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mercredi 8 septembre 2010




“Les Médicamenteurs”
de Stéphane Hore 

L’expertise médicale en question

L’indépendance et la fiabilité de l’expertise en santé publique sont au cœur de l’enquête menée par Stéphane Horel, journaliste indépendante, qui a également réalisé un documentaire sur ce sujet en 2009.

Lorsqu’elle décrit le Comité d’urgence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) contre la pandémie grippale de la manière suivante : “Un comité que l’on peut (…) qualifier de secret, entièrement soustrait au regard démocratique, est habilité à prendre des décisions aux conséquences mondiales sans avoir à rendre des comptes à qui que ce soit”, ce n’est pas l’opinion de quelqu’un qui voit des conspirations partout, mais une réalité.

Ce Comité est présidé par l’universitaire australien John McKenzie, mais le nom des autres experts est effectivement tenu secret - afin d’éviter les pressions sur eux, explique l’OMS - et ne sera révélé qu’une fois que la structure aura été dissoute.

L’auteure admet qu’il y aura toujours des conflits d’intérêts dans ce domaine, mais refuse de baisser les bras, et affirme qu’il est indispensable d’en limiter le nombre et les conséquences.

Le tableau qu’elle dresse, à travers plusieurs histoires où l’on voit que les intérêts des industriels du médicament ont, pour le moins, été pris en compte au détriment des finances publiques, est impressionnant.

Par exemple, le premier groupe pharmaceutique français, Sanofi-Aventis, fabrique un médicament vedette, le Plavix, prescrit à des malades ayant fait un accident vasculaire cérébral. “C’est le deuxième médicament le plus vendu au monde, après le Tahor de Pfizer. Ventes 2008 : 6,1 milliards d’euros, en croissance de 15,3 %”, écrit Stéphane Horel. Il est aussi le médicament le plus onéreux pour la Sécurité sociale : 450 millions d’euros remboursés en 2008. Or il ne possède une supériorité par rapport à un traitement par l’aspirine que “dans un nombre limité de cas”.

Pourtant, différentes instances lui ont accordé une évaluation très positive, tout en se défendant fermement d’avoir tenu compte de la nationalité du laboratoire ou de ses liens supposés avec le pouvoir en place.

Très documentée, cette enquête aura demandé beaucoup d’obstination. Si les agences de sécurité sanitaire ont fait des progrès en matière de transparence, les grandes institutions et les industriels peuvent faire mieux.

Les Médicamenteurs de Stéphane Horel, Éditions du Moment, 324 pages

Paul Benkimoun


Article paru dans l’édition du 16.03.10

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