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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

samedi 22 janvier 2011

AFP
Pétition sur le risque de disparition de la pédiatrie de ville

PARIS — L'association française de pédiatrie ambulatoire (Afpa) a remis mercredi au ministère de la Santé à Paris une pétition signée par 130.000 personnes pour attirer l'attention sur les risques d'une disparition de la pédiatrie de ville.

La présidente de l'Afpa Catherine Salinier demande notamment au ministre de la Santé Xavier Bertrand d'augmenter le numerus clausus des pédiatres, qui avoisine 280. Elle estime qu'il faudrait former 600 pédiatres par an pour remplacer, dans les années à venir, les pédiatres qui vont partir en retraite.

L'âge moyen des 6.725 pédiatres exerçant en France recensés en 2009 par l'Ordre des médecins était de 54 ans pour les hommes et de 48 ans pour les femmes, qui représentent 63,4% de ces spécialistes de l'enfant.

Leur répartition sur le territoire est très inégale et la plupart sont salariés. Ils ne sont que 25% à exercer en libéral et environ 800 pédiatres ont une activité mixte (salariée et libérale), selon l'Afpa.

"La France ne compte qu'un seul pédiatre pour 5.300 enfants, soit trois fois moins que la moyenne européenne et huit fois moins qu'en Italie", souligne la pétition, qui se veut un "nouveau cri d'alerte" face à "l'indifférence des pouvoirs publics".

"L'enfant n'est pas un adulte en miniature. La médecine infantile est complexe. Le suivi de l'enfant en croissance, de sa naissance à son adolescence réclame des compétences spécifiques", affirme notamment cette pétition.

Selon l'Afpa, qui compte 1.400 adhérents sur les 2.700 pédiatres de ville, différentes études prouvent que le suivi des enfants par des pédiatres est "plus pertinent et plus économique du fait de leur approche spécifique et exclusive".
Arizona Psycho 
19.01.11
Reportage
Tucson (Arizona, Etats-Unis) Envoyée spéciale - Le 29 septembre 2010, deux policiers de l'université de Pima County en Arizona se sont rendus au 7741 North Soledad Avenue, à Tucson, pour une mission si délicate, apparemment, qu'ils avaient pris soin de poster des renforts dans les environs. Ils venaient remettre son avis de suspension à Jared Lee Loughner, 22 ans, un étudiant qui effrayait les professeurs, nombre d'élèves et, hors campus, certains employés de banque qui se surprenaient à porter instinctivement le doigt sur le signal d'alarme quand ils le voyaient approcher.

Le jeune homme n'avait jusque-là agressé personne, mais il faisait constamment des sorties bizarres, des réflexions sur le "sens", le "contrôle", les mots, la grammaire. A la banque, il s'en était pris à une caissière à qui il avait dit que les femmes n'avaient rien à faire dans des positions de pouvoir. Sur YouTube, il avait mis en ligne une vidéo qui avait inquiété l'université. On le voyait arpentant le campus, de nuit, hélant une silhouette au passage, apparemment un professeur, avec un rire sarcastique : "Encore merci pour ce 12 que vous m'avez donné !" Il dénonçait le "génocide" des étudiants sur le campus, la "torture" qu'on leur infligeait, l'anticonstitutionnalité de l'université...

Jared Loughner n'est jamais retourné en cours. Deux mois plus tard, il est allé s'acheter un pistolet semi-automatique Glock 9mm, et en toute légalité puisqu'il n'avait pas d'antécédents psychiatriques. Le 8 janvier, il a tué six personnes sur le parking du supermarché Safeway de son quartier et a blessé d'une balle dans la tête l'élue démocrate de la circonscription, Gabrielle Giffords, 40 ans.

Pas plus que l'armée, qui avait refusé d'incorporer Jared Loughner en 2004, l'université ne se sent en quoi que ce soit responsable. "Il n'avait commis aucun crime. Il ne présentait pas de danger pour lui-même ou pour les autres. Il ne paraissait pas être dans un état de crise aiguë", a précisé l'avocate de l'établissement, Alice Calliso, dans le journal Arizona Daily Star. A défaut de la société dans son ensemble, chaque institution peut se féliciter d'avoir protégé les "siens". Ou de "s'être débarrassée du problème", comme dit Clarke Romans, qui travaille sur le sujet de la santé mentale depuis trente-cinq ans.

Aujourd'hui, la maison de Soledad Avenue est déserte. Après s'être - littéralement - murés derrière un barrage de véhicules et un panneau de contreplaqué pour échapper à la presse, les parents de Jared Loughner ont été conduits en lieu sûr par une voiture de police. Ils n'ont diffusé qu'un communiqué, qu'est venu lire un homme qui n'a pas voulu dire son nom. "Il n'y a pas de mots pour exprimer ce que nous ressentons. Nous souhaiterions qu'il y en ait, pour vous faire plaisir. Mais nous ne comprenons pas pourquoi cela est arrivé." C'est tout. Selon un psychologue proche du dossier, Jared Loughner était en conflit avec son père, et sa mère avait toujours préféré s'effacer. Une famille ordinaire, retranchée derrière le mesquite, l'arbre du désert, qui masque l'entrée.

Dix jours après la fusillade, Tucson s'interroge. "Comment n'a-t-on pas réussi à empêcher le tueur de passer à l'acte ?" Paradoxalement, l'Arizona est l'un des rares Etats qui ont échappé au mouvement antiplacement d'office des années 1980.

N'importe quel professeur, parent d'élève ou employé de banque aurait pu signaler son attitude étrange et demander à la justice d'ordonner une évaluation psychologique. Ailleurs, c'est impossible. L'avis du patient est prépondérant. La Cour suprême a même confirmé la liberté supérieure de ne pas prendre ses médicaments.

Tucson est une ville plus sophistiquée qu'il n'y paraît. Faite de strates, de recoins, de quartiers. "C'est un endroit pacifique, de positivité. Les gens sont ici depuis le XVIe siècle", dit Victor Soto Fontes, 54 ans, membre de la tribu amérindienne des Tohono O'Odham, le "peuple du désert".

Mais, en dix ans, la population a augmenté de 20 % et avec la pression démographique est venue la "dysharmonie". Les immigrants vivent dans le Barrio, le sud de la ville, une commune en soi, avec son maire et sa police. Côté "anglo", les nouveaux venus se sont installés dans le nord-ouest, de plus en plus haut dans les foothills, les contreforts des monts Catalina. Les retraités sont attirés par le soleil, les républicains par l'espace, les amoureux de la nature par la profondeur de la nuit (l'éclairage est réduit pour faciliter le travail des observatoires). Nul besoin de chercher à s'intégrer. On ne se mêle pas des affaires des autres, de peur de la réciproque.

La question de l'immigration a empoisonné l'atmosphère. Tucson a son Rush Limbaugh, un justicier des ondes qui se fait appeler "John Justice". Mais, globalement, elle reste une ville universitaire, démocrate, aux antipodes de Phoenix, ses projets de loi anti-immigration et ses militants du Tea Party. C'est pourquoi le choc a été grand. Devant l'hôpital universitaire où Gabrielle Giffords récupère doucement, les animaux en peluche, les messages et les photos recouvrent un parterre de plus en plus rempli.

Dans l'est de la ville, au bout de la 22e Rue, se trouve le siège de la branche locale de la National Alliance on Mental Illness (NAMI). L'association est dirigée par Clarke Romans, un transfuge de la Côte est, ex-cadre dans l'industrie pétrolière. Sa vie a basculé lorsque son fils, Kenneth, un adolescent "athlétique, beau garçon, intelligent", a commencé à se comporter bizarrement à l'âge de 16 ans. "On roulait et il me disait : "Tu vois tous ces feux qui passent au vert. C'est moi qui commande tout ça"." La maladie a duré des années, jusqu'à ce qu'un nouveau médicament "entrouvre le rideau noir". Les hallucinations sonores ont diminué, et Kenneth a réussi à lire un livre ou à soutenir une conversation sans interférences cérébrales. "C'est ainsi que nous sommes devenus membres d'un club auquel personne ne veut appartenir", relate le père. Celui des familles subitement confrontées à la schizophrénie.

L'histoire de Jared Loughner n'a pas surpris Clarke Romans. "Quand je lis son portrait dans les journaux, à toutes les lignes, il y a des drapeaux rouges." Statistiquement, de 6 % à 10 % de la population a des problèmes mentaux sérieux, affirme-t-il : schizophrénie, dépression majeure, psychose maniaco-dépressive. Pour une ville de 1 million d'habitants comme Tucson, cela représente de 60 000 à 100 000 personnes. Un quart seulement des malades sont en traitement, estime-t-il. "Loughner était l'un des 75 % de malades qui ne sont pas diagnostiqués."

Dans les années 1960, puis sous Ronald Reagan, la psychiatrie américaine a connu une révolution appelée "désinstitutionnalisation". Les asiles et les établissements d'Etat ont fermé. Entre 1960 et 1990, 80 % des lits ont été supprimés. Compte tenu de l'état des établissements psychiatriques, c'était "une bonne décision", estime Clarke Romans. La philosophie reposait sur un principe d'intégration, "chacun est responsable". Les malades mentaux seraient pris en charge par leurs communautés. Mais la société s'est détournée.

