Publié mercredi 16 septembre 2020
A 38 ans, Aurélie Jean a déjà eu plusieurs vies. Cette spécialiste des algorithmes et de la modélisation numérique a mené plusieurs travaux de recherche dans la santé, notamment au Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Boston. Fondatrice de la société franco-américaine In Silico Veritas, spécialisée dans le conseil stratégique en données et en algorithmique, elle est aussi associée auprès de la société française de conseil Altermind. Aurélie Jean a notamment publié, en 2019, De l’autre côté de la machine. Voyage d’une scientifique au pays des algorithmes. Elle a répondu par écrit à nos questions.
«Le Temps»: La technologie et l’intelligence artificielle peuvent-elles nous aider à sortir de cette crise sanitaire?
Aurélie Jean: Cette question est bancale, car beaucoup de choses peuvent aider à sortir de la crise sanitaire. L’intelligence artificielle (IA) en fait partie, mais elle n’est pas la seule. On peut, par l’IA, simuler des scénarios de déconfinement et de reconfinement, contribuer au développement de vaccins, ou encore améliorer la logistique par une optimisation des transports de matériels, voire de patients. Cela étant dit, l’IA seule ne peut pas réussir sans le soutien de la médecine, c’est une évidence qu’il faut souligner et ne jamais oublier.
L’intelligence artificielle aurait-elle eu la possibilité de prévenir la pandémie ou de la prédire? Ou pourra-t-elle le faire à l’avenir?
Des modèles d’IA sont actuellement utilisés pour anticiper chaque année les évolutions de la grippe saisonnière, mais cela aurait été quasiment impossible pour le virus du Covid-19 et ce pour plusieurs raisons. L’IA fonctionne sur des composantes explicites de modélisation dans lesquelles on décrit explicitement le phénomène à simuler, et sur des composantes implicites dans lesquelles la logique est décrite implicitement par apprentissage sur des données qui représentent des scénarios du passé du phénomène à simuler.