Pas de trêve estivale pour l'hôpital Saint-Jean-de-Dieu
le 17.08.2009 04h00
En août, ça continue de bouchonner à l'entrée et à la sortie de cet hôpital lyonnais. Les médecins doivent sans cesse chercher des solutions pour assurer le suivi des soins aux patients.
http://www.leprogres.fr/fr/france-monde/article/1885680,192/Pas-de-treve-estivale-pour-l-hopital-Saint-Jean-de-Dieu.html
Peu de malades et de soignants dans le parc et dans les couloirs : ce mardi, l'hôpital psychiatrique de Saint-Jean-de-Dieu, dans le 8 e arrondissement de Lyon, semble gagné par la torpeur aoûtienne. A l'unité d'hospitalisation de courte durée (UHCD), le service « post urgences », seule une jeune fille agitée sort sans cesse de sa chambre pour venir dans le bureau infirmier, véritable tour de contrôle située face à l'entrée sécurisée. Comme la plupart des patients, elle est envoyée par les urgences des Hospices civils de Lyon. « Il n'y a pas encore moyen de lui parler », explique le Dr Lionel Reinheimer, chef du service, précisant que sous l'effet des médicaments, ces crises aiguës « ne dépassent pas les 48 heures ». Comme cette jeune fille, déjà venue ici il y a deux ans, de nombreux patients sont hospitalisés en urgence car ils ont arrêté leur traitement. En théorie, ils doivent quitter l'UHCD au bout de 72 heures, le plus souvent pour aller en clinique ou dans une autre unité de l'hôpital. Quand ce circuit fonctionne bien, « c'est valorisant de voir un patient hyper mal ressortir calmé », remarque le Dr Reinheimer. Mais depuis des mois, c'est « le bouchon continu »: il y a en permanence 8 à 9 patients des deux UHCD (23 lits et 2 chambres d'isolement) qui attendent une place ailleurs. Des chambres de patients en permission sont utilisées en leur absence, des lits supplémentaires installés dans des chambres individuelles voire dans des salles d'activité... Les malades en crise attendent plusieurs heures aux urgences des HCL avant qu'une place ne soit trouvée. Fin mai, c'est dans un réfectoire que 5 patients ont dormi. À la suite de ce coup d'éclat, le directeur, Jacques Marescaux, et le président de la commission médicale, Bernard Joli ont convaincu l'Agence régionale d'hospitalisation de financer la création d'une nouvelle unité de 20 lits pour des patients cérébro-lésés, à hauteur de 1,3 M d'euros (pour un coût total de 1,68 M). Elle ouvrira en décembre et sera certainement vite remplie car le champ d'action est vaste : malades psychotiques, accidentés de la route, patients souffrant de maladies neuro-dégénératives... Dans l'unité de secteur du Dr Patrick Briant, 3 patients sur 26 attendent une place dans ce type de structure. Le plus ancien est là depuis 1998. En géronto-psychiatrie, les assistantes sociales bataillent pour convaincre les maisons de retraite d'accepter des patients dans leurs services dédiés aux personnes âgées désorientées. Certains malades stabilisés au bout de deux mois doivent patienter jusqu'à un an. Car, là, ce n'est pas la lourdeur de la pathologie qui compte mais les moyens financiers... «Pour quelqu'un qui peut payer plus de 2 500 euros mensuels, l'attente est ramenée à une vingtaine de jours », explique Nicole Orrao, assistance sociale. Dans ce même service, se trouve un patient condamné car « il joue de l'arme blanche quand il a bu ». Il est actuellement « stabilisé » car il ne boit pas à l'hôpital, mais « vu le prix d'une journée d'hospitalisation cela coûte cher uniquement pour ne pas boire d'alcool!», remarque la chef de service, le Dr Florence Dibie-Racoupeau.
L'hôpital accueille à peine 30 % des malades suivis en psychiatrie publique, « mais ça bouffe 90 % de notre temps », note le Dr Briant qui freine sur les lits supplémentaires dans son unité car il ne veut pas « dégrader le soin ». «Il y a 20 ans, les patients étaient gardés en moyenne 240 jours, aujourd'hui, c'est 30 jours. Juste le temps d'évaluer les effets indésirables graves des médicaments. Il faut 3 mois pour voir si on est dans le bon sens et 3 ans pour évaluer les résultats », explique le psychiatre. Si le suivi des soins n'est pas assuré, c'est l'arrêt garanti. « Déjà à l'hôpital, la moitié seulement prend ses médicaments. A l'extérieur, dans le meilleur des cas, ils arrêtent au bout de deux ans », explique le psychiatre qui estime qu'il faut actuellement 2 à 3 rechutes pour arriver à une prise en charge correcte. Un projet d'hôpital de jour de 15 places est développé pour essayer de ne pas perdre les patients qui n'adhèrent pas au suivi ambulatoire.
