Par Sophie Landrin
Publié le 11 février 2022
ENQUÊTE En septembre 2020, le viol et le meurtre d’une jeune dalit par des membres d’une haute caste ont remis en lumière les persécutions dont sont victimes les anciens « intouchables ». Appuyée sur l’hindouisme, la société indienne impose toujours ségrégation et violences.
C’est une maison en briques d’allure banale dans un village de l’Uttar Pradesh on ne peut plus commun, plantée au milieu des champs, dont l’accès est désormais gardé en permanence par vingt policiers en treillis, armés de fusils. Un contingent a été assigné par les autorités pour en contrôler l’entrée jour et nuit, et surveiller les faits et gestes de ses occupants. Outre un mirador, huit caméras de vidéosurveillance enregistrent le moindre mouvement. Dans la cour d’une maison voisine, le visiteur a obligation de consigner dans un registre ses identité, adresse et téléphone, avant de passer par un portique équipé d’un détecteur de métaux.
Voilà plus d’un an qu’à Hathras, dans ce district du nord de l’Inde, la vie d’une famille de dalits (« opprimés », le nom que se sont choisi les anciens « intouchables ») a basculé dans un cauchemar sans fin. Le 14 septembre 2020, leur fille, 19 ans, partie ramasser du fourrage, a été victime d’un des viols collectifs les plus sordides de ces dernières années. Asha (un nom d’emprunt, car la loi indienne protège l’identité des victimes d’un crime sexuel) avait été assaillie par quatre hommes qui, après avoir abusé d’elle, l’ont traînée par le cou avec son foulard, lui brisant la colonne vertébrale.