Politique de santéVers l'An 1 des projets régionaux de santé...
Emmanuelle Wargon, secrétaire générale des ministères chargés des Affaires sociales"Nous aurons bien les 26 projets régionaux de santé à Noël"
27.07.12 - HOSPIMEDIA
Alors que les derniers Projets régionaux de santé (PRS) sont en voie de finalisation dans les ARS, Emmanuelle Wargon dresse pour Hospimedia un bilan d'étape de leur élaboration, du travail réalisé et en cours. Elle répond également aux réserves émises sur le manque de lisibilité des projets.
Hospimedia : "Depuis l'adoption par l'ensemble des régions en 2011 de leurs Plans stratégiques régionaux de santé (PSRS) (lire notre brève du 08/08/2011), une quinzaine de régions sur 26 ont annoncé avoir arrêté leurs PRS sur le premier semestre 2012. Où en est-on de ces projets ?
Emmanuelle Wargon : Nous avons à ce jour treize ARS qui ont adopté leur PRS (1), neuf l'ont approuvé en partie mais il manque encore l'adoption soit de programmes, soit de tout ou partie du Schéma régional d'organisation des soins (SROS) selon les cas et pour lesquels les volets manquants sont attendus pour septembre ou octobre. Il s'agit de Guadeloupe, Guyane, Haute-Normandie, Languedoc-Roussillon, Lorraine (2), Martinique, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais, Picardie. Enfin, quatre sont un peu plus en retard, Île-de-France, Rhône-Alpes, Corse et Basse-Normandie qui, elles, auront un PRS à la fin de l'année. Nous aurons donc bien 26 projets régionaux de santé à Noël...
Emmanuelle Wargon : Nous avons à ce jour treize ARS qui ont adopté leur PRS (1), neuf l'ont approuvé en partie mais il manque encore l'adoption soit de programmes, soit de tout ou partie du Schéma régional d'organisation des soins (SROS) selon les cas et pour lesquels les volets manquants sont attendus pour septembre ou octobre. Il s'agit de Guadeloupe, Guyane, Haute-Normandie, Languedoc-Roussillon, Lorraine (2), Martinique, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais, Picardie. Enfin, quatre sont un peu plus en retard, Île-de-France, Rhône-Alpes, Corse et Basse-Normandie qui, elles, auront un PRS à la fin de l'année. Nous aurons donc bien 26 projets régionaux de santé à Noël...
H. : Comment expliquer les différences de calendrier entre les régions ?
E.W. : Pour l'Île-de-France et Rhône-Alpes, le calendrier est lié à la taille des régions et, de plus, la région parisienne avait adopté son SROS avec retard. Le volume de travail est quand même très significatif pour ces régions qui avaient considéré qu'il fallait se donner suffisamment le temps de mener à bien ce PRS. En Corse, c'est un peu lié à l'occupation pendant deux mois l'année dernière de l'ARS, qui l'a désorganisée (lire notre brève du 24/05/2011) et il y a eu un changement de direction. Pour sa part, la Basse-Normandie a considéré qu'il était plus pertinent de finir les concertations politiques après les échéances électorales (lire la partie 2 du dossier) et que cela faisait plus de sens de mettre en consultation un document après l'éventuelle alternance qui s'est produite. Ensuite, dans chaque région, le SROS, volet le plus technique, prend forcément du temps, ainsi que deux autres points, en fonction du contexte local : les zonages dans le SROS ambulatoire, selon les difficultés des territoires, et le schéma médico-social, plus ou moins facile en fonction des divergences de vues stratégiques entre conseils généraux dans une région.
E.W. : Pour l'Île-de-France et Rhône-Alpes, le calendrier est lié à la taille des régions et, de plus, la région parisienne avait adopté son SROS avec retard. Le volume de travail est quand même très significatif pour ces régions qui avaient considéré qu'il fallait se donner suffisamment le temps de mener à bien ce PRS. En Corse, c'est un peu lié à l'occupation pendant deux mois l'année dernière de l'ARS, qui l'a désorganisée (lire notre brève du 24/05/2011) et il y a eu un changement de direction. Pour sa part, la Basse-Normandie a considéré qu'il était plus pertinent de finir les concertations politiques après les échéances électorales (lire la partie 2 du dossier) et que cela faisait plus de sens de mettre en consultation un document après l'éventuelle alternance qui s'est produite. Ensuite, dans chaque région, le SROS, volet le plus technique, prend forcément du temps, ainsi que deux autres points, en fonction du contexte local : les zonages dans le SROS ambulatoire, selon les difficultés des territoires, et le schéma médico-social, plus ou moins facile en fonction des divergences de vues stratégiques entre conseils généraux dans une région.