Les crédits n'ont pas suivi pour le logement ou les soins. Sous Ronald Reagan, des milliers de malades mentaux sont venus grossir les rangs des sans-abri. Puis des prisons. "On attend qu'ils commettent un crime, on les met en prison, et là ils subissent de mauvais traitements", dénonce Victor Soto Fontes, qui travaille depuis douze ans dans le secteur psychiatrique en détention.

"La désinstitutionnalisation a abouti à une réinstitutionnalisation. Dans les prisons", résume le Treatment Advocacy Center, une ONG qui milite pour un retour au placement d'office si nécessaire. Selon une étude du ministère de la justice, datant de 2007, 64 % des détenus des prisons locales souffrent de maladies psychiques ; 56 % pour les prisons d'Etat et 45 % dans les pénitenciers fédéraux.

En temps normal, l'Arizona est l'un des Etats les plus mal lotis pour les services de santé mentale. Le docteur E. Fuller Torrey, qui a fondé cette ONG, place l'Etat à l'avant-dernier rang national pour le nombre de lits d'hôpital par habitant. Les psychiatres ont quatre cents patients en moyenne. Les assistantes sociales, cent dossiers. "J'ai calculé : ça fait une heure et quatorze minutes par mois, y compris les papiers", dit Clarke Romans.

Si on ajoute la politique d'austérité actuelle dans un Etat qui cherche à limiter un déficit de 1,1 milliard de dollars (822 millions d'euros) en 2012, les conséquences sont dramatiques. Depuis le 1er juillet 2010, les malades de l'Arizona reçoivent des courriers les informant que leur prise en charge a changé. On les laisse tomber. On laisse tomber les gens de 65 ans à qui l'on devait poser une prothèse du genou, mais dont les revenus sont supérieurs au seuil de pauvreté. On laisse tomber les gens en attente d'une transplantation d'organe. On laisse tomber les gens qui touchent plus de 10 000 dollars (7 400 euros) par an. "Pour être pris en charge, il faut être très pauvre ou très malade", dit Clarke Romans.

En trois ans, l'Etat a coupé 65 millions de dollars (48 millions d'euros) dans les services psychiatriques. Depuis l'été, 7 000 personnes ont perdu leurs aides : elles peuvent encore être soignées en urgence, mais ne bénéficient plus de médicaments gratuits ou du transport médical. L'effet a été immédiat : le nombre de personnes admises en urgence "psy" a augmenté de 123 % en moins d'un an.

En décembre 2010, Maria Ramirez, 53 ans, a été informée qu'en raison de son statut d'immigrée sans papiers elle ne pourrait plus bénéficier des services sociaux du comté. Ni son mari, qui retape les pneus dans un garage pour 1 100 dollars par mois (822 euros) , ni ses deux enfants n'ont de papiers en règle. Traitée pour dépression depuis des années, Mme Ramirez a dû trouver, du jour au lendemain, une nouvelle source de financement pour ses médicaments. Une association a entrepris de les commander au Canada.

En octobre, un homme de 24 ans, Bradley Ware, a tué un individu avec qui il avait eu une altercation. "Quelqu'un qu'on ne pouvait pas manquer dans la rue : Noir, 1,97 m", raconte Clarke Romans. Bradley était sous traitement médical sur ordre de la justice. Mais les juges n'avaient pas renouvelé le traitement. Trop cher. Le fournisseur de soins avait déclaré que les médicaments n'étaient plus nécessaires. Seule la mère de Bradley, une employée de banque, s'était inquiétée. Quelques semaines plus tard, Bradley Ware passait à l'acte, avec une machette. Il attend son procès.
Corine Lesnes

vendredi 21 janvier 2011

culture mobile_le blog

Contrôler sa santé sur Iphone


"Allons-nous, à l'instar des États-Unis notamment, vers une prise en charge plus individuelle de notre capital santé ? Demain, chacun disposera peut-être d'un coach santé virtuel personnel pour stimuler son envie de s'occuper de soi. Peut-être aussi que les données qui seront recueillies via un pèse-personne ou un podomètre arriveront directement sur l'ordinateur du médecin..." interrogeait sur Marthe Aurèle dans le dossier Culturemobile "Je prends ma santé en main : quand les patients s'informent, partagent leur expérience et gèrent leur santé sur Internet". En effet, certains objets connectés sont déjà en mesure de transmettre des informations sur notre corps, en voici quelques exemples :
Le tensiomètre Withings à la particularité d'être connectable à un iphone. Les données s'enregistrent sur le mobile et dressent un tableau des mesures et des courbes sont tracées automatiquement pour détecter les tendances en un coup d'oeil. Le suivi devient aisé pour le patient et pratique pour le médecin qui décèlera plus rapidement les anomalies, car le patient peut les exporter et les envoyer par mail.

Dans les hopitaux, un électrocardiocardiogramme se présente sous la forme d'une grosse imprimante à laquelle est reliée une dizaine d'électrode. Son poids nécessite de le déplacer sur un chariot roulant. Un encombrement qui pourrait prendre fin puisque la société Alivecor a mis au point une application "iPhonECG" complémentaire d'une coque iPhone un peu spéciale, équipée d’électrodes elle permet de faire un ECG (Electrocardiogramme) n'importe où, très facilement. Si le degrès de précision s'avère à la hauteur des enregistrements actuels, cette solution pourrait participer à la numérisation des dossiers des patients hospitalisés.

Bien entendu si vous êtes en bonne santé toutes ces applications peuvent vous sembler futiles ; profitez-en alors pour télécharger la nouvelle application gratuite de la Croix-Rouge, elle vous enseignera les gestes qui sauvent.

mercredi 19 janvier 2011

Comment accueillir la folie? Un débat organisé lundi 24 janvier par Mediapart.
Par Sophie Dufau

La loi sur l'hospitalisation sous contrainte sera réformée dans les prochains mois. Face à un texte à intention clairement sécuritaire, alimenté par un discours qui stigmatise les malades mentaux comme potentiellement dangereux, il est urgent de s'interroger sur l'accueil que la société réserve aux personnes souffrant de troubles psychiques. Tant à l'hôpital, qu'à l'école, dans les entreprises et plus généralement dans la cité.
Ce débat est né d'une proposition de Paul Machto, psychanalyste et psychiatre à Montfermeil et Yves Gigou, infirmier, tous deux abonnés à Mediapart et rédacteurs de l'édition Contes de la folie ordinaire.

Il réunira:
- Hervé Bokobza, psychiatre et psychanalyste, directeur de la clinique de psychothérapie institutionnelle de Saint-Martin de Vignogoul dans l'Hérault, ancien président de la Fédération Française de Psychiatrie et membre du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire;
- Bénédicte Maurin, éducatrice auprès d'enfants près de Blois;
- Sylvie Zucca, psychanalyste (a beaucoup travaillé autour des questions de la psychiatrie en grande précarité, notamment au Samusocial), et auteur de Je vous salis ma rue - clinique de la désocialisation (ed. Stock, 2007);

Sera aussi présent dans la salle, Guy Dana auteur de Quelle politique pour la folie? : le suspense de Freud (ed. Stock, 2010).

Ce débat, animé par Sophie Dufau, journaliste à Mediapart et auteur de Le Naufrage de la psychiatre (ed. Albin Michel, 2006), s'inscrit dans le cadre des «lundis de Mediapart» qui, une fois par mois, propose une réunion publique la Maison des Metallos, à Paris.

L'entrée est libre et gratuite. 


Infos pratiques :
Maison des métallos, 94 rue Jean-Pierre Timbaud, 75011 Paris M° Couronnes
Lundi 24 janvier, de 19h00 à 21h00.

Première plongée dans l’hôpital-prison de Bron
18/01/2011

« La Croix » a pu visiter en exclusivité le premier hôpital-prison de France. Ouvert en mai, il accueille une cinquantaine de détenus présentant des troubles psychiatriques lourds

Luc n’a pas tout de suite réalisé où il était transféré. À peine incarcéré pour avoir poignardé son père, ce jeune homme de 19 ans a été conduit dans la toute nouvelle unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA) de Bron, en banlieue lyonnaise (1).

« On m’a amené ici parce que, en cellule, j’étais un petit peu angoissé », ânonne-t-il lentement. Le diagnostic médical est, lui, autrement plus préoccupant : pris de bouffées délirantes, Luc présentait un risque de passage à l’acte. Depuis son arrivée à Bron, il n’a plus été une seule fois en contact avec les « bleus », le surnom donné aux surveillants par les détenus.

Place aux blouses blanches, et à elles seules. « Les médecins qui m’entourent m’aident à éclaircir les points négatifs en moi, à comprendre mes délires. En prison, tout est plus… sec. Les surveillants ont d’autres soucis à gérer. »

En marge de ses rendez-vous médicaux, le jeune homme peut participer aux multiples activités culturelles et sportives de l’établissement. Il préfère, pour l’heure, enchaîner les puzzles, hobby aussi solitaire que rassurant. Et son état de santé devrait, selon les médecins, permettre d’ici à quelques jours son retour en prison.

