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Qui suis-je ? Cette énorme question a mobilisé depuis 2012 un programme de recherches interdisciplinaires. Le résultat de ses travaux, édité sous l’égide du philosophe des sciences Jean Gayon (mort en 2018) avec les contributions d’Antonine Nicoglou, de Gaëlle Pontarotti, de François Villa et de Jonathan Weitzman, sous le titre L’Identité. Dictionnaire encyclopédique (Folio Essai, Gallimard), tient en 846 pages en format poche à la portée de toutes les bourses.
De l’ADN à la Voix, en passant par l’Anonymat, le Clone, le Changement, l’Essence, le Genre, l’Inconscient, l’Immunité, les Papiers d’identité, le Personnage, le Queer, la Race… tout y est. Et cette multiplicité d’approches (philosophie, sciences de la nature et médecine, psychanalyse et neurosciences, littérature et sciences du langage) a, au fond, quelque chose de rassurant à l’heure où l’identité devient une obsession autant collective qu’individuelle. Car cette notion, si difficile à définir dans toutes les disciplines, devient fascinante lorsqu’on en découvre les mouvements et les nuances. Une certitude : l’identité n’est pas fixe !
Qu’est-ce que l’identité ?
Si on ne me demande pas ce qu’est l’identité, je le sais, si on me le demande, je ne le sais plus. L’expérience de pensée dite du « bateau de Thésée » est citée par plusieurs auteurs du Dictionnaire encyclopédique et structure les pistes de réflexion. Elle est utilisée par les philosophes depuis l’Antiquité et s’inspire de la légende de Thésée, parti d’Athènes en bateau pour combattre le Minotaure. À son retour, le navire serait resté dans le port d’Athènes, chaque pièce étant remplacée à l’identique au fur et à mesure de son vieillissement. Plusieurs siècles plus tard, le bateau est flambant neuf comme lors de l’embarquement de Thésée, mais sans aucune de ses planches d’origine. Est-ce encore le bateau de Thésée ? « Aussi les philosophes, dans leurs disputes sur la nature des choses qui s’augmentent, citent-ils ce navire comme un exemple du doute, et soutiennent-ils, les uns qu’il reste le même, les autres qu’il ne reste pas le même » (Plutarque, Vie des hommes illustres). Il découle de ce paradoxe (le bateau qui est et n’est pas le même) deux grands sens de l’identité, repérés dans différents domaines : l’identité-distinction et l’identité-persistance.