Et si l'on repensait vraiment la politique familiale ?
LE MONDE ECONOMIE | Par Thibault Gajdos, CNRS
En suggérant d'intégrer les allocations familiales dans le calcul de l'impôt sur le revenu, Didier Migaud, le premier président de la Cour des comptes, a récemment lancé l'une de ces guerres picrocholines dont ce pays a le secret.
Au lieu de débattre des objectifs de la politique familiale, on ratiocine sur ses modalités. Les uns plaident pour une fiscalisation des allocations ; les autres préfèrent une mise sous conditions de ressources.
De son côté, Pierre Moscovici, le ministre de l'économie et des finances, temporise : il est urgent d'attendre le rapport que Bertrand Fragonard, le président du Haut Conseil de la famille, doit incessamment remettre au premier ministre, Jean-Marc Ayrault. Hélas, cela ne rassure pas tout le monde. Et certains poussent déjà des cris d'orfraie : "C'est la politique familiale que l'on assassine !"
Cette "politique familiale" tant vantée, dont le quotient familial est l'inébranlable totem et les allocations familiales l'indépassable tabou, est clairement et fortement nataliste. Et avec un certain succès : Guy Laroque (Sciences Po) et Bernard Salanié (université de Columbia) ont montré que l'ensemble des prestations et des allégements d'impôts ont un effet significatif... sur la fécondité des femmes, en particulier pour le troisième enfant ("Identifying the Response of Fertility to Financial Incentives", article à paraître dans le Journal of Applied Econometrics).