Entre 10 à 25 % de la population carcérale souffrent de troubles graves

Avant l’ouverture de l’UHSA, en mai dernier, les bouffées délirantes de Luc l’auraient tout droit mené dans un hôpital psychiatrique. Son statut de détenu aurait obligé les soignants à le tenir à l’écart du reste des patients, dans une chambre fermée à clé.

Surtout, pour limiter tout risque d’évasion, son hospitalisation se serait limitée à quelques jours. C’est pour répondre à cette inadéquation de l’offre de soins psychiatriques aux détenus (entre 10 à 25 % de la population carcérale souffrent de troubles graves) que les pouvoirs publics ont fini par créer les UHSA.

Seul établissement de la sorte actuellement, l’unité de Bron a tout, en apparence, d’une prison classique : gros murs d’enceinte, barreaux aux fenêtres, parloirs… Principale différence : seul le personnel hospitalier y intervient. Les surveillants pénitentiaires sont relégués à l’entrée du bâtiment et n’ont pour seule mission que d’assurer la sécurité extérieure.

Le terme de « détenu » est proscrit, ici on parle de « patient »

Autre différence avec les établissements pour peine : le terme de « détenu » est proscrit, ici on ne parle que de « patient ». « Nous accueillons des individus atteints d’une pathologie psychiatrique qui souhaitent, ou nécessitent, d’être hospitalisés sur le long cours et pas uniquement lors d’une crise », explique Pierre Lamothe, médecin psychiatre et responsable du pôle Santé mentale des détenus et psychiatrie légale, dont dépend l’UHSA. « Ils retournent en détention lorsqu’on perçoit en eux une moindre souffrance, une meilleure estime d’eux-mêmes, une plus grande capacité à gérer les règles de vie en collectivité. »

Certains ne restent à Bron que quelques jours. D’autres de longs mois. Pas étonnant, compte tenu de la variété des profils qui cohabitent ici : une mère infanticide, un criminel sexuel proche du handicap mental, un quadragénaire profondément dépressif, un psychopathe borderline, un schizophrène délirant, etc. Cette cinquantaine de patients – dont un mineur – sont d’ailleurs répartis dans différentes unités, en fonction de leur pathologie ou de leur éventuelle dangerosité.

Les soignants sont tous volontaires. Corinne Bouchet fut l’une des toutes premières à déposer sa candidature. En tant que cadre de santé, elle assume la part de danger inhérente à sa fonction : «On ne peut soigner sans prendre le risque de l’autre.»

Les patients "apprécient qu’on s’occupe d’eux sans hostilité"

Tout est fait, néanmoins, pour limiter au maximum les débordements. Il n’est qu’à voir le nombre de caméras dans les couloirs pour s’en convaincre. Autre détail, auquel les patients ne prêtent sans doute pas attention : le personnel médical intervient systématiquement en binôme, pour mieux faire face en cas de problème.

Enfin, chaque employé est doté d’un talkie-walkie géolocalisable. Un premier signal permet de mobiliser une partie du personnel médical, un second, l’ensemble de la communauté soignante, et un troisième, les surveillants de la pénitentiaire. L’arrivée sur les lieux prend moins de 20 secondes.

Éloigné de l’hôpital classique, l’UHSA l’est presque tout autant de la prison. Et c’est bien là son originalité. Alain, un ancien enfant de la Ddass, toxicomane ayant attenté à ses jours à plusieurs reprises derrière les barreaux, en atteste.

« Quand vous êtes au bout du rouleau, quand vous sortez le drapeau, comme on dit, en prison, personne n’y prête attention. Les médecins sont trop débordés, ils viennent deux minutes vous voir pour vous prescrire vos médicaments. Ici, ça n’a rien à voir : on m’écoute », explique le trentenaire, encore stupéfait de pouvoir appeler les soignants par leur prénom. À entendre Pierre Lamothe, les patients seraient surtout rassurés d’être pris en charge médicalement. « Ils apprécient qu’on s’occupe d’eux sans hostilité et qu’on les aide à mettre des mots sur leur souffrance. Cela les sécurise énormément. »

Le patient reprend le chemin de la prison lorsqu’il est en voie de guérison

Cruelle logique : lorsqu’il est en voie de guérison, le patient doit reprendre le chemin de la prison et troquer son titre de « malade » pour celui de « détenu ». Étonnamment, les intéressés sont plutôt demandeurs. Et ce, pour des raisons inattendues.

Par exemple, à l’heure où l’on brandit l’encellulement individuel comme « la » panacée, Luc goûte peu le fait d’avoir une chambre individuelle au sein de l’UHSA : « En prison, on est plusieurs par cellule et je crois que je préfère. Ici, je gamberge tout seul autour de mon lit. » Alain, lui, reproche à l’UHSA son caractère aseptisé : « En détention, on peut fumer en cellule, se faire un petit café, écouter de la musique tard dans la nuit… »

Si les détenus se montrent si désireux de quitter les lieux c’est aussi, à entendre la psychiatre Ève Becache, pour ne plus être étiquetés comme « malades ». « Toute personne s’estimant guérie souhaite rentrer chez elle, analyse le médecin. Eh bien, c’est pareil pour les détenus. » C’est donc souvent la communauté soignante qui insiste pour que le patient reste encore quelques jours avant de rejoindre la prison.Huit établissements semblables prévus d’ici à 2012
Déjà victime de son succès, l’établissement pourrait aujourd’hui rapidement « s’emboliser ». Car les demandes d’hospitalisation à l’UHSA sont désormais quotidiennes. Huit établissements semblables sont appelés à voir le jour d’ici à 2012. Au final, 700 places devraient être créées.

Les pouvoirs publics comptent, pour l’heure, s’en tenir là, pour des raisons financières notamment, même s’il y a plusieurs milliers de détenus atteints de troubles psychiatriques en France. Le coût de fonctionnement de l’UHSA de Bron se monte à neuf millions d’euros, dont sept en personnel (pour une centaine d’équivalents temps-plein).

Une facture totalement assumée par Pierre Lamothe : « Avec ce budget, on s’approche de ce que coûte un service de réanimation. Et ce n’est pas très éloigné de ce que nous faisons : finalement, nous prenons en charge des personnes qui ont été abandonnées psychologiquement et qui se retrouvent, de ce fait, “inanimées” socialement. »
Marie BOËTON

(1) L’établissement est rattaché au centre hospitalier Le Vinatier.

120 médecins lancent un manifeste pour défendre l'accès aux soins
18.01.11 

Le mouvement a pour origine le soutien au docteur Didier Poupardin de Vitry-sur-Seine, qui est en conflit judiciaire avec l'Assurance maladie de ce département, parce qu'il fait bénéficier systématiquement ses patients en longue maladie de remboursements à 100 %.
AFP/GABRIEL BOUYS

Cent-vingt médecins "solidaires" ont lancé un manifeste pour dénoncer "les consignes de restriction" de l'accès aux soins remboursés et "la privatisation" de la Sécurité sociale, mardi 18 janvier à l'Assemblée nationale.

Le mouvement a pour origine le soutien à un praticien "désobéissant", le docteur Didier Poupardin, de Vitry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne, qui est en conflit judiciaire depuis plusieurs mois avec l'assurance maladie de ce département, parce qu'il fait bénéficier systématiquement ses patients en longue maladie de remboursements à 100 %.

Au cours d'une conférence de presse, en présence de députés ou représentants de partis politiques de gauche et de syndicats, le Dr Poupardin a dénoncé le "matraquage idéologique" sur la maîtrise des dépenses de santé et la responsabilisation des patients pour limiter le déficit de la Sécurité sociale qui, affirme-t-il, est en premier lieu un "déficit de ressources".

Le Dr Didier Menard, vice-président du Syndicat de la médecine générale (SMG), praticien à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), a déclaré que la poursuite en justice du Dr Poupardin "a réveillé la conscience de beaucoup de médecins". Il a expliqué que le sens du manifeste était d'organiser une "indignation active mais collective" parmi le plus grand nombre possible de médecins.

"UN SYSTÈME QUI EXCLUT DE PLUS EN PLUS LES COUCHES POPULAIRES"


Selon lui, il faut "sortir du bricolage (...) pour aider les patients à avoir un meilleur accès aux soins et le faire de façon plus politique et poser cette question sur la place publique". "Nous sommes dans un système qui exclut de plus en plus les couches populaires", a-t-il affirmé.

Selon le manifeste, la fondation de la Sécurité sociale, contenue dans le programme du Conseil national de la résistance, "reposait sur un principe majeur de solidarité et d'équité : chacun cotise selon ses moyens et chacun reçoit selon ses besoins". Mais "ce principe recule et tend à s'inverser : chacun doit payer selon ses besoins (si vous êtes très malade vous devez payer beaucoup) et chacun reçoit selon ses moyens (si vous êtes très riche, vous êtes bien soigné)". Les médecins seront invités à signer le manifeste sous la phrase suivante : "Nous déclarons vouloir résister aux consignes de restriction de l'accessibilité aux soins".
Rendre payante l'aide médicale aux sans-papiers coûtera plus cher à l'État
04.01.11

Le droit d'entrée de 30 euros pour bénéficier de l'aide médicale d'Etat risque d'accroître les dépenses de l'État.

