Le canton de Berne a présenté vendredi ses mesures
pour équilibrer les comptes de ses trois grandes institutions psychiatriques.
Elles seront privatisées au 1er janvier 2017 et devront être rentables.
Un contexte très préoccupant, un itinéraire vraiment
très difficile et des mesures d’économie drastiques, voire dramatiques: ce sont
les mots utilisés en conférence de presse pour décrire la situation dans
laquelle évoluent les services psychiatriques bernois - et en particulier ceux
du Jura bernois – Bienne-Seeland. Ceux-ci vont devoir profondément se
restructurer, de manière à réduire leurs coûts d’exploitation de 22%.
| 18.08.2015 2015 fut une année de mobilisation pour les médecins. Mais ce conflit s’inscrit dans une longue histoire de grèves, de protestations et de négociations avec l’Etat, l’Assurance-maladie, les mutuelles. Cet été, « le Quotidien » remonte le temps, et se remémore certains des épisodes les plus marquants de la contestation médicale qui font écho aux préoccupations actuelles.
1945 : un nouvel ordre mondial s’instaure. Dans le petit univers de la médecine française aussi, les choses bougent. La création de l’Assurance-maladie, avec notamment l’instauration d’un tarif opposable par l’ordonnance du 3 mars 1945, ne se passe pas sans remous.
Chez les praticiens, en effet, la protestation est presque unanime, car le tarif opposable est incompatible avec le principe de l’entente directe entre le patient et le médecin sur les honoraires. « Accepter le principe des honoraires opposables, c’est détruire de fond en comble le caractère libéral auquel dans un pays redevenu libre nous restons fermement attachés », écrit en juillet le Dr Paul Cibrié, secrétaire général de la CSMF, dans « le Médecin de France »*.
Alain Badiou est philosophe et professeur à l’Ecole normale supérieure. Son dernier ouvrage en date est « Le Second Procès de Socrate » (Actes Sud, 2015).
Quelles ont été les rencontres déterminantes pour l’orientation de votre vie ?
Alain Badiou : Avant le théâtre et la philosophie, il y a eu une phrase de mon père. Pendant la seconde guerre mondiale, en effet, s’est constitué un souvenir écran, déterminant pour la suite de mon existence. A l’époque, j’avais 6 ans. Mon père, qui était dans la Résistance – il a été nommé à ce titre maire de Toulouse à la Libération –, affichait sur le mur une grande carte des opérations militaires et notamment de l’évolution du front russe. La ligne de ce front était marquée sur la carte par une fine ficelle tenue par des punaises. J’avais plusieurs fois observé le déplacement des punaises et de la ficelle, sans trop poser de questions : homme de la clandestinité, mon père restait évasif, devant les enfants, quant à tout ce qui concernait la situation politique et la guerre.
Nous étions au printemps 1944. Un jour, c’était au moment de l’offensive soviétique en Crimée, je vois mon père déplacer la ficelle vers la gauche, dans un sens qui indiquait nettement que les Allemands refluaient vers l’Ouest. Non seulement leur avance conquérante était stoppée, mais c’est eux qui désormais perdaient de larges portions de territoire. Dans un éclair de compréhension, je lui dis : « Mais alors, nous allons peut-être gagner la guerre ? », et, pour une fois, sa réponse est d’une grande netteté : « Mais bien sûr, Alain ! Il suffit de le vouloir. »
Cette phrase est-elle devenue votre maxime ?
Cette réponse est une véritable inscription paternelle. J’en ai hérité la conviction que quelles que soient les circonstances, ce que l’on a voulu et décidé a une importance capitale. Depuis, j’ai presque toujours été rebelle aux opinions dominantes, parce qu’elles sont presque toujours conservatrices, et je n’ai jamais renoncé à une conviction uniquement parce qu’elle n’était plus à la mode.
Vous faites grand cas de la volonté. Or une grande tradition philosophique, le stoïcisme, conseille aux hommes de vouloir ce qui arrive pour être heureux. N’y a-t-il pas plus de sagesse à accepter le monde tel qu’il est plutôt que vouloir le changer ?
