Une série documentaire de Nedjma Bouakra, réalisée par Yvon Croizier A-t-il déjà existé un écart plus grand entre les savoirs objectifs et l’expérience subjective autour d’une partie de l’anatomie du corps humain ? Le clitoris entretient une dispute scientifique, philosophique voire entre les deux sexes au ...
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mardi 22 septembre 2020
« Moi, aujourd’hui, j’ai découvert qu’il y avait de plus en plus de filles qui en avaient marre qu’on leur interdise de porter la tenue vestimentaire qu’elles souhaitent à l’école. »
Bonjour,
C’est un débat très vif qui a surgi hier soir autour de la tablée familiale. Selon un rituel bien installé, chacun y est invité à faire part d’une nouveauté qu’il a expérimentée dans sa journée. Ma belle-fille Naé (treize ans), inaugurant le tour de table, a affirmé : « Moi, aujourd’hui, j’ai découvert qu’il y avait de plus en plus de filles qui en avaient marre qu’on leur interdise de porter la tenue vestimentaire qu’elles souhaitent à l’école. » De fait, un mouvement est né en ce sens sur les réseaux sociaux, incitant les jeunes filles à s’habiller de manière volontairement « provocante » pour mettre à l’épreuve le règlement intérieur, jugé rétrograde, de leur établissement.
Hier soir, je me suis fait une nouvelle amie.
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Contre l’imposture et le pseudo-rationalisme Renouer avec l’éthique de la disputatio et le savoir comme horizon commun
- Bruno Andreotti, Camille Noûs
- Dans Zilsel 2020/2 (N° 7), pages 15 à 53
omme scientifique, comme universitaire et comme rationaliste, je me suis constitué un parti pris épistémologique et méthodologique qui permet de définir de manière opératoire ce qu’est la raison, ce qui définit la science mais aussi ses limites, ce que je suis supposé enseigner et ce que je dois taire de mes opinions dans mes enseignements. Je pensais ces conceptions pragmatiques largement partagées, et même fondatrices de l’idéal-type de l’universitaire. Pourtant, les prises de position publiques d’un milieu que je qualifierai ici de pseudo-rationaliste, mêlant des « sceptiques », des zététiciens [1], des vulgarisateurs, des militants « libertariens » [2], des cadres, des ingénieurs et de jeunes chercheurs, m’apparaissent orthogonales pratiquement en tout point à mes conceptions, que je professe depuis plus de vingt ans dans des modules de formation à la méthode scientifique par l’expérimentation. Dans cet éditorial, je me propose d’effectuer un exercice réflexif à partir de ce constat, en résumant d’abord ce qui, jusqu’à présent, me semblait être des évidences partagées, mais qui sont manifestement contestées par les pseudo-rationalistes, puis en montrant comment ce milieu est devenu usurpateur de l’expression scientifique et propagateur de falsifications politiquement intéressées. Cet éditorial adopte le point de vue du praticien, avec une visée d’objectivation, d’une part, et d’alerte, d’autre part, en direction des universitaires, des amateurs de science comme des rationalistes, sur les tentatives de dérégulation des normes de véridiction savante.
Les règles de la raison
La raison s’entend comme l’ensemble de facultés cognitives qui permettent le raisonnement – facultés dont les aspects sociaux et biologiques sont encore largement incompris, malgré l’essor de l’imagerie fonctionnelle – et la raison comme le trait dominant de l’imaginaire occidental. La raison éclôt à Athènes entre le 7e et le 4e siècle avant J.-C. et s’exprime avec l’apparition conjointe de la philosophie, de la science et de la démocratie [3]. Pour la première fois de l’histoire qui nous est accessible, la communauté des citoyens, le demos, imagine de se doter de manière raisonnée de ses propres règles collectives. Une seconde discontinuité historique intervient aux révolutions Américaine et Française, avec l’émergence de la démocratie libérale, marquée par l’héritage des Lumières. La raison apparaît ainsi comme une rupture avec les sociétés hétéronomes dont les significations sont dictées et closes par la religion et la tradition, et se fonde donc sur la séparation entre savoir et croyance. Pour autant, la raison n’est pas univoque et est soumise à une tension interne entre deux exigences superficiellement contradictoires. D’une part, elle suppose l’interrogation illimitée sur le monde, la critique permanente des institutions sociales, la recherche de la vérité comme horizon commun et la transmission par l’enseignement des savoirs et des grammaires de pensée disciplinaires : c’est le fondement de la science. D’autre part, la raison repose sur l’ambition démocratique d’une « direction consciente par les hommes eux-mêmes de leur vie » [4], ce qui suppose une pluralité de rationalités en débat : c’est le fondement démocratique de la politique. Si l’avenir de chaque société est conditionné par son économie, ses institutions sociales et par les techniques dont elle dispose, il n’en existe, et c’est heureux, aucune détermination qui serait strictement déductible, scientifiquement, du passé. L’histoire même de la raison nous en donne des preuves, par les ruptures non prédictibles qui l’ont façonnée. Je peux témoigner, comme chercheur en physique statistique, de la difficulté à prédire les propriétés émergentes d’un système passif aussi simple qu’une assemblée de grains dont on connaît parfaitement les interactions : aussi la prétention à prédire l’évolution supposément déterminée de sociétés à partir des comportements individuels, en niant au passage la part de l’environnement, de l’imaginaire social ou de l’histoire m’apparaît-elle proprement insensée.
