Un recours illégal et abusif à l'isolement et à la contention dans les services psychiatrie du CHU de Saint-Etienne, c'est ce que dénonce, entre autres, le 1er mars 2018, Adeline Hazan, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, après sa visite de l'établissement en janvier 2018. Dans son rapport, elle constate des traitements qualifiés « d'inhumains ou dégradants » au sens de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Ni se laver ni se changer
Parmi les patients en attente de soins psychiatriques présents dans les couloirs des urgences, sept s'y trouvent depuis quinze heures à sept jours, cinq étant présents depuis plus de trois jours. Ils n'ont pu ni se laver, ni se changer, ni avoir accès à leur téléphone portable. Trois d'entre eux doivent utiliser un urinal posé le long de leur jambe sur le brancard au-dessus du drap. Or aucun de ces patients ne présente d'état d'agitation, certains demandant juste à pouvoir être détachés, sans véhémence, dans une forme de résignation et d'acceptation. Face à ces constats, la loi l'autorisant à saisir le gouvernement en cas d'urgence, Adeline Hazan exige l'arrêt immédiat de ces atteintes aux droits des personnes. Cette « affaire » survient quelques jours après que le gouvernement a installé (le 19 février 2018) une commission chargée de faire des propositions pour prévenir la maltraitance des personnes âgées ou handicapées (article en lien ci-dessous).
Un malaise structurel
Deux ans auparavant, l'Unafam (association de personnes avec un handicap psychique) avait déjà dénoncé de telles pratiques jugées « indignes » dans un autre établissement. Le cas Saint-Étienne n'est donc pas isolé et témoigne des problèmes structurels qui affectent la psychiatrie. L'orientation donnée par l'article 72 de la loi du 26 janvier 2016, visant à une réduction des pratiques d'isolement et de contention, tarde à être mise en œuvre dans les établissements, en dépit des recommandations de bonne pratique de la Haute autorité de santé (HAS) et des instructions ministérielles. « Il est inadmissible que la loi ne soit pas respectée, s'indigne l'Unafam. Des patients admis en soins sans consentement sont, parfois dès leur arrivée, placés en isolement, voire sous contention, sans justification clinique réelle, ajoutant de la souffrance psychique à celle qui les a conduits à l'hôpital. Et il y aurait beaucoup à dire sur les conditions matérielles de l'isolement, dans des chambres d'isolement délabrées, où les patients doivent faire leurs besoins dans un seau hygiénique. » Selon l'association, « les établissements et les équipes doivent veiller au respect de la dignité des personnes et celui de leurs droits fondamentaux. »
Une image désastreuse
L'image de la psychiatrie, que de telles pratiques renvoient, est jugée « désastreuse » par l'association et joue certainement un rôle dissuasif qui ne peut que retarder l'entrée dans un parcours de soins de personnes en souffrance psychique. On se souvient de deux récentes polémiques médiatiques autour de la bande annonce de Touche pas à mon poste (sur C8) en septembre 2016 et du jeu « Psychiatric hospital » de Fort Boyard (France 2)en juin 2017 qui avaient offensé les associations dédiées proposant une image stéréotypée (notamment via l'usage d'une camisole de force et d'une pièce capitonnée) et archaïque de la psychiatrie dans des programmes à fort impact sur les jeunes téléspectateurs (articles en lien ci-dessous).