AFP/OLIVIER MORIN

Le durcissement des conditions d'accès à l'aide médicale d'Etat (AME), votée en décembre par le Parlement, serait contre-productive, affirme un rapport de l'Inspection des affaires sociales (IGAS) et de l'Inspection générale des finances (IGF). Révélé par Les Echos et Mediapart, ce volumineux rapport propose une analyse détaillée du dispositif qui permet l'accès aux soins aux personnes sans papiers dont les revenus n'excèdent pas 634 euros par mois. Le rapport conteste tous les points avancés par les députés et sénateurs UMP pour durcir les conditions d'accès à ce dispositif.

Pas de fraude à l'AME. Les abus dénoncés par la droite sont impossibles à prouver, notent les auteurs du rapport. Le député Jean Léonetti assurait qu'"il y a des filières de fraudes", tandis que Thierry Mariani dénonçait de "nombreux abus". "Il n'est pas possible d'établir statistiquement un lien entre l'évolution des dépenses et l'évolution des abus et fraudes", répond le rapport, qui s'appuie sur un audit des caisses d'assurance-maladie de Paris et de Bobigny, qui, avec celle de Créteil, concentrent la moitié des dépenses d'AME.

Les accusation de greffes abusives ou de tourisme médical sont battues en brèche. "Les observations statistiques démentent l'existence de filières", estiment les rapporteurs. Comme les autres patients, les personnes sans papiers sont inscrites sur une liste d'attente à partir de critères médicaux et logistiques, ce qui "rend peu probable un tourisme médical". Seule une vingtaine de personnes sans papiers a bénéficié d'une transplantation en 2009. Le rapport précise que les dépenses de l'AME sont centrées sur des personnes "très malades".

La contribution forfaitaire "inadaptée". Surtout, le rapport critique l'idée d'une contribution forfaitaire de 30 euros mise en place dans le budget 2011. Un tel droit d'entrée paraît "financièrement inadapté, administrativement complexe et porteur de risques sanitaires", estime le rapport. Le document pointe ses "lourds effets pervers" et le risque de voir se multiplier les "recours tardifs à l'hôpital, nettement plus coûteux". Selon les députés, le droit d'entrée aurait dû permettre d'économiser 6 millions d'euros. Mais le rapport estime que si 10 %  des malades retardent leur demande de soins la dépense supplémentaire pourrait être de 20 millions d'euros.

De fait, cet argumentaire rejoint celui des associations médicales et de soutien aux étrangers qui ont dénoncé pendant le débat parlementaire les risques que ce droit d'entrée faisait peser sur la santé des migrants, mais aussi sur l'ensemble du système de santé. "C'est un non-sens économique : retarder l'accès aux soins engendre des surcoûts pour le système. Les soins urgents coûtent plus cher que la médecine de ville. Cela ne ferait qu'empirer une situation qui se dégrade déjà", expliquait ainsi Olivier Bernard, président de Médecins du monde, en septembre.

Un rapport enterré. Ce rapport a été transmis en novembre à Roselyne Bachelot et François Baroin. Mais le document n'a été mis en ligne qu'à la toute fin du mois de décembre, après que les députés avaient voté la mise en place de cette contribution forfaitaire.

Fonction publique : 100 000 postes supprimés d'ici à 2013
17.01.11

A l'occasion de la présentation de ses vœux à la presse, lundi 17 janvier, le ministre du budget et de la fonction publique, François Baroin, a confirmé que la politique de non-remplacement d'un départ sur deux dans le secteur public se poursuivrait au rythme de 100 000 départs non remplacés en trois ans.

Entre 2011 et 2013, "100 000 emplois ne seront pas remplacés au sein des administrations et des opérateurs", a indiqué le ministre. Cette politique "n'en est pas moins tout à fait équilibrée, elle permet de reverser la moitié des économies réalisées aux fonctionnaires, sous la forme de bonifications", a-t-il rappelé.

M. Baroin a cité en exemple la fusion, emblématique, de "l'ensemble des services" de la nouvelle direction générale des finances publiques (DGFIP), réunissant les administrations du Trésor et des impôts. Il a également vanté la rationalisation des achats des différentes administrations, qui a déjà permis d'économiser 712 millions d'euros sur un périmètre d'achats "d'un peu plus de 5 milliards".

CONTRAT DE PERFORMANCE


M. Baroin a aussi rappelé la feuille de route fixée à la mi-décembre à un demi-millier d'opérateurs de l'État, de Météo France à l'Office national des forêts, qui pèsent, hors universités et agences régionales de santé, 29 milliards d'euros de crédit de l'État et 235 000 emplois, dont une partie de fonctionnaires. "Plus de 85 %" d'entre eux ont déjà signé fin 2010 le "contrat de performance" permettant d'assurer leur "pilotage stratégique", a-t-il souligné.

Le ministre a souhaité que leur soient étendues dès cette année les règles budgétaires des administrations, avec des "gains de productivité, la certification de leurs comptes", "une réduction de 10 % de leurs dépenses de fonctionnement d'ici 2013", et l'interdiction de s'endetter à plus d'un an pour un "grand nombre" d'entre eux.

M. Baroin a par ailleurs rappelé l'attachement du gouvernement à combattre la précarité dans la fonction publique, via un projet de loi en cours de négociation avec les syndicats.
Œdipe en Chine
Documentaire
Durée : 0:55 min

 RÉSUMÉ

Qu'est-ce que Freud ou Lacan ont à dire aux Chinois ? La psychanalyse, nourrie des mythes occidentaux, peut-elle s'adapter à l'une des plus vieilles civilisations du monde ? Dans cette enquête révélatrice d'une ouverture à «l'inconscient», thérapeutes et étudiants chinois s'allongent sur le divan. Un siècle après les découvertes de Freud, la psychanalyse suscite un certain engouement en Chine. Rien de très développé encore, mais dans ce pays où les bouleversements économiques accélérés brouillent les repères traditionnels, où la liberté d'expression n'existe pas et où parler de soi est mal vu, elle apparaît comme un espace privilégié permettant à une parole intime de se déployer

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Comment résister au diktat de l'urgence
Par
Pascale Senk17/01/2011

Le mal qui nous menace aujourd'hui est un rapport dysfonctionnel à la temporalité. À trop vivre dans l'immédiat, nous perdons peu à peu les bénéfices de la durée.

C'est le dernier sujet qui passionne, inquiète, fait débat: des livres, des conférences et pas moins de deux colloques importants explorent la relation de l'homme contemporain au temps et s'inquiètent de la tyrannie de l'immédiateté dans nos vies. Le premier, celui de l'association GyPsy (gynécologie psychanalyse), s'est tenu au début du mois de décembre à Paris et réunissait pendant trois jours des psychanalystes, mais aussi des philo sophes, des historiens ou des écrivains. Le second, qui se prépare actuellement, réunira, à Grenoble, en octobre prochain, sociologues, scientifiques et psychologues.

Que se passe-t-il donc? Y a-t-il péril en la demeure? On pourrait dire que justement «rien ne demeure: tout passe trop vite et nous ne nous y retrouvons pas. Les nouvelles technologies nous ayant désormais plongés dans le règne de l'instantanéité, nous avons perdu un certain sens de la temporalité et sommes souvent déchirés entre deux instances: le temps social, extérieur, celui de nos contraintes organisationnelles pour nous adapter au monde pressé dans lequel nous vivons, et le temps intérieur, appelé aussi temps psychologique, qui nous invite à goûter ce qui se passe dans nos vies à notre propre rythme, cette fois-ci subjectif. Il semble qu'actuellement beaucoup d'entre nous soient comme déphasés dans leur perception de ces différents temps (lire ci-dessous). Jacques André, psychanalyste et auteur notamment des Désordres du temps (Éd. PUF), observe certaines contradictions contemporaines: «Nous avons gagné en allongement de vie, et pourtant, la préoccupation du vieillissement semble arriver chez certains dès l'âge de 30 ans. Très tôt, ils souffrent de leur première ride alors qu'ils ont beaucoup d'années devant eux.»

Autre contrainte déstabilisante : le diktat de l'urgence s'est imposé dans le temps social. «Avant, celui-ci était rythmé par les saisons, rappelle le psychanalyste. Aujourd'hui, beaucoup semblent poussés par l'envie de brûler les étapes: ils vivent dans la précipitation, la suroccupation, se retrouvent à sortir tous les soirs, à multiplier les relations éphémères.» Ainsi le règne du non-durable en vient-il à colorer nos existences.

Or cette «sommation cumulative d'instants» que les médias notamment diffusent à profusion (cf. la culture du «scoop») ne s'accorde pas avec nos besoins profonds d'élaboration psychique. Car on peut remarquer que toutes les grandes initiations dans nos vies: grandir, apprendre, aimer, éduquer, traverser un deuil par exemple demandent du temps. «Aujourd'hui, nous n'avons plus le temps d'incuber les événements et de les élever au statut d'événements psychiques , regrette le psychanalyste Roland Gori. Alors, bien sûr, nous pouvons nous adapter en développant un “faux-self”, un moi d'emprunt, mais que deviennent nos rêves, nos mémoires, les mythes dans cette société qui matérialise le temps à ce point?» Et de citer Winnicott : «Pour pouvoir être et avoir le sentiment que l'on est, il faut que le faire-par-impulsion l'emporte sur le faire-par-réaction.» Réflexion, anticipation et intégration nous sont donc aussi nécessaires que l'air et l'eau.