Notre destin, dans les années 1940, était d’avoir perdu la guerre. Un stoïcien allait-il alors dire qu’il était raisonnable d’être tous pétainistes ? Pétain faisait un triomphe lors de ses visites en province, on pouvait penser qu’il avait épargné au pays le plus dur de la guerre. Fallait-il accepter ? Je me méfie du stoïcisme, de Sénèque qui, richissime et du fond de sa baignoire en or, prônait l’acceptation du destin.
Pour des raisons diverses mais de leur plein gré, ils et elles ont cessé de travailler et le vivent très bien. Leurs proches, pas toujours, tant la valeur travail reste l’alpha et l’oméga par lequel on juge de l’activité d’une personne.
«Je ne veux pas faire des trucs qui me font chier.» Camille - il a préféré donner ce prénom cher aux zadistes - ne travaille pas. Ou si peu : un ou deux mois par an, depuis qu’il a décroché son bac à Nancy en 2005. «Je pourrais vivre seulement du RSA, mais faire les vendanges me permet d’acheter des BD et des cadeaux»,précise-t-il. Hervé, la petite quarantaine, a démissionné de son poste d’entraîneur sportif il y a trois ans pour devenir homme au foyer. Les revenus de sa femme suffisent pour faire vivre la famille. Lui se consacre désormais à ce qu’il remettait jusqu’alors à plus tard, mais surtout il peut voir grandir ses enfants. Etre libre de son temps, c’est aussi ce qui a amené Lætitia, bricoleuse heureuse tout juste trentenaire, à troquer son CDI dans un centre social contre une vie nomade à bord de son camion.
Cette technologie d'apprentissage, basée sur des réseaux de neurones artificiels, a complètement bouleversé le domaine de l'intelligence artificielle en moins de cinq ans.
« Je n'ai jamais vu une révolution aussi rapide. On est passé d'un système un peu obscur à un système utilisé par des millions de personnes en seulement deux ans. » Yann LeCun, un des pionniers du « deep learning », n'en revient toujours pas. Après une longue traversée du désert, « l'apprentissage profond », qu'il a contribué à inventer, est désormais la méthode phare de l'intelligence artificielle (IA). Toutes les grandes entreprises tech s'y mettent : Google, IBM, Microsoft, Amazon, Adobe, Yandex ou encore Baidu y investissent des fortunes. Facebook également, qui, signal fort, a placé Yann LeCun à la tête de son nouveau laboratoire d'intelligence artificielle installé à Paris.
Ce système d'apprentissage et de classification, basé sur des « réseaux de neurones artificiels » numériques, est, pêle-mêle, utilisé par Siri, Cortana et Google Now pour comprendre la voix, être capable d'apprendre à reconnaître des visages. Il a « découvert » par lui-même le concept de chatet est à l'origine des images psychédéliques qui ont inondé la Toile ces dernières semaines, aux allures de « rêves » de machines.
C’est en 1994 que le monde découvre l’écrivaine Taslima Nasreen. Elle est alors âgée de 32 ans, et une fatwa a été lancée contre elle par des intégristes musulmans, suscitant une émotion internationale. A l’époque, en dehors du Bangladesh, son pays d’origine, et de l’Inde, bien peu de gens ont lu les écrits de celle que les médias s’empressent de surnommer « la Salman Rushdie bangladaise ». Des romans, recueils de poésie et éditoraux dans lesquels elle dénonce l’isolement et l’aliénation des femmes en Asie, maintenues dans un état de quasi-esclavagisme au nom des religions, et notamment de l’islam. « Notre Constitution reconnaît l’égalité entre les sexes. Dans la réalité de nos campagnes, on en est loin : il faut que ça change », martelait-elle en février 1994 aux journalistes venus l’interroger dans son appartement de Dacca, gardé par des policiers, avant qu’elle soit contrainte de quitter son pays pour une longue période d’errance.
Cette « réalité », qu’elle continue aujourd’hui de combattre en exil, c’est au Dhaka Medical College and Hospital que Taslima Nasreen l’a approchée au plus près. Cette jeune femme au visage rond et au regard doux est alors non seulement une auteure populaire mais aussi une gynécologue. Elle travaille depuis huit ans dans cet établissement public réputé où elle est médecin chef quand des groupes musulmans fondamentalistes commencent à la persécuter, l’accusant de « blasphème ».
