Demain, une journée rendra hommage au psychiatre et psychanalyste bordelais.
Michel Demangeat sera évoqué aujourd'hui, de 9 heures à 18 heures. (photo archives « sud ouest »)
Ceci est une journée en forme d'hommage certes, mais qui sera aussi l'occasion de nouvelles questions, d'autres défis à poursuivre, d'autres travaux à prolonger. Michel Demangeat, psychiatre et psychanalyste bordelais, est mort l'année dernière, à l'âge de 83 ans. Demain vendredi, à l'Athénée municipal de Bordeaux, entre 9 et 18 heures, ses pairs viendront évoquer sa mémoire, et poursuivre son itinéraire.
Michel Demangeat, psychiatre, a fait sa formation analytique avec Lacan et fut tout au long de sa vie un précurseur. « Il a été la cheville ouvrière de la création du premier hôpital de jour pour malades mentaux en 1972.
Les salariés de l’Atelier du Coin Montceau réalisent des affiches sur le cinéma, pour une exposition prochaine à Dijon. Photo C.R.
Créé en 1992 sous l’impulsion de l’équipe de psychiatrie de la Société de secours de Bourgogne et d’artistes peintres de l’association Malin plaisir, l’Atelier du Coin a tout d’abord accueilli des personnes atteintes de maladies psychiques.
La psychanalyse se consacre à la libération psychique individuelle; mais la découverte des craintes, des désirs, des fantasmes n’est pas sans influence sur la perception des valeurs communément admises et du bien-fondé des hiérarchies dominantes. Elle contribue ainsi à un affranchissement des modèles politiques considérés comme la seule réalité possible.
par Max Dorra, avril 2012
La lutte des classes a-t-elle un contenu latent?
Henri Lefebvre, Le Manifeste différentialiste
Tout pouvoir repose, en dernière analyse, sur la capacité d’angoisser, d’infantiliser. De réactiver une peur, celle éprouvée face à l’autre,l’étranger. Le jugement de valeur qu’un autre porte sur nous — son attitude, sa mimique, à l’évidence l’expriment — peut en effet provoquer notre angoisse. De son appréciation, de l’estime qu’il nous porte, du crédit qu’il nous accorde dépendra pendant le temps de l’échange (appréciation, estime, crédit, échange : l’économie, on le voit, hante les mots) notre force d’exister, de persévérer dans notre être. Bref, notre accès à la banque du sens.
Les trois notions, rétablissement, inclusion sociale et empowerment, créent un nouveau paradigme qui situe l'usager de la psychiatrie comme moteur de sa propre vie, au sein d'une collectivité dans laquelle il est citoyen à part entière et où les services de santé mentale se donnent les moyens de soutenir son autonomie plutôt que de perpétuer son rôle traditionnel de « patient ».
Un tapis sur le divan de Freud, une histoire pour un objet
"Le rêve dans un tapis" est le nom d'une exposition proposée au musée départemental de Labastide Rouairoux, jusqu'à la fin du mois de mai. Le fil conducteur choisi est un certain Freud...
Voici donc une histoire psychanalytique du tapis... ou presque. La commissaire de cette exposition, Anne Deguelle, artiste plasticienne, a choisi pour évoquer cet objet de prendre celui qui lui paraissait le plus emblématique : le tapis qui ornait le divan de Freud dans son bureau de Londres. Il en existait justement un dans le fond du musée départemental. Il s'agissait d'un tapis des nomades Qashquai, au style orné de décors végétaux et animaliers, dans un univers onirique. La scénographe trouvait le lien entre ce tapis et le monde des rêves explorés par le père de la psychanalyse intéressant. Elle a donc mené son exposition dans ce sens, avec des rêves représentés en sons et en images sublimatives.
Suicide d’enfants : les psys évoquent des «responsabilités au pluriel»
le 23.03.12
Le suicide des trois enfants âgé de 11 et 12 ans, dans la wilaya de Tizi Ouzou, en l’espace de 48 heures, a remis sur table le manque d’infrastructures sanitaires, en particulier psychologiques au niveau des établissements scolaires.
Le suicide est un acte commis par une seule personne, mais la responsabilité est partagée entre les proches, l’école, la société et les médias, estime le docteur Mustapha Bouzidi, psychiatre de l’enfant et de l’adolescent et enseignant à l’université de Tizi Ouzou. Pour lui, on ne peut parler de coupable lorsqu’il s’agit d’un suicide, mais de «responsabilités au pluriel». Mieux vaut prévenir que guérir. Et la prévention est l’affaire de tous, insiste le psychiatre. «Aujourd’hui, l’enfant est ‘‘confié’’ à la télévision, internet et les jeux électroniques, sources de violence. Les parents doivent surveiller leurs enfants et les faire suivre chez un psychologue s’ils jugent leur cas compliqué. L’école également doit mettre du sien et se doter d’équipes pluridisciplinaires pour assurer un suivi psychologique des enfants en difficulté», conseille Dr Bouzidi.
