L’avis du « Monde » : pourquoi pas
« Le seul moyen de supporter l’insupportable, c’est d’en rire », observait Marjane, avatar de l’auteure et cinéaste Marjane Satrapi, dans la bande dessinée autobiographique qui l’avait révélée au grand public, Persépolis. Adapté pour le cinéma par Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud, Persépolis restituait en traits minimalistes et grinçants l’enfance de Marjane à Téhéran pendant la révolution islamique, et son passage compliqué à l’âge adulte. En noir et blanc, avec beaucoup moins de blanc que de noir, c’était un portrait à charge de l’Iran contemporain que l’on voyait se dessiner sur le parcours de l’héroïne : provocateur, parfois très drôle, mais presque toujours de cet humour qui fait aussi mal.
Quatrième long-métrage de Marjane Satrapi, The Voices est aussi loin de Persépolis et de l’Iran qu’on pourrait l’imaginer. Avec La Bande des Jotas, son précédent film, la réalisatrice avait déjà rompu une première fois avec cet univers, mais cette rupture s’était faite dans la discrétion, avec des moyens très modestes, pour une diffusion en salles plus modeste encore. Pour The Voices, c’est tout l’inverse : on devine un budget moins restreint, les têtes d’affiche sont familières (Ryan Reynolds, Gemma Arterton, Anna Kendrick), les couleurs dominantes sont le rose, couleur des « bleus » de travail de l’entreprise du héros, et le rouge sang, car il s’agit à nouveau, et c’est sans doute son seul point commun avec La Bande des Jotas, d’une histoire de meurtres.