Le cinéaste Jean-Bernard Marlin conte la liaison passionnelle entre deux adolescents dans le milieu de la prostitution.
L’AVIS DU « MONDE » – À NE PAS MANQUER
On se souvient du personnage du roi de Perse, dans Les Mille et Une Nuits, qui, trompé un jour, décide d’épouser et d’exécuter une vierge quotidiennement pour éviter à l’avenir cette situation fâcheuse. Cette manière originale de couper court au débat #metoo rencontre en Shéhérazade une redoutable adversaire qui suspend la sentence du roi en l’assujettissant au récit feuilletonné nuit après nuit à son intention. Jean-Bernard Marlin a donc bien fait d’intituler son premier long-métrage du nom de la conteuse désarmante, car son film, avec des moyens et dans un décor très différents, raconte un peu la même histoire.
Situé dans le milieu de la délinquance juvénile à Marseille, Shéhérazade appartient à ce type de film qu’on nomme un peu pompeusement « fiction documentée », ce qui veut tout simplement dire qu’il tire dans le meilleur des cas de son substrat documentaire une authenticité plus vive et une puissance d’incarnation décuplée. De Toni (1935), de Jean Renoir, à La BM du Seigneur (2010), de Jean-Charles Hue, en passant par La Vie de Jésus (1997), de Bruno Dumont, le cinéma français, après le néoréalisme italien, en livre quelques remarquables exemples.