Spécialiste de l’histoire des sciences, Laurent-Henri Vignaud met en perspective les crises sanitaires qui ont traversé le monde avec celle que nous vivons.
Laurent-Henri Vignaud est maître de conférences d’histoire moderne à l’université de Bourgogne. Spécialiste de l’histoire des sciences, il explique au Monde comment s’est forgé le concept de contagion, et de quelle façon les épidémies, comme les mesures prises pour les contrôler, ont façonné nos sociétés.
Quand la notion de contagion est-elle apparue ?
Dans la pensée archaïque grecque, il y avait l’idée que les maladies étaient causées par un poison que l’on appelait « contage » et d’où dérive le mot « contagion ». Mais, au Ve siècle avant J.-C., cette conception a été remplacée par celle d’Hippocrate, selon qui la maladie résulte d’un déséquilibre entre les « humeurs ». On en retrouve la trace dans le mot « choléra », qui vient du grec cholê, la bile.
Cette théorie a prévalu jusqu’aux travaux de Pasteur et de l’Allemand Koch, qui ont mis en évidence le rôle des virus et des bactéries dans la propagation des maladies infectieuses. Malgré cela, lors des épidémies de choléra qui frappent l’Europe au XIXe siècle, il y a tout un débat entre les « contagionnistes », convaincus du rôle des microbes, et les « anti-contagionnistes », persuadés que la santé n’est qu’une question d’hygiène générale : bien manger, respirer de l’air frais, se laver les mains.