Cet évènement tragique n’est pas un cas isolé ni une nouveauté. «Le suicide d’adulte semble ne pas susciter l’intérêt des concernés, à savoir les spécialistes et professionnels de la santé, pour effectuer des études approfondies et des statistiques afin de déceler les raisons et les solutions de ce phénomène. Encore moins le suicide d’enfants qui prend de l’ampleur et qui, faut-il le préciser, n’est pas propre à Tizi Ouzou», affirme le psychiatre. La difficulté de recenser les cas de suicide d’enfants revient, selon Mahmoud Boudarene, psychiatre dans la même wilaya, aux procédés entrepris par les enfants suicidaires. «Généralement, les accidents de voiture ou les chutes sont considérés comme des accidents alors qu’en réalité, certains sont l’œuvre de la victime elle-même. Un enfant peut se jeter sur une voiture ou dans un puits pour mettre fin à ses jours.
Mais dans les trois derniers cas, le suicide a vite été avéré grâce au procédé peu habituel chez l’enfant, qui est la pendaison», explique Dr Boudarene. Par ailleurs, nos deux interlocuteurs s’accordent à dire que les hypothèses avancées jusque-là, quant aux raisons de ces actes fatals, expliquent ce geste par l’échec scolaire. Or, ce dernier ne peut être le seul facteur, car une goutte ne fait déborder qu’un vase déjà plein.
Lamia Tagzout
La psychiatrie est-elle le propre de l’homme ?
Publié le 07/03/2012
« Le rire est le propre de l’homme » prétend Rabelais. Dans quelle mesure cet aphorisme (déjà transposé au langage par Descartes) est-il extrapolable aussi à la psychopathologie ? Autrement dit, les professions de vétérinaire et de psychiatre sont-elles résolument irréductibles entre elles ?
The British Journal of Psychiatry analyse un ouvrage récent, fruit d’une collaboration entre un neuropsychiatre et un biologiste de l’évolution. Les auteurs observent qu’on peut retrouver dans plusieurs espèces animales les équivalents de certains troubles psychiatriques chez l’homme (comme « la dépression ou la simple phobie »), mais qu’il n’en est pas de même pour des problématiques plus complexes comme la schizophrénie, l’autisme, les troubles bipolaires, ou les démences fronto-temporales [1] qui se révèlent apparemment des affections « propres à l’espèce humaine.»
On doit naturellement s’interroger alors sur cette spécificité présumée : pourquoi le genre humain aurait-il ce douteux privilège d’éprouver ces troubles psychiatriques (qualifiables en somme de «supérieurs ») ? Comprendre les mécanismes de cette spécificité pourrait nous renseigner sur les particularités du cerveau humain et « apporter un nouvel éclairage sur les troubles neuropsychiatriques. »
S’appuyant notamment sur les neurosciences, les auteurs rattachent plusieurs maladies mentales spécifiques de l’homme à la « nature exclusivement humaine de certains systèmes neuronaux comme ceux de la conscience de soi (self-monitoring), du langage, et de l’intégration sociale. » On peut bien sûr contester cette spécificité, dans la mesure où il existe également des langages (non verbaux) et des sociétés chez maintes espèces animales, mais l’acuité et la coexistence de ces critères semblent propres à l’humanité. On doit aussi rappeler que des comportements étranges, voire « suicidaires », sont observés chez certains animaux (par exemple le gammare [2], ou la coccinelle [3]). Le commentateur regrette toutefois que cet ouvrage « n’apporte pas d’idée nouvelle », mais consiste seulement dans un « réarrangement agréable » (d’idées éprouvées).
Carson A : Book review : The human illnesses: neuropsychiatric disorders and the nature of the human brain (Peter Williamson & John Allman), Oxford University Press, 2011. Br J Psychiatry 2012 01: 85.
Notre cerveau, machine à illusions
LE MONDE SCIENCE ET TECHNO |
En 1966, le psychiatre britannique John Barker fondait le Bureau britannique des prémonitions. Six ans auparavant, il avait mis à profit l'effondrement d'un terril sur une école du Pays de Galles, qui avait tué 144 personnes (dont 139 écoliers), pour lancer dans la presse un singulier appel à témoins : il souhaitait savoir si quelqu'un avait prévu le drame. Il reçut 60 lettres, dont la moitié des auteurs indiquaient avoir eu une telle prémonition, en rêve.
