Un étrange arbre rougeoyant s’échappe d’une forêt tropicale. Le tableau de Karl Ernst Papf, peintre allemand du XIXe siècle, intitulé l’Homme civilisé perdu en contemplation dans l’immense forêt amazonienne, est l’œuvre préférée de Moussa. Fantasmer une forêt, «on fait tous ça en détention, on travaille l’imaginaire».
Aujourd’hui, Moussa est commissaire d’exposition. D’habitude, il est prisonnier. Avec dix autres condamnés à de longues peines, il a monté une exposition au cœur du centre de détention Sud Francilien, à Réau, en Seine-et-Marne, l’une des prisons les plus récentes et technologiques de l’Hexagone. Epaulés par Vincent Gille, chargé d’études documentaires à la maison de Victor Hugo, à Paris, et par une équipe de la Réunion des musées nationaux-Grand Palais, les onze détenus ont choisi le thème de l’événement - le voyage -, sa scénographie - organisée autour des quatre continents -, les tableaux et objets présentés - près de 90, dont la plupart sont des originaux. Le Louvre avait exposé, en 2011, dix reproductions de tableaux à la maison centrale de Poissy, «mais jamais des œuvres originales n’avaient été prêtées à une prison pour une aussi longue durée»,explique Jean-Paul Cluzel, président de la Réunion des musées nationaux-Grand Palais.