Jardin secret

Mais alors, comment s'en sortir ? Pour le philosophe Marcel Gauchet, tel est le nouveau défi qui nous incombe: réconcilier ces deux temps qui rythment nos vies, le temps de la construction sociale, qui est artificiel mais auquel nous obéissons, et notre temps intérieur, qui nous fait traverser les événements d'une manière irrémédiablement solitaire. «Nous ne pouvons nous passer d'aucun de ces temps, précise le philosophe, et nous ne cessons d'osciller de l'un à l'autre. Mais il est possible de vivre au mieux cette dualité: en prenant conscience notamment que le temps “objectif” ne se réduit pas à la contrainte sociale et au conformisme.» On peut ainsi l'envisager comme «le temps de l'action en commun, du travail réfléchi de construction partageable avec les autres et en mesure de produire des effets durables au-delà des limites de nos vies».

De manière plus pragmatique, le psychiatre Laurent Schmitt recommande dans son livre Du temps pour soi (Éd. Odile Jacob) de multiplier les occasions de se mettre en contact avec sa propre temporalité: micropauses d'environ une minute nous permettant d'interrompre nos activités trois ou quatre fois par jour, aménagement de nos activités et de nos loisirs en fonction de notre rythme individuel, culture d'un jardin secret… Des propositions qui deviendront peu à peu incontournables pour tous ceux qui ne veulent plus perdre leur temps.
Tous médecins généralistes !
15.01.11

La médecine exerce une emprise grandissante sur nos vies. Et la santé n'échappe pas au grand chambardement de nos démocraties. L'autorité du médecin ne va plus de soi, patient docile ou pas. Le brutal et pertinent Dr House a remplacé l'inquiétant et charlatan docteur Knock. L'automédication triomphe, la consultation numérique est autorisée et les internautes se livrent à de savants ou hasardeux autodiagnostics. Nos attitudes ont changé. Patients impatients, nous serions tous devenus des généralistes, des experts patentés. Pour ces raisons, la revue Médium, dirigée par l'écrivain et philosophe Régis Debray, s'est emparée de ce passionnant sujet.

Le constat est partagé par tous les rédacteurs de cette publication trimestrielle : la médecine est partout. Pas un hebdo sans son palmarès des hôpitaux, pas une télé sans son émission de santé. Et le Mediator est d'abord un drame, mais également un feuilleton. Alors, que peut nous apprendre sur ce moment d'emballement sanitaire la "médiologie" (terme combiné du latin - medium, le véhicule - et du grec - logos, le discours), qui désigne une discipline qui s'attache au moyen de communication plutôt qu'au contenu que celle-ci véhicule et s'intéresse aux effets produits par l'innovation technique sur l'espace public ?

Tout d'abord un "effet jogging". De même que le progrès des moyens de transport développe paradoxalement la marche et la course à pied dans un monde fortement urbanisé, de même l'hyper-technicité médicale provoque des retours aux médecines traditionnelles, expliquent Monique Sicard, coordinatrice du numéro, et Paul Soriano, rédacteur en chef de Médium. Ensuite un "effet wiki" : blog, forum, réseaux sociaux ou experts "on line" font que le savoir médical est participatif et interactif. Au point que Dominique Dupagne, médecin généraliste, célèbre l'avènement d'une "médecine 2.0". Car le Web permettrait de contourner les intérêts financiers et d'inventer un nouvel art de soigner. "Estompement des frontières du savoir et du pouvoir", du sachant et de l'ignorant, du médecin et du patient, le Net met une déterminante expérience en partage, celle du vécu de la maladie.

Directeur des ressources humaines du centre hospitalier de Senlis, Lucien Gérardin n'y voit pas qu'un progrès. Un "mouvement de consumérisme médical" est en marche, dit-il. Et les prescriptions des médecins sont souvent vérifiées sur des sites spécialisés par des patients inquiets des effets secondaires d'un médicament, ou dubitatifs sur le diagnostic établi par leur médecin traitant. Ainsi cette "hypochondrie généralisée" de la société où chaque citoyen se transforme en petit médecin a, selon lui, "un côté orwellien". Il faut dire que les crises sanitaires (vache folle, vaccin H1N1, Mediator, etc.) ont inauguré une ère de la méfiance et de la défiance.

Mais attention à ne pas oublier que l'espérance de vie, dans les pays dits "développés", ne cesse d'augmenter, rappelle Jean de Kervasdoué, titulaire de la chaire d'économie et de gestion des services de santé du CNAM. Et que le système de santé français demeure l'un des plus performants. Inutile, pourtant, de dépenser plus. Car "plus de médecine ne veut pas dire plus de santé". Ainsi le Japon, pays qui dépense le moins pour ses soins, à l'exception de la Corée, est aussi celui où l'on vit le plus longtemps, écrit-il.

Gardons-nous donc de donner raison à Aldous Huxley, l'auteur du Meilleur des mondes (1931), qui disait que "la médecine a fait tellement de progrès que plus personne n'est en bonne santé" !
Quand la technologie remplace la discussion…
Par Xavier de la Porte
17/01/11

La lecture de la semaine, il s’agit d’un article de USA Today publié le 30 décembre dernier, sous la plume de Sharon Jayson. Il m’est arrivé par un auditeur de Montréal, que je remercie au passage. Et il s’intitule : “2010, l’année où la technologie a remplacé la discussion”.

L’article commence par constater que les Américains sont connectés à un  niveau sans précédent. 93 % d’entre eux utilisent des téléphones portables ou des outils de connexion sans fil… Les avantages sont évidents : on peut rester en contact avec ses amis et sa famille, et utiliser à  bon escient les moments d’attente, par exemple, pour discuter avec eux. L’inconvénient : on se déconnecte de fait des gens qui sont dans la même pièce que nous. C’est pourquoi, malgré toutes ces technologies qui nous permettent de communiquer plus facilement, 2010 est l’année où l’on a arrêté de se parler les uns aux autres. [...]


[...] Sherry Turkle, qui dirige l’Initiative sur la technologie et l’autonomie au MIT, à Cambridge, Massachusetts (et qui vient de faire paraître un livre sur le sujet intitulé Seuls ensemble), s’inquiète de ce qu’elle voit aujourd’hui : “Nous sommes dans une confusion entre la connexion continue et le fait d’avoir de vraies connexions, explique Sherry Tuckle. On est toujours disponible pour tous. Mais, quand on y regarde de plus près, on ne se donne plus le temps pour avoir des conversations qui comptent vraiment.

Dans son dernier livre Still Connected : Family and Friends in America Since 1970 (Toujours connectés : famille et amis en Amérique depuis 1970), il explique que le temps passé en contact avec les amis et la famille n’a pas beaucoup changé depuis 40 ans, malgré l’explosion du mobile ; il y a eu une légère baisse du contact en face à face, mais une hausse substantielle des autres manières de communiquer, comme le téléphone ou le mail. Le changement majeur, ajoute-t-il, c’est “l’idée que vous êtes disponible à tous les membres de votre environnement social à tous les instants, et qu’ils le sont pour vous. Quant aux conséquences et aux implications, nous les ignorons.

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Maxisciences

L’aire cérébrale du mensonge dévoilée

14 janvier 2011
Une zone du cerveau serait potentiellement activée lorsque les personnes mentent. C’est du moins ce qu’une équipe de neurologues britanniques pense avoir repéré.

L’Agence Science Presse rapporte qu’un neurologue anglais, Matthew Rushworth, et son équipe ont réussi à identifier la zone du cerveau qui s’activerait en cas de mensonge. Des volontaires ont été soumis à un test pour permettre cette étude.
Les participants devaient choisir entre deux boîtes en fonction des informations, vraies ou fausses, données par un autre candidat. En fonction de ce que croyait le participant chargé de choisir la boîte à ouvrir, différentes zones du cerveau étaient activées. Ainsi, s’il pensait l’information juste, la zone activée n’était pas la même que s’il pensait qu’on lui mentait. De même, en leur montrant qu’ils s’étaient trompés, l’activité cérébrale changeait à nouveau.
Si cette étude a bien été menée, elle pourrait être utile pour mieux appréhender les problèmes de schizophrénie et de paranoïa, indiquent les auteurs de l’étude. En effet, les schizophrènes développent une paranoïa importante en étant contraints de faire face à leurs estimations fausses de la réalité

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dimanche 16 janvier 2011




NE LAISSEZ PAS FAIRE !

L’HÔPITAL PUBLIC EST VOTRE HÔPITAL

DÉFENDEZ-LE AVEC NOUS !

- Défendez-le parce qu’il assure des soins de qualité pour tous quels que soient les moyens de chacun.

