par Christian Lehmann, médecin et écrivain publié le 18 juin 2022
11 mars 2020. Depuis Rome, l’ancien Premier ministre italien Matteo Renzi exhorte sur CNN les pays occidentaux à prendre des mesures drastiques pour éviter la propagation du Covid. Nous sommes juste avant le confinement et la séquence semble sortie d’un blockbuster américain, avec ce politicien désespéré : «Ne sous-évaluez pas le risque comme nous l’avons fait. De nombreuses personnes décident de dire, comme en France la semaine dernière […] : “N’ayons pas peur, allons au théâtre”. C’est une bonne réaction face à une attaque terroriste, nous montrons notre résilience. Mais face à un virus, nous devons éviter les lieux publics. Donc ne perdez pas de temps. L’Italie a perdu du temps et c’était une erreur.» A l’époque, tandis que son pays était submergé par la première vague du Covid, la France apposait fièrement des affichettes dans les aéroports en se préparant à aller voter aux municipales. Il y a quelques semaines, à nouveau surpris par le contraste entre le discours du ministre de l’Enseignement transalpin et le déni de ses homologues français, j’ai demandé à Ugo Di Luca, 53 ans, web développeur italien, de me parler de la différence d’approche entre ces deux pays voisins :
«Avant la crise, j’étais un de ces privilégiés qui exerçaient déjà leur métier en télétravail, et j’alternais ma résidence entre la région parisienne et le Nord-Est italien, selon mes obligations professionnelles et familiales. En atterrissant en Italie au début de la pandémie, mi-février 2020, j’ai compris qu’il se passait un truc étrange. La prise de température à l’arrivée et ces personnes en combinaisons blanches, c’était troublant. A mon retour, deux jours après l’interruption inquiétante du Carnaval de Venise, aucun contrôle à l’aéroport d’Orly… et j’ai trouvé ça plus inquiétant encore. Puis le confinement. J’étais opposé à ce confinement généralisé, je comprenais qu’il soit indispensable en Italie, cueillie par surprise, mais je pensais naïvement que la France pouvait gérer cela territorialement, en comptant sur la responsabilité individuelle et des mesures strictes envers les personnes détectées positives. L’épisode de l’aéroport d’Orly aurait dû m’ouvrir les yeux.