Elle décide de démissionner en février 1993, peu avant que soit lancée contre elle la première fatwa, afin de protester contre la confiscation de son passeport par le gouvernement bangladais sous prétexte qu’elle écrit « contre la religion », et qu’à la rubrique profession, elle a indiqué « journaliste » plutôt que « médecin ».
Depuis le 1er janvier 2015, le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) est partiellement entré en vigueur. Usine à gaz pour les uns, avancée sociale majeure pour les autres, ce dispositif, emblématique de la réforme des retraites, a fait l’objet de quelques modifications avant l’été. Mais il reste des points d’achoppement.
Au départ, la loi prévoyait que l’employeur établisse une fiche individuelle d’exposition pour tout salarié du privé exposé à au moins un des dix facteurs de pénibilité fixés par la loi. En 2015, quatre critères sont d’ores et déjà pris en compte : le travail de nuit, le travail répétitif, le travail en milieu hyperbare et les horaires alternants et en 2016, cela sera le cas des six autres :postures pénibles, manutentions manuelles de charges, agents chimiques, vibrations mécaniques, températures extrêmes et bruit. Toute personne exposée à un risque professionnel (et dépassant les seuils et les durées fixés par décret) durant un trimestre aura droit à un point (deux en cas d’exposition à plusieurs facteurs). Les points accumulés donneront droit à de la formation continue pour se reconvertir, à du temps partiel de fin de carrière (sans baisse de salaire), ou à des trimestres de retraite.
Plus de travail, plus de salaire, plus de patron, mais pas de licenciement. Du jour au lendemain, le 10 juillet, les onze salariées travaillant depuis quinze à trente ans à l’entretien de certaines toilettes publiques, les lavatories de la Ville de Paris, ont tout perdu.
Elles étaient employées par Stem Propreté jusqu’à ce qu’un appel d’offres attribue le 30 juin ce marché à l’entreprise néerlandaise 2theloo. Mais celle-ci refuse de reprendre ces salariées, comme la loi et la convention collective de la propreté l’y obligent pourtant, selon Force ouvrière (FO), qui soutient ces employées, et leur avocate Me Hortense Betare. Du coup, ces femmes, âgées de 45 à 65 ans, payées environ 1 300 euros net par mois, toutes primes incluses, se retrouvent dans un no man’s land juridique. Et, après trois semaines de lutte, elles sont désespérées.
A Halluin, dans le Nord, le café Aux accordéonistes abrite une «caisse de bistrot». Un moyen pour les travailleurs d’économiser pour leurs vacances.
On dirait des boîtes aux lettres miniatures. Ces petits casiers en bois, derrière le comptoir du bar Aux accordéonistes, à Halluin, près de Lille, sont des «caisses d’épargne» de bistrot. Une vieille tradition du Nord ouvrier. Autrefois, elles servaient à mettre de l’argent de côté pour se chauffer en période hivernale. Un peu comme les fourmis qui engrangent pour les jours difficiles. Aujourd’hui, les dernières boîtes qui subsistent servent à payer une partie des vacances. Des drôles de tirelires, réservées aux clients, pour faire des économies quand ils vont boire un coup. Dans ce bistrot, ils sont 90, baptisés les Milliardaires réunis, à cotiser. Toute l’année, à dates fixes, ils viennent glisser un billet, un chèque ou des pièces, dans la fente qui porte leur nom. Ils boivent un coup au passage. Il y a des règles. On donne 20 euros par mois, minimum. On cotise jusqu’en juin et on récupère sa mise juste avant les vacances. Le 23 juin, c’était la dernière levée, et l’argent de l’année a été réparti dans les jours qui ont suivi, à une date toujours secrète, après la fermeture. Chacun récupère ce qu’il a cotisé. Bien sûr, ça ne paie pas toutes les vacances. En général, juste le péage, l’essence ou le gîte, ou l’argent de poche sur place.