- Défendez-le parce que c’est là que se font les grandes recherches d’aujourd’hui qui permettront les progrès de demain.


- Défendez-le parce que c’est lui qui assure 80% des urgences, c’est lui qui a fait face hier à l’épidémie de SIDA et à la canicule et qui pourra faire face à une pandémie grippale.


- Défendez-le parce que c’est lui qui prend en charge les cas les plus graves ou les plus complexes à tous les âges de la vie.


- Défendez-le parce que les autres pays nous l’envient.


La loi HPST dite loi Bachelot a supprimé l’appellation de « Service Public Hospitalier ». Elle ne parle plus que d’ « Établissement de Santé ». Elle cherche à transformer l’hôpital public en entreprise.

Pour être rentable l’hôpital devra sélectionner les pathologies et les patients, et diminuer le nombre de personnels : moins d’infirmières, moins d’aides soignantes, moins de médecins, moins de secrétaires, moins d’assistantes sociales.
Il est prévu de supprimer 20 000 emplois dans l’ensemble des hôpitaux.

NE LAISSEZ PAS FAIRE
POUR DÉFENDRE VOTRE HÔPITAL PUBLIC ASSURANT
L’ACCÈS ÉGAL POUR TOUS À DES SOINS DE QUALITÉ,
SIGNEZ LA PÉTITION NATIONALE QUI SERA ADRESSÉE
AU PARLEMENT ET AU GOUVERNEMENT :

« Je défends l’Hôpital Public, lieu de formation des professions médicales et paramédicales, de l’innovation et des progrès thérapeutiques, qui offre à tous, sans discrimination, des soins de qualité.

Je m’oppose à son démantèlement qu’annoncent d’une part un nouveau mode de direction qui aura pour souci principal la rentabilité, d’autre part des suppressions d’emplois non justifiées qui altèreront la qualité des soins. L'Hôpital Public doit avoir un financement lui permettant de remplir ses missions.»
Psychanalyse et Non-Psychanalyse

Que peut la psychanalyse pour les pratiques sociales ?

On peut voir les sciences humaines se donner couramment des "airs" psychanalytiques dans la mesure où, bien souvent, elles utilisent la thèse d'un "inconscient structuré comme un langage" sans toujours reconnaître leur dette à l'égard de la doctrine analytique. Hypothèse : l'"analycité" serait la condition de possibilité des sciences humaines comme le langage est la condition de l'inconscient. Par-delà les prétentions objectivistes (plus ou moins légitimes, ce n'est pas notre problème) de la sociologie et des sciences sociales en général, par-delà l'écriture ambiguë de l'Histoire "entre science et fiction", il reste à établir la dette contractée par les "pratiques sociales" à l'endroit de la psychanalyse, d'autant qu'elles sont directement confrontées à la réalité éthique et politique du sujet. Ces pratiques d'aide sociale, d'éducation, de formation, etc., se fondent toutes sur une forme de transfert mais ne peuvent ni en produire la théorie, ni évidemment se contenter d'importer la technique inventée par Freud (l'association libre et son écoute flottante) dans le cadre de la pratique analytique. Comme la cure, elles font intervenir acte et structure (de langage) mais sans viser les mêmes finalités puisqu'elles ne s'adressent pas au "même" : l'une parle exclusivement au sujet en tant que tel, alors que les autres ont affaire à l'individu socialement aliéné, soit l'assujet.

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Fondantion Maison des sciences de l'homme

La psychanalyse vaut-elle aujourd’hui d’être défendue ?

Table ronde animée par Jacques Munier (France Culture)

Avec José Morel Cinq-Mars (érès ; PUF), Heitor O’Dwyer de Macedo (Stock), Patrick Chemla (érès), Erik Porge (La Fabrique), Isabelle Blondiaux (Le Félin)

La psychanalyse suscite souvent méfiance et rejet. La montée en puissance des sciences cognitives, des thérapies comportementalistes, de l’idéologie de l’évaluation accentue encore cette marginalisation et vaut que soit posée la question de l’importance et des enjeux de cette discipline.

Salle Margaret Mead, Samedi 5 février 16h30-18h

Normativité, créativité, transmission dans la psychanalyse


Colloque du Comité de Liaison Française CLF De la CONVERGENCIA

29 et le 30 janvier 2011
A l'Institut de théologie protestante
83 bd Arago, 75014 Paris

“Par la grâce de l'analysant…”, nous disait Lacan à propos du transfert.
Nos associations, qui s'attachent aujourd'hui à maintenir la psychanalyse dans le fil d'une transmission qui ne dénature ni le propos de Freud ni l'enseignement de Lacan, devraient en venir à instaurer cette norme inédite que la psychanalyse elle-même advienne, en ce troisième temps, comme discours renouvelé, grâce à l'intervention des analysants qu'elle se rendrait à même d'intégrer en son sein, de même que ceux-ci ne feraient aucune difficulté à faire savoir au dehors que c'est à la psychanalyse qu'ils doivent la renaissance d'une subjectivité non entravée.
La création du sujet, enfin écouté et reconnu par la voix qui s'en écoute dans le cadre d'une cure, déboucherait ainsi sur la possibilité que soit forgé, lors d'un tel travail, un sujet de la création, celle-ci ne se limitant plus à celle d'un nouveau psychanalyste, simple moyen de reproduction de son discours, mais à celle d'une oeuvre, que ce soit dans les domaine de l'art ou de la science, puisque sa possibilité ferait passer le sujet en question de la déchéance du nom réduit au rang de “signifiant quelconque” dont on peut se passer, à la signature d'un nom qui fait acte, voire tournant dans l'histoire.

Dispositif
Les textes de chaque association seront mis en discussion par deux autres associations de Convergencia.

Samedi 29 janvier 2011
matin 10h-12h30 :

Invitation adressée aux auteurs du « Manifeste pour la psychanalyse » dont l'ouvrage sera mis en discussion par :

Le Cercle Freudien (C.F.) France ; Cartels Constituants de l'Analyse Freudienne (C.C.A.F.), Psychanalyse Actuelle , Dimensions de la Psychanalyse

après-midi 14h30 – 17h30

1. Le texte d'Analyse freudienne sera discuté par :
1. Dimension de la Psychanalyse
2. Fedepsy
2. Le texte d'Espace analytique sera discuté par :
1. Analyse Freudienne
2. Psychanalyse-Actuelle
3. Le texte d'Insistance sera discuté par :
1. Dimensions de la Psychanalyse
2. Fedepsy

Dimanche 30 Janvier 2011
matin : 10h30 -12h30

4. Le texte de Dimensions de la Psychanalyse sera discuté par :
1. Cercle Freudien
2. Espace Analytique
5. Le texte du Cercle Freudien sera discuté par :
1. Cartels Constituants (C.C.A.F.)
2. Insistance

Dimanche après-midi : 14h30 – 17h30

6 Le texte des Cartels Constituants (C.C.A.F.) sera discuté par
1. Analyse freudienne
2. Insistance
7. Le texte de Psychanalyse-Actuelle sera discuté par :
1. Espace Analytique
2. Cartels Constituants (C.C.A.F.)
8. Le texte de Fedepsy sera discuté par :
1. Psychanalyse Actuelle
2. Cercle freudien

17h30-18h30 Ouvertures, relances

Une participation de 60 euros par personne a été décidée pour l'ensemble du colloque, de 40 euros pour chaque journée ou pour une demi-journée.
Une participation de 10 euros sera demandée aux étudiants.

Colloque Organisé par Le CLF :
Analyse Freudienne (A.F)
Cercle Freudien (C.F.) France
Espace Analytique (E.A.) France
Insistance (I) France
Cartels Constituants de l'Analyse Freudienne (C.C.A.F.)
Psychanalyse Actuelle (P.A.) Dimensions de la Psychanalyse (D.P.) Fedepsy (F.P.)
Pour le CLF-Convergencia
Barbara Didier-Hazan, Fabienne Ankaoua, Nabile Farès, Paolo Lollo
Le Livres de Psychanalyse
Les Paradoxes du délire. Wittgenstein, Schreber, et l'esprit schizophrénique
Louis A. Sass

Décembre 2010
Les Éditions d'Ithaque

Voici un essai sur la philosophie et sur la folie sur la folie comme parente proche de la philosophie ; sur la philosophie comme espèce de la folie. Être « fou », tant pour le spécialiste de clinique mentale que pour n'importe lequel d'entre nous, c'est croire des choses absolument fausses, ou en percevoir certaines qui n'existent tout simplement pas. Mais bien des schizophrènes, ces fous par excellence, n'agissent nullement comme s'ils prenaient leur délire pour la réalité. Dans ce travail, d'une pénétration et d'une sensibilité exceptionnelles, Louis Sass fait voler en éclat nos idées reçues sur le délire et la réalité. Comment ? En mettant en regard l'autobiographie du « fou » le plus célèbre de l'histoire de la psychiatrie et de la psychanalyse, le Président Daniel Paul Schreber, et les textes du philosophe ou de l'antiphilosophe Ludwig Wittgenstein. Car quantité de « maladies intellectuelles » que Wittgenstein a détectées en philosophie le détachement à l'égard de la vie sociale, l'indifférence aux enjeux pratiques, la pente à l'abstraction et à la concentration de la conscience sur elle-même présentent de troublantes affinités avec les symptômes classiques de la schizophrénie. La schizophrénie, montre ainsi Louis Sass, pourrait bien être, à cet égard, non la perte définitive de la raison, mais le point d involution ultime sur la trajectoire d'une conscience livrée aux savants paradoxes d'un solipsisme vécu.