L'objectif de son Bureau était digne d'une nouvelle de Philip K. Dick : utiliserces "précogs" pour anticiper et prévenir les catastrophes. En 1967, l'un d'eux informe Barker qu'il va bientôt mourir. Le psychiatre avait justement écrit un livre intitulé Mort de peur, où il expliquait qu'une telle prédiction pouvait se réaliser, car la terreur induite par cette annonce était susceptible d'affecter le système immunitaire. Baker se plia à sa science : il mourut effectivement soudain, en 1968. Et son Bureau ne lui survécut que quelques années, avant de fermer, faute de moyens.
Des histoires comme celle-ci, le livre de Richard Wiseman en regorge. On y croise une mangouste parlante, mais invisible, dans une masure de l'île de Man. Mais aussi le télépathe Washington Irving Bishop, mort avec ses secrets, car autopsié à l'âge de 33 ans alors qu'il était sans doute simplement plongé dans une crise de catalepsie. Et encore le sinistre Jim Jones, grand laveur de cerveaux, qui poussa au suicide plus de 900 personnes enrôlées dans sa secte au Guyana, en 1978.
L'un des personnages les plus marquants pour l'auteur est sans doute la psychologue anglaise Susan Blackmore, qui a été à l'origine de sa vocation scientifique. Richard Wiseman a en effet d'abord été magicien professionnel, avant de se tourner vers la psychologie - deux disciplines ayant évidemment partie liée. Le témoignage de Susan Blackmore a changé sa vision du surnaturel : plutôt que d'enquêter, en bon sceptique, sur l'authenticité du paranormal, n'était-il pas plus fructueux d'étudier pourquoi il nous fascine tant ; pourquoi beaucoup y croient, en font l'expérience ?
Démystifier le paranormal
La psychologie expérimentale s'est fait une spécialité d'élucider ces questions - pas seulement pour dégonfler les baudruches de la parapsychologie, mais aussi pour analyser ou améliorer des techniques dont d'autres marchands d'illusions, comme les as du marketing ou les politiciens, font leur miel. Wiseman, aujourd'hui professeur de psychologie à l'université du Hertfordshire et star des médias outre-Manche, en livre un précis réjouissant.
Ses Petites expériences extrasensorielles s'inscrivent dans la longue tradition éditoriale des ouvrages qui démystifiaient le paranormal, aussi vivace que la lignée de ceux qui en font la promotion. L'intérêt de son livre ne réside pas tant dans les "trucs" qu'il dévoile, en praticien expérimenté, que dans l'analyse qu'il expose des mécanismes mentaux qui nous conduisent à croire l'impossible, à voir l'invisible.
Sous sa plume alerte, desservie par une traduction un peu plate, la télépathie, la voyance, la prémonition, les fantômes de toutes étoffes deviennent de fascinants révélateurs de nos processus mentaux. Son manuel - il propose d'étonnantes petites expériences propres à animer les repas de famille - risque de faire des adeptes. Aussi bien dans le camp des mystificateurs que dans celui des sceptiques. Susan Blackmore a pour sa part renoncé à dénoncer les illusions paranormales : elle était lasse d'être confrontée à des crédules mettant en doute son ouverture d'esprit. Mais Richard Wiseman a brillamment repris le flambeau...
Une équipe scientifique internationale, composée de
chercheurs tchèques [1], autrichiens [2], néerlandais [3], italiens [4] et
estoniens [5], a mis au point un robot "infirmier" pouvant assister
les personnes âgées ou les patients ayant subi une intervention chirurgicale.
Le Conseil constitutionnel censure en partie la loi sur la réforme de la psychiatrie
Le Monde.fr avec AFP |
Le Conseil constitutionnel a censuré vendredi 20 avril deux dispositions issues de la loi de 2011 sur les soins psychiatriques sans consentement, concernant les "irresponsables pénaux" et les personnes placées en unité des malades difficiles (UMD), mais donne un délai au législateur "pour remédier à cette inconstitutionnalité".
Pour les personnes jugées irresponsables par un juge, la censure vise ceux dont l'hospitalisation sans consentement a été décidée par un préfet et non directement par le juge. Jugeant que "l'abrogation immédiate de ces dispositions aurait eu des conséquences manifestement excessives", le Conseil constitutionnel a reporté au 1er octobre 2013 la date de l'abrogation des dispositions en cause. Le Conseil répond ainsi à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par une association de défense des droits des patients en psychiatrie, le CRPA, sur la conformité à la Constitution de quatre articles ou alinéas du code de la santé publique.
Le Conseil constitutionnel admet qu'"en raison de la spécificité de la situation des personnes ayant commis des infractions pénales en état de trouble mental ou qui présentent, au cours de leur hospitalisation, une particulière dangerosité, le législateur pouvait assortir de conditions particulières la levée de la mesure de soins sans consentement dont ces personnes font l'objet". "Toutefois, il appartient alors au législateur d'adopter les garanties contre le risque d'arbitraire encadrant la mise en œuvre de ce régime particulier", expliquent les Sages dans un communiqué.
