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dimanche 9 janvier 2011

L'hôpital psy pour détenus est enfin vraiment sur les rails
27 décembre 2010


Il sera construit à Seclin, derrrière l'hôpital. Un projet longtemps retardé. Soixante lits seront ouverts à terme pour soigner les détenus souffrant de troubles psychiatriques. Ils sont nombreux.
FLORENCE TRAULLÉ

La loi remonte à 2002. Elle prévoyait la création d'UHSA (Unités hospitalières spécialement aménagées) pour prendre en charge les détenus souffrant de troubles psychiatriques. Huit ans plus tard, une seule unité existe en France, ouverte en juin à Lyon. Mi-décembre, le jury a retenu une équipe pour la réalisation de l'UHSA qui sera construit derrière l'hôpital de Seclin. « On est dans la phase finale du choix » , explique Christian Caplier, un des directeurs adjoints du CHRU de Lille, l'établissement qui aura la charge médicale des lieux. Début janvier, ça devrait être bouclé, le projet pressenti devant être finalisé. Ensuite, dépôt de la demande de permis de construire, soumission du projet aux Bâtiments de France, vu la proximité avec l'ancien hôpital de Seclin, un site classé, fouilles d'archéologie préventive... Christian Caplier mise sur une ouverture d'une première partie de l'UHSA avant Noël 2012. Enfin.
Il n'est que temps. Alain Jego, directeur régional de l'administration pénitentiaire, qui sera chargée de sécuriser les lieux, est partisan de ce type de nouvelles structures : « C'est une vraie nécessité. La prison est devenue un lieu asilaire pour des personnes malades et cela dépasse largement ses fonctions. » La bonne solution, ces nouveaux hôpitaux psychiatriques entièrement dédiés aux détenus ? « En tout cas, il faut essayer. On n'a pas le choix. » Lors d'une récente journée d'études sur le thème psychiatrie et justice, le sénateur nordiste Jean-René Lecerf, devenu spécialiste des questions carcérales, évaluait à « 10 % le nombre de personnes incarcérées qui sont dans un état psychiatrique tel que leur peine n'a strictement aucun sens pour eux ». Un constat que partage le professeur Pierre Thomas (lire ci-dessous) qui, en temps que responsable du SMPR (le service médico-psychologique régional, chargé des soins psychiatriques en prison) est le maître d'oeuvre du projet d'UHSA pour le volet médical.

Si Jean-René Lecerf dénonce les conditions actuellement déplorables dans lesquelles s'effectuent les soins psychiatriques en prison, il s'interroge sur le principe même des UHSA même si « c'est une avancée considérable pour les soins apportés aux malades lourds. Aujourd'hui, la seule option pour les soigner ailleurs qu'en détention, c'est l'hospitalisation d'office ». Problème : les hôpitaux psychiatriques ne sont plus adaptés à ces patients qui nécessitent une surveillance. Quelques UMD (unités pour malades difficiles) existent bien en France mais trop peu nombreuses. Et elles ont besoin de place pour des patients qui n'ont pas, majoritairement, eu de problèmes avec la justice. Résultat : dans les hôpitaux, « il arrive que des détenus hospitalisés soient attachés sur leurs lits. Ils n'ont alors qu'une envie : retourner au plus vite en prison ». Où les soins touchent très vite leurs limites. Un cercle vicieux.
Jean-René Lecerf, qui avoue que la découverte de l'univers carcéral aura été « le grand choc » de sa vie de parlementaire, se demande si la création des UHSA ne poussera pas « les jurés à envoyer en prison, avec bonne conscience, des personnes qui n'ont rien à y faire et qui doivent, d'abord et avant tout être soignées ». Pour lui, la vraie question est « d'éviter que ces gens entrent en prison ».
Quand il avait été question de créer l'UHSA régionale à Saint-André (le maire Olivier Henno s'y était violemment opposé), des psychiatres s'interrogeaient sur l'opportunité d'un tel lieu, résumé par certains à un « hôpital prison ». Le professeur Thomas assure que, désormais, « il n'y a plus de polémique » et, de toute façon, « vu la situation actuelle, lamentable, l'UHSA ne peut qu'être un plus. Tout le monde l'appelle de ses voeux ».
Restera à recruter les personnels médicaux. Si pour les psychiatres (quatre équivalents temps plein), ça ne devrait pas poser problème, Christian Caplier sait, d'avance, que trouver des infirmiers (une cinquantaine) « ne sera pas facile, d'autant que le CHR devra faire face en 2012 à de nombreux départs en retraite ».

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