lundi 21 septembre 2020
« Étouffer la révolte » : pathologiser la contestation
Étouffer la révolte raconte comment une révolution psychiatrique a eu des incidences politiques profondes. Jonathan Metzl a enquêté à Ionia, au Michigan : il s’est servi des archives d’un hôpital d’État pour étudier le profil des schizophrènes à travers le temps.
En 1948, Anatole Litvak portraiture un asile psychiatrique dans La Fosse aux serpents. On y suit les pérégrinations de Virginia, une romancière blanche vulnérable, passive et diminuée par des troubles mentaux qui la déconnecte de la réalité. L’intrigue du film concorde avec l’étude des fiches d’admission de l’hôpital d’Ionia : ce sont des femmes blanches, rurales et inoffensives qui forment le gros de la patientèle schizophrène de l’établissement. Pourtant, au tournant des années 1950-1960, la schizophrénie va devenir le fait d’hommes noirs, urbains et décrits comme agressifs, dans un complet renversement des normes.
Entretemps, le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) a été révisé. Et, c’est l’auteur qui le note, « le DSM-II opérait comme un texte implicitement raciste, reflétant le contexte social de ses origines d’une manière qui permettait à ses utilisateurs de pathologiser, consciemment ou non, la révolte comme une maladie mentale. » Nous sommes alors en plein mouvement pour les droits civiques et la nouvelle version du DSM atteste que la schizophrénie se caractérise notamment par l’hostilité et le refus de se plier à l’autorité. Les normes professionnelles de la psychiatrie ont changé et, dans les années 1960, de plus en plus de personnes atteintes de « trouble de la personnalité antisociale » se voient requalifiées en schizophrènes paranoïdes. Ce sont essentiellement des hommes Noirs qui s’opposent à l’establishment blanc.
Propositions pour une judiciarisation du maintien de l’isolement et de la contention
- 20 SEPT. 2020
- PAR ANDRÉ BITTON
- ÉDITION : CONTES DE LA FOLIE ORDINAIRE
Communiqué
Paris, le 20 septembre 2020.
Propositions en vue d’une réforme du maintien en isolement et contention des personnes psychiatrisées sous contrainte
Le CRPA a été intervenant au soutien de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la traçabilité de l’isolement et de la contention des personnes psychiatrisées sous contrainte, statuée par le Conseil constitutionnel le 19 juin 2020.
Après en avoir discuté avec notre conseil, Me Jean-Marc Panfili avocat au Barreau de Montauban et ancien cadre supérieur de santé à l’EPSM de Montauban [1], notre association propose les points de réforme suivants relatifs à l’isolement et à la contention des personnes psychiatrisées sous contrainte :
Selon nous (et pas seulement selon nous !) la personne dont la mesure est contrôlée, qu’il s’agisse de l’hospitalisation sous contrainte ou de la décision d’isolement et /ou contention, doit avoir le choix entre un avocat commis ou choisi ou une personne de confiance (désignée à l’admission ou par avance) pour la représenter lors d’un contrôle judiciaire. Cette personne de confiance pouvant porter les directives pour lesquelles la personne psychiatrisée la mandate. Cela afin de responsabiliser les aidants bénévoles ou professionnels, ainsi que les représentants des usagers, et de limiter une extension problématique de la représentation obligatoire par avocat. Le film "12 jours" de novembre 2017 prouve que dans nombre de juridictions cette représentation obligatoire par avocat est un désastre.
Une résidence d'artistes... dans l'hôpital psychiatrique de La Rochelle
Par Marina Guibert, France Bleu La Rochelle, France Bleu
Le collectif Essence Carbone, qui regroupe neuf artistes rochelais, a investi tout un bâtiment au cœur de l'hôpital psychiatrique Marius Lacroix. Ils y resteront un an pour un projet à destination des patients mais aussi des soignants et même du grand public à l'occasion des journées du patrimoine
Une résidence d'artistes au milieu d'un hôpital psychiatrique. Pas commun et pourtant c'est bien ce qui se passe en ce moment à l'hôpital Marius Lacroix de La Rochelle. Neuf artistes, tous Rochelais, regroupé dans le collectif Essence Carbone. Ils ont investi tout un bâtiment au milieu du centre et vont rester un an auprès des patients, des soignants et même du grand public à l'occasion des journées du patrimoine.
