La discipline, qui considérait à la fois l’individu et le monde qui l’entoure à sa naissance, est aujourd’hui dépolitisée, regrette Florent Gabarron-Garcia, qui remet en avant dans son ouvrage les multiples débats de l’époque.
Sigmund Freud dans son bureau, à Vienne, vers 1935. Photo Akg-images. Imagno
Pour éviter de prendre sérieusement en considération des difficultés internes, il n’est pas rare, suivant quelque pulsion paranoïde, qu’on ne se crée un ennemi extérieur, auquel on attribue tous les maux. Depuis quelques années, la psychanalyse, par exemple, ne fait, sans doute à juste titre, que dresser des contre-feux pour ralentir l’avancée, jugée dangereuse, de la médicalisation des troubles psychiques, de la pharmacologie et des sciences neurobiologiques. Est-ce que cela l’oblige à se retirer, se réfugier «bien au chaud dans des institutions», ne plus se soucier que de ses «affaires intérieures», sa clinique, ses théories, ses écoles, ses lectures de Freud ou de Lacan, et se contenter de «revêtir la souffrance psychique du manteau d’un œdipianisme livresque» ? Il est difficile de l’affirmer catégoriquement. Ce qui est patent, en revanche, c’est qu’elle est moins présente dans le champ social, comme si elle s’était «dépolitisée» et, centrée sur le psychisme individuel, ne «voulait rien savoir, ou presque, de la violence du monde actuel», trahissant ainsi les motivations qui étaient à son origine. C’est l’hypothèse qu’explore Florent Gabarron-Garcia dans l’Héritage politique de la psychanalyse - en reconstruisant justement l’«histoire populaire de la psychanalyse» et en creusant le sillon ouvert, entre autres, par Wilhelm Reich, ou le travail de Deleuze et Guattari.