Louis Arnorsson Sass, psychologue formé à la phénoménologie, est professeur de psychologie clinique à l'université Rutgers (New Jersey). Il y est chercheur au Centre de sciences cognitives et il y enseigne également en littérature comparée. Ses travaux, toujours marqués par l'interdisciplinarité, se situent à la croisée de la psychologie clinique, de la philosophie, de l'histoire des sciences, des arts et de la littérature. On y trouve des études phénoménologiques sur la schizophrénie, sur les notions de vérité et de soi en psychanalyse, sur l'herméneutique en philosophie, ou sur l'articulation modernité / post-modernité
Ergothérapie en psychiatrie : De la souffrance psychique à la réadaptation
Hélène Hernandez , Laurent Berges , Muriel Mutis , Philippe Vaur
12 janvier 2011
L’ambition de cet ouvrage réside dans l’écriture de pratiques liée à l’exposition de choix conceptuels et théoriques. A l’heure où les étudiants en ergothérapie réalisent un mémoire de fin d’études nourri d’une initiation à la recherche, la profession se devait de disposer d’écrits référencés dans lesquels la théorie éclaire la pratique et la féconde.

jeudi 13 janvier 2011

La Non-philosophie

LES PRINCIPES DE LA PENSÉE.
La philosophie immanentale.

De Sylvain Tousseul


Le bâtiment dans lequel vous vous trouvez a été construit avec certaines connaissances qui relèvent des sciences exactes, comme la géométrie ou la physique, et en fonction de certaines conditions qui relèvent des sciences humaines, comme l’économie ou l’esthétique. Ainsi, le monde dans lequel nous vivons est construit à l’aide des sciences dont nous disposons, c’est-à-dire que la légitimité de notre monde repose sur celle de nos sciences. Or, nos sciences n’ont aucune légitimité, car les logiques avec lesquelles elles sont élaborées n’ont jamais pu être justifiées depuis qu’Aristote les a découvertes, et tant que les logiques ne sont pas justifiées, les sciences et le monde qu’elles permettent de construire ne le sont pas davantage. C’est pourquoi le présent ouvrage se donne pour tâche de résoudre l’énigme millénaire des logiques : comment pense-t-on ? Pourquoi pense-t-on ? Et quelles sont les idéologies que Ça entraîne ?

Castres. Le cercle du Pastel invite Dark Vador sur son divan
Comment, depuis 1977, une musique, une respiration et une silhouette noire peuvent parvenir à représenter la terreur pour deux générations ? Dark Vador, personnage central de Star Wars, sera aussi au centre d'une conférence menée par le psychiatre et psychanaliste Hubert Stoecklin sur le thème «psychanalyse, art et cinéma» proposée par l'association «le cercle du Pastel» à l'auditorium de la bibliothèque municipale, 2 avenue du Sidobre, le mardi 7 décembre à 20h30.

Hubert Stoecklin parlera notamment de sa rencontre avec Anakin Skywalker, devenu Dark Vador: «Il fallait un regard analytique pour entendre ce que nous dit Dark Vador à travers son terrible masque. Dark Vador à beaucoup à dire sur son passage du côté obscure.»
Le psychiatre va ainsi s'appuyer sur le moment central de la saga, c'est à dire la transformation de Anakin en Vador pour étayer une conférence forcément très psychanalytique.

Bachelot opposée aux assistants sexuels pour les handicapés

Une proposition de loi visant à créer un statut d’aidant sexuel devrait être déposée dans le courant de l'année.

La ministre de la Solidarité et de la Cohésion sociale, Roselyne Bachelot, s’est déclarée jeudi «rigoureusement opposée» au recours à des assistants sexuels pour les personnes handicapées.

Interrogée lors d’une conférence de presse pour savoir si elle soutiendrait une proposition de loi qui devrait être déposée en 2011 pour rendre possible le recours à des assistants sexuel pour des personnes handicapées, Mme Bachelot a répondu: «J’y suis rigoureusement, formellement, totalement opposée». «Vous pensez que la ministre en charge du droit des femmes va soutenir un truc pareil ?», a-t-elle demandé.

Le député UMP Jean-François Chossy, qui a été missionné par le Premier ministre pour réfléchir à «l’évolution des mentalités et le changement du regard de la société sur les personnes handicapées», prépare une proposition de loi visant à créer un statut d’aidant sexuel.
Jamais sans mon génome
Par ANNE DIATKINE


L’année 2011 s’annonce sous les meilleurs auspices. Les nouveau-nés ou plutôt leurs parents vont enfin savoir où leur vie va les mener et comment obéir dès le premier jour à leur destin, sans stupidement résister ou s’imaginer qu’ils usent de leur libre arbitre et produisent leur histoire. Portable Genomics, conçu par le chercheur Patrick Merel, est une application qui permet de transporter avec soi tout son génome dans son iPhone ou iPad. Grâce à elle, Dieu n’est plus caché et le jansénisme est de nouveau tendance.

Mais la prédestination a pris une forme scientifique. Désormais, un bébé pourra dormir et grandir en compagnie de toutes les informations possibles concernant ses gènes, comme autant de doudous. S’il se révèle virtuellement hypertendu, cardiaque, diabétique, ou si son père n’est pas son père, il pourra dire à la manière de Jacques le Fataliste : «Tout ce qui nous arrive de bien ou de mal est écrit là-dedans.» S’il est colérique, mauvais en math, dépressif, schizophrène, atteint de «phobie sociale», sans doute, en cherchant bien pourra-t-on trouver la cause dans son génome, plutôt que de s’intéresser à ce qu’il est. Et s’il n’est rien de tout cela, ce sera probablement que la combinaison génétique ou le gène ne se sont pas encore exprimés.

Comment offrir un tel cadeau à un bébé ? Il faut d’abord recueillir sa bave, ce qui n’est pas trop compliqué, l’action de baver étant une disposition commune à tous les nouveaux humains. Puis, la mauvaise fée prévoyante envoie la salive du bébé dans une boîte en plastique, à un laboratoire américain avec quelques centaines de dollars, lequel en extrait l’ADN, et séquence et analyse son génome. Le résultat sera renvoyé grâce à l’application qui en analysera les informations, sur l’ordinateur portable ou le téléphone. Selon l’inventeur de Portable Genomics, toutes sortes de nouveaux diagnostics seront intégrés et affinés à mesure des progrès de la recherche. Grâce au GPS incorporé dans le smartphone, on pourra se rendre n’importe où en sachant quel spécialiste consulter en fonction de ses prédispositions. Un code couleur simplissime (vert, c’est bien ; rouge c’est mal) nous indiquera la maladie qui peut nous tomber dessus. Portable Genomics est à la fois le rêve des hypocondriaques, des parents abusivement anxieux, d’une société qui contrôle, évalue et ne laisse rien au hasard, et un paradis financier pour des laboratoires qui souhaiteraient court-circuiter les intermédiaires et vendre directement au consommateur le remède idoine, d’un simple clic. Sans compter les usages détournés des hackers ou des directeurs des ressources humaines, qui, au moment d’un entretien d’embauche, jetteront un œil sur la page Facebook et l’autre sur le capital génétique. Est-ce le cauchemar d’un paranoïaque, une utopie négative, ou notre avenir proche ? Pour l’instant, la législation française interdit de faire séquencer son génome sans nécessité ni prescription médicale. Qu’à cela ne tienne : la Californie ouvre ses portes à Patrick Merel et à sa société.

mercredi 12 janvier 2011

Les psychiatres ne suivraient pas la règle d’or
Publié le 12/01/2011

Selon les éditorialistes du British Journal of Psychiatry, les psychiatres ne respecteraient pas toujours ce principe éthique universel, connu sous le nom de   ‘‘Règle d’or’’ (The Golden Rule). Principe résumant et supplantant, par sa simplicité exemplaire, la masse des lois et autres réglementations : « Traitons les autres comme on accepterait d’être traité par eux. »

Or les auteurs commentent une étude allemande indiquant que les psychiatres « ne veulent généralement pas être traités comme ils traitent souvent leurs patients. » Dans cette étude, 500 psychiatres (recrutés lors d’un congrès annuel) ont été interrogés sur leurs pratiques professionnelles, sur la façon dont ils préfèreraient eux-mêmes être traités s’ils se trouvaient à la place du malade, et sur ce qu’ils répondraient à un patient leur demandant ‘‘Que feriez-vous à ma place, Docteur ?’’ Et les résultats de cette enquête sont édifiants ! Car les psychiatres semblent pratiquer la politique du ‘‘Fais comme je dis, et non comme je fais !’’
 
