— 1 janvier 2021
Au terme d’une année dévastatrice pour le monde de la création artistique, Libération a donné carte blanche à quatre artistes - cinéaste, femme de théâtre, bédéaste ou auteur - pour imaginer ce qui pourrait émerger du champ de ruines.
Benoît Forgeard : «En art, rien de tel que la contrainte»
Auteur au cinéma de comédies d’anticipation presque trop bien vues pour n’être que drôles (Gaz de France, Yves), le cinéaste retient avant tout de cette année qu’il ne faut plus rien chercher à anticiper.
«Je pèche par optimisme, mais côté culture, l’épisode Covid aura du bon. On peut être certain que les spectacles proposés à la réouverture des salles auront été parfaitement répétés, et beaucoup ont redécouvert le théâtre à l’occasion du confinement, via Internet. La Comédie-Française a fait un tabac, une nouvelle fenêtre s’est ouverte. Cette obligation à se virtualiser a permis d’attirer l’attention de nouveaux publics. En art, rien de tel que la contrainte. Expérimentation à poursuivre quand plus rien ne nous y forcera.
«Le cinéma a pris cher, encore que, dans ce contexte moins concurrentiel, les films français ont fait plus d’entrées que les américains. Mais la période semble avoir entériné un changement de rapport de force. Le temps d’un petit somme, les plateformes ont triplé de volume. C’est avec elles qu’il va falloir dealer. Attention toutefois : une panne mondiale d’Internet sur plusieurs mois aurait pour effet de relancer les salles. Aussi, je préconise de ne pas nous en débarrasser. Comme souvent, la société civile a plus de clés qu’elle ne l’imagine. Pour rééquilibrer les forces et contraindre les Gafa, il suffirait de se mobiliser. La résiliation de millions d’abonnements pourrait-elle faire pression ? Faudrait tenter. Qui commence ?»