représentation résonne en nous, c'est malgré tout parce qu'elle donne l'impression de traduire un sentiment, un malaise que nous ressentons chaque jour un peu plus face aux crispations de la société. Ce sentiment que ce besoin d'autorité est partout plus présent : en politique bien sûr, où le système favorise la primauté des représentants au détriment de toute forme de démocratie participative, mais plus encore dans le monde du travail, où le système favorise toujours plus une organisation pyramidale fondée sur le contrôle.