Marie Pezé n'est pas venue, jeudi 5 décembre, au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Son emploi du temps l'a empêchée d'être là lorsque les juges ont remonté le fil de sa carrière, qui s'est brisé net, il y a trois ans et demi. Une affaire douloureuse : d'un côté, il y a la psychanalyste, considérée comme l'une des plus grandes spécialistes des risques psycho-sociaux en France ; de l'autre, son ancien employeur, le centre d'accueil et de soins hospitaliers (CASH) de Nanterre, auquel elle reproche d'avoir négligé ses conditions de travail, la laissant se consumer à petit feu dans le surmenage.
C'est en 1975 que Marie Pezé intègre le CASH comme psychologue au service de chirurgie de la main. Elle est d'abord bénévole (jusqu'en 1982) puis vacataire (jusqu'en 1994). Ensuite, elle signe des CDD puis un CDI à temps partiel, en 1997. Cette année-là, elle ouvre dans l'établissement une consultation « souffrance et travail », où elle reçoit des salariés en situation de très grande détresse du fait de leur activité professionnelle. Son initiative sert de modèle et ouvre la voie à d'autres lieux du même type dans l'Hexagone.
Souffrant d'une pathologie évolutive, Marie Pezé est reconnue travailleuse handicapée à la fin des années 1990. La direction du CASH s'efforce d'en tenir compte en effectuant quelques aménagements (fauteuil ergonomique, oreillette pour le téléphone). Mais ils s'avèrent insuffisants et la santé de Marie Pezé, qui ne compte pas ses heures, se dégrade. Finalement, la médecine du travail la déclare définitivement « inapte » à son poste et la psychanalyste est licenciée, en juillet 2010.