LE MONDE | | Par Philippe-Jean Catinchi
Après la Grande Guerre, des pédagogues vont tenter de réformer l’école pour que naisse une génération pacifique.
Pour en finir avec la guerre, au lendemain de la boucherie de 1914-1918, ne faut-il pas d’abord réformer l’école ? Inventer une autre façon d’éduquer les enfants pour que l’on ne puisse pas en faire si aisément de simples recrues vouées au sacrifice au nom de l’idéal patriotique ?
C’est le chantier qu’ouvrent nombre de pédagogues dans une Europe saignée à blanc. Sans concertation initiale, des femmes et des hommes, préoccupés par les enjeux éducatifs bien avant le conflit mondial pour certains, généralement alertés par le sort fait aux enfants délaissés tenus pour « débiles » (le Polonais Janusz Korczak, l’Italienne Maria Montessori, le Belge Ovide Decroly, l’Allemand Paul Geheeb, pour ne rien dire du pédagogue libertaire catalan Francisco Ferrer, fusillé en 1909 en champion de l’« Ecole moderne ») vont dès la fin des combats pointer les faiblesses du modèle en place pour proposer d’autres voies où l’intérêt de l’enfant, sa pleine participation aux projets éducatifs, la prise en compte de son corps et de sa vitalité, de sa personnalité et de sa psychologie propres sont les seules priorités.
Un homme va fédérer ces énergies. Le pédagogue genevois Adolphe Ferrière (1879-1960), qui, à l’écoute des expérimentations anglaises de la fin de l’ère victorienne, préconise des méthodes actives d’enseignement. Mais, sourd, il doit renoncer, dès 1918, aux « 30 points qui font une école nouvelle », qui valent charte universelle. Et, préconisant la promotion de l’idéal de solidarité et de fraternité humaines, il organise un Congrès de l’éducation nouvelle à Calais en août 1921.