Le poème retrouvé des atomes
Si vous avez aimé Le Nom de la rose, vous allez adorer l'histoire de Poggio Bracciolini (1380-1459) et du manuscrit qu'il retrouva dans un monastère. Heureusement, ici, point de catastrophe finale : il s'agit d'un happy end, et vous pouvez facilement vous procurer ledit ouvrage, qui contribua à inspirer la science moderne.
Dans le livre qui relate cette aventure (The Swerve - "la déviation" -, de Stephen Greenblatt, W. W. Norton, 2011), un chapitre est consacré à l'histoire d'une fin du monde : celle du monde classique et de la perte de la plupart de ses oeuvres. Presque mille ans après, les précurseurs de la Renaissance écument les bibliothèques des monastères afin de retrouver des chefs-d'oeuvre oubliés. Bracciolini, secrétaire pontifical, après l'échec de son parti - le pape, son employeur, sera jeté en prison -, part à travers monts et vaux de Bavière à la recherche d'autres trésors. C'est ainsi que, probablement dans le monastère de Fulda, il tombe en 1417 sur une copie du De rerum natura (De la nature), de Lucrèce.
Bracciolini se rend rapidement compte qu'il a mis la main sur une oeuvre hors norme, radicale, excessive déjà pour les auteurs classiques. Lucrèce, disciple fidèle d'Epicure, y expose un matérialisme sans concessions : l'Univers est constitué d'un nombre infini d'atomes qui se meuvent au hasard à travers l'espace, formant des structures complexes pour se désagréger et former par la suite de nouvelles configurations. Il n'y a pas de grand plan, pas d'architecte divin.