H. : Le calendrier initial, prévoyant des PRS arrêtés officiellement pour fin 2011, même assoupli par les ministres entre-temps, a bien évolué...
E.W. : Le calendrier initial était très, voire trop ambitieux. Terminer les PRS en un an, c'était hors de portée. Finalement, les ARS l'ont fait en deux, voire un et demi pour les plus rapides mais avec des documents assez lourds, stratégiques, qui engagent pour cinq ans et qui ont vocation à être co-construits et discutés. On ne peut pas à la fois demander un travail de profondeur fait avec les acteurs et demander à ce qu'il soit fait vite, sinon on aboutit à un document prescriptif, non concerté. Nous avons donc choisi une voie intermédiaire en desserrant le calendrier.
E.W. : Le calendrier initial était très, voire trop ambitieux. Terminer les PRS en un an, c'était hors de portée. Finalement, les ARS l'ont fait en deux, voire un et demi pour les plus rapides mais avec des documents assez lourds, stratégiques, qui engagent pour cinq ans et qui ont vocation à être co-construits et discutés. On ne peut pas à la fois demander un travail de profondeur fait avec les acteurs et demander à ce qu'il soit fait vite, sinon on aboutit à un document prescriptif, non concerté. Nous avons donc choisi une voie intermédiaire en desserrant le calendrier.
H. : Comprenez vous la demande de moratoire de la Fédération hospitalière de France (FHF) (3) sur les PRS (lire notre brève du 25/06/2012), pointant fin juin l'illisibilité et la complexité des projets et que les acteurs auraient du mal à s'approprier ?
E.W. : Je comprends en un sens que les travaux aient pu paraître longs, assez touffus et apparaissant, par leur transversalité, moins précis acteur par acteur dans certains cas. Auparavant, les hospitaliers avaient un interlocuteur dédié [les ex-Agences régionales de l'hospitalisation, ARH, NDLR] et les sujets étaient plus clairement bilatéraux. Aujourd'hui, l'ARS est aussi l'interlocutrice de la ville, du médico-social, le contact est moins direct. Il faut retrouver un lien avec les acteurs hospitaliers, qui est forcément un peu différent du précédent. Ceci dit, nous avons des contacts réguliers avec la FHF et les acteurs hospitaliers, comme les autres, ont été très associés aux PRS. Il a toujours été clair que la campagne de contractualisation avec les établissements se déclenchait à l'adoption du PRS et durait six mois. Je pense qu'il est important qu'elle ait lieu et mette en cohérence l'action de l'ARS vis-à-vis de chaque établissement d'un côté et puis son action transversale de l'autre. Par ailleurs, il y a toujours du cas par cas, des endroits où l'on peut se donner un peu de temps et travailler aux marges.
E.W. : Je comprends en un sens que les travaux aient pu paraître longs, assez touffus et apparaissant, par leur transversalité, moins précis acteur par acteur dans certains cas. Auparavant, les hospitaliers avaient un interlocuteur dédié [les ex-Agences régionales de l'hospitalisation, ARH, NDLR] et les sujets étaient plus clairement bilatéraux. Aujourd'hui, l'ARS est aussi l'interlocutrice de la ville, du médico-social, le contact est moins direct. Il faut retrouver un lien avec les acteurs hospitaliers, qui est forcément un peu différent du précédent. Ceci dit, nous avons des contacts réguliers avec la FHF et les acteurs hospitaliers, comme les autres, ont été très associés aux PRS. Il a toujours été clair que la campagne de contractualisation avec les établissements se déclenchait à l'adoption du PRS et durait six mois. Je pense qu'il est important qu'elle ait lieu et mette en cohérence l'action de l'ARS vis-à-vis de chaque établissement d'un côté et puis son action transversale de l'autre. Par ailleurs, il y a toujours du cas par cas, des endroits où l'on peut se donner un peu de temps et travailler aux marges.
H. : Quel bilan peut-on tirer du travail réalisé, et encore en cours, dans le cadre des PRS ?
E.W. : De mon point de vue, l'exercice des PRS a plutôt bien marché, même si évidemment c'est très lourd et compliqué dans sa mécanique. Qualitativement, cet exercice a l'avantage d'avoir remis en marche une réflexion et un diagnostic sur les besoins au niveau régional et mis dans le même mouvement tous les acteurs, hospitaliers, libéraux, médico-sociaux, associations de patients (...), et bien sûr les élus, qui sont également des acteurs importants. C'est forcément long, et dans des instances lourdes, comme la Conférence régionale de santé et de l'autonomie [CRSA] que la loi a composée avec beaucoup de membres. Mais cela pose réellement la vertu de la concertation, laquelle permet de fonder et de justifier les actions plus précises qui se déclinent dans les schémas avec les autorisations d'activité, et puis dans les programmes par territoire. Quasiment toutes les ARS se disent aujourd'hui : "Il faut que je décline mon PRS territoire par territoire avec des programmes d'action plus précis et pratiques". Car l'enjeu, au final, n'est pas simplement d'écrire des documents stratégiques mais bien ensuite de les mettre en œuvre dans la réalité".
