"Je voulais faire le portrait objectif de
l'immense complexité de ces moments de la vie". Avec "Chronic",
qui sort mercredi sur les écrans, le réalisateur mexicain Michel Franco offre
le portrait d'un aide-soignant (Tim Roth) totalement dévoué à l'accompagnement
de patients en fin de vie. Un sujet O combien d’actualité, mais assez peu
montré au cinéma. Le jeune réalisateur, né en 1979, dont le film a reçu le prix
du scénario au dernier Festival de Cannes. L'idée a germé lorsqu'il a assisté
aux derniers mois de vie de sa grand-mère paralysée. "J'étais très touché
et intrigué par l'infirmière qui s'est occupée d'elle", a-t-il raconté à
Cannes.
"Chronic" raconte donc l'histoire de David,
aide-soignant à domicile peu loquace, qui vit au rythme de ses patients au
point de s'approprier parfois leur histoire. L'intrigue très réaliste se
concentre sur la relation entre David et quatre malades chroniques successifs.
Le soignant méticuleux se donne tout entier à cette tâche ingrate et physique,
touchant à l'intime, lorsqu'il lave les patients ou les prend dans ses bras
dans des instants de désespoir. "Je me suis effacé le plus possible pour
incarner le personnage, un gars très silencieux, très perturbant à jouer",
a analysé à Cannes l'acteur britannique, qui a travaillé son rôle au contact de
plusieurs infirmières, apprenant les gestes techniques. L’aide-soignant
chroniquement dépressif en raison d'un drame qui a fait exploser sa propre
famille, se trouve également à un moment critique de sa vie. Après des années
d'absence, il tente de renouer maladroitement avec sa fille étudiante en
médecine, avec laquelle il communique moins bien qu'avec ses patients.
Impuissants, les proches des malades réagissent
différemment dans le film: en retrait, absents ou encore en embuscade,
surveillant avec suspicion ou jalousie la subite intimité qui se noue entre
l'infirmier et le patient. "Je n'ai pas voulu montrer les familles du
doigt", précise Michel Franco. "C'est simplement ce qui se passe dans
la vraie vie." Le cinéaste s'attaque sans le moindre pathos au sujet
sensible de l'accompagnement à la mort et à celui de l'euthanasie, puisqu’une
des patientes la réclame. Michel Franco et Tim Roth avaient d'ailleurs défendu
à Cannes le droit des malades incurables à mettre fin à leur vie. "Ça
devrait être légal et fait de manière appropriée", avait plaidé le
réalisateur, dont "Chronic" est le quatrième long métrage.
(avec AFP)