C’est la série de l’été dansles Echos : après la hausse du nombre d’exilés fiscaux (vendredi), place (lundi) à la hausse de la ristourne fiscale accordée aux grosses fortunes, via le plafonnement mis en place par la gauche en 2013, pour remplacer le bouclier fiscal de Sarkozy. Et qui, selon le quotidien, coûterait plus cher à l’Etat que feu ce bouclier. Même si un week-end s’est intercalé entre ces deux informations, ceux qui ont courageusement, en plein mois d’août, suivi ce dossier un peu aride, peuvent légitimement se sentir déboussolés : nombre record d’exilés fiscaux vendredi et montant record des ristournes accordées aux plus riches lundi. Autrement dit, plus les grosses fortunes sont chouchoutées, plus elles fuient la France…
En réalité, si aucune des deux infos n’est fausse, chacune d’elle, plongée dans la relativité statistique, prend un tout autre sens. Et conduisent toutes deux à mettre en exergue… une forte hausse des gros patrimoines en France.
LE MONDE | | Par Philippe Dagen (Hauterives (Drôme)
Parmi les nombreuses inscriptions que Joseph Ferdinand Cheval, dit le Facteur Cheval, a tracées en divers points de son Palais idéal, à Hauterives, figure celle-ci, en forme de défi : « Au champ du labeur, j’attends mon vainqueur ». Bruno Decharme et Antoine de Galbert pourraient la faire leur. Le premier, cinéaste, a fondé en 1999 la collection Abcd, qui est l’une des principales dans son domaine, celui que Jean Dubuffet désignait du terme impropre – mais passé à la postérité – d’art brut. Abcd signifie du reste « art brut connaissance & diffusion ». Enquêtant, visitant, accumulant, interviewant et filmant, il ne cesse de nourrir cet ensemble, dont une partie a été montrée l’hiver 2014-2015 à la Maison rouge. Laquelle est la création, en 2004, d’Antoine de Galbert, autre collectionneur obsessionnel et boulimique. L’art actuel, celui des marginaux et des autodidactes, celui aussi des cultures tenues jadis pour « primitives » le captivent également.
Lundi, trois enfants ont été retirés à leur mère, accusée de carences affectives, alors qu’au moins l’un d’entre eux est autiste. Une incompréhension dramatique de ce handicap, dénoncent les associations.
L’avocate Sophie Janois n’hésite pas à parler d’«erreur judiciaire».Sa cliente, Aurélie (1), s’est vu retirer ses trois enfants lundi matin au motif qu’elle serait responsable de leurs troubles du développement. L’un d’eux a pourtant été diagnostiqué autiste et il existe une forte suspicion d’autisme sur les deux autres. Ils seraient donc atteints de troubles neurologiques, sans lien avec leur éducation.
Sophie a été victime d'un signalement abusif et a failli perdre la garde de son fils, que les professionnels croyaient victime de carences affectives.
Lorsqu’elle décroche le téléphone, Sophie (1) a une petite voix. En Isère, une femme qu’elle aide depuis un moment vient de remettre ses trois enfants à l’Aide sociale à l’enfance pour un placement. L’un a été diagnostiqué autiste et de forts soupçons d’autisme pèsent sur les deux autres. «Ils lui ont arraché ses enfants», lâche-t-elle. La situation lui rappelle sa propre histoire : il y a quelques années, le centre d’action médico-sociale précoce (CAMSP) qui suivait son fils, de 7 ans et demi aujourd’hui, repère chez lui des «carences psycho-affectives». Sophie n’est pas d’accord avec cette accusation et s’interroge : et s’il était autiste ?
Des frères et sœurs autistes ont été retirés à leur mère, accusée de carences affectives. Une incompréhension dramatique de ce qu'est l'autisme, dénoncent les associations.
L’avocate Sophie Janois n’hésite pas à parler d'«erreur judiciaire». Les trois enfants de sa cliente, Aurélie (1), lui ont été retirés lundi matin au motif qu’elle serait responsable de leurs troubles du développement. L’un d’eux a pourtant été diagnostiqué autiste et il existe une forte suspicion d’autisme sur les deux autres. Ils seraient donc atteints de troubles neurologiques, sans lien avec le mode éducatif. Face à ce qu’elles dénoncent collectivement comme un scandale, plus de cent associations se sont mobilisées pour dénoncer les «placements abusifs» d’enfants autistes, dont le cas d’Aurélie ne serait que le dramatique révélateur.