Propos recueillis par Caroline Cordier
(1) Il s'agit des ARS d'Alsace, Aquitaine, Auvergne, Bourgogne, Bretagne, Centre, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Limousin, Océan Indien (La Réunion et Mayotte), Pays-de-la-Loire, Poitou-Charente, Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA).
(2) L'ARS Lorraine a précisé à Hospimedia que son PRS avait été adopté le 20 juillet dernier et mis en ligne. Un site Internet dédié devrait être lancé à la rentrée.
(3) Sollicitée par Hospimedia à ce sujet, la FHF n'a pas souhaité "communiquer avant la rentrée sur cette question".
Un exercice complexe et novateur pour les ARS
27.07.12 - HOSPIMEDIA
Concertation approfondie, ampleur de la tâche, spécificités régionales de l'offre de soins, travail renforcé dans la territorialité... les arguments ne manquent pas aux ARS, afin de justifier d'un calendrier desserré pour l'adoption de leur PRS. Tour d'horizon des choix réalisés et contraintes rencontrées dans certaines agences.
Outre le Plan stratégique régional de santé (PRSR), que toutes les régions ont adopté en 2011, les ARS doivent élaborer, en concertation avec les différents acteurs, a minima dans le cadre de leur PRS trois schémas régionaux et quatre programmes(1). Auxquels s'ajoutent, au gré des régions, d'autres programmes plus spécifiques ou annexes explicatives. Vient alors le temps officiel de consultation de deux mois auprès des instances, avant l'arrêté de publication du PRS. Une mécanique ambitieuse et complexe et, surtout, un premier exercice pour les agences, conduisant le ministère à desserrer le calendrier initial (lire notre article du 16/12/2010) d'une année, pour fixer une nouvelle échéance butoir à fin 2012. Si une petite quinzaine d'agences a d'ores et déjà adopté ce document (lire la Partie 1 de ce dossier), d'autres, par choix ou contraintes inhérentes à leur région, devraient finalement le faire à l'automne et, pour quatre d'entre elles, d'ici à la fin de l'année.
Parenthèse de la période de réserve
Plusieurs ARS ont délibérément choisi de laisser passer les échéances électorales de mai et juin. "La période de réserve gênait dans le dialogue avec l'ensemble des acteurs, aussi nous avions lancé en amont la concertation depuis plusieurs mois", indique Christian Dubosq, Directeur général (DG) de l'ARS de Picardie, qui va lancer sa consultation officielle le 28 septembre sur un projet comprenant notamment des documents "stratégiques transversaux" sur la télé-santé ou les addictions. "Il me paraissait assez évident de ne rien arrêter avant les présidentielles et les législatives sans connaître les orientations et les cadrages du nouveau gouvernement", indique Pierre-Jean Lancry, DG de l'ARS de Basse-Normandie, dont le PRS devrait être arrêté fin novembre. Beaucoup de temps a été passé sur le Schéma régional d'organisation des soins (SROS), a-t-il expliqué, dans "une région où l'offre hospitalière est importante par rapport à la taille" de la circonscription.
Même parenthèse liée à période de réserve pointée par Alain Corvez, directeur de la stratégie et de la performance à l'ARS du Languedoc-Roussillon, dont le PRS doit être arrêté fin septembre, et dont le Programme régional d'accès à la prévention et aux soins (PRAPS) a été particulièrement travaillé dans "l'une des régions où l'on rencontre le plus de précarité en France".
En Corse, la consultation officielle sur le PRS va être lancée le 17 septembre, "après consultation des grands élus, de la CRSA*, des fédérations", en vue d'une adoption début décembre, a indiqué à Hospimedia le DG, Jean-Jacques Coiplet, arrivé en mars à l'agence (lire notre brève du 29/02/2012). "Les délais ont été desserrés pour deux raisons, précise-t-il : la volonté de prolonger la concertation devant la démarche participative très intéressante en Corse et par respect du souci du travail des collaborateurs en interne, impacté par le conflit social de l'été dernier" (lire notrebrève du 29/02/2012). "Nous avons par ailleurs travaillé longuement sur les taux de fuite des patients partis se faire soigner sur le continent, sur la problématique de l'accès aux soins de premiers recours ou encore le maintien des équipements lourds", a-t-il expliqué, ainsi qu'à la mise en place de partenariats, comme par exemple récemment en cancérologie (lire notre brève du 23/07/2012).
