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lundi 21 décembre 2009
Hôpital psy de Blain : « Une philosophie du soin »
Des patients travaillent au tri du linge sale dans la buanderie.
Photo : Archives du Centre hospitalier spécialisé de Blain
Le centre hospitalier spécialisé de Blain aura 50 ans en 2010 et intégrera de nouveaux locaux d'ici 2011. Un livre revient sur l'histoire peu commune de l'« hôpital-village ».
Trois questions à Philippe Dossal, coordinateur de l'ouvrage « Pont-Piétin, un hôpital-village ».
Pourquoi un livre sur l'hôpital-village ?
L'hôpital de Pont-Piétin a été créé ex-nihilo à la fin des années 50. Dans le département, la capacité n'était pas suffisante pour accueillir les « malades mentaux ». Il n'y avait que Saint-Jacques, à Nantes. C'était la fin des asiles : on voulait socialiser les gens dans un microcosme fonctionnant en autarcie. Quelques hôpitaux-villages sont alors construits en France, dont Blain. Aujourd'hui, le concept est obsolète. Les neuroleptiques ont modifié la donne : depuis les années 70-80, on remet les malades dans la cité. À Blain, on est passé de près de 1 000 malades à 100 ou 200. Le lieu se reconstruit comme un hôpital classique, des pavillons sont détruits. D'ici 2011, ce sera un autre établissement. Des cadres ont voulu fixer cette aventure de la psychiatrie en train de se fermer.
Photos, témoignages, presse... comment retracer 50 ans de l'hôpital ?
Les auteurs ont des regards différents : un assistant social, des cadres soignants et administratifs. Dans les archives de l'établissement, on a débusqué un lot de photos, des notes de service. Elles montrent l'établissement dans les années 60, quand il s'agissait d'un village, avec son garage, sa coiffeuse, sa banque. Des souvenirs émouvants sont remontés : lors de bals thérapeutiques, malades et médecins dansaient ensemble. À l'époque, il n'y avait pas de personnel hospitalier, les malades faisaient le ménage. Certains possédaient même la clé des pavillons ! Jusqu'à 40 malades travaillaient à la ferme, ils gagnaient un pécule. Cela a disparu avec l'allocation adulte handicapé.
Tout n'était pas rose, on parle de douches à la chaîne dans les pavillons...
Il ne s'agit pas de dire que tout était merveilleux. Hommes et femmes étaient séparés, on les dépossédait de leurs vêtements personnels. Mais Blain était en progrès par rapport à la psychiatrie d'alors : à Saint-Jacques, il y avait des dortoirs de 30 à 40 personnes. À Blain, ils étaient 6. L'implantation a été accueillie paradoxalement par la population, aussi. Il y avait de la peur, de la fascination, mais cela apportait du travail. C'est encore la plus grosse entreprise de Blain : 600 fiches de paie ! Les auteurs sont un peu nostalgiques d'une certaine forme d'humanité du soin, comme ces étés où ils partaient en camping avec les malades.
Recueilli par Clémence HOLLEVILLE.
« Pont-Piétin, un hôpital-village » aux éditions Siloë. 18 €. Auteurs : Paul Ablin, Christian Joulan, Thierry Joutard, Jean Leray, Françoise Maurier, Isabelle de Saint Sulpice et Philippe Dossal.