Des chambres d'hôpital transformées en ateliers d'artistes
On oublie vite qu'on est au cœur d'un hôpital psychiatrique. Les chambres sont devenues des ateliers qui fourmillent d'artistes en tous genre et les œuvres ont envahi murs sols et plafonds. _"L'art peut être partout_, affirme Vincent Ruffin, le directeur artistique du projet, même dans un lieu comme celui-ci qui va devenir un lieu d'art par la force des choses". Cette résidence c'est d'abord un échange de bon procédés avec l'hôpital Marius Lacroix pour ouvrir les patients à l'art. "L'art c'est s'exprimer différemment alors si ça peut aider les patients tant mieux, il faut tester de toute façon."
L'ouverture au monde c'était justement la première volonté du directeur de l'hôpital Aurélien Vautard : "on a encore parfois cette image ancienne et un peu caricaturale de l'hôpital psychiatrique comme un asile, un lieu d'enfermement alors qu'aujourd'hui il y a une modernisation de la prise en charge et une normalisation de la maladie mentale. C'est fondamental que les patients puissent avoir un accès à la culture, à l'art parce _qu'ils ne sont que de passage ici, en dehors ils ont une vie comme vous et moi"_. Et le message pour Bernard en pleine visite : "c'est intéressant de voir qu'on ne traite pas les patients qui sont ici comme des pestiférés et qu'on leur permet de vivre eux aussi".
Toul Ar C'Hoat : l'école pour enfants épileptiques
20 septembre 2020
DOCUMENT – Toul Ar C'Hoat, en Bretagne, est une école dédiée aux enfants épileptiques, handicapés par leur maladie. L'établissement accueille chaque année 84 élèves entre 8 et 20 ans, qui y vivent en internat.
La médecine de précision change la donne pour la santé mentale
18 septembre 2020
SUISSE
Les patients atteints de cancer bénéficient des avancées de la médecine de précision, mais l’approche personnalisée pour traiter les maladies neurologiques comme Alzheimer n’en est qu’à ses débuts. La neuroimmunologue Maria-Teresa Ferretti explique pourquoi il est important d’investir dans la médecine de précision afin d’améliorer la santé du cerveau pour tous.
Selon la définition des Instituts nationaux de la santé américains, la médecine de précision est une approche émergente pour le traitement et la prévention des maladies qui prend en compte les variables individuelles de chacun au niveau des gènes, de l’environnement et du style de vie. Elle permettra aux médecins et aux chercheurs de prévoir avec plus de précision quelles stratégies de traitement et de prévention fonctionneront pour une maladie particulière, et dans quels groupes de personnes. Elle s’oppose à l’approche «taille unique», dans laquelle les stratégies de traitement et de prévention des maladies sont élaborées pour la personne moyenne, sans tenir compte des différences individuelles.
« Lettre à un enfant que je n’aurai jamais »
Par Lettres d'une génération 20 septembre 2020
Je n’ai jamais su choisir. J’incarne typiquement la catégorie des indécis, des hausseurs d’épaule, des sans avis et des amateurs du « comme tu veux ». Prendre une décision sur des choix mineurs a toujours été une sorte de micro calvaire social, une chose un peu ennuyante de l’ordre de l’oubli du sucre après avoir fini les courses, ou des petites peaux qui poussent et qui piquent sur le côté des ongles.
Pourtant, il en est une pour laquelle je n’ai pas d’incertitude. Une décision, de celles que l’on ne prend généralement qu’après des années, de celles qui dérangent l’opinion publique, de celles qui attirent les froncements de sourcils, les sourires équivoques et les « Tu verras dans cinq ans, dans dix, dans quinze, peut-être vingt ». De celles qui créent les insomnies.
J’ai choisi de te priver du jour, de te laisser aveugle, sourd, muet, sans muscles ni chair, sans rire ni sang, sans âme ni larmes. Te laissant rien alors que tu pourrais être. J’ai choisi de supprimer d’avance tout souvenir, bon comme mauvais. D’éviter les albums photos qui font rire et pleurer, les repas de famille barbants, la découverte des beautés et des fragilités de la planète. J’ai choisi d’arracher tes pansements, de couper court à tes colères, d’empêcher tes chutes dans les graviers tranchants, d’abréger toutes tes souffrances avant même qu’elles ne paraissent. Avant même que je ne te les donne.
Arnaud Fontanet, épidémiologiste : « Je n’aurais jamais cru voir cela de mon vivant »
ENTRETIEN Je ne serais pas arrivé là si… « Le Monde » interroge une personnalité sur un moment décisif de son existence. Cette semaine, le chercheur à l’Institut Pasteur, membre du conseil scientifique, évoque ses expériences humanitaires, son enfance ainsi que le Covid-19.
Longtemps médecin de terrain, à l’étranger et souvent dans des pays en guerre, Arnaud Fontanet dirige au sein de l’Institut Pasteur, à Paris, l’unité de recherche des maladies émergentes. Membre du conseil scientifique qui rend des avis à l’exécutif, cet épidémiologiste de 59 ans se consacre depuis des mois, comme ses collègues, à lutter contre le nouveau coronavirus.