Premier exercice de style
Taille des régions oblige, les ARS Rhône-Alpes et d'Île-de-France font naturellement valoir l'ampleur du travail engagé, notamment dans le cadre du SROS, volet le plus technique. "Au vu de l'importance et de la masse de travail à conduire et de l'exigence de qualité dans la concertation avec les acteurs engagés, il était naturel que le PRS soit décalé d'un an", souligne Nicolas Péju, directeur de la démocratie sanitaire à l'agence francilienne, qui précise que la consultation officielle démarrera le 27 septembre en vue d'un arrêté final avant le 31 décembre. "C'est tout de même le premier exercice de ce type et, outre l'ampleur du SROS et sa vingtaine de volets dans notre région, il a fallu mener simultanément le travail pour un projet globaldans un cadre nouveau", appuie-t-il. Alors que des critiques ont émané fin juin de la Fédération hospitalière de France (FHF) pointant les délais d'élaboration des PRS, trop contraints, "n'ayant pas permis un exercice plein et entier de la démocratie sanitaire" (lire notre brève du 25/06/2012), Nicolas Péju estime que cela "semble pour notre ARS injustifié, voire paradoxal, alors que nous avons précisément fait le choix d'une concertation longue, avec des fédérations largement associées".
"Le PRS est un travail complexe et lourd à mettre en œuvre, et pour une région telle que Rhône-Alpes, nous avons voulu prendre notre temps", confie la directrice adjointe de la stratégie et des projets à l'ARS, Catherine Malbos, qui indique que le PRSdevrait être arrêté avant le 30 novembre. Elle précise que le temps d'élaboration s'est allongé du fait du choix d'adosser aux trois schémas des "documents thématiques chapeau" transversaux entre prévention/sanitaire/médico-social portant, par exemple, sur les droits des usagers en santé ou encore les Systèmes d'information en santé (SIS). Ce temps s'explique également, indique-t-elle, par la volonté de travailler en amont sur la "territorialisation" des programmes, "un travail que d'autres agences, peut-être plus promptes à publier un PRS, devront effectuer en aval".
Démocratie sanitaire
À l'évocation de la complexité de l'exercice de démocratie, Christian Dubosq rétorque que cette "observation valait il y a douze mois, l'exigence de transversalité dans nos travaux étant à la fois astreignante pour les ARS et pour les acteurs, mais ce premier exercice a eu un effet pédagogique général". "Cet apprentissage de la démocratie sanitaire, nous l'avons fait tous ensemble", renchérit Christian Ferro, directeur de l’organisation de l'offre de santé à l'ARS de Haute-Normandie, dont le PRS doit être validé en octobre après finalisation d'un programme sur la démographie des professions de santé. "Cet exercice a mis l'ARS face à ses responsabilités quant aux attentes importantes des acteurs, souligne-t-il. Au final, nous avons été plutôt performants, sur un an et demi, quand nous avons en ARH [l'ex-Agence régionale de l'hospitalisation, NDLR] passé deux ans sur un SROS qui était une véritable usine à gaz".
Quant à l'éventuelle absence de lisibilité des PRS, pointée fin juin par la FHF, Christian Dubosq insiste sur "toute l'importance des explications orales régulières aux participants en amont" de la publication des PRS. "Des documents trop écrits, trop volumineux... J'entends ces arguments mais l'essentiel est d'avoir fait du bon travail et les acteurs sont surtout maintenant très en attente sur la lisibilité des actions", commente Christian Ferro. "Chacun pourra trouver, dans un ensemble si vaste, qu'il n'y a pas assez dans la partie qui le concerne mais c'est un outil global à s'approprier, le changement de paradigme prendra du temps", estime Alain Corvez. Reste que les acteurs locaux vont devoir s'approprier des PRS de 1 500 pages pour certains, où le SROS représente 650 pages parfois. D'où la promesse d'un travail explicatif et pédagogique ultérieur de nombreuses ARS à travers des documents de synthèse, des "plans d'actions opérationnels" pour les différents schémas, ou la mise en place de référents internes et d'équipes "transverses" en agence sur le PRS. Ceci avant d'entamer évidemment le cœur de l'ouvrage, sans doute plus complexe encore, la mise en œuvre...
Caroline Cordier
* Conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA)
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