À 18 heures, 8 patients étaient entrés à Saint-Jean-de-Dieu et 2 étaient en attente. La moyenne est de 4 à 10 entrées quotidiennes. Avec 16 lits supplémentaires, l'hôpital a souvent un taux d'occupation de 108 %. « Ça fait penser à Verdun, soupire le Dr Bernard Joli. On s'impose des souffrances à soi et aux autres. »
En août, ça continue de bouchonner à l'entrée et à la sortie de cet hôpital lyonnais. Les médecins doivent sans cesse chercher des solutions pour assurer le suivi des soins aux patients.
http://www.leprogres.fr/fr/france-monde/article/1885680,192/Pas-de-treve-estivale-pour-l-hopital-Saint-Jean-de-Dieu.html
Peu de malades et de soignants dans le parc et dans les couloirs : ce mardi, l'hôpital psychiatrique de Saint-Jean-de-Dieu, dans le 8 e arrondissement de Lyon, semble gagné par la torpeur aoûtienne. A l'unité d'hospitalisation de courte durée (UHCD), le service « post urgences », seule une jeune fille agitée sort sans cesse de sa chambre pour venir dans le bureau infirmier, véritable tour de contrôle située face à l'entrée sécurisée. Comme la plupart des patients, elle est envoyée par les urgences des Hospices civils de Lyon. « Il n'y a pas encore moyen de lui parler », explique le Dr Lionel Reinheimer, chef du service, précisant que sous l'effet des médicaments, ces crises aiguës « ne dépassent pas les 48 heures ». Comme cette jeune fille, déjà venue ici il y a deux ans, de nombreux patients sont hospitalisés en urgence car ils ont arrêté leur traitement. En théorie, ils doivent quitter l'UHCD au bout de 72 heures, le plus souvent pour aller en clinique ou dans une autre unité de l'hôpital. Quand ce circuit fonctionne bien, « c'est valorisant de voir un patient hyper mal ressortir calmé », remarque le Dr Reinheimer. Mais depuis des mois, c'est « le bouchon continu »: il y a en permanence 8 à 9 patients des deux UHCD (23 lits et 2 chambres d'isolement) qui attendent une place ailleurs. Des chambres de patients en permission sont utilisées en leur absence, des lits supplémentaires installés dans des chambres individuelles voire dans des salles d'activité... Les malades en crise attendent plusieurs heures aux urgences des HCL avant qu'une place ne soit trouvée. Fin mai, c'est dans un réfectoire que 5 patients ont dormi. À la suite de ce coup d'éclat, le directeur, Jacques Marescaux, et le président de la commission médicale, Bernard Joli ont convaincu l'Agence régionale d'hospitalisation de financer la création d'une nouvelle unité de 20 lits pour des patients cérébro-lésés, à hauteur de 1,3 M d'euros (pour un coût total de 1,68 M). Elle ouvrira en décembre et sera certainement vite remplie car le champ d'action est vaste : malades psychotiques, accidentés de la route, patients souffrant de maladies neuro-dégénératives... Dans l'unité de secteur du Dr Patrick Briant, 3 patients sur 26 attendent une place dans ce type de structure. Le plus ancien est là depuis 1998. En géronto-psychiatrie, les assistantes sociales bataillent pour convaincre les maisons de retraite d'accepter des patients dans leurs services dédiés aux personnes âgées désorientées. Certains malades stabilisés au bout de deux mois doivent patienter jusqu'à un an. Car, là, ce n'est pas la lourdeur de la pathologie qui compte mais les moyens financiers... «Pour quelqu'un qui peut payer plus de 2 500 euros mensuels, l'attente est ramenée à une vingtaine de jours », explique Nicole Orrao, assistance sociale. Dans ce même service, se trouve un patient condamné car « il joue de l'arme blanche quand il a bu ». Il est actuellement « stabilisé » car il ne boit pas à l'hôpital, mais « vu le prix d'une journée d'hospitalisation cela coûte cher uniquement pour ne pas boire d'alcool!», remarque la chef de service, le Dr Florence Dibie-Racoupeau.
L'hôpital accueille à peine 30 % des malades suivis en psychiatrie publique, « mais ça bouffe 90 % de notre temps », note le Dr Briant qui freine sur les lits supplémentaires dans son unité car il ne veut pas « dégrader le soin ». «Il y a 20 ans, les patients étaient gardés en moyenne 240 jours, aujourd'hui, c'est 30 jours. Juste le temps d'évaluer les effets indésirables graves des médicaments. Il faut 3 mois pour voir si on est dans le bon sens et 3 ans pour évaluer les résultats », explique le psychiatre. Si le suivi des soins n'est pas assuré, c'est l'arrêt garanti. « Déjà à l'hôpital, la moitié seulement prend ses médicaments. A l'extérieur, dans le meilleur des cas, ils arrêtent au bout de deux ans », explique le psychiatre qui estime qu'il faut actuellement 2 à 3 rechutes pour arriver à une prise en charge correcte. Un projet d'hôpital de jour de 15 places est développé pour essayer de ne pas perdre les patients qui n'adhèrent pas au suivi ambulatoire.
À 18 heures, 8 patients étaient entrés à Saint-Jean-de-Dieu et 2 étaient en attente. La moyenne est de 4 à 10 entrées quotidiennes. Avec 16 lits supplémentaires, l'hôpital a souvent un taux d'occupation de 108 %. « Ça fait penser à Verdun, soupire le Dr Bernard Joli. On s'impose des souffrances à soi et aux autres. »
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