Par Isobel Leybold-Johnso
03. NOVEMBRE 2014
Sortir les personnes en souffrance psychique de l'isolement
(Keystone)
En Suisse comme ailleurs, les troubles psychiques sont encore tabous. Et ceci, malgré le fait que la Suisse dispose du plus grand nombre de psychiatres par habitant au monde. Une campagne a été lancée pour mettre fin à cette culture du silence.
Seriez-vous prêt à engager un malade mental ? Et seriez-vous prêt à le laisser garder vos enfants ? Questions épineuses. Seuls 38% de la population accepterait d’employer une personne souffrant de troubles psychiques et 14,2% leur confierait leur enfant.
Ces chiffres sont tirés d’une toute nouvelle enquête sur le comportement des gens face aux maladies mentales. L’étude a été présentée début octobre à Zurich, lors du lancement de la première campagne d’envergure nationale qui cherche à briser les préjugés entourant les maladies mentales.
«Les sociétés européennes sont certes plus ouvertes qu’auparavant sur le sujet, mais cette tolérance a des limites, explique Wulf Rössler, l’ancien directeur – aujourd’hui retraité – de l’unité psychiatrique de l’Hôpital de l’Université de Zurich, qui a présenté l’enquête. Certaines personnes seraient prêtes à aider des malades, mais leur attitude change radicalement lorsqu’on leur demande s’ils accepteraient de les employer.»
La question des baby-sitters est également très délicate. «Les gens veulent protéger leurs enfants, explique l’expert. Les réponses des sujets interrogés montrent donc très clairement ce qu’ils pensent vraiment des gens qui souffrent de troubles psychiques.» L’enquête a ainsi révélé que certaines personnes pensent que les malades mentaux sont «dangereux», «imprévisibles» et que leur maladie était de «leur propre faute».
«Même les professionnels du secteur ont parfois des préjugés sur leurs patients, estime Wulf Rössler. C’est pour cette raison que cette campagne est importante.» Le but est de permettre aux malades mentaux d’avoir une vie normale. «Ces patients ont les mêmes aspirations que n’importe qui d’autre dans la vie: ils veulent travailler, avoir une famille et être intégrés socialement», raconte le spécialiste.