DEUX GRIEFS REJETÉS
Il a par ailleurs rejeté deux autres griefs de l'association du "Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie" (CRPA). Contrairement aux inquiétudes de l'association, la loi ne peut imposer des soins psychiatriques "en ambulatoire" (hors de l'hôpital), explique-t-il en substance.
L'autre point portait sur le délai excessif, selon l'association, pour l'intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) lors d'une hospitalisation ordonnée par la justice. Le Conseil relève que la loi a prévu un réexamen périodique tous les six mois de cette mesure d'hospitalisation sans consentement. Par ailleurs, note-t-il, "la loi ne fait pas obstacle à ce que le JLD puisse être saisi à tout moment aux fins d'ordonner la mainlevée immédiate de la mesure".
La loi du 5 juillet 2011 avait été initiée fin 2008 par Nicolas Sarkozy après le meurtre d'un étudiant à Grenoble par un malade mental qui s'était enfui de l'hôpital. Quelque 70 000 personnes sont hospitalisées sous contrainte chaque année. Les points censurés par les Sages concernent à peu près 300 personnes au total.
Le Conseil constitutionnel impose de meilleures garanties pour les malades jugés dangereux
Le Monde.fr |
Nouveau joli coup pour les patients en psychiatrie. Déjà, fin 2010, ils avaient réussi à rendre obligatoire le contrôle des hospitalisations sous contrainte par un juge des libertés par l'intermédiaire d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Vendredi 20 avril, par le même biais, ils ont obtenu une modification de la loi concernant les patients considérés dangereux.
Il s'agit de ceux placés en unité pour malades difficiles (UMD) et des personnes ayant commis une infraction pénale mais ayant été jugées irresponsables du fait d'un état de trouble mental. Les sages ont jugé inconstitutionnels deux points de la loi du 5 juillet 2011 sur la psychiatrie, concernant la sortie des programmes de soins de ces malades.
"GARANTIES CONTRE LE RISQUE D'ARBITRAIRE"
Contrairement à la demande du Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie (CRCA), l'association de patients à l'origine de la QPC, ils ont estimé qu'en raison du profil de ces patients "le législateur pouvait assortir de conditions particulières la levée de la mesure de soins sans consentement" - deux expertises de psychiatres supplémentaires sont notamment prévues. Mais le Conseil constitutionnel a cependant jugé nécessaire que soient adoptées "des garanties contre le risque d'arbitraire encadrant la mise en œuvre de ce régime particulier". Il a ainsi estimé indispensable de définir dans quelles conditions il peut être décidé d'une admission en UMD, la loi ne précisant pas de critères de placement.
Les individus jugés "irresponsables pénaux" devront être par ailleurs informés de la transmission de la décision de justice au préfet, qui peut décider de l'admission en hôpital psychiatrique. Le président du CRCA, André Bitton, a jugé que cette double censure était "une très bonne chose pour ces patients réputés les plus dangereux, qui étaient les plus en péril au niveau des libertés individuelles et des droits".
Le Conseil constitutionnel a donné un délai de dix-huit mois au législateur pour modifier la loi du 5 juillet 2011. Ce texte avait principalement introduit des soins sans consentement hors des murs de l'hôpital auxquels ils étaient jusque-là cantonnés, avec l'hospitalisation d'office et celle à la demande d'un tiers. Sa décision constitue une brèche pour les associations de patients, les syndicats de psychiatres ou encore le Syndicat de la magistrature, très critiques envers ce texte. Le CRCA souhaitait également, avec sa QPC, que l'intervention d'un juge pour les soins sous contraintes hors les murs de l'hôpital soit rendue obligatoire, mais le Conseil constitutionnel ne lui a pas donné raison.
Les sages ont estimé qu'il n'y avait pas de mesure de contrainte possible dans ces programmes de soins sans consentement. Ce qui laissait, vendredi, tous les acteurs dubitatifs. Maintenant qu'une réforme de la loi est rendue obligatoire, il est certain que la question va revenir dans le débat.
Laetitia Clavreul
Revendications du CRPA sur le champ de la contrainte psychiatrique
I-1°) Nous réclamons une dé psychiatrisation de la société. Il faut tout de même réaliser que, selon les chiffres dont nous avons connaissance, nous sommes passés en une quarantaine d'années d'une file active dans la psychiatrie publique de 300 000 personnes au début des années 70, à une file active actuelle, toujours dans la psychiatrie publique, de 1,5 millions de personnes. Les perspectives actuelles indiquent de plus une extension incessante du champ d'application de la psychiatrie en général et de la contrainte psychiatrique en particulier.