Par exemple, alors que près de la moitié des psychiatres proposent des injections de neuroleptiques retard (depot antipsychotic medication) à leurs patients ayant une mauvaise observance à l’égard des traitements per os, seulement 15 % d’entre eux s’appliqueraient à eux-mêmes, le cas échéant, cette stratégie thérapeutique ! Et encore, il est possible qu’un biais entache ces statistiques déjà éloquentes, car les réponses données par les professionnels ne sont peut-être pas tout à fait sincères, dans la mesure où certains psychiatres ne répondraient pas franchement ce qu’ils pensent, mais ce qu’ils estimeraient ‘‘socialement acceptable’’ de répondre. En clair, ils minimiseraient les réponses ‘‘choquantes’’ (du type ‘‘Ce qui vaut pour autrui ne vaut pas pour moi’’ et vice-versa) quand ils repèreraient une entorse flagrante à la logique ou à l’éthique ! Enfin, pour exercer la psychiatrie, on n’en reste pas moins pusillanime : en effet, cette étude allemande montre que les psychiatres sont plus volontiers enclins à s’appesantir sur les effets latéraux des médicaments, quand ces traitements les concernent personnellement que s’ils sont destinés à leurs patients !
Dr Alain Cohen

Crawford MJ et Dunlea E : Providing patients with information about treatment choices : do unto others ? Br J Psychiatry 2010; 197: 429-430.

mardi 11 janvier 2011

Nouvelles psychanalytiques

La question de l'identité aujourd'hui, entre amnésie et hypermnésie


Journée de l'EPhEP - Organisateur(s) : École Pratique des Hautes Études en Psychopathologies - Le samedi 29 janvier 2011 de 9h30 à 13h30 et de 14h30 à 17h30 - Lieu de déroulement : Paris Faculté de médecine Paris-Descartes.





Argument :


L’identité ne figure habituellement pas parmi les troubles ou les symptômes isolés en psychopathologie. Chacun est couramment persuadé d’en avoir une, et sauf si elle prend la forme d’un délire constitué, personne ne s’en étonne : elle relève de notre psychologie spontanée, individuelle ou collective. Elle peut ainsi répondre de façon automatique à toute altérité qui viendrait menacer ou seulement questionner notre être : à commencer évidemment par celle du corps et du sexe, dont les symptômes, la jouissance ou le désir nous sont inévitablement autres, et fréquemment étranges.

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Passage à l’acte et responsabilité

2ème Après-midi d’Étude de l’atelier de lecture de textes Jacques Lacan (ACF IDF et Envers de Paris)









le Samedi 26 mars 2011 à 14h à l’Université de Chicago à Paris, sur le thème Passage à l’acte et responsabilité, avec la participation de François Leguil

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Une pragmatique de la désinsertion en psychanalyse
Laura Sokolowsky
- Membre de l'ECF

Dans le langage commun et administratif, la désinsertion sociale correspond à la situation d’un individu qui a rompu plus ou moins brutalement ses attaches avec sa famille, son travail, ses amis. Cette notion met l’accent sur le vécu de celui qui s’exclut. Du point de vue sociologique, on étudie alors ce phénomène de déclassement social, la façon dont quelqu’un peut devenir Rmiste ou SDF.
La désinsertion n’est donc pas sans lien avec l’exclusion. L’exclusion est le nom de ce qui n’a pas de nom : c’est le nom d’un réel. Cette notion est apparue dans le contexte précis de la montée du chômage, au cours des années 70. Elle correspond à l’émergence d’une nouvelle pauvreté, plus exactement, à la réapparition de la pauvreté dans les grands centres urbains.
Ce terme, qui signifie « être fermé dehors », est une notion négative qui recouvre le monde des sans abri, sans travail, sans domicile, sans famille, sans attaches. La rupture avec l’Autre apparaît accomplie. Rejeté à la marge de la société, l’exclu subsiste grâce à la charité publique. Il déploie des stratégies de survie. Ce phénomène est-il réversible ? C’est une question. Peut-on l’endiguer ? Peut-on intervenir avant que cette rupture, ce lâchage complet avec le social ne s’accomplisse ? L’exclusion serait dès lors le dernier degré de la désinsertion sociale qui renverrait, elle, à l’idée d’un processus, d’une progression, d’une transformation.
Comment se déprend-on du social ? Est-il indifférent, du point de vue psychanalytique, que cette déprise soit ancienne ou bien récente ? Existe-t-il plusieurs types de déprises, impliquant diverses modalités de se réinsérer dans le lien social ? Les personnes qui s’adressent à nous ont-elles l’idée qu’elles y sont pour quelque chose ?
En psychanalyse, nous nous réglons sur d’autres paramètres que l’évaluation de la capacité à tenir ou non un travail dans le système salarial actuel. Nous tenons compte de la position subjective, c’est-à-dire, fondamentalement, du choix du sujet qui décide ou non de se déprendre de l’Autre. Il convient de ne pas confondre la désinsertion telle que peut l'envisager la psychanalyse et la précarité au sens économique du terme, au sens de pauvreté, du manque de ressources financières. Il s'agit là d'un point décisif.

Je me réfère ici au terme employé par Lacan dans son commentaire de 1953 sur l’Homme aux loups. Paradoxalement, ce célèbre patient de Freud n’était pas un homme pauvre, bien au contraire. Au départ, lorsqu'il fit appel à Freud, l'Homme aux loups avait une position de riche. Cette fortune avait grandement participé à sa désinsertion dans la société. Une partie du drame de ce patient était sa désinsertion comme riche, en tant que riche. Très précocement, en effet, l'Homme aux loups fut séparé de tout ce qui, sur le plan social, pouvait constituer pour lui un modèle. A la suite de Freud, Lacan fit valoir que l'Homme aux loups était désinséré car sans modèle social, qu'il était isolé par sa position de riche. Son isolement était corrélé à la défaillance de l'idéal-du-moi.
Par ailleurs, Freud indiquait que son patient se sentait séparé de l’univers par un voile. Ce voile ne se déchirait qu’à un seul moment quand, sous l’influence du lavement, le contenu intestinal sortait de l’intestin. Alors, il se sentait de nouveau bien portant et normal. Dans les rêves de l'Homme aux loups, en effet, il est question d'une femme qui se dévoile, à laquelle lui-même arracherait le voile, dénudant son corps. Le symptôme du vidage brutal du contenu intestinal, où le voile se déchirait brutalement, correspondait à la satisfaction d'un fantasme d'accouchement, de procréation anale, indiquait Freud. Ce fantasme de féminisation isolait ce sujet du monde. Cette position féminine dans l'inconscient était aussi responsable de sa désinsertion.

Le rapport du sujet à la jouissance oriente ainsi l’abord psychanalytique de la désinsertion.  Le sujet peut s’être séparé d’une jouissance insupportable localisée dans l’Autre, dans un mouvement d’autodéfense. Il a démissionné, il a divorcé, déménagé, changé de pays. Il s’est dépris du social pour se protéger.
Mais, la déprise peut aussi correspondre au laisser en plan, au lâchage par l’Autre. Ici, le sujet se laisse tomber, il n’oppose plus de résistance à la jouissance mortifère, à la pulsion de mort. La déprise n’a pas une fonction protectrice et l’autodestruction domine. Le recours massif aux toxiques et à l’alcool se rencontre davantage dans ce type de cas.
La déprise peut encore se manifester au moment où un événement social et un événement subjectif coïncident. Par exemple, un licenciement survient alors que le sujet a perdu l’appui d’un partenaire. Il faut avoir les deux conditions simultanées. Le sujet n’arrive alors plus à rebondir. L’isolement et le mutisme sont les marques distinctives de la déprise.

En psychanalyse, la définition de ce que serait une insertion réussie selon les normes sociales n’est guère utilisable. Les modalités de reprise sont, en effet, diverses : il peut s’agir d’un raccrochage par le branchement sur l’inconscient et le rêve, de la restauration partielle d’une invention signifiante protégeant le sujet d’une persécution fondamentale, d’un rebranchement centré sur une séparation d’avec l’objet. Il convient de mentionner aussi la récurrence de l’isolement et de la prévalence de ce que Lacan définissait comme l'appui sur l’ego dans le séminaire qu'il consacra au sinthome. Si nous croyons savoir à l’avance ce qui convient au sujet en matière d’insertion, nous rejoignons dès lors le bataillon de ceux qui s’efforcent de normaliser le sujet. C’est une erreur non seulement éthique, mais aussi clinique, dans la mesure où les sujets qui s’adressent à la psychanalyse ne s’aliènent pas dans les signifiants maîtres contemporains. Les idéaux de réussite professionnelle, d’accumulation de capital, de rentabilité ne sont pas parvenus, en effet, à les captiver.

Bibliographie :


Freud S., Cinq psychanalyses, PUF, Paris, 2007.
Furtos J. et al, Les cliniques de la précarité. Contexte social, psychopathologie et dispositifs, Masson, Paris, 2008.
Lacan J., Le séminaire, Livre XXIII, Le sinthome, Seuil, Paris, 2005.
Oberholzer K., Entretiens avec l'homme aux loups. Une psychanalyse et ses suites, Gallimard, Paris, 1981.
Rilke R. M., Le livre de la pauvreté et de la mort, Actes Sud, Paris, 1982.