Si le revenu universel suscite encore un grand scepticisme, la pandémie et l’explosion des dépenses sociales ont fait évoluer le débat sur la refonte des prestations dans les États providence. Les aides monétaires – notamment celles mises en œuvre pendant la pandémie – se révèlent un moyen simple et efficace de répondre à de nombreux besoins sociaux. Certes, depuis un an, il n’y a eu quasiment aucun versement récurrent sans critère de sélection. Mais si l’heure du revenu universel n’est pas encore arrivée, l’épreuve du Covid-19 a peut-être accéléré les choses.
Le pauvre hère a perdu son travail, sombré dans l’alcool et survécu à une tentative de suicide. La nuit, Calixte (1) hurle qu’il a «le mauvais œil» sur lui. «Si je lui avais diagnostiqué une névrose ou dit que les esprits n’existaient pas, je n’aurais pas pu le soigner», estime Jacques Brandibas, un des pionniers de l’ethnopsychiatrie à la Réunion. Au contraire, le psychologue accompagne son patient chez une guérisseuse à l’orée de la forêt de la roche écrite, sur les hauteurs de Saint-Denis. Il laisse «Madame Marie» affirmer que l’épouse et la maîtresse de l’homme lui ont chacune lancé un sort, l’une pour l’avoir trompée, l’autre pour ne pas avoir quitté sa femme… Calixte a pu reprendre une vie normale après cette séance, assure le praticien aujourd’hui à la retraite, «alors que les soins à l’établissement public de